Catégorie : Parutions

Cynthia Fleury : « Le travail doit faire lien avec l’émancipation et non pas avec la survie »

cynthia_fleuryCynthia Fleury
Les irremplaçables
Collection Blanche, Gallimard
Parution : 03-09-2015
Nous ne sommes pas remplaçables. L’État de droit n’est rien sans l’irremplaçabilité des individus. L’individu, si décrié, s’est souvent vu défini comme le responsable de l’atomisation de la chose publique, comme le contempteur des valeurs et des principes de l’État de droit. Pourtant, la démocratie n’est rien sans le maintien des sujets libres, rien sans l’engagement des individus, sans leur détermination à protéger sa durabilité. Ce n’est pas la normalisation – ni les individus piégés par elle – qui protège la démocratie. La protéger, en avoir déjà le désir et l’exigence, suppose que la notion d’individuation – et non d’individualisme – soit réinvestie par les individus. «Avoir le souci de l’État de droit, comme l’on a le souci de soi», est un enjeu tout aussi philosophique que politique. Dans un monde social où la passion pour le pouvoir prévaut comme s’il était l’autre nom du Réel, le défi d’une consolidation démocratique nous invite à dépasser la religion continuée qu’il demeure.
Après Les pathologies de la démocratie et La fin du courage, Cynthia Fleury poursuit sa réflexion sur l’irremplaçabilité de l’individu dans la régulation démocratique.

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« Ils ont tué mon mari, mon amoureux, mais pas l’artiste »

— Par Caroline Constant —

tignous_albumChloé Verlhac, la femme du dessinateur Tignous, assassiné le 7janvier dernier à « Charlie Hebdo », est à l’origine 
du premier tome d’une anthologie de ses œuvres [sortit], le 14 octobre.

Tignous. Éditions du Chêne, 38 euros. Il s’interrogeait sur notre responsabilité dans le départ pour le djihad des adolescents, quand les frères Kouachi sont entrés à Charlie Hebdo, le 7 janvier dernier. Tignous, comme onze autres personnes, est tombé sous leurs balles. Demain, 14 octobre, sort en librairie le premier tome d’une anthologie de ses œuvres. C’est son épouse et complice, Chloé Verlhac, qui a voulu montrer au public l’œuvre de son grand escogriffe de mari. Ce petit bout de femme, toute en rousseur, a la détermination des braves et l’énergie du désespoir. Pour elle, pas question que la barbarie triomphe, dans cette histoire. De son si prolixe époux, elle a sélectionné dans ce fabuleux ouvrage 200 illustrations, qui témoignent de la richesse de l’imagination de Tignous, de la variété de ses centres d’intérêt et de ses révoltes, et de son rêve de fraternité. Et aussi et surtout de la bonhomie du personnage, au trait puissant et incisif, mais jamais méchant.

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Comment devient-on un homme ?

— Par Lucile Quillet —

fabrique_des_garconsL’historienne Anne-Marie Sohn a décrypté 200 ans de construction de l’identité masculine dans le livre La Fabrique des garçons. Entretien.

Un an après la parution de La Fabrique des filles (1), les éditions Textuel récidivent avec le pendant testostéroné de leur étude des stéréotypes genrés. Dans La Fabrique des garçons (2), l’historienne Anne-Marie Sohn décrypte les mécanismes fondateurs de l’identité masculine dans l’éducation des petits garçons. Car les hommes ne naissent pas hommes, ils le deviennent. Entretien.

Lefigaro.fr/madame. – On entend beaucoup parler des stéréotypes dont souffrent les femmes, mais peu de ceux qui concernent les hommes. Pourquoi ce silence ?
Anne-Marie Sohn. – Même s’ils s’interrogent sur eux-mêmes, les hommes parlent peu de leurs stéréotypes. Seulement une poignée d’hommes, qui se disent féministes, récusent à haute voix les traits de la domination masculine. On remet difficilement ces clichés en question car le masculin fait figure d’universel, son identité semble naturelle. Grammaticalement déjà, on utilise le masculin pour définir l’humanité toute entière. La construction de la masculinité a transformé la culture en nature. Aussi, les processus de fabrication des garçons sont moins visibles que ceux des filles.

