Catégorie : Littératures

Poèmes de Mady

Les Agoodjiés

Un lourd silence règne sur kotopka.
Un silence comme un frêle fil trop tendu
quand il casse c’est l’assaut
des cris de guerres mais des cris de femmes
Même combattant comme des lionnes
plongeant sous les pluies de balles
les vieux chasse-pots ne valent pas
les étincelants fusils neufs
Nan Ahouannaton ta bravoure n’empêchera pas votre sang de couler
Puis Abomey tomba

Panama



Porte de l’Amérique du sud
Autrefois tu étais Colombien
de nos jours tu te dis Panaméen
Tu as déjà deux bandes rouge et blanche
serais tu le cinquante-cinquième ?
Te souviens tu de 1989
ce jour où on a spolié ta souveraineté
sous un faux prétexte.

Les embarcations passant en ton sein
ne sont point régis par tes frêles mains
mais par des tentacules dégoulinantes de ketchup.

Ce qu’il est beau de voir sur tes terres
n’est point des vieux élégants arborant des panamas
chapeau que l’on ne voit qu’en étalage
il est beau de rencontrer les indigènes Kuna.

N’y allez pas pour voir de beaux bateaux de beaux chapeaux
mais pour une rencontre humaine.

Gâchis



je distille l’égoïsme
décante l’espérance
j’attends le déluge
ou j’expie mes péchés
dans l’enfer inexpugnable
des suppôts du système

J’exècre, j’excrète
je crache, sur l’épouvantable Babylone
mais je veux y placer un rouage
pour en exprimer
un dividende

j’attends une réponse
je suis prisonnier
derrière ses faux murs
prisonnier qui a une clé

je sors, et j’observe
ce qu’est la côte riche
ils marchent en ligne
avenue Coca-Colone
entre deux Mac dollar

les seuls qui m’ont parlé
m’ont demandé de l’argent
pour le mac feliz

Cela me gêne



La base de leur pensée est l’écu
leurs motivations pécuniaires
Nous avons huit soucis principaux
Nous avons huit douleurs
Au dos, à l’estomac,
aux entrailles, a l’occiput,
au porte monnaie, une à venir ,
à la fierté, au cœur.

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« Puis le choix de l’atome » : Pour une Poétique des Possibles.

 —  par Scarlett JESUS —


Le Gaïac est un bois brun verdâtre très dur. Il est aussi appelé “bois saint” ou “bois de vie” (anglais lignum vitae). On trouve cette essence dans les Amériques tropicales, par exemple dans les Antilles et au Venezuela. Guaiacum officinale et Guaiacum sanctum sont des petit arbres du genre Guaiacum de la famille des Zygophyllacées

 

 

Voici un ouvrage qui mériterait d’être lu par d’autres que les quelques rares privilégiés qui ont eu la faveur d’acquérir ce recueil sorti fin 2010. Un ouvrage qui révèle, à travers une écriture poétique contemporaine originale, un poète guadeloupéen s’inscrivant dans la lignée de MALLARMÉ, le père de la modernité poétique, et de SAINT-JOHN PERSE. Comme lui, ce poète écrit sous un pseudonyme. Il emprunte à MALLARMÉ son prénom, Stéphane, et se dote d’un patronyme quelque peu sibyllin « Od-Ray Gaïac ». Aux prénoms de ses deux parents et au nom d’un arbre des forêts guyanaises, au bois très dur, le gaïac, le poète associe d’autres éléments : un prénom féminin, Audrey, en référence possible avec une muse du 7ème art, Audrey Hepburn ; le nom d’un jazzman, Ray Charles,  précédé d’un curieux Od, peut-être l’abréviation médicale du latin oculus dexter (œil droit).

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Le printemps des poètes 2011 à la bibliothèque Schoelcher

— Par Christian Antourel —

 


 Par Christian Antourel

Chaque année au mois de mars, nous revient cette manifestation attendue dans tout l’hexagone. Intitulé cette année »Année de l’Outre-mer français » chez nous, c’est l’occasion de présenter cinq rencontres littéraires et poétiques, afin de célébrer et faire découvrir la poésie à travers cinq univers  d’auteurs.
Travelling annuel dans  l’histoire de la poésie. Le Printemps des Poètes 13 ème édition, est cette expression sans laquelle des œuvres du plus grand intérêt, resteraient cantonnées au  rôle accessoire et ornemental dans le paysage  littéraire. Au lieu de ce destin auquel  les condamnait le désengagement  d’une certaine presse spécialisée et des lecteurs non informés : Le Printemps des Poètes,  véritable ballet des mots et du geste poétique, s’impose comme le rendez-vous incontournable et promotionnel de la poésie.

