Par JEAN-PHILIPPE DOMECQ Romancier
Il arrive quelque chose d’exceptionnel à Sugar Man, film de Malik Bendjelloul sur le rockeur Sixto Rodriguez revenu de l’oubli total. Ce documentaire d’emblée repéré par la presse (Libération du 26 décembre) connaît depuis lors une ferveur telle que sa programmation est prolongée de semaine en semaine. De trois écrans en France, on vient de passer à cinquante ; les deux concerts programmés en urgence pour juin au Zénith et à la Cigale affichent complet, un troisième est annoncé ; en Grande-Bretagne, le film vient de se voir décerner un Bafta, et qui sait ce qu’il pourrait décrocher dimanche à Hollywood ? Ventes exponentielles aussi du CD qui collecte ses deux seuls disques autrefois vendus en tout et pour tout à 6 exemplaires aux Etats-Unis, mais à 500 000 dans un pays alors plus clos que l’URSS, l’Afrique du Sud, où la jeunesse se dressa contre l’apartheid au chant de ralliement de ses titres de chansons claquant mat : Cold Fact et Coming From Reality.
Deux figures mythiques sont rameutées par ce fabuleux oubli et retour d’un chanteur qui avait, pour être star, plus que Bob Dylan selon les spécialistes. Une voix de révolte sur l’oreiller, pour ainsi dire. Cela s’entend dans la chanson Sugar Man qui, comme Mr. Tambourine Man de Dylan, rend hommage au dealer. On songe également au Rimbaud des Illuminations qui, à 21 ans, déserte le Paris des poètes pour se taire au Harar à jamais.
Eh bien, il faut imaginer un come-back du Harar. Autant revenir du désert.
Et c’est la deuxième figure, le saint, que réveille ce chamanique profil de chicano planqué à Detroit…..
20 février 2013 à 19:06