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« Qu’est-ce qui nous unit ? », de Roger-Pol Droit

union_uniteUne recension de Marc Knobel, Historien, Directeur des Etudes au CRIF
Nos sociétés se déchirent. Polémiques, affrontements innombrables, violences, destructions, désolations, petitesses en tout genre, opposant les uns aux autres, des guerres dévastatrices, la terreur et le terrorisme, jusqu’aux décapitations. Ce sont toutes les images quelquefois horribles d’une humanité qui semble désincarnée, presque déshumanisée.
Cette omniprésence du conflit dans nos vies a achevé de nous convaincre que ce qui nous divise est désormais plus fort que ce qui nous unit.
C’est ce dernier versant, celui du lien humain, qu’a choisi d’explorer le philosophe Roger-Pol Droit.
Qu’est-ce qui nous unit? (Plon, 2015) La question est urgente, elle est aussi pertinente.
Roger-Pol Droit explore alors brillamment et (nous) interroge, qu’est-ce que ce « nous » dont les contours sont brouillés, dont les contours sont à explorer, parce que les conflits et les affrontements jalonnent notre présent.
C’est ainsi, pour reprendre l’actualité la plus récente que les murs et les barbelés érigés pour empêcher les migrants de frapper à la porte de l’Europe font douter de la solidarité, des émotions et de la souffrance qu’il est possible de partager.

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L’humanité au pluriel : la génétique et la question des races

— Par Simone Gilgenkrantz —

humanite_au_plurielFils de…
Fils de bourgeois ou fils d’apôtre
Tous les enfants sont comme les vôtres
Fils de César ou fils de rien
Tous les enfants sont comme le tien
Jacques Brel (1967)
Le nouveau livre de Bertrand Jordan, L’humanité au pluriel – La génétique et la question des races, tombe à pic [1]. Et ceci n’est pas dû au hasard. Comme il existe des « lanceurs d’alerte », on trouve parmi les scientifiques des « veilleurs » qui, patiemment, au fil des livres qu’ils écrivent, jettent un éclairage lucide et clair sur les mirages et les pièges tendus au grand public par les acquis des sciences biologiques. La génétique n’en manque pas et Bertrand Jordan est de ceux-là.
À l’heure des tests ADN en vue du regroupement familial, au moment où la génétique va devenir personnelle [2] et où chacun voudra connaître son génome – comme on s’est appliqué récemment à établir son arbre généalogique -, au moment où s’accomplit le projet HapMap, qui recense à travers le monde les variations courantes dans la séquence de l’ADN de toutes les populations humaines du globe, il fallait bien qu’un généticien revisite la question des races, malgré tout ce qu’elle charrie derrière elle de stigmatisation, de haine et de tabous.

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Paroles de »migrants »

devenus_francaisZola, Drucker, Gainsbourg, Sarkozy, Cardin mais aussi Badinter, Apollinaire, Stravinsky, Chagall, de Staël, Cavanna, Coluche ou Aznavour : chacun dans leur domaine, chacun à sa façon, ils portent l’esprit français, la culture, et participent à ce qu’on appelle l’identité d’une nation. Ils incarnent la France. Pourtant, ils ne sont pas nés français. Ce n’est qu’après de longues démarches administratives qu’ils le sont devenus, eux-mêmes ou leurs parents. Le public l’ignore souvent. Leurs enfants l’ont parfois occulté, tout occupés à se faire une place en France. Les archives nationales, elles, ont tout gardé, dans des chemises en carton au papier jauni, dans des milliers de boîtes, sur plusieurs kilomètres de rayonnages…
C’est à une longue enquête de détective que se sont livrées les auteurs. Il a fallu véritablement exhumer ces trésors de papier, ces dossiers de naturalisation anonymes. Un fabuleux patrimoine où se racontent épopées intimes et aventures collectives au gré des ballottements de l’histoire. Les familles, que les auteurs ont rencontrées, n’en avaient jamais eu connaissance : Michel Drucker, Raymond Domenech ou Charles Aznavour ont ainsi été confrontés aux traces émouvantes de leur histoire.

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Louise Michel, rouge fleur de germinal

— Par Jérôme Skalski —

louise_michelLa publication de deux des ouvrages majeurs de la combattante de la Commune de Paris, militante républicaine, socialiste et anarchiste, est l’occasion d’une redécouverte de son œuvre à la fois littéraire et politique.

