Catégorie : Politiques

La Martinique, malade de sa colonialité et de sa structure gérontocratique

— Par Isis Labeau-Caberia —

Les réactions extrêmement critiques qui ont déferlé suite au déboulonnement des statues de Victor Schœlcher sont symptomatiques de deux maux qui gangrènent la société martiniquaise : d’une part, son inertie face à un héritage colonial encore vivace ; d’autre part, le fossé grandissant entre une société vieillissante et embourgeoisée et sa jeunesse réclamant le changement social.
Le 22 mai 2020, de jeunes militant.es martiniquais.es procédaient au déboulonnement de deux statues de Victor Schœlcher, s’attaquant ainsi aux représentations de celui qui, depuis la IIe République, a été systématiquement érigé en symbole paternaliste de la « générosité » de l’État français à l’égard des esclaves de ses colonies. En choisissant cette date hautement symbolique du 22 mai — jour de commémoration du soulèvement servile qui, le 23 mai 1848, contraignit le gouverneur local à proclamer l’abolition immédiate de l’esclavage sur l’île et ce, avant même l’entrée en vigueur du décret d’abolition adopté le 27 avril à Paris — ces militant.es envoyaient un message fort : il s’agissait de dénoncer le récit colonial et assimilationiste d’une abolition « par le haut », un récit répété ad nauseam depuis 1848 et qui continue à ce jour à occuper une place centrale (voire exclusive) dans le champ de la mémoire officielle de l’esclavage, au détriment de la longue histoire des luttes serviles.

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Un modèle sociétal à élaborer en dehors de tout obscurantisme

— Par Jean-Philippe Nilor et Marcellin Nadeau, co-présidents du mouvement politique Péyi-A —

Nous prenons acte de l’ensemble des évènements survenus dans le cadre de la commémoration du 22 Mé 1848, en ce mois de mai 2020.
Ces commémorations multiformes dans leurs expressions et leurs méthodes, traduisent le long processus qu’ont eu à connaître des sociétés plus anciennes que la nôtre avant de pouvoir s’accorder sur des dates, des symboles et autres évènements leur permettant de faire Peuple. Faire Peuple, c’est-à-dire partager un passé commun pour construire un destin commun dans une dimension plurielle et diverselle.
La destruction des statues de Schœlcher a fait couler beaucoup d’encre.
De nombreuses personnalités politiques se sont empressées de prononcer des condamnations sans procès de ces jeunes militants.
À Péyi-A, nous avons toujours privilégié la réflexion sur les réactions dégainées à la hâte sur les réseaux sociaux.
La France n’a jamais regardé son passé colonial en face. Et par voie de conséquence, notre pays s’est forgé une lecture du passé grâce aux recherches et aux travaux émérites de certains de ses enfants, historiens, intellectuels, artistes…
Au-delà des faits, des dates, de telle ordonnance ou telle autre révolte, la lecture de l’Histoire restera toujours subjective.

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Destruction de statues en Martinique

Chaque génération pose sa pierre pour la décolonisation

— Par Danielle Laport, Docteure HDR – Sociologue —

L’histoire de la Martinique est riche en évènements qui interrogent la société dans son rapport à la France et de ce fait dans son rapport avec elle-même.

La dépose violente de la statue de Victor Schœlcher dans deux communes s’inscrit dans la continuité des actions directes menées depuis quelques mois dans les centres commerciaux sur la question de la chlordécone. En lieu et place d’une dénonciation consternée de ces actes du 22 mai 2020, nous devons nous attacher à mieux décrypter l’action de ces jeunes activistes qui posent, à leur manière, la question d’une Martinique à décoloniser.

La Martinique a déjà connu ce type d’acte sur les symboles de la période coloniale ; période constituant une page de l’histoire de la Martinique. Mais ces actes étaient anonymes ou identifiés à des slogans que l’on peinait à rattacher à un groupe.

Ce 22 mai 2020, les actes sont filmés, postés sur les réseaux sociaux, revendiqués ; les jeunes activistes ne craignent pas d’être identifiés. La Martinique franchit une étape ; celle de jeunes Martiniquais.e.s

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La Martinique au bord du précipice !

