— Par Maurice Ulrich —
L’historien Guillaume Payen, avec une biographie, et la philosophe italienne Donatella Di Cesare éclairent encore chacun à leur manière la profondeur de l’antisémitisme du philosophe allemand et ses rapports au nazisme.
Un peu plus de soixante-dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale et cinquante ans après sa mort, où en est-on avec Martin Heidegger, longtemps considéré par nombre de penseurs et non des moindres comme le plus grand philosophe du XXe siècle, ayant en tout cas connu pendant quelques décennies une réception étonnamment positive en France ? Deux nouveaux ouvrages viennent de paraître qui éclairent d’une façon toujours plus crue ce que furent son antisémitisme et son rapport au nazisme. Guillaume Payen, docteur en histoire, publie chez Perrin une biographie très documentée, Martin Heidegger, catholicisme, révolution, nazisme, et la traduction française de Heidegger, les juifs, la Shoah, de la philosophe italienne Donatella Di Cesare, publié en 2014 en italien, vient de paraître au Seuil. L’enjeu de ces nouveaux travaux, faut-il le souligner, n’est pas réservé à la philosophie. L’œuvre de Heidegger, qui avait adhéré au parti nazi en 1933 en même temps qu’il devenait recteur de l’université de Fribourg, est contemporaine des deux guerres mondiales et de l’extermination systématique de 6 millions d’hommes, de femmes et d’enfants au seul motif qu’ils étaient juifs.