— Par Claude Ribbe —
Établie dès le XVIIe siècle dans la partie occidentale d’Haïti (l’île aux montagnes), rebaptisée Hispaniola (la petite Espagne) par Christophe Colomb, la colonie française de Saint-Domingue, où l’on produisait du sucre et du café, était devenue, à la veille de la Révolution, le modèle envié de la colonisation européenne. Mais cette prospérité reposait entièrement sur l’esclavage et la déportation massive de centaines de milliers d’Africains.
Quand, en 1791, les colons voulurent secouer le joug de la métropole qui se réservait leurs marchandises grâce au privilège de l’Exclusif, les esclaves en profitèrent pour se soulever et les « sang-mêlés » revendiquèrent la citoyenneté française. Ils l’obtinrent en 1792, l’esclavage étant aboli sur place l’année suivante, à la faveur de la guerre contre l’Angleterre et l’Espagne.
Après s’être emparé du pouvoir, Napoléon Bonaparte, une fois la paix rétablie en Europe, voulut abattre son rival Toussaint Louverture, qui était devenu le chef incontesté de Saint-Domingue et venait d’adopter une constitution accordant l’autonomie à la colonie. Une armée de vingt mille hommes débarqua en février 1802.
Malgré quelques succès militaires et l’enlèvement de Toussaint Louverture, l’expédition française, à laquelle le Premier consul demanda bientôt de rétablir l’esclavage, fut décimée par la fièvre jaune et se heurta à un peuple qui combattait pour sa liberté et son indépendance.