Pierre Alex Marie-Anne

À force d’évoquer sans cesse de façon obsessionnelle l’époque de l’esclavage et de ses turpitudes, les manipulateurs professionnels, pour la plupart blanchis sous le harnais, sont parvenus à leurs fins: réécrire l’histoire ,à leur convenance ,en se servant de l’immaturité et de la naïveté de jeunes écervelés. Ceux-ci reprennent ,à coup de masse hyper-médiatisés et sans doute de bonne foi, la dénégation du rôle central du grand abolitionniste que fût SCHŒLCHER au plan national , parallèlement à celui des esclaves dans les colonies ,contre les idées et les féodalités esclavagistes.

Le but poursuivi est évident: dresser les communautés qui composent la Martinique les unes contre les autres afin de rendre au final toute cohabitation impossible ; l’étendard RVN qui leur sert de signe de ralliement ne dit pas autre chose : il exalte exclusivement une dominante raciale ,à l’exact opposé de ce qui constitue notre identité plurielle et composite.

Ce fait d’actualité n’est donc pas à prendre à la légère , il y va de la cohésion et de la survie de notre petite communauté; largement répercuté par ailleurs au plan national il est de nature à faire fuir les visiteurs et les investisseurs potentiels tout en accélérant l’évasion de nos cerveaux vers des cieux plus cléments .

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« Nous condamnerons en image, en son, en zoom… »

France Inter, jeudi 28 mai 2020,  Augustin Trapenard, « Lettres d’intérieur » : Maïwenn

Maïwenn est comédienne, scénariste et réalisatrice. Sa lettre est adressée à celui qui a filmé l’assassinat d’un jeune homme noir par quatre policiers à Minneapolis.

Paris, le 27 mai 2020

« À toi qui as filmé,

Quand j’ai regardé mon téléphone, ce matin, il était 6h. Il était encore trop tôt pour lire l’application du Monde, leurs nouvelles s’affichent à 7h. Alors je vais faire un tour sur Instagram. Je tombe sur Madonna. D’habitude je passe, fatiguée de voir son botox ou sa vie extraordinaire, mais là je comprends qu’une vidéo ne la concerne pas, donc je regarde. C’est ta vidéo, celle de l’arrestation d’un homme à Minneapolis, en pleine après-midi.

Au départ, je ne comprends pas, je vois des flics pas du tout gênés d’être filmés par toi alors qu’ils plaquent un homme au sol qui ne présente aucune résistance.

L’homme supplie d’arrêter, il dit « I CAN’T BREATH, JE NE PEUX PLUS RESPIRER », mais le policier qui a un genou sur son cou a l’air d’apprécier que tu le filmes : il bombe le torse, il te regarde droit dans les yeux.

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Les statues et la mémoire

— Par Philippe Pierre-Charles —

Le premier devoir des nouvelles générations à l’égard des ancêtres est de chercher à les comprendre, à faire corps avec leurs luttes, à étudier patiemment, avec empathie, leurs vies, hauts faits comme faiblesses, succès comme échecs, espoirs comme illusions, tout compris.

Cet exercice est salutaire à plus d’un titre : il est une bonne introduction à l’histoire qui arrive plus facilement à la vérité quand elle regarde depuis le bas de la société, là où on pousse de hauts cris. Elle est aussi un bel antidote contre le sectarisme et l’arrogance qui aigrissent l’âme. Dans le jugement qu’il porte aux « grands hommes » (expression bien plus courante au masculin, hélas !) le peuple est parfois plus sage que les intellectuel-le-s parce que c’est lui qui vit d’abord les effets et les méfaits des « grands » et de leurs politiques. Le peuple n’ignore pas les trajectoires humaines auxquelles il assiste aux premières loges. Ces trajectoires sont lumineuses quand elles sont ascendantes, affligeantes dans le cas contraire.

Schœlcher est partisan de l’esclavage à ses débuts, partageant les préjugés racistes dominants de l’époque, mais il n’est pas un cas unique.

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Le déboulonnement des deux statues de Victor Schoelcher en Martinique est légitime

— Par – Cannelle Fourdrinier —

Ces déchoukaj des statues de Victor sont des actes, non pas de vandalisme, mais de résistance ancestrale, car faire la promotion exclusive de l’éminent raciste Victor Schoelcher revient à mutiler les mémoires de toutes celles et ceux ayant lutté, souvent au prix de leur vie, pour la liberté dans la Caraïbe.