L’espérance révolutionnaire de Louise Michel fut celle d’un siècle. Née deux mois avant les journées de juillet 1830 qui virent se rallumer le brasier de la Révolution française, son existence s’acheva, à presque soixante-quinze ans, le 9 janvier 1905 à Marseille.

La publication, aux éditions La Découverte, du second tome de ses Mémoires (1), ainsi que la réédition de ses Souvenirs (2) sur la Commune de Paris, sont l’occasion de redécouvrir ce personnage que Victor Hugor déclara « viro major », « plus grande qu’un homme », institutrice, militante inflexible et incorruptible, journaliste, écrivain et poète.

« La Mégère, la Pétroleuse, 
le Monstre à face humaine »

Au lendemain de la Semaine sanglante, elle fait partie des milliers de communards condamnés par les conseils de guerre à la déportation. Après avoir passé deux ans en prison, elle demeure sept années en Nouvelle-Calédonie. Sur la presqu’île Ducos tout d’abord, à Nouméa ensuite, sa peine commuée en « déportation simple ».

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L’histoire d’un théâtre de l’utopie : le Théâtre du Peuple de Bussang

theatre_du_peupleLe Théâtre du Peuple de Bussang est né en 1895 d’une utopie humaniste et artistique : créer dans les montagnes vosgiennes une fête dramatique destinée à l’ensemble du peuple, en régénérant l’art de son temps. Depuis cent vingt ans, ce théâtre atypique dans le paysage culturel français maintient vivant l’idéal de son fondateur, Maurice Pottecher, résumé par la devise “Par l’art, pour l’humanité” inscrite au fronton de la scène. Dans cette bâtisse de bois classée Monument historique et dont le fond de scène s’ouvre sur la nature, est proposée chaque été, à l’occasion d’un rituel festif, populaire et familial, une programmation dramatique croisant créations et oeuvres de répertoire et mêlant professionnels et amateurs. Malgré les guerres, les évolutions sociétales, les changements dans le fonctionnement, l’organisation et la direction du lieu, ce projet a résisté au passage du temps, en se réinventant sans cesse, mais sans perdre son “esprit” originel. Dans l’Humanité => En s’appuyant sur des centaines d’entretiens, les deux auteurs, spécialistes en études théâtrales racontent l’aventure 
de Bussang depuis sa fondation en 1895. Le Théâtre du Peuple 
de Bussang. 
Cent vingt ans d’histoire, de Bénédicte Boisson 
et Marion Denizot.

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Internet : qui possède notre futur ?

jaron_lanierInternet, nouvel eldorado ? Dans ce cas, pourquoi certains s’enrichissent-ils alors que d’autres (les plus nombreux) s’appauvrissent ? Contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire, Internet ne crée pas plus d’emplois qu’il n’en détruit dans la réalité concrète… Et pourtant, Internet est en train de transformer notre économie de fond en comble… Nouvelle monnaie universelle : l’information. Celle que nous mettons quotidiennement sur Internet quand nous nous connectons avec notre ordinateur ou notre Smartphone, et que les géants du Net s’approprient via les services « gratuits » proposés aux utilisateurs et qu’ils reconditionnent en ces « Big Data » qu’ils vendent aux annonceurs à prix d’or. Il s’agit d’un rapt général : notre société est en train de se faire déposséder de ses données – de sa richesse…! Allons-nous laisser les gros serveurs maîtrisant les algorithmes les plus puissants confisquer notre avenir ? Comment faire en sorte qu’Internet devienne vraiment l’eldorado… pour tous ?

Créateur à répétition de start-up et inventeur de la « réalité virtuelle », Jaron Lanier a collaboré avec les plus grandes firmes du Net : l’envolée d’Internet, il l’a vécue de l’intérieur, les dérives du monde numérique, il connaît… Il œuvre maintenant à ce qu’Internet redevienne ce merveilleux outil conçu pour tous, et nous projette dans le futur d’Internet – notre futur.

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L’esclavage raconté à ma fille – Christiane Taubira

taubira_esclavage_sa_filleGarde des Sceaux, ministre de la Justice, Christiane Taubira a été députée de Guyane de 1993 à 2012, mandat pendant lequel elle a rédigé en 2001 la proposition de loi visant à reconnaître la traite négrière et l’esclavage comme crime contre l’humanité.

