Catégorie : Sciences Sociales

Sciences sociales : nouveautés du 28 juin 2020

L’histoire des sciences sociales débute avec le siècle des Lumières, autours de 1650, lorsqu’une révolution au sein de la philosophie naturelle a changé le cadre de référence avec lequel les individus jaugeaient de la scientificité. Les sciences sociales sont issues de l’éthique de cette époque et ont été influencées par le long XIXe siècle ( la révolution industrielle et la révolution française, notamment). Les sciences sociales se sont développées à partir des sciences (expérimentales et appliquées), de savoirs existants, de pratiques normatives, et ce, dans un élan et une vision de progrès social lié à des groupes sociaux donnés.

Le terme de science sociale apparaît pour la première fois en 1824 dans l’ouvrage de William Thompson (1775-1833), An Inquiry into the Principles of the Distribution of Wealth Most Conducive to Human Happiness; applied to the Newly Proposed System of Voluntary Equality of Wealth.

Les débuts des sciences sociales au 18e siècle se reflètent dans la grande encyclopédie de Diderot, avec des articles de Jean-Jacques Rousseau et d’autres pionniers. L’émergence des sciences sociales se reflète également dans d’autres encyclopédies spécialisées. La période moderne a vu la science sociale être utilisée pour la première fois comme un champ conceptuel distinct.

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En France, la carrière des Noirs se heurte à un mur

Les décideurs tendent encore, par réflexe, à s’entourer de personnes qui leur ressemblent, à savoir de Blancs.  Les rares qui ont réussi à percer le plafond de verre blanc sont souvent des enfants des élites africaines.

— Par Isabelle Chaperon et Véronique Chocron —

Adieu, le portrait d’Uncle Ben’s sur les paquets de riz, celui d’Aunt Jemima sur les préparations pour pancakes. Les industriels américains Mars, PepsiCo ou encore Colgate-Palmolive ont promis, ces derniers jours, de purger leurs marques de tout « stéréotype raciste ». Google, Apple, Bain Capital se sont engagés à débourser 100 millions de dollars (88,6 millions d’euros) pour lutter contre les discriminations raciales. Même le très puissant Jamie Dimon, patron de JPMorgan, a posé un genou à terre devant les photographes, en soutien au mouvement #BlackLivesMatter (« les vies noires comptent »).

Depuis le calvaire éprouvé par George Floyd, asphyxié sous le poids d’un policier blanc à Minneapolis (Minnesota), le 25 mai, les entreprises américaines multiplient les gestes pour affirmer leur volonté de prendre en compte un appel à la justice qui résonne dans le monde entier. « Avec la mise à mort de George Floyd, tous les Noirs du monde ont eu le sentiment qu’un genou était posé sur leur cou.

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Notre Martinique aujourd’hui. Sera-t-on Martiniquais demain ?

Par Guy Lordinot —

« Entre l’intégration et la désintégration, il y a place pour l’invention. »
Aimé Césaire

Aujourd’hui, les Martiniquais sont en plein désarroi. Rien ne va plus.
Symptôme inquiétant : plus de trois mille jeunes émigrent chaque année vers d’autres pays afin de se forger, ailleurs, un avenir répondant à leurs souhaits, que la Martinique est incapable de leur offrir.

Conséquence : la population vieillit. Dans le même temps, l’arrivée régulière d’une population de race blanche montre qu’un génocide par substitution (expression d’Aimé Césaire) est en marche.

Le désarroi s’amplifie, certains cherchent les responsables de cette situation alarmante.
Pour eux, Victor Schœlcher, qu’ils considèrent comme un esclavagiste, en est le responsable. Décision est prise de démolir les deux statues érigées en son honneur. L’opération est menée le 22 mai 2020 par des hommes et des femmes, jeunes pour la plupart qui revendiquent leur geste symbolique à visage découvert face aux autorités de l’Etat.
Disparu depuis 1893, l’intéressé ne peut évidemment pas réagir. Il faut par conséquent trouver d’autres personnalités à incriminer, par exemple les békés, héritiers des esclavagistes. On les cloue au pilori et on s’attaque aux symboles de leur puissance économique.