La Martinique est une terre de résistance : les 21 et 22 mai 2020 en ont été l’énième démonstration : 172 ans après que nos ancêtres esclavagisé.e.s aient brisé leurs chaînes, sans qu’aucun.e blanc.he ne vienne les sauver (contrairement à ce que prétend le roman colonial français), leur descendance a souhaité mettre fin à leur invisibilisation. Non, nous ne devons pas notre liberté à Victor Schoelcher. Non, il ne constitue pas le ciment de notre attachement (supposé, et finalement inexistant pour nombre d’entre nous) à la République bananière française qui nous tue à petit feu en nous inoculant du chlordécone depuis 1968, du glyphosate depuis des décennies et autres produits phytosanitaires meurtriers; qui nous sait sans eau courante (laquelle n’est pas potable, eu égard aux pesticides que l’on y retrouve, notamment du chlordécone), en pleine pandémie de COVID-19.

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Du regard sur les statues…

— Par Léon Mastail —
La commémoration de l’abolition de l’esclavage, ce 22 mai 2020, sera à marquer d’une pierre noire ou d’une pierre blanche, selon que l’on considère que les événements qui s’y sont déroulés sont négatifs ou positifs. La destruction de deux statues de Victor Schoelcher a déconcerté bien des martiniquais, d’abord par son caractère inattendu, ensuite par la « violence » de l’acte, enfin par la remise en cause du parcours de cet homme qui jusqu’alors était considéré, presque de manière unanime, comme « une des grandes figures emblématiques du mouvement abolitionniste de l’esclavage au 19ème siècle… »
D’ailleurs, le socle sur lequel reposait l’une des deux statues portait l’inscription suivante : « Nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves ».
Le reproche fondamental qui est actuellement fait à Victor Schoelcher serait de n’avoir pas été, durant toute sa vie d’homme politique, un abolitionniste de la première heure, pur et dur. Et pourtant, selon toujours les activistes, les statues à son effigie lui donneraient à tort la primauté sur les héroïques esclaves qui, au péril de leur vie déjà bien misérable, ont mené les dures luttes qui ont irrémédiablement conduit à l’abolition de l’esclavage.

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Blablas, leçons et donneurs de leçons. Sortez du quadrille, la ronde est belle

— Par Jean-Marc Terrine, auteur et critique d’art —

Depuis que les statues de Victor Schoelcher ont été détruites le 22 mai 2020 en Martinique les leçons d’histoire fusent sur la question de l’abolition de l’esclavage chez-nous. Beaucoup de plumes, notamment celles de donneurs de leçons qui sortent de leurs chapelles les plus diverses et qui expliquent à la jeunesse, dans des « lettres » souvent leur condamnation et leur ignorance face à l’histoire. J’ai même vu un feuillet qui reprenait une citation de Karl Marx pour illustrer la faiblesse de pensée de ces activistes : « L’ignorance n’est pas un argument ».

Il est fou de voir comment toute cette pensée, qui s’adosse à une posture dite scientifique, qui pratique l’art de de la rhétorique et de l’argumentation semble avoir perdu ses facultés face à de tels gestes symboliques : faire tomber des représentations. Pourquoi tous ceux qui sont intervenus sur cette question à ce jour1, qui fait tant débat et qui mérite plus qu’un débat, ne voient que la face visible de l’iceberg ? Une face visible, juste une chronologie historique qui suffirait à justifier l’incompréhension et la condamnation de ces actes de vandalisme.

