— Par Coralie Schaub —
Le député de Martinique Serge Letchimy a présidé la commission d’enquête parlementaire sur l’impact économique, sanitaire et environnemental de l’utilisation des pesticides chlordécone et paraquat en Guadeloupe et Martinique, dont le rapport a été présenté ce mardi. Il insiste sur la responsabilité de l’Etat dans ce qu’il qualifie de «drame» et de «scandale», le chlordécone ayant été autorisé entre 1972 et 1993 aux Antilles françaises pour lutter contre le charançon du bananier, alors même que les autorités avaient été informées dès la fin des années 60 de la dangerosité de cet insecticide ultra toxique et de sa persistance dans l’environnement. Il presse aussi l’Etat de mettre enfin en place des mesures ambitieuses de réparation et d’indemnisation des victimes et territoires touchés. Sans quoi il y aura, dit-il, «une crise sociale majeure».
Source : Liberation.fr
Chlordécone. La commission d’enquête parlementaire pointe la responsabilité de l’État et réclame des « réparations »
La commission d’enquête parlementaire sur la pollution au chlordécone, un insecticide qui a durablement contaminé les sols de Guadeloupe et Martinique, demande une loi de programmation pour sortir du chlordécone en prévoyant des « réparations ». Un rapport allant dans ce sens a été présenté ce mardi 26 novembre.
- La commission d’enquête parlementaire sur la pollution au chlordécone a rendu ses conclusions, ce mardi. Après six mois d’auditions sur ce qu’Emmanuel Macron a lui-même qualifié de « scandale environnemental » dans lequel l’État « a sa part de responsabilité », la commission d’enquête a validé son rapport final. Il souligne que « l’État a fait subir des risques inconsidérés, au vu des connaissances scientifiques de l’époque, aux populations et territoires de Guadeloupe et de Martinique ». « Indéniablement, l’État est le premier responsable », pour avoir autorisé la vente de ce produit, a expliqué à l’Agence France Presse (AFP) la députée de Guadeloupe (MoDem) Justine Benin, rapporteuse de cette commission. Mais « ces responsabilités sont partagées avec les industriels, mais aussi les groupements de planteurs et certains élus, qui ont défendu jusqu’au bout l’usage du chlordécone, qu’ils considéraient à tort comme un produit miracle sans possibilité d’alternative ».
95 % des Guadeloupéens et 92 % des Martiniquais sont contaminés
« Le rapport est assez accablant et démontre que la population est en grande souffrance », a expliqué la députée devant la presse. Face à cette situation, la commission a fait au total 49 propositions. Elles devront « s’inscrire sur le long terme à travers une loi d’orientation et de programmation pour acter le principe des réparations » à cette pollution, a déclaré Justine Benin.
Le chlordécone est un insecticide, perturbateur endocrinien et cancérogène probable, autorisé entre 1972 et 1993 dans les bananeraies des Antilles, alors que sa toxicité et son pouvoir persistant dans l’environnement étaient connus depuis les années 60, a fait savoir Justine Benin. Aujourd’hui, 95 % des Guadeloupéens et 92 % des Martiniquais sont, selon Santé Publique France, contaminés par le produit, qui se retrouve dans l’eau, certains légumes, viandes et poissons, entraînant des interdictions de cultures et de pêche.
Faire de la recherche sur l’insecticide une priorité stratégique nationale
La commission, qui n’a pas chiffré ses propositions, a notamment rappelé la responsabilité de l’État dans cette pollution, aux cotés des acteurs économiques et politique locaux de l’époque. Elle demande la création d’« un fonds d’indemnisation pour réparer les préjudices subis par les victimes atteintes d’une pathologie résultant » du chlordécone.
Mais il est encore impossible de définir à partir de quel taux dans le sang le chlordécone est dangereux pour l’homme, rappelle la commission, qui recommande de faire de la recherche sur l’insecticide une priorité stratégique nationale, sur la santé et sur les possibilités de dépolluer les sols.
La commission préconise aussi « un suivi sanitaire systématique » aux « personnes potentiellement plus exposées au risque de chlordécone », financé par l’assurance-maladie. Pour payer la prise en charge des préjudices et la dépollution des terres, elle recommande d’instaurer « une contribution de la filière économique de la banane », selon le « principe du pollueur-payeur », a expliqué le président de la commission, le député PS de Martinique Serge Letchimy, président de la commission.
Un numéro vert pour les victimes et un délégué interministériel réclamés
Sur le plan économique, la commission recommande une « indemnisation intégrale du préjudice subi par les agriculteurs et les pêcheurs ». Pour protéger la population, elle préconise de « mettre en place des zones d’interdiction des cultures sensibles dans les secteurs les plus contaminés », avec un accompagnement financier des agriculteurs concernés.
Elle demande aussi un numéro vert pour les victimes, et la création d’un délégué interministériel dédié au chlordécone, pour piloter le prochain Plan chlordécone, prévu en 2020.
Source: ouest-france