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Des médecins cubains arrivent en renfort en Martinique, une première en France

Les médecins seront confinés pendant une semaine, avant de pouvoir prendre leur poste. Ils resteront trois mois sur place.

Quinze médecins cubains sont arrivés, vendredi 26 juin, en Martinique, pour aider l’île des Caraïbes à faire face à l’épidémie de coronavirus et pallier la pénurie de professionnels de santé. Il s’agit d’une première pour la France.

Les docteurs sont arrivés à l’aéroport du Lamentin, avec un drapeau cubain, par un vol spécial. Leur mission, qui durera trois mois, servira à couvrir certaines spécialités dont la pneumologie, l’infectiologie, la radiologie ou encore la médecine d’urgence.

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La France devient ainsi le troisième Etat européen, après l’Italie et Andorre, à recevoir l’aide directe de professionnels de santé cubains. L’île socialiste a mis en place de longue date l’exportation de services médicaux, qui constitue l’un des moteurs de son économie.

Cette équipe de médecins compte un pneumologue, deux spécialistes en médecine interne, un infectiologue, deux anesthésistes, trois radiologues, deux néphrologues, un hématologue, un urgentiste, un chef de brigade et un directeur administratif.

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Le Cénacle 2020

Les 11, 23 et 24 juillet 2020

Cette année [le] rendez vous tant attendu aura lieu mais il s’organise autrement et sera de plus courte durée.
Votre espace de discussion vous accueille les 11, 23 et 24 juillet les thèmes abordés seront tout aussi intenses et captivants.
Chers auditeurs et amis du Cénacle nous débuterons l’édition 2020 autour de ce qui nous fonde, nos valeurs culturelles le Samedi 11 Juillet à 18h30 sur le thème: «Les Danses en ligne et en cercle dans le Danmyé-Kalennda – Bèlè.» avec les militants culturels de l’AM4
Nous avons grand besoin de nous retrouver culturellement après ces temps de confinement.
Puis le Jeudi 23 et Vendredi 24 Juillet le cénacle abordera la question des statues dans notre Histoire la parole sera donnée à tous tandis que des éléments de réponses seront exprimés par des historiens, martiniquais et d’ailleurs psychanalystes, politiques de toutes obédiences.
Venez nombreux car votre point de vue compte sur ce qui secoue fortement une grande partie du monde et nous avec.
Compte tenu des contraintes sanitaires, pour mieux évaluer notre jauge et organiser les soirées l’inscription est indispensable jusqu’au 19 juillet 2020.

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Baisse de motivation des étudiants, interactions « au point mort » avec les enseignants : le ras-le-bol des cours en ligne

Avant une rentrée universitaire qui s’annonce hybride, les enseignants s’alarment de la perte du « lien » pédagogique.

Par Alice Raybaud —

Chaque semaine depuis la mi-mars, Alexandre Mayol, maître de conférences en sciences économiques à l’université de Lorraine, allumait son ordinateur, se branchait sur Zoom et saluait ses étudiants. Ou plutôt, des dizaines d’écrans noirs : autant de petits carrés sombres que d’étudiants, invisibles. Les micros étaient fermés, les caméras éteintes afin d’éviter de saturer le réseau, et pour respecter l’intimité d’un chez-soi devenu brusquement lieu d’études. Puis, dans un « silence d’outre-tombe », Alexandre Mayol commençait son cours. « Mon monologue », rectifie l’enseignant, saisi par la désagréable impression de « parler dans le vide ».

Une situation inédite

Ces mots sont dans toutes les bouches : interaction « au point mort »« frustration », voire « tensions » manifestes… Lorsque, en mars, les universités et grandes écoles ont basculé vers des cours en ligne à cause de l’épidémie de Covid-19, la relation pédagogique entre enseignants et étudiants a en effet dû s’adapter, tant bien que mal et sans préparation, à cette situation inédite.

Un modèle qui pourrait se poursuivre en septembre, si la situation sanitaire ne permet pas un retour normal dans les établissements.