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Cet enfant qui a grandi…

— Par Ali Babar Kenjah —

  1. Ceux qui croient qu’une statue de Victor Schoelcher a été déboulonnée à Fort~de~France le 22 mé dernier sont des aveugles persistant dans l’aveuglement. Aveugles qui persistent à ne pas voir que cette œuvre ne portait pas sur le présumé libérateur, qu’en vérité cette œuvre traite d’un projet de « libération », que ce projet décrit une relation et qu’à ce titre l’œuvre implique symboliquement deux personnages. Le premier prend toute la lumière, on ne voit que Lui; il domine le second de toute sa taille et son geste protecteur a l’enveloppement bienveillant des grandes personnes qui savent. Car l’autre personnage est un enfant. Personnage subalterne généralement considéré comme décoratif, simple objet d’un amour dont le grand homme est le sujet. Or ce petit personnage donne tout son sens à l’œuvre qui est une pétition, l’œuvre qui est un discours exalté, un tract. Nous le savons bien, certains en ont même fait un patrimoine : ce grand « Libérateur » est une incarnation du génie français; et ce petit enfant c’est la Martinique. La Martinique, décor mineur d’un projet universel et « révolutionnaire »: l’Empire colonial français du XIXème siècle…
  2. Dans cette œuvre, le grand homme, austère comme un Père blanc, est l’homme de la France (la mère), son génie civilisateur, tandis que l’enfant symbolise une Martinique orpheline dans la morve de son innocence.

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La Démocratie est-elle l’horizon inséparable de notre temps ?

— Par Lucien Cidalise-Montaise —

Aujourd’hui, pris dans l’engrenage morbide et très « personnel » du confinement, nous affirmons que les obligations qui nous sont imposées, confirment la réalité d’une catastrophe propre à cette néo-démocratie qui nous gère, alimentée par de brèves interventions de « nos » dirigeants. Cette démocratie est aujourd’hui une réalité idéologique qui peut se résumer à ceci « la démocratie cé dé mo ki rassis, lè i kon sa, i kon pain. Yo ka di i perdu, d’où pain perdu ! ».

Nous condamnons les actions, ô combien insouciantes d’individus en colère. Nous condamnons parce que nous ne partageons pas les méthodes, gestes inconscients et inqualifiables de certains de ces contradicteurs, mais apprécions avec lucidité les revendications qui risquent d’être éternelles parce que réelles, engoncées et politiquement œuvres de l’idéologie que nous combattons, eux et nous.

La démocratie qui fleurit, ici, ne semble pas favorable à la neutralité. Elle entretient le doute, le mensonge, l’hypocrisie etc…

Elle ne me semble pas être une arme qui nous fera avancer. Que faire ? Consolider les rapports entre ceux-ci, les Révoltés ! et ceux qui n’apprécient pas. Est-ce un profond désir de la gauche anticolonialiste martiniquaise ?

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La démolition des statues de Victor Schœlcher exprime un malaise méconnu

— Par Jean-Marc Party —

La destruction des deux statues de Victor Schoelcher que compte la Martinique, ce 22 mai 2020, a suscité d’innombrables commentaires et réactions, locales ou extérieures. Cet acte pose la question du nécessaire débat sur les grandes figures de notre histoire.

 Le bris des deux statues de l’abolitionniste républicain français, à Fort-de-France et dans la ville portant le nom de Victor Schœlcher, est diversement apprécié. La destruction de ces monuments constitue un crime de lèse-majesté pour certains, un acte de vandalisme pour d’autres, un signe de méconnaissance de pans entiers de notre histoire tourmentée pour d’autres encore.

La plupart des responsables politiques qui ont réagi à ce geste inédit le condamne fermement. Le président de la République s’est mêlé à ce concert de protestations. Il dénonce « les actes qui salissent la mémoire de Schoelcher et celle de la République ». La ministre des Outre-mer ne dit pas autre chose.

C’est dire si le traumatisme est important. L’acte revendiqué par deux jeunes femmes s’exprimant dans une vidéo postée sur des réseaux sociaux est de la même veine qu’un communiqué signé « Lanmounité ». 

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Outre-mer : un plan d’un milliard pour aider les collectivités et entreprises

Le ministère des Outre-mer et l’Agence française de développement (AFD) ont signé lundi un plan doté d’un milliard d’euros pour accompagner les collectivités locales et les entreprises ultramarines dans la crise sanitaire et économique liée au coronavirus.

Ce plan, baptisé «Outre-mer en commun», se veut «une réponse à la crise sanitaire mais aussi à son impact économique», dans le cadre de la «trajectoire outre-mer 5.0 »(déclinaison des objectifs de développement durable pour les territoires ultramarins, ndlr), lancée depuis avril 2019, explique un communiqué commun. Ce plan se décline notamment en trois points : une réponse sanitaire, une réponse économique et une réponse environnementale.