 

Les intervenants ;

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WIDAD AMRA

Elle  parvient dans son écriture à recréer une époque, une histoire sociale derrière un  voile d’apparences  et de sonorités pures  jusque dans les entrelacs et les émanations   d’une humanité  à  l’infinie générosité.

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« Borlette, géoposie » de Max Jeanne

— Par Scarlett Jesus —

Max JEANNE : Honneur et respect pour HAÏTI.

par Scarlett JESUS

Haïti est l’objet d’un intérêt tout particulier en Guadeloupe. En décembre, Evelyne TROUILLOT recevait le Prix CARBET pour son roman La Mémoire aux abois. Le mois suivant, le public était invité à applaudir Ayiti, écrit et interprété par Daniel MARCELIN. Enfin, la semaine dernière, Max JEANNE publiait aux éditions NESTOR son quatrième recueil de poésies : Borlette. Ce titre, qui désigne un jeu de hasard à deux chiffres très prisé par les Haïtiens, est une métaphore pour désigner le destin d’un pays sur lequel s’abattent tous les malheurs : misère, cyclones et tremblement de terre meurtrier du 12 janvier 2010.
Le genre poétique auquel se rattache ce recueil est ouvertement affiché : il s’agit de « géopoésie ». Ce terme n’est pas tout à fait nouveau. Utilisé par Italo CARVINO en 1984, il a été repris par un autre écrivain Guadeloupéen, Daniel MAXIMIN, dans un essai, publié au Seuil en 2006, Les Fruits du cyclone, une géopoétique de la Caraïbe. Il désigne une volonté d’exprimer la culture d’une région en rendant compte du rapport particulier des habitants de celle-ci avec leur terre, le « paysage » sur lequel ils vivent.

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« Plantation Massa-Lanmaux », de Yann Garvoz

par MAURICE MOURIER —

 3 mars  2011

 YANN GARVOZ, PLANTATION MASSA-LANMAUX Maurice Nadeau, 312 p., 24 €

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Au XVIIIe siècle, le jeune fils d’un planteur des « colonies », après des études en France qui l’ont mis au contact des idées philanthropiques des Lumières, rentre au pays. La plantation de canne à sucre de son père fonctionne, selon l’ancien système éprouvé, sur la soumission absolue des esclaves au maître. Imprégné d’utopie rousseauiste, Donatien, qui porte le prénom du Divin Marquis, va essayer de moderniser et d’humaniser le domaine. Ce livre étrange, aux deux tiers réussi, raconte son échec.

Voyons d’abord les éléments de la réussite littéraire, qui est souvent très notable. S’agissant d’un texte et non d’une étude historico- sociologique, cette réussite repose, comme il fallait s’y attendre, sur le style. Yann Garvoz, qui est clairement perfectionniste, s’est proposé une gageure : travailler la pâte verbale, abondante et riche, de son livre, en imitant, transposant, pastichant à la fois l’oeuvre sadienne et la prose précise de l’Encyclopédie, de La Nouvelle Héloïse ou (parfois) de Bernardin de Saint- Pierre. Mais cela n’est rien.

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Hommage à Gérald Bloncourt, par Widad Amra, poétesse.

Autour de Gérald Bloncourt.
Intervention à la bibliothèque Schoelcher le Jeudi 17 Février 2011.


 

Monsieur Bloncourt

Je connais votre pays. J’aime votre pays dans ce qu’ il offre de créativité dans une grande diversité, dans ce qu’il offre de résistance dans le temps, dans ce qu’il offre de dignité, et dans ce qu’il dit de l’humanité. Et cela, au delà, de tous les Malgré. Passés et présents.

Mais vous, Monsieur Bloncourt, avec tout le respect que je vous dois, je ne vous connaissais pas.
Jusqu’à ce livre…Jusqu’au hasard amical qui a mis ce livre entre mes mains.
Et je dirais comme Jean Claude Charles, qui a écrit votre préface, mon étonnement.
«  A la fin des années 60, en Haïti, je ne connaissais pas l’existence de Gérald Bloncourt.