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Au Brésil, la redécouverte des grandes figures noires qui avaient été « blanchies »

Toute référence à la couleur de peau de Joaquim Maria Machado de Assis, monument national de la littérature, a, notamment, longtemps été proscrite.

Lettre de Rio de Janeiro

C’est à l’époque du baccalauréat, vers 17-18 ans, qu’André Tadao Kameda a découvert que le plus grand écrivain de son pays était noir. « Jusque-là ce n’était pas très clair, se souvient le jeune homme. Machado de Assis est un immense classique au Brésil, mais le sujet n’avait jamais vraiment été abordé en classe. Cette année-là, le professeur a finalement mentionné sa couleur de peau… mais sans s’attarder sur cet aspect. »

Comment aurait-il pu s’en douter ? Sur la photo officielle de l’auteur, illustrant la plupart de ses livres, Joaquim Maria Machado de Assis a le teint aussi pâle que sa chemise : visage surexposé, cheveux lissés, lèvres masquées par la barbe. « Difficile de trouver sur ce cliché la moindre trace de ses origines africaines ! », remarque André, aujourd’hui âgé de 37 ans, et qui consacre une thèse au grand auteur.

En vérité, le traitement réservé à « Machado » (comme on l’appelle) ne doit rien au hasard : l’écrivain, comme bien d’autres personnalités noires ou métisses, a vu son portrait volontairement « blanchi », résultat d’un racisme odieux à l’œuvre au début du XXe siècle.

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« La culture de la croissance ; les origines de l’économie moderne », de Joel Mokyr

À propos

On a beaucoup écrit sur la Révolution industrielle, ses lieux et ses étapes. Ce livre-ci prend le problème tout autrement. Il développe les conditions culturelles de cette révolution technologique et sociale. L’auteur, Joel Mokyr, professeur à Princeton et économiste parmi les nobélisables, est en même temps un historien de l’économie dont la réputation est internationale. Pourquoi la Révolution industrielle a-t-elle eu lieu en Europe et pas en Chine ou au Moyen Orient dont les conditions intellectuelles et sociales pouvaient faire des régions à prétention industrielle ? Pour l’auteur, le mérite de l’Europe n’est pas dans l’économie de marché ni dans l’innovation technologique mais dans une culture de la croissance qui s’enracine dans deux raisons, d’une part la fragmentation des États et des rivalités internationales et d’autre part, une République des sciences parallèle et intérieure à la République des Lettres. Les vraies raisons du développement européen tiennent à une forme de libéralisme qui fermente de 1500 à 1700 et s’épanouit avec les Lumières.

Traduction PIERRE-EMMANUEL DAUZAT 

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D’Isaac Newton à Francis Bacon : comment les intellectuels ont été à l’origine de la croissance économique

Dans un essai érudit, l’historien Joel Mokyr voit l’innovation intellectuelle comme la source de l’essor économique moderne de l’Europe.

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La crise sanitaire a accentué la sous-représentation des femmes dans les médias

Selon deux études du CSA et de l’INA, la crise du coronavirus a montré que les journalistes de télévision et de radio privilégient encore largement les hommes lorsqu’ils ont besoin d’une parole experte.

Des femmes interrogées en tant qu’infirmières ou mères de famille, mais très peu en tant qu’expertes. Deux études du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de l’Institut national de l’audiovisuel (INA), publiées mardi 23 juin et portant sur la représentation des femmes à la télévision et à la radio, montrent que la crise due au coronavirus a conforté la vision sexiste des rôles dans la société.

Pour son étude, le CSA a épluché près de quatre-vingt-neuf heures de programmes de télévision et de radio, soit un total de 2 962 intervenants sous diverses formes (plateaux, duplex et reportages sur TF1, France 2, France 5, M6, BFM-TV, LCI, France Inter et RTL) entre les mois de mars et mai. « La parité est presque atteinte pour les [présentateurs et présentatrices] et les journalistes », mais « des déséquilibres perdurent dans d’autres catégories, et en particulier dans celle des [experts et expertes] », constate l’autorité.