Relance des investissements

En matière sanitaire, l’AFD va renforcer «son appui aux réseaux régionaux de surveillance épidémiologique» et va «contribuer au plan de réforme et de relance des investissements» pour les hôpitaux d’Outre-mer, précise le communiqué, sans donner de chiffres.

Pour «soutenir le tissu économique», l’AFD va examiner «avec bienveillance les demandes de report d’échéances de 6 mois de ses prêts aux collectivités locales et aux entreprises», accélérer «ses décaissements» (à hauteur de 250 millions d’euros), «les instructions de prêts budgétaires annuels des grandes collectivités» (250 millions), et mettre en place des «prêts d’urgence d’aide à l’investissement sur 20 ans pour les collectivités ultramarines».

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La statue foyalaise de Schoelcher : une œuvre d’anciens esclaves.

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Voilà qu’enfin apparaissent sur les blogs les justes interventions d’intellectuels, d’historiens ou de professionnels de l’histoire qu’on entendait peu et qui donnent un ton nouveau et semblent vouloir faire passer au second plan le discours traditionnel qui a conduit à la haine et l’intolérance. Hélas, il a fallu pour cela en arriver à ces extrémités qui sont le résultat d’un discours et d’une politique qui ont malheureusement réussi.

Certes, il est juste de reconnaître qu’avant les années soixante l’école s’était très peu préoccupée d’apprendre leur histoire aux jeunes Martiniquais. L’unique livre de lecture de la nation véhiculait la même parole dans toutes les colonies. Il n’est pas moins vrai que, portés par les idées de décolonisation, la Martinique s’est largement rattrapée. De sorte qu’aujourd’hui il n’y a sans doute aucun peuple caribéen qui ait un meilleur niveau de connaissance de son histoire que le nôtre. D’autant plus que le souci quotidien de ces populations quant au gîte et au couvert leur laisse peu du temps pour les considérations mémorielles.

Ainsi donc, au terrain en jachère de l’histoire s’est substitué un récit national martiniquais de stricte confrontation avec le roman français.

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Statues de Schœlcher : n’y aurait-il aucune oreille ?

— Par  Anique Sylvestre, écrivaine —
N’y aurait-il aucune oreille pour entendre la voix de ces jeunes révoltés qui ont osé expulser de son trône Victor Schœlcher ?
N’y aurait-il aucune oreille pour écouter les raisons d’une telle colère ?
N’y aurait-il personne pour voir les visages de ces deux jeunes femmes qui bravent l’interdit et qui se montrent au grand jour pour clamer la raison, sinon les raisons de leur acte ?
En d’autres temps, on en avait voulu à Joséphine qui finalement est restée étêtée. Et c’est pas plus mal ! À part qu’une explication en bonne et due forme de l’acte aurait pu servir à dire publiquement l’histoire.
Plusieurs tentatives avaient été faites préalablement sur la personne de Schœlcher, personnage de notre histoire encore très controversée, d’autant que des plus éminents de nos littérateurs, politiques et démocrates l’avaient, en leur temps, eux aussi, encensé.
Aujourd’hui, historiens, syndicalistes, politiques ou citoyens ordinaires s’horrifient de cet acte. Et moi, la première, me suis souvenue des Talibans pour ne citer qu’eux, en voyant ces images défiler sur les réseaux sociaux puis à la télévision.

La montagne n’est plus du même vert

Schœlcher ? La montagne n’est plus de ce même vert que l’on chantait au temps de l’antan.

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« Engageons-nous tous pour la #ScèneFrançaise »

L’appel de 142 artistes et acteurs du monde culturel

« Nous vivons une crise sanitaire sans précédent, qui a des impacts économiques dramatiques et immédiats pour notre pays. La culture est durement frappée, et la situation est catastrophique pour le secteur de la musique, avec plusieurs mois d’arrêt complet des activités au moment de l’année où s’ouvre la saison des festivals. À la différence d’autres secteurs d’activité, les professionnels de la musique ne sont pas concernés dans l’immédiat par le déconfinement progressif.

