— Par Philip Barrett, Sophia Chen et Nan Li —
Trois économistes du FMI se sont penchés sur les pandémies des siècles derniers. Ces crises agissent systématiquement comme des révélateurs et des accélérateurs des problèmes sociaux.
En 1832, Paris est frappée par la grande épidémie de choléra. En quelques mois, la maladie emporte 20 000 personnes dans une ville qui compte alors 650 000 habitants. La plupart des décès surviennent au cœur de la ville, où vivent dans des conditions sordides de nombreux travailleurs pauvres attirés à Paris par la Révolution industrielle. La progression de la maladie avive les tensions de classe, les riches reprochant aux pauvres de propager la maladie et les pauvres pensant qu’on les empoisonne. Bientôt, l’animosité et la colère se portent sur la figure du roi, déjà impopulaire. Les funérailles du général Lamarque, victime de l’épidémie et défenseur des causes populaires, déclenchent d’importantes manifestations contre le gouvernement : ces scènes de rues barricadées sont immortalisées dans Les Misérables de Victor Hugo. Selon les historiens, l’interaction de l’épidémie avec les tensions préexistantes est l’une des causes principales de ce que l’on appelle l’Insurrection républicaine de 1832, et qui peut expliquer à son tour la répression mise en place par les autorités et les révoltes populaires dans la capitale française au dix-neuvième siècle.