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L’honneur perdu de Maxette Pirbakas et la tentation du racialisme aux Antilles !

—  ¨Par Jean-Marie Nol, économiste —

Le vote de l’eurodéputée guadeloupéenne maxette Pirbakas s’est portée « contre » la résolution reconnaissant la traite transatlantique comme un crime contre l’humanité. C’était le vendredi 19 juin à Bruxelles. Plusieurs personnes en Guadeloupe et Martinique se sont émus qu’une guadeloupéenne ait pu porter sa voix contre un vote du parlement européen reconnaissant l’esclavage comme étant un crime contre l’humanité. L’expression de cette colère contre madame Pirbakas qualifiée par certains à dessein d’origine indienne, souligne la présence dans la société d’un système de différenciation et de hiérarchisation racialisé. C’est un système invisible pour les personnes qui correspondent à ce que l’on définit comme la norme, en l’occurrence celles dont les ascendants sont d’origine africaine et qui sont largement majoritaire en Guadeloupe et Martinique .

Préjugés et frustrations nourrissent déjà le racisme aux Antilles.

Un événement tragique, la mort de George Floyd aux Etats-Unis, a ouvert de nouveau un espace public pour ces discussions. L’attention médiatique de la résurgence de la problématique raciale est inédite dans la période contemporaine en France, voire à un moindre degré en Guadeloupe et Martinique .

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Le Covid-19 pénalise l’emploi des femmes

— Par Véronique Dupont (AFP) —

Licenciées ou contraintes de démissionner pour s’occuper de leurs enfants privés d’école, les femmes ont été frappées de manière disproportionnée par l’épidémie.

Elles perdent leur travail, démissionnent ou s’occupent plus des enfants privés d’école que les hommes: le choc économique massif de la pandémie de coronavirus a des allures de grand bond en arrière pour l’emploi des femmes. « Les femmes, à cause de leur surreprésentation dans le secteur des services, ont été frappées de manière disproportionnée par le Covid-19 », souligne C. Nicole Mason, directrice de l’Institute for Women’s Policy Research, un centre de réflexion américain. « Au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, les femmes ont plus de chances d’avoir perdu leur emploi que les hommes », qu’elles soient licenciées ou contraintes de démissionner pour s’occuper de leurs enfants privés d’école, renchérit Chris Rauh, professeur d’économie à l’université de Cambridge, interrogé par l’AFP.

Les mères confinées plus sollicitées que les pères

Elles sont plus présentes dans les emplois précaires ou les secteurs particulièrement frappés par les mesures de confinement instaurées pour lutter contre le coronavirus, comme la restauration, l’hôtellerie, l’événementiel, les salons de coiffure, etc.

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Coronavirus : en Guyane, le pic de l’épidémie attendu « entre la deuxième et la troisième semaine de juillet », selon l’ARS

L’épidémie de coronavirus est toujours très active en Guyane, où le nombre de nouveaux cas augmente tous les jours. La directrice de l’Agence régionale de santé craint que ce ne soit que « le début de la montée de l’épidémie ».

La Guyane se prépare à un « afflux massif dans les hôpitaux » alors que le nombre de nouveaux cas augmente tous les jours. « Le virus arrive dans des zones, dans des sortes de réservoirs dans lesquels il peut accélérer très fortement », explique lundi 22 juin sur franceinfo Clara de Bort, directrice de l’Agence régionale de santé. La proximité avec le Brésil, l’un des épicentres de l’épidémie, y est pour beaucoup. Le pic est attendu pour la “deuxième ou troisième semaine de juillet”, selon Clara de Bort.

franceinfo : Comment expliquez-vous cette soudaine accélération de la circulation du virus depuis dix jours en Guyane ?

Clara de Bort : Le virus arrive dans des zones, dans des sortes de réservoirs dans lesquels il peut accélérer très fortement, dans des quartiers densément peuplés, avec des familles très nombreuses et la difficulté à respecter les gestes barrières.

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Déboulonnage des statues : « L’anachronisme est un péché contre l’intelligence du passé »

Collectif

Face à la « passion justicière » de certains, les historiens Jean-Noël Jeanneney, Mona Ozouf, Maurice Sartre, Annie Sartre et Michel Winock appellent à « fonder une culture partagée propice aux combats futurs ».