Pour toute la scène artistique française, autrices/auteurs, compositrices/compositeurs, artistes, DJ, techniciennes/techniciens, et leurs partenaires éditrices/éditeurs et productrices/producteurs, cette situation implique une double peine économique : avec la disparition de l’important canal de diffusion de leurs œuvres que sont les concerts, ils subissent une perte de revenus instantanée. Pour les artistes, les créateurs et les éditeurs rémunérés grâce aux droits d’auteur, cette perte de revenus s’inscrit dans la durée. Le coup d’arrêt porté aujourd’hui à la diffusion de leurs œuvres générera un effondrement de leurs revenus, en droits d’auteur, dans les douze à dix-huit mois à venir.

Parce que l’ensemble de nos créateurs et de nos musiciens sont fragilisés, c’est notre diversité culturelle qui se trouve menacée

Parce que l’ensemble de nos créateurs et de nos musiciens sont fragilisés, c’est notre diversité culturelle qui se trouve menacée.

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Mauvais geste, saine révolte

Déclaration de Louis Maugée après le saccage des statues de Victor Schœlcher

Le 22 mai dernier, de jeunes activistes nationalistes ont renversé la statue de Victor Schœlcher dans la commune de Schœlcher et à Fort de France en Martinique.

Victor Schœlcher est l’abolitionniste de l’esclavage le plus connu. En France et dans les outremers francophones.

Le 22 mai est la journée de commémoration de l’insurrection anti esclavagiste du 22 mai 1848 en Martinique. Elle avait contraint le gouverneur de l’île à décréter l’abolition de l’esclavage avant l’arrivée du décret gouvernemental. En effet le gouvernement issu de la révolution de 1848 en France avec notamment Victor Schœlcher avait décrété l’abolition de l’esclavage le 27 avril 1848.

Certes, on peut trouver chez Schœlcher des déclarations et propos contestables, condamnables, mais néanmoins secondaires eu égard à son combat pour l’abolition.

Et cela n’en faisait pas de toute façon un ennemi des esclaves. Il fut au contraire un défenseur de leur liberté à partir d’un certain moment de sa vie. Et il s’est battu pendant de longues années pour l’abolition de l’esclavage. Il fut un démocrate révolutionnaire, anti royaliste, républicain de 1848.

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Une intéressante contribution au débat

Tribune de Myriam Cottias, France Antilles du 24 mai, Pages Débats.

Myriam Cottias  :  Directrice du Centre International de Recherches sur les esclavages et post-esclavages (CIRESC). Historienne, Directrice de recherche au CNRS, Coordinatrice du programme de l’Agence Nationale de la Recherche « Réparations, compensations et indemnités au titre de l’esclavage (Europe-Amériques-Afrique) (XIXe-XXIe) », ancienne présidente du CNMHE (Comité National pour la Mémoire et l’Histoire de l’Esclavage, remplacé en 2019 par la Fondation pour la mémoire de l’esclavage).

TRIBUNE : Lors du 22 mai — jour de commémoration du soulèvement des esclavisé.e.s qui a abouti à la proclamation anticipée de l’abolition de l’esclavage en 1848 en Martinique — deux statues de Victor Schœlcher ont été brisées, jetées à terre, rappelant le déboulonnage des statues des généraux confédérés aux États-Unis. Ses assaillants ont alors donné des coups de pied et ont craché, semble-t-il, sur ce symbole honni transposant en Martinique des actions politiques qui se sont déroulées, entre autres, à la Nouvelle-Orléans, à Baltimore ou à Nashville contre les statues des généraux Lee et Nathan Bedford Forrest, fondateur du Ku Klux Klan. Elles avaient été érigées pendant la ségrégation raciale ou en réaction au mouvement des droits civiques dans les années 60.

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Schoelcher : détruire une statue est-il toujours illégitime ?

— Par Catherine Bertho Lavenir —

Catherine Bertho Lavenir, ancienne rectrice de l’académie de Martinique, est inspectrice générale de l’Éducation nationale, professeure des Universités, ED Arts et médias, Sorbonne-Nouvelle. Après la destruction de deux statues de Victor Schoelcher en Martinique ce 22 mai, elle  s’interroge sur le sens que peut avoir, en 2020, l’iconoclasme.

