— Par Roland Sabra —
Début 2007 l’Association PUMA ( Pour Une Autre Martinique) demande à un cancérologue réputé Dominique Belpomme de faire le point sur la situation créée par l’usage intensif du chlordécone en Martinique. . En août 2007 Il a co-signé, avec le Pr Luc Montagnier, le premier à avoir identifié le virus du Sida, un opus intitulé « The multitude and diversity of environmental carcinogens ».Que celui qui a eu l’audace de le traiter de charlatan fasse la liste de ses propres publications scientifiques.
Fin avril et début mai 2007. Le Pr Belpomme se rend en Martinique pour collationner l’ensemble des informations concernant les abus d’usage de chlordécone. Nul travail d’enquête scientifique, il s’agit simplement de rassembler, d’examiner de confronter différentes études avec l’idée que le regroupement de ces informations éparses pourrait donner une cohérence alarmante et obliger les pouvoirs publics à réagir.
Juillet 2007, dans une note interne la MIIC (Mission interministérielle et Interrégionale Chlordécone) qui est informée du travail du Pr Belpomme, redoute les effets dévastateurs du rapport qui n’est pas encore rédigé précise : « La crise est extrêmement grave.[…] Il faut réaliser un énorme travail de communication afin de répondre à l’inquiétude de la population et au ressenti actuel d’insuffisance des pouvoirs publics. »
Un « plan-com » est alors élaboré pour circonscrire, circonvenir et finalement tenter de torpiller le rapport Belpomme. Ce plan comporte deux volets. Un volet « scientifique » et un volet politique.
Le volet « scientifique »
En août 2007, un mois avant la publication du rapport la MIIC (Mission interministérielle et Interrégionale Chlordécone) écrit : « Attaquer D. Belpomme sur son manque de rigueur, ses approximations […] pourrait ne pas être de bonne politique, vu la notoriété du personnage et sa capacité de prendre le public à témoin si on le martyrise. La réponse devra donc être indirect. […] Elle ne doit pas venir de l’Etat, mais des chercheurs et des instituts attaqués, au risque d’alimenter le thèse qu’ils sont à la botte. »
Septembre 2007, deux instituts se chargent de ce travail l’INVs ( Institut national de veille Sanitaire) et l’AFSSA (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments) relayés par un presse complaisante. Par exemple l’INVS déclare le jour même de la publication du rapport Belpomme : « Aucun lien démontré. La plus grande fréquence du cancer de la prostate aux Antilles par rapport à la métropole peut être expliquée par l’origine ethnique de la population. »
Si l’INVS dit vrai on devrait retrouver dans tous les pays où la population est issue de la traite négrière les mêmes taux de cancer de la prostate. On attend les chiffres.
Mais l’INVS qui vient de nier tout lien entre cancer et chlordécone à vouloir trop en faire se prend les pieds dans le tapis puisqu’il affirmait, un an auparavant dans le Bulletin d’alerte et de surveillance des Antilles Guyane ( juillet 2006) : « Seulement 3,3% des Martiniquais [ c-à-d environ 12 000 personnes] seraient, du fait de leur habitude alimentaire, au delà de la dose journalière admissible ».
On notera au moins deux choses. Premièrement ce qui est nié en 2007 était reconnu à mots couverts en 2006. Deuxièmement, que le risque de cancer relève des habitudes alimentaires des Martiniquais et non du chlordécone contenu dans les aliments. Si vous ne voulez pas du cancer mangez autre chose, des produits importés, ce que ne contredira pas la caste martiniquaise qui a le monopole sur l’import-export.
Le volet politique
C’était le volet « scientifique » voyons maintenant le volet politique. Il se résume à deux mots d’ordre : jouer la transparence et ne pas attaquer frontalement le Pr Belpomme ! Les ministres ont été briefés, mis au courant collectivement par Nicolas Sarkozy :dans la lumière des projecteurs, ils utilisent, tous le même mot dans une phrase à la syntaxe quasiment identique : « Nous sommes favorables à la transparence ». Il suffit de reprendre les déclarations du Président de la République, de la Ministre de l’intérieur, du Secrétaire d’Etat à l’Outremer.
Dans l’ombre des projecteurs se livre le véritable combat.
Rachida Dati, Garde des Sceaux, intime du couple présidentiel, adresse le 19-09-07 une lettre au Président de l’Assemblée Nationale et lui précise qu’au nom de l’intangible principe de séparation des pouvoirs entre le législatif et le judiciaire, et puisqu’une enquête judiciaire est en cours, la nomination d’une commission d’enquête parlementaire réclamée par les élus antillais ne pourrait être que contraire à la Constitution et donc qu’elle s’y oppose.
Par ailleurs en tant que « Chef » autoproclamé des Procureurs de la République Rachida Dati se pourvoit en Cassation pour faire annuler la qualification d’empoisonnement retenue par un Tribunal de première instance et confirmée par la Cour d’Appel, à la suite d’une plainte d’une association guadeloupéenne.
Passion victimaire
Le Plan Communication anti-Belpomme de la Mission Interministérielle Régionale Chlordécone a plus ou moins fonctionné, relayé ici et là-bas par une certaine presse plus ou moins manipulée, plus ou moins consentante et éblouie par sa proximité avec les foyers du pouvoir. La Martinique est maintenant présentée comme une victime d’un complot destiné à salir son image, et non plus d’un empoisonnement. Passion victimaire dont on a juste changer l’objet. Personne n’a jamais mis un revolver sur la tempe d’un planteur pour l’obliger à utiliser du chlordécone.
Plus que jamais le peuple martiniquais ne doit compter que sur lui-même, que sur ses propres forces s’il veut que toutes les responsabilités soient mises à jour.
Pour terminer deux questions : « Est-il vrai comme l’affirme le président de l’association PUMA que depuis DEAN plus de trois cents tonnes de pesticides ont été importées? Et est-il vrai que les planteurs ont demandé au Ministre de l’Agriculture M Barnier, qui les aurait refusées des dérogations pour leur utilisation?
Roland Sabra, le 20/09/07