La fièvre iconoclaste qui s’est emparée d’un certain nombre de groupes épris de passion justicière, projetant de déboulonner les statues de certaines figures historiques, de débaptiser des lieux publics, de changer le nom de rues et d’établissements scolaires, a paru d’abord dérisoire. Mais sa contagion serait un danger pour les principes républicains.

Que la chute d’une dictature appelle un peuple à renverser spontanément et à effacer les représentations des tyrans : on fait plus que le comprendre, on a pu en être joyeux, souvent, on espère pouvoir l’être encore demain, tout autour de la Terre. En revanche, en démocratie, pareille initiative revient aux élus du peuple, quel que soit le niveau de leur responsabilité.

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Dans tous les cas, il appartient aux élus et aux gouvernants qui sont responsables devant l’opinion de prendre garde à une idée simple. Il n’est pas seulement absurde, il est néfaste de s’abandonner à un danger majeur que les historiens connaissent bien.

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Coronavirus : le FMI prévoit une crise plus sévère que prévu, la France parmi les plus touchés

Le FMI table désormais sur une contraction du PIB mondial de 4,9 % contre 3 % en avril. Toutes les régions du monde sont concernées par ces projections pessimistes.

Une « crise pas comme les autres », bien pire que prévu, et une reprise plus lente qu’espéré : les prévisions du Fonds monétaire international (FMI) sont alarmistes. L’économie mondiale va cumuler plus de 12 000 milliards de dollars de perte en 2020 et 2021 à cause de la pandémie due au coronavirus, estime l’institution de Washington, ce mercredi.

Gita Gopinath, son économiste en chef, a dévoilé une prévision de récession de 4,9 % cette année. C’est bien pire que les 3 % anticipés en avril en plein cœur de la pandémie, quand le FMI soulignait déjà qu’il s’agissait de la pire crise depuis la Grande Dépression des années 1930.

Crise très sévère en France et en Europe

L’Europe, qui a instauré des confinements sévères, est de loin la région la plus touchée. Pour les pays de la zone euro et le Royaume-Uni, la contraction du Produit intérieur brut (PIB) est vertigineuse : -10,2 %.

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« Ce qui dérange, c’est le profil de ceux qui demandent le déplacement des statues de Colbert »

— Par Léonora Miano, écrivaine —

Selon l’écrivaine Léonora Miano, satisfaire la demande de citoyens « devenus français en raison d’un crime contre l’humanité », l’esclavage colonial, ne ferait pas pour autant disparaître Jean-Baptiste Colbert des livres d’histoire.

Tribune. Les statues meurent aussi. Nous le savons depuis le film de Chris Marker, Alain Resnais et Ghislain Cloquet. Diatribe anticolonialiste sur le pillage des artefacts subsahariens, Les statues meurent aussi (1953) évoque le ravage intime que constitua le fait de détourner ces œuvres de leur fonction initiale pour les inhumer dans les musées français. Le film parlait d’une profanation. Il fut interdit avant d’être présenté, onze ans après sa création, dans une version tronquée par la censure.

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Que les statues meurent, la République l’avait su avant 1953. Comme souvent dans l’histoire, on s’était appliqué à soi-même les méthodes que l’on irait parfaire au loin. On avait abattu ses propres totems, vandalisé ses propres mausolées. La République naissante avait démonté nombre de statues royales en 1792, avant d’éventrer, en octobre 1793, le tombeau des monarques. Du passé, on faisait table rase.

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Visé par une plainte pour viol, l’avocat Alex Ursulet placé en garde à vue

Me Ursulet est visé par une enquête préliminaire pour « viol et harcèlement sexuel » ouverte en octobre dernier par le parquet de Paris. Il a été placé sous le statut de témoin assisté à l’issue de sa garde à vue.