En ce 22 mai 2020, jour de commémorations de l’abolition de l’esclavage en Martinique, un groupe d’activistes s’attaque à deux statues de Victor Schoelcher et les détruit d’une manière qui n’autorisera aucune restauration. Une vidéo est immédiatement postée sur le net, suivie d’autres où de jeunes militantes expliquent la signification de l’acte. Deux temporalités s’affrontent : le discours « lent » des statues qui, décennie après décennie, portent dans l’espace public un même discours et l’articulation évènement-image-débat-diffusion immédiate, B.A.BA de l’activiste contemporain.

Dans une atmosphère d’épidémie où l’expression politique est raréfiée, les activistes occupent l’espace public puis médiatique. Leurs revendications associent l’indemnisation des victimes du chlordécone avec l’exigence de réparations pour les descendants d’esclaves. Reporté une première fois, leur procès pour une action antérieure – le blocage de supermarchés – doit se tenir dans quelques semaines.

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Le débat ce n’est pas ça !

— Par Fola Gadet, écrivain et universitaire —

Quand ça se passe en Afrique du Sud, vous comprenez, vous applaudissez. Quand ça se passe aux États-Unis, vous comprenez, vous applaudissez, vous écrivez. Quand ça se passe chez nous, ça vous semble vide de sens, vous récriminez. L’indignation de ces jeunes activistes doit être entendue. Pour ma part, je préfère dix jeunes debout derrière leurs idées que 100 fatalistes, conformistes et individualistes. Ils ne sont pas les premiers à faire ça et ils ne seront pas les derniers si nous ne saisissons pas ce moment pour avoir une conversation autour de notre mémoire, de notre histoire. Ces jeunes ne sont pas bêtes et sans raisonnement intellectuel. Ils ne sont pas non plus les marionnettes d’un groupe politique. Arrêtons de les insulter et de les ridiculiser à partir du confort de nos petites vies. Vous avez eu leur âge ? Vous savez que ce sont des années où on veut changer le monde et nous avons besoin de cette énergie. Nous sommes le fruit de gens qui avaient cette énergie à un moment donné.

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Une drôle de salade de fruits !

L’autre événement du 22 mai, à Fort-de-France

— par Janine Bailly —

Depuis le déconfinement, et le retour à une vie presque normale, les affiches et publicités qui évoquent la nécessité de se tenir à un mètre minimum de quiconque se multiplient. Et si elle prétendent nous aider à tenir la maladie en respect, elles se voient pourtant reçues avec plus ou moins de bonheur.

Ainsi, ce vendredi 22 mai, la préfecture de Martinique avait publié sur les réseaux sociaux un message appelant ses habitants à respecter cette distance entre chacun. Un visuel légendé « 1 m ou 5 ananas », sur lequel la séparation était donc symbolisée par… cinq ananas  posés entre deux personnages, l’un noir et l’autre blanc, bien pourvus de masques.  Un dessin censé illustrer l’importance de cette distanciation physique, nécessaire pendant l’épidémie de coronavirus. Une affiche qui a paru enjoindre les Martiniquais à compter non en mètres, mais en ananas… Une utilisation du fruit exotique qui n’a pas été du goût de tous !

Suivre l’exemple ? En effet, le 10 avril dernier, la municipalité de Rapa Nui, sur l’île de Pâques, avait  la première utilisé cette comparaison pour rappeler l’importance de ce geste-barrière à appliquer contre le coronavirus.

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Points de vue sur un évènement marquant de ce 22 mai 2020

France Antilles du 22 mai 2020 :  l’événement à Fort-de-France

« En ce jour de commémoration du 22 Mai, un groupe d’activistes a fait tomber deux statues de leur socle avant de les endommager à coups de masse. Les militants sont passés à la vitesse supérieure cette année, contestant l’action de Victor Schœlcher et lui reprochant notamment le décret suivant l’abolition de l’esclavage, ayant permis l’indemnisation des propriétaires d’esclaves. »

Sur People Bò Kay : un acte assumé, un témoignage

Deux militantes martiniquaises ont revendiqué samedi, dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, avoir participé à la destruction des deux statues de Victor Schoelcher le 22 mai, jour du 172ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage en Martinique.

« Ceci est un message à la gendarmerie de la Martinique, la police, les forces armées, les juges, les magistrats. Nous assumons pleinement notre acte parce que nous en avons assez, nous jeunes Martiniquais d’être entourés de symboles qui nous insultent », déclare Jay Assani, activiste martiniquaise très connue sur les réseaux.