« La traite et l’esclavage furent le premier système économique organisé autour de la transportation forcée de populations et de l’assassinat légal pour motif de liberté, pour marronnage. Ce système a perduré
pour l’Europe durant plus de quatre siècles, pour la France durant plus de deux siècles.
Il ne s’agit pas de se morfondre ni de se mortifier, mais d’apprendre à connaître et respecter l’histoire forgée dans la souffrance. D’appréhender les pulsions de vie qui ont permis à ces millions de personnes réduites à l’état de bêtes de somme de résister ou simplement de survivre. Il s’agit de comprendre cette première mondialisation qui a généré des relations durables entre trois puis quatre continents.
Ces événements doivent être enseignés, que l’on sache qu’il y eut, dès les premiers temps, résistance sur place et solidarité transcontinentale. Interrogeons cette histoire afin que les jeunes générations détectent les liens entre le racisme ordinaire et ses sources dans le temps, et qu’elles comprennent que la République a besoin de leur vigilance et de leur exigence.

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Un essai assassin contre Luc Ferry, Frédéric Lenoir et Michel Onfray

— Par Patrice Trapier —

roger-pol-droitRoger-Pol Droit a publié un essai assassin contre « les prophètes du bonheur », à commencer par Comte-Sponville, Ferry, Lenoir et Onfray.

L’été approche et son cortège de régimes santé-forme-minceur. Une séance de méditation, cinq fruits et légumes quotidiens, le bonheur est dans le pré! À côté des maillots se glisseront naturellement dans la valise quelques traités de « philo perso » achetés sur Amazon : au choix le paradis en dix leçons, la sérénité pour les nuls ou le zen à la portée de tous…

C’est contre ces prophètes du bonheur (Comte-Sponville, Ferry, Lenoir, Onfray…) et leur kit prêt-à-penser, que Roger-Pol Droit a publié, il y a quelques semaines déjà, un essai assassin qui se lira allègrement durant tout l’été. Le très urbain « RPD » laisse aller sa colère contre les propagandistes d’un « bonheurisme philosophique » qu’il conteste en bloc et en détail. À une époque où le tragique de l’Histoire signe son retour ; où la science en marche autorise tous les fantasmes ; où les grandes idéologies effilochées laissent la place à l’intégrisme, au nihilisme ou au narcissisme culturel, l’homme occidental cultive son nombril en s’imaginant lointain disciple de Sénèque, Socrate, Lucrèce ou Épicure.

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Le théâtre noir brésilien, un processus militant d’affirmation de l’identité afro-brésilienne

theatre_noir_bresilienUn ouvrage de Christine DOUXAMI
Collection Logiques sociales
ISBN : 978- 2-343-06332-4 • 35 € • 322 pages
L’ouvrage de Christine Douxami « Le théâtre noir brésilien : un processus militant d’affirmation de l’identité afro-brésilienne », met en avant les différentes formes artistiques et esthétiques du théâtre noir au Brésil de sa création en 1944 jusqu’à aujourd’hui. Ce théâtre constitue une réponse militante et artistique de la part de membres du groupe ethnique afro-brésilien à un sujet jusqu’aujourd’hui tabou au Brésil : la discrimination raciale qui émane de l’ensemble de la société brésilienne envers les populations afro-brésiliennes. Depuis 2001, le gouvernement fédéral brésilien met toutefois en avant des politiques d’action affirmative en faveur des populations noires et commence à admettre l’existence du racisme. Le théâtre noir a donc parallèlement connu un nouvel essor et traduit, tant en termes de dramaturgie qu’esthétiquement sur le plateau, les nouvelles aspirations des populations afro-brésiliennes. L’ouvrage, en soulignant le travail des précurseurs brésiliens dans ce domaine de l’art engagé et en montrant quels sont les choix artistiques et politiques actuels de ce théâtre de revendication identitaire est donc particulièrement actuel et nécessaire.