— Par Michel Deléan —

L’avocat Alex Ursulet, 62 ans, a été placé en garde à vue mardi 23 juin au matin à Paris dans une affaire de viol, selon des informations obtenues par Mediapart. Une plainte pour « viol et harcèlement sexuel » le visant personnellement avait été déposée le 25 septembre dernier au parquet de Paris par une avocate de 26 ans, ancienne stagiaire de Me Ursulet. La jeune femme avait versé des copies de SMS et des attestations écrites de témoins à l’appui de sa plainte, rédigée par l’avocat Thibault Laforcade.

Le parquet de Paris a ouvert fin octobre une enquête préliminaire, qui a été confiée aux policiers parisiens de la 3e division de police judiciaire (DPJ). Me Ursulet, qui est présumé innocent, conteste catégoriquement les accusations de la jeune avocate, et a annoncé le dépôt de plusieurs plaintes pour contre-attaquer.

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UFM : 2 mois ½ d’accompagnement des femmes en situation de confinement. Quel bilan ?

Du 17 mars au 5 juin, l’équipe de la Maison de Solange de l’UFM s’est mobilisée pour poursuivre l’accueil et l’accompagnement des femmes en difficulté et victimes de violences à distance.

Quel bilan peut-on tirer de cette période ?

Hélène, la responsable du Pôle Accueil et accompagnement de l’UFM, nous en parle.

  • Notre équipe s’est organisée pour assurer le meilleur accueil téléphonique possible pour les femmes : Une écoute et un dialogue pour installer la confiance, malgré la distance. Une disponibilité plus grande avec des horaires élargis, le rappel systématique des femmes déjà connues, mais aussi une attention encore plus grande sur les conditions du confinement : solitude, face à face avec le conjoint, difficultés financières, enfants, danger immédiat, entourage …
  • Nous avons eu une augmentation du nombre d’appels pendant cette période : 448 (234 à la même période en 2019). Si nous comptons tous les échanges téléphoniques de la période, nous en sommes à … 2 217, ce qui est énorme !

Nous avons eu à gérer des situations d’urgence, femmes mises à la porte par leur conjoint, par exemple.

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Lettre ouverte à Macron : 31 militantes réclament « la fin des violences » faites aux femmes au travail

Dans cette lettre ouverte, une trentaine de femmes responsables d’organisations syndicales, associations et ONG demandent au Président de la République d’agir contre les violences sexistes au travail. 

Voici leur lettre ouverte : « Monsieur le Président, si la France fait face à la crise sanitaire, c’est notamment grâce à l’engagement des femmes : en première ligne pour assurer les activités essentielles, en télétravail tout en permettant la continuité pédagogique de leurs enfants, et auprès de nos aînés dont elles assurent majoritairement la prise en charge… Le confinement a aussi entraîné une augmentation des violences domestiques, une hausse de plus de 30% de signalements ayant ainsi été constatée. Pourtant, à l’heure du déconfinement, les femmes pourraient être – à nouveau – oubliées, sommées de remiser leurs revendications pour ne pas accroître les difficultés économiques des entreprises. Un jour d’après comme avant, en pire? 

Ce 21 juin, il y a un an, l’Organisation Internationale du Travail, adoptait la première norme internationale concernant l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail. Arrachées par la mobilisation des femmes et le mouvement syndical, la convention et la recommandation sont ambitieuses et novatrices et constituent le premier texte international contraignant visant à lutter contre le harcèlement et les violences au travail.

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Des mesures pour mettre fin à la cicatrice mémorielle qu’est l’esclavage

— Par Noah Fléchelles —

Il est temps que la France regarde toute son histoire dans les yeux. Le climat de protestation mondial généré par la mort de George Floyd aux États-Unis doit pouvoir nous permettre de guérir les cicatrices mémorielles encore bien présentes dans notre société aujourd’hui. Cessons ainsi de prétendre que la grande différence entre l’histoire américaine et celle de la France est que l’une d’elles s’est construite sur une société esclavagiste alors que la nôtre, non. Cela est tout simplement faux. Ce serait oublier le passé bien chargé des territoires ultramarins qui font pourtant « la fierté de la France » comme aiment à le rappeler chaque nouveau Président de la République. La Martinique, la Guadeloupe, la Réunion, et la Guyane sont tant de territoires qui ont été marqués profondément par les crimes contre l’humanité que sont l’esclavage et la traite négrière. Ces territoires ont, comme les États-Unis, été construits sur cette atrocité qu’est l’esclavage, et l’omettre ne fait que renforcer un sentiment déjà bien présent de racisme.
Ce serait aussi oublier que la France s’est largement enrichie sur le dos de ces esclaves.