« Et nous avons pris la décision, nous ne sommes pas les premiers à s’en prendre à ces symboles.

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Distanciation : le préfet de Martinique retire une affiche jugée raciste

Plusieurs personnes se sont indignées de cette affiche publiée vendredi, qui représente deux hommes, un Blanc et un Noir, séparés par des ananas.

La préfecture de Martinique a fait machine arrière samedi 23 mai, après avoir publié sur les réseaux sociaux la veille une affiche pour illustrer la distanciation physique à respecter pour limiter la propagation du Covid-19, la distance en question ayant été transcrite en ananas. Deux personnages sont représentés : un Noir et un Blanc. Ce visuel a fait polémique sur les réseaux sociaux, avec un tweet remarqué du chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, qui a qualifié la démarche des services de l’État dans le département d’outre-mer de « honte ».

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Excuses de la préfecture

Face à ça, les services du nouveau préfet Stanislas Cazelles, ex-conseiller à l’Élysée pour l’outre-mer nommé en février, ont retiré l’illustration. « Nous présentons nos excuses si elle a pu heurter certains d’entre vous. L’unique objectif était de montrer l’importance de la distanciation face à l’épidémie », a écrit le service communication du préfet sur son compte Twitter.

« Message honteux du préfet de la Martinique.

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Casser les statues de Schoelcher est une démarche qui méconnait une part de l’histoire de la fin de l’esclavage!

— Par Gilbert Pago —

Ma lettre traduit une volonté de dialogue ( serait-elle impossible ?) avec les jeunes activistes. Accepteront elles et ils cette invite ?

Des statues de Victor Schoelcher tant au centre Camille Darsières ( ex tribunal de Fort de France) que celle de l’entrée du bourg de Schoelcher ( à Case Navire), ont été abattues ce vendredi 22 mai.

Le coup d’éclat se définit grandement comme militant, il reste très malheureusement erroné et perturbe encore plus notre compréhension de notre histoire.

Les militants et militantes des années 1960 et 1970 (avec lesquels je suis fier d’avoir très fortement agi) rejetaient le rôle d’une France qui aurait octroyé l’émancipation, par l’action bienfaitrice de ses seuls abolitionnistes dont Schoelcher. Cette génération exigeait de ne pas minorer le rôle de la lutte des esclaves pour l’arrachement de leur émancipation. Elle faisait ressortir que l’ignorance et la méconnaissance des 22 et 23 mai, ne devaient pas perdurer.

Le 22 mai, jour de 5 événements marquants à Saint Pierre et au Prêcheur, devenait à juste raison la date-phare qu’elles et ils érigeaient comme date de commémoration et de célébration, avant même celle du 23 mai, date réelle et officielle de l’abolition de l’esclavage.

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S’appuyer sur une mémoire partagée pour bâtir une vision ambitieuse de l’avenir

— Par Olivier-Ernest Jean-Marie —

Deux statues de Victor Schoelcher ont été détruites aujourd’hui (22 mai 2020) devant l’Espace Camille Darsières à Fort-de-France et à l’entrée du bourg de Schoelcher en Martinique.

Je constate que Nous (communauté martiniquaise) ne partageons pas (plus?) la même mémoire. Il existe des divergences sur les références historiques que nous devons retenir pour asseoir notre communauté dans le Monde et nous situer dans le temps.

En préambule, je précise que mon intervention n’a pas pour objectif de justifier ou de condamner ces destructions.

Au-delà du jugement moral que nous pouvons porter sur les motivations et les méthodes des auteurs de ces actes, il me semble important, si nous voulons créer ou consolider notre communauté martiniquaise, que nous entamions un devoir de mémoire profond, sincère, participatif et courageux.

Les statues de Schoelcher, de Joséphine et de D’Esnambuc sont régulièrement dégradées… puis furtivement restaurées (à l’exception de celle de Joséphine…), les plaques des rues Gallieni et Blénac sont régulièrement enlevées…puis remplacées discrètement.

Il y a là le signe d’un désaccord profond qui mine la construction d’une communauté martiniquaise sereine et ambitieuse.

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