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« Archives, pour un monde menacé » par Anne Waldman

— Par Vincent Broqua —

archives_pour_1_mondeArchives, pour un monde menacé est le premier livre de la grande poète, écrivain et artiste Anne Waldman publié en France. Venant compléter les quelques titres édités par le collectif Maelstrom en Belgique, le livre, préparé et traduit par Vincent Broqua, traducteur et spécialiste de poésie américaine, est un choix de textes couvrant les treize dernières années de l’œuvre d’Anne Waldman. Archives, pour un monde menacé donne donc à lire l’évolution d’une pensée et d’une pratique poétique, mais aussi philosophique et politique, au début du 21ème siècle. Ce choix éditorial de textes récents est d’autant plus significatif qu’il s’appuie aussi sur les leçons tirées du passé, qu’il tienne de la mémoire collective ou bien, plus précisément, de la mémoire littéraire. En effet, ces cinquante dernières années, Anne Waldman, en fréquentant et rassemblant un très grand nombre d’écrivains autour de divers projets, comme The Jack Kerouac School of Disembodied Poetics qu’elle a fondée avec Allen Ginsberg ou plusieurs aventures éditoriales, est devenue l’infatigable animatrice de la poésie américaine, une mémoire à elle seule de la seconde moitié du 20ème siècle américain en art et littérature⋅ Archives, pour un monde menacé, apporte un double démenti à la critique parfois adressée à l’encontre de l’école de New York : que ce groupe d’écrivains était apolitique et que les femmes y étaient absentes.

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Albert Moutoudou relance « l’hypothèse panafricaniste »

panafricain— Par Jean Chatain —

L’Hypothèse panafricaniste, d’Albert Moutoudou, Éditions L’Harmattan, 108 pages, 12,50 euros. Dans un ouvrage argumenté, l’auteur camerounais montre en quoi le durcissement des différences ethniques s’accompagne à peu près systématiquement d’une déstabilisation accentuée des sociétés.

L’ethnie, la nation, le continent… trois niveaux de concepts trop souvent utilisés de façon incantatoire par nombre de discours sur l’Afrique, glissant de l’un à l’autre chaque fois que la réflexion se heurte à plusieurs nœuds de contradictions que l’on s’efforcera non pas de résoudre mais de contourner en sautant d’un palier à l’autre, en jouant de l’un contre l’autre (en particulier l’ethnie contre la nation) au mépris de la plus élémentaire cohérence. Mais chaque fois avec un objectif politique identique : « De Moïse Tshombé dans l’ex-Congo belge aux vociférateurs de la Radio des Mille Collines au Rwanda, en passant par Buthelezi en Afrique du Sud, les apprentis sorciers ne peuvent qu’être réduits à deux options : ou bien la tentation hégémonique de leur ethnie (sur les autres ethnies) ou bien la tentation sécessionniste ; l’une et l’autre étant des impasses politiques. 

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Une comparaison originale entre Marx et Foucault pour dépasser le capitalisme

— Par Jérôme Lamy,  Historien des sciences —
marx_foucaultFoucault avec Marx, de Jacques Bidet. Éditions La Fabrique, 240 pages, 13 euros. Grâce à une analyse rigoureuse des contradictions potentielles entre les deux philosophes Marx et Foucault, Jacques Bidet livre 
un ouvrage essentiel pour une philosophie politique permettant de penser le dépassement du capitalisme.

Le projet du livre de Jacques Bidet n’est pas de comparer Marx à Foucault, ni de suturer leurs ensembles théoriques en vue d’une intégration conceptuelle. Le propos est plus large, plus ambitieux aussi. Il s’agit de produire une théorie métastructurelle de la modernité. En considérant les œuvres de Marx et de Foucault comme des façons de penser la rationalisation des rapports sociaux sous leurs formes les plus générales, Jacques Bidet envisage une nouvelle approche des principes généraux organisant les forces productives. Il commence par répertorier les différences fondamentales entre Marx et Foucault : si le premier pense en termes de structures (et de reproduction de celle-ci), le second envisage les dispositifs (comme des articulations des discours aux pratiques). Les cours de Foucault à la fin des années 1970 se sont orientés vers une analyse du libéralisme et des arts de gouverner.

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Les juifs algériens dans la lutte anticoloniale

juifs_algeriens_ds_lutte_anticolonialeOuvrage paru aux Presses universitaires de Rennes en mai 2015.

Présentation : « Pour nous qui venions à peine d’avoir l’âge de raison en ces jours d’humiliation, ces années de jeunesse ont à jamais marqué notre vie et c’est pourquoi nous sommes fiers de l’injure qu’on nous lançait comme un opprobre : Oui, nous sommes des juifs indigènes algériens… Et après ? Vous n’aurez pas notre cœur contre un certificat de nationalité dont vous vous servez comme d’un couperet de guillotine. »

Diffusées clandestinement durant la guerre d’indépendance, ces lignes ont été écrites en 1957 par des juifs algériens qui, nés citoyens français vers 1930, déchus de la citoyenneté française durant trois années et exclus de l’école sous Vichy, sont devenus des militants communistes algériens après la Seconde Guerre mondiale avant de rejoindre le FLN en 1956.