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L’heure de nous-mêmes

— Par Christian Rapha, Maire de Saint-Pierre —

Deux statues de Victor Schœlcher détruites, des écoles qui peinent à rouvrir malgré le déconfinement et le contrôle de la situation sanitaire, des coupures d’eau intempestives sur tout notre territoire qui privent une grande partie de la population martiniquaise du service qu’elle est en droit d’attendre notamment en période de crise sanitaire, des transports qui fonctionnent par intermittence, le dossier du chlordécone enkayé alors que de nombreuses propositions concrètes et intéressantes sont formulées par des associations ou des parlementaires, des jeunes agriculteurs en quête de terre pour s’installer alors que 20 000 hectares sont en friche et que la CTM est gestionnaire d’une banque de terres agricoles… notre pays Martinique souffre de maux qui semblent hors de portée de notre action ! Comme si nous étions impuissants à actionner les manettes du changement de notre quotidien et de notre réalité alors que localement nous n’avons jamais été autant en responsabilité.
Alors qu’une partie des politiques fustigent l’Etat « français », parfois qualifié de colonialiste ou néocolonial, nous avons du mal à assumer pleinement notre responsabilité à l’échelon territorial et local (prérogatives qui sont nombreuses et étendues dans le cadre du statut de collectivité relevant de l’article 73) et à nous rassembler au-delà de nos divergences politiques pour convaincre le cas échéant le dit Etat quand nous estimons que nos intérêts ne sont pas pris en compte.

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Après l’esclavage la Martinique a eu une histoire.

— Par Yves-Léopold Monthieux —

La méconnaissance de l’histoire martiniquaise ne s’était pas limitée à la seule période de la colonisation et de l’esclavage. En effet, depuis les années 1950, avec le retour progressif puis en masse des intellectuels revenus de leurs études, ainsi qu’à la « découverte » du 22 mai 1848, la connaissance de l’histoire de l’esclavage a fait un véritable bond. Sous le magistère d’anciens tels qu’Armand Nicolas, Léo Elisabeth, Edouard Delépine, s’est développée une génération de professeurs d’histoire, tous formés à l’étude de l’esclavage. Le plus connu d’entre eux, l’historien Gilbert Pago, a produit plusieurs ouvrages et n’a pas cessé d’intervenir depuis 50 ans dans les écoles, sur les radios et télévisions, et au cours de conférences diverses. Lui et les autres historiens cités plus haut, en particulier Édouard Delépine1, l’historien et homme politique, ont tous publié le fruit de leurs recherches sur l’esclavage dans des ouvrages, thèses et articles, et participé à des colloques en Martinique et ailleurs. De leurs propres aveux, ces travaux n’ont pas eu le succès escompté auprès de la jeunesse.

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Quand Rosa Parks remplace Colbert dans la dénomination d’un lycée

Ce n’est pas nouveau, mais cela prend une ampleur nouvelle. En effet, la question des emblèmes esclavagistes dans l’espace public se pose, en France comme ailleurs, formulée depuis quelques dizaines d’années par des citoyens  qui demandent le retrait de ces symboles, que ce soit noms de rues ou d’établissements publics et scolaires, statues et monuments mis accusation. Aujourd’hui, l’historienne Jacqueline Lalouette estime quant à elle, dans le journal « Ouest France », qu’il est préférable d’« expliquer plutôt que détruire ».

La Controverse, en Septembre 2017, relevée dans des publications au journal « Le Monde »

— Tribune du CRAN, le 17 septembre : À l’initiative de Louis-Georges Tin, président du CRAN (Conseil représentatif des associations noires de France), et du philosophe Louis Sala-Molin, plusieurs personnalités signent une tribune afin que le nom de Colbert, ministre de Louis XIV, soit retiré de l’espace public.