Lire aussi : Mireille Saïd, Casbah clandestine et haïk de combat.

De l’entre-deux-guerres à l’indépendance de l’Algérie, une petite minorité de juifs issus de familles autochtones ont suivi des trajectoires comparables, les déplaçant en quelques années des projets sociaux ordinaires de leurs parents – faire de leurs enfants de bons Français plus ou moins juifs – vers le projet politique inouï de s’affirmer Algériens.

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Arabie saoudite : voici les écrits qui valent 1.000 coups de fouet

— Par Pascal Riché —

mille-coups_de_fouetLe jeune blogueur Raif Badaoui a été condamné à 10 ans de prison et 1.000 coups de fouets pour ses écrits « blasphématoires ». Un petit livre présente les articles, raisonnés et lumineux, qui lui ont valu cette peine.

Si vous vous demandez encore où est Charlie, il rêve dans les toilettes de sa cellule collective, dans une geôle saoudienne. Quand il y entre, le prisonnier Raif Badaoui (aussi orthographié Raif Badawi), 31 ans, y trouve des feuilles de papier souillées, des excréments partout. La situation, écrit-il, est effroyable :
Des murs sales, des portes défoncées, rouillées. Me voilà qui tente de m’adapter pour faire face à ce chaos. Et tandis que j’examine avec attention les centaines de graffitis inscrits sur les murs poisseux des toilettes communes de la cellule, mon regard tombe sur la phrase ‘La laïcité est la solution‘. Stupéfait, je me frotte les yeux pour m’assurer que je vois bien ce que je vois.« 

Sur les murs, une main a donc écrit ton nom, Laïcité. Ce qui redonne du courage et même de la « gaieté » au prisonnier, qui a tout à coup le sentiment de voir apparaître, sur le mur misérable couvert d’obscénités, « une jolie fille séduisante » :
J’ai été aussi émerveillé qu’heureux de découvrir cette belle maxime insolite.

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Le mariage d’amour n’a que 100 ans… »

mariage_damour-2Comment peut-on affirmer cela ? Il y a bien longtemps que l’on n’épouse plus ni une dot, ni un nom, ni un titre de noblesse !

Et pourtant…

À la manière d’une enquête, ce livre retrace la longue histoire du couple : notre ancêtre Lucy a-t-elle choisi son compagnon par amour comme le font avec évidence toutes les Lucies d’aujourd’hui ? Sans jugement et en se fondant sur des faits historiques, il explique comment un simple contrat d’intérêts s’est embarrassé au fil des siècles d’un élément incroyablement nouveau : l’amour ! Et comment, finalement, ce sentiment a redistribué les cartes pour offrir au xxie siècle des possibilités totalement inédites…

Laurence Caron-Verschave a débuté sa carrière comme journaliste avant de travailler dans la communication.

Yves Ferroul est médecin sexologue, chargé de cours d’histoire de la médecine et de cours de sexologie à la faculté Lille-II. Il est également agrégé de lettres, docteur en lettres, et a enseigné la littérature du Moyen Âge à l’université Lille-III. Il est le coauteur avec Élisa Brune du Secret des femmes.

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Chronique d’un lieu de pensée, Fonds Saint-Jacques

— Par Jean Benoist —

fds_st_jacques_chroniqueDurant quinze années, le Centre de recherches caraïbes de l’université de Montréal a été présent aux Antilles, par ses chercheurs et ses étudiants. Installé à la Martinique dans le beau lieu historique de l’ancien monastère de Fonds St-Jacques, le centre a d’abord permis le sauvetage et la restauration du lieu. Puis,il a réalisé de multiples travaux en anthropologie, linguistique, archéologie, géographie,démographie, zoologie et écologie et publié un grand nombre de livres et d’articles.
Créé en 1968, lors d’une période charnière de la présence du Québec au monde, il a été un lieu de rencontre de la francophonie et il a donné naissance à de nombreux liens entre les Antilles et le Québec. Dans ce livre, on suit ses activités au quotidien, on suit les efforts de ceux qui ont oeuvré à l’essor du Centre, on voit débuter la carrière des chercheurs et des enseignants qui s’y sont formés, et on découvre certains de leurs travaux.
Mais ce livre dépasse le cas particulier du centre de recherche de Fonds St-Jacques, pour devenir l’étude du milieu de la recherche.