« (…) Cette exigence suscite chez certains de nos compatriotes une certaine angoisse : jusqu’où, disent-ils, faudra-t-il aller ? La réponse est claire : on ne pourra sans doute pas modifier tous les symboles liés à l’esclavage dans l’espace public, tant ils sont nombreux et intimement liés à notre histoire nationale.

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Le Défenseur des droits dénonce « la dimension systémique » des discriminations en France

Jacques Toubon réclame la création d’un observatoire des discriminations, des campagnes de « testing » et des sanctions pénales « réellement dissuasives » contre les responsables de discriminations.

Contrôles policiers, accès à l’emploi, au logement ou à l’éducation… Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, réclame la création d’un « observatoire des discriminations » et critique « l’insuffisance des politiques publiques » sur cette question, dans un rapport publié lundi 22 juin. Selon lui, il existe une « dimension systémique » des discriminations, notamment racistes, en France qui remet en cause les « droits fondamentaux » de « millions » de personnes et la « cohésion sociale ».

Les personnes d’origine étrangère ou perçues comme telles sont désavantagées dans l’accès à l’emploi ou au logement et plus exposées au chômage, à la précarité, au mal logement, aux contrôles policiers, à un état de santé dégradé et aux inégalités scolaires.Jacques Toubondans un rapport sur les discriminations

Pour le Défenseur des droits, ces « discriminations ne sont pas le résultat de logiques individuelles, de quelques DRH qui refusent d’embaucher des personnes noires ou arabes », mais « c’est tout le système qui est en cause ».

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Rompre avec l’utilitarisme

— Par Ibrahima Fall —
Le consultant dénonce une philosophie du management qui, en restant rivée sur le court terme, a failli face à la complexité et aux interactions humaines lors de la crise sanitaire L es conséquences d’un management réduit à sa plus petite expression – la minimisation des coûts et la maximisation des gains – s’exprimaient jusqu’ici au travers du stress, du burn-out, de la perte de sens du travail, plus tragiquement de suicides. Mais la crise sanitaire donne à voir une nouvelle perspective. La « managérialisation » de l’action publique a, par exemple, fait perdre de vue qu’un État souverain ne pouvait pas déléguer à un autre pays, à l’autre bout de la planète, par l’intermédiaire d’entreprises, la fabrication de médicaments de base nécessaires à la santé de ses citoyens. A court terme, les gains financiers d’un tel choix sont réels, mais dans le temps long, une crise comme celle du coronavirus en montre les limites.
Ainsi, le « bon » management finit par exclure, au profit de l’efficient, tout ce qui ne peut pas être saisi par les tableurs : le Vrai, le Juste, le Bien, le Beau.

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Audrey Célestine : « Le problème des violences policières est similaire en France et aux États-Unis »

 — Propos recueillis par Luc Cédelle —

Ceux qui meurent le plus du fait d’interventions de la police sont, ici aussi, issus de quartiers populaires, noirs ou d’origine maghrébine, souligne la sociologue.

Entretien
Audrey Célestine est maîtresse de conférences en sociologie politique et études américaines à l’université de Lille. Elle a notamment publié (Karthala, 2018) et (Textuel, 2018). La Fabrique des identités. L’encadrement politique des minorités caribéennes à Paris et New York Une famille française. Des Antilles à Dunkerque en passant par l’Algérie

Comment percevez-vous la phrase d’Assa Traoré, la soeur d’Adama Traoré, lors du rassemblement parisien du 13 juin contre les violences policières : « Ce qui se passe aux États-Unis, il se passe exactement la même chose en France. Nos frères meurent » ?

Audrey Célestine Dans le cadre d’une mobilisation et dans un contexte international où ce qui se produit aux Etats-Unis est largement publicisé, cette phrase ne me surprend pas. Assa Traoré est dans son rôle lorsqu’elle la prononce. C’est ce qu’on appelle en science politique une extension du cadre, pour construire un pont entre deux situations.

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