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Les vingt ans de « Recherches en Esthétique »

— Par Pierre Juhasz —

recherches_esthetique_01-20La revue Recherches en Esthétique, avec son vingtième numéro, fête sa vingtième année d’existence. Étant un fidèle lecteur de cette revue depuis sa naissance et contribuant, depuis cinq ans, par des articles ou des recensions, à alimenter ses pages, je souhaite, par les quelques lignes qui suivent, participer à cette célébration en évoquant, à travers les vingt numéros parus, ce qui constitue, à mes yeux, la très grande qualité de cette revue et, dans le champ des publications sur l’art, son unicité. Célébration que je souhaiterais sous le signe, non d’une commémoration, mais, comme le dirait Walter Benjamin, d’une remémoration, afin que se dessinent – en plasticien que je suis – les contours du territoire et des horizons ouverts et couverts par Recherches en Esthétique, afin d’esquisser brièvement l’histoire et la géographie qui lui ont donné naissance.

En tant qu’enseignant d’arts plastiques, en tant que plasticien et aussi, parfois, critique d’art, ma réflexion porte sur l’enseignement artistique, sur l’approche discursive des œuvres d’art et plus généralement sur les questions relatives à l’art. C’est ainsi qu’à travers les numéros successifs, l’occasion m’a été donnée de m’interroger sur l’imprévisible dans l’enseignement artistique, sur l’insolite dans l’œuvre de Jean-Jacques Lebel, sur la notion de trouble dans l’Assomption du Titien ou encore, de me pencher sur la question de l’engagement dans l’œuvre de Joan Fontcuberta, ou encore, j’ai eu l’occasion de présenter, dans le dernier numéro, le très bel ouvrage de Jean Lancri sur Etant donné de Duchamp : De l’ombre chez (ou sur) Marcel Duchamp.

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« Penser le nazisme » : Johann Chapoutot publie La loi du sang.

la_loi_du_sangDevant l’ampleur et le caractère inédit des crimes nazis – qu’ils soient collectifs ou individuels –, les historiens butent sur la causalité profonde, qui reste obscure.
Ces comportements monstrueux s’appuient pourtant sur des fondements normatifs et un argumentaire juridique qu’il faut prendre au sérieux. C’est ce que fait ici Johann Chapoutot dans un travail de grande ampleur qui analyse comment les philosophes, juristes, historiens, médecins ont élaboré les théories qui faisaient de la race le fondement du droit et de la loi du sang la loi de la nature qui justifiait tout : la procréation, l’extermination, la domination.
Une profonde intimité avec une immense littérature publique ou privée – correspondances, journaux intimes –, avec la science et le cinéma du temps, rend sensible comment les acteurs se sont approprié ces normes qui donnent un sens et une justification à leurs manières d’agir. Comment tuer un enfant au bord de la fosse peut relever de la bravoure militaire face à l’ennemi biologique.
Si le métier d’historien consiste à comprendre et non à juger, ou à mieux comprendre pour mieux juger, ce livre jette une lumière neuve et originale sur le phénomène nazi.

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« Le Code Noir. Idées reçues sur un texte symbolique » de J-F Niort

code_noir_jf_niortPrésentation éditeur
Texte fondateur du droit colonial français, le Code Noir a suscité beaucoup de confusions et d’erreurs, à commencer par son nom lui-même… Code Noir ou Édit de mars 1685? Écrit par Colbert? Dont il n’existerait qu’une seule version? Qui aurait réduit les esclaves à l’état de chose? …

Présentant les acquis des recherches historiques récentes, cet ouvrage corrige un certain nombre d’idée s reçues sur le Code Noir dont on n’a d’ailleurs toujours pas retrouvé à ce jour l’original aux Archives nationales.
Auteur
Jean-François Niort , historien du droit colonial et spécialiste du Code Noir, est maître de conférence HDR en Histoire du droit, à la Faculté des Sciences juridiques et économiques de la Guadeloupe.

Sommaire
Avant-propos de Myriam Cottias
Préface de Marcel Dorigny
Introduction
« Le Code Noir a été écrit par Colbert. »
« Le Code Noir est le véritable nom de l’Edit de mars 1685. »
« Le Code Noir existe en une seule version. »
« Le Code Noir ne concerne que les esclaves. »
« Le Code Noir fait de l’esclave une chose. »
« L’esclave dans le Code Noir n’a pas de personnalité juridique.

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« Le chant du divers » de Manuel Norvat

Introduction à la philopoétique d’Édouard Glissant

le_chant_du_diversL’oeuvre d’Édouard Glissant est réputée difficile. Sa textualité résolument opaque déroute en des traces imprévisibles. C’est que Glissant fait appel à l’imaginaire des genres tant dans sa version canonique (roman, théâtre, poésie, essai) que dans le recours à la poétrie : une forme d’expression non fixée toute de poétique et de poterie, de terre et de langage.
Aussi l’oeuvre de Glissant est-elle toujours à venir et puissamment magmatique. De surcroît, Glissant ne semble pas assigné à résidence dans une spécialité puisqu’il convoque à sa guise la littérature et les autres domaines de la création, mais aussi les sciences et les savoirs de l’humain : histoire, anthropologie, sociologie, économie et philosophie.
D’où parle Glissant ? De quel point de vue ? De quel territoire de la pensée et de la création ? Ces questionnements interrogent le discours glissantien. Cet inextricable de l’oeuvre de Glissant réclamant un lecteur exigeant et sensible n’est pas inexplicable : c’est un plain-chant articulé autour du souffle du Divers. C’est de là que proviennent les sources multiples de la matière littéraire et réflexive d’Édouard Glissant : une philopoétique d’où s’énoncent les ritournelles conceptuelles et intuitives d’une vision du monde.

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L’empathie, nouvelle lumière du Monde

— Par Guy Flandrina —

pour_les_musulmansDans son dernier livre : « Pour les musulmans »1, le journaliste Edwy Plenel ouvre la porte du « plus large, contre le plus étroit ».

Il y plaide pour « l’écho divers du monde, le respect du pluriel et le souci des autres ». Il se refuse à accepter que l’on réduise la communauté humaine « à des identités assignées, à des places déterminées, à origines immuables, à nations fermées sur elles-mêmes ».

Le président de Médiapart clarifie les origines et les fondements de la laïcité, tout en pourfendant la construction des boucs émissaires que sont les musulmans, les noirs, les roms, les minorités, les opprimés.

L’auteur rappelle l’ouverture et la lucide générosité de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 : « les hommes naissent libres et égaux en droits ». Il ne se prive pas de rappeler son Préambule : « sans distinction de race, de religion, ni de croyances »… rempart plus que jamais d’actualité !

La naissance d’un homme et son histoire personnelle font le lit de sa perception du Monde, de son rapport à l’Autre.

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Le maître, l’esclave et l’Etat

— Par Philippe-Jean Catinchi —

libres_&_sans_fersLe 5 mars 1848, une semaine à peine après la chute de la monarchie de Juillet et la proclamation de la IIe République, se mettait en place une commission d’abolition de l’esclavage chargée de préparer l’émancipation, sous la présidence de Victor Schœlcher. Dès la première réunion, le 6 mars, les décrets sont en chantier, qui aboutiront le 27 avril à la pleine reconnaissance des  » nouveaux citoyens  » ou  » nouveaux libres « .

Mais qui sont ces femmes et ces hommes dont le sort se joue à Paris, fixés dans ces territoires lointains, Guadeloupe, Martinique, Réunion ? Plongeant dans les archives judiciaires où la  » parole de l’esclave  » s’entend parfois, sous la plume des greffiers, lorsque larcins et meurtres conduisent à la recueillir, Frédéric Régent, Gilda Gonfier et Bruno Maillard, qui travaillent respectivement en métropole, à la Guadeloupe et à La Réunion, relèvent le défi de l’interroger. Malgré la difficulté de la langue, d’abord. S’ils s’expriment  » libres et sans fers « , selon l’expression judiciaire consacrée, les esclaves le font dans des idiomes que les sources ne respectent pas, traduisant avec le piège d’équivalences linguistiques peu sûres la plupart des propos, sauf à conserver une formule originale pour le piquant du pittoresque.

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