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Glissant, poète du partage créole

— Par René de Céccatty —

Depuis des décennies, l’œuvre romanesque et poétique de ce « passeur d’écumes » s’accompagne d’une réflexion complexe, sur l’identité créole, miroir de compréhension de notre monde

 

Édouard Glissant est né en 1928 à Sainte-Marie, en Martinique. Il entreprend des études de philosophie à la Sorbonne en 1946 et vivra à Paris jusqu’en 1965. Docteur ès lettres, il fonde l’Institut martiniquais d’études et une école selon un système alternatif d’éducation. Son premier recueil de poèmes, Un champ d’îles, paraît en 1953. Il publie dès lors régulièrement des pièces de théâtre, des poésies, des essais et des romans. La Lézarde (1958) lui vaut le Prix Renaudot. Il collabore à de nombreuses revues, Présence africaine, Critique, Les Lettres nouvelles. En 1971, il fonde la revue Acoma. De 1982 à 1988, il dirige le Courrier de l’Unesco. Il vit à New York où il tient une chaire de littérature. 

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E. Glissant : continuer nos combat et le débat!

 — par Philippe Pierre-Charles —

 

La foule présente aux cérémonies pour celui qui s’en va, les présences officielles du pouvoir sont une nouvelle preuve des changements de la situation politique aux Antilles. Derrière l’écume des événements en surface, le pays continue de bouger. Le combat passionné d’Edouard Glissant et de tant d’autres, celui du peuple, tout simplement n’est pas vain. Devant sa dépouille prenons l’engagement de poursuivre les combats et de continuer à interroger œœuvre !
 
Notre attachement à Edouard Glissant (E.G. dans la suite) ne résulte pas d’un accord avec tous ses actes, tous ses écrits dont aucun parmi nous n’a lu ni discuté l’intégralité. Penseur infatigable, écrivain puissant, il laisse une œœuvre multiple dont l’exploration doit continuer. D’autant que même devant des désaccords évidents, une complexité fascinante et une opacité irritante, il nous oblige à penser, avec notre propre tète. A penser et à rêver aux cotés des personnages de ses romans qui sont souvent l’illustration étonnante d’une théorie, d’une vision historique. Ainsi pour son idée du peuple martiniquais, synthèse de « l’humus sauvage » des Longoué et du « terreau domestique » des Beluse, synthèse dont l’épaisseur et la richesse comptent autant que les événements emblématiques de notre histoire.

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Monsieur Glissant

— Par Manuel Norvat —

Auteur d’une thèse en cours d’écriture sur l’œuvre d’Édouard Glissant, Manuel Norvat, met l’accent sur la tonalité phénoménologique de cette pensée polyphonique du Divers : une «philopoétique».

Ouvert à la diversité du monde, Édouard Glissant aura relayé à travers son œuvre une parole irriguée par la poésie : c’est-à-dire la création d’un langage, d’une musique. Sa maison, située au Sud de la Martinique, dans la commune du Diamant, concentre et diffracte, du bord de mer où elle se trouve, tous les lieux et tous les êtres qui lui sont chers. La joaillerie et le tragique des rouleaux d’écumes qui la lèchent, mais aussi les mousses des forêts subtropicales et subversives de la route de la Trace et tant d’autres paysages archipélagiques et continentaux, de villes et de campagnes, de fonds marins ou d’étoiles lointaines tourbillonnent grâce à lui jusqu’au vertige dans notre imaginaire, désormais relié à partir d’un lieu réel ou symbolique que nous pouvons choisir. Oui, les éléments qu’il a glorifiés semblent dire comme lui : «Vis dans ton lieu et pense avec le monde».

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Hommage à Edouard Glissant

— Par Manthia Diawara—

 

Manthia Diawara  est cinéaste et enseignant à l’université de New York, auteur du documentaire «Edouard Glissant: un monde en relation»

 

Je me souviendrai toujours de ce voyage entrepris avec Edouard à Sainte Marie en Martinique, pour visiter la case de sa naissance dans un petit village du nom de Bezaudin. Du Diamant, en contournant Fort de France, pour aller vers le Lamantin, nous traversions un petit pont sur une rivière où jouait Edouard avec ses amis, quand il était enfant.

Edouard me montra du doigt les cases-nègres en bordure du fleuve, qui ont inspiré Joseph Zobel pour son livre La Rue Cases-Nègres. Nous descendions d’abord vallées après vallées, pour remonter ensuite par des chemins escarpés sans fin, vers la Montagne Pelée.

Tout le long du chemin, nous traversions des plantations de bananes. Edouard me parla du vert foncé des arbres géants qu’on ne trouve plus; des rivières dont on entend plus le bruit de l’eau qui coulait sur les petits cailloux et contre les rochers.

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L’impensé d’une écriture belle de monde.

— Par Alaric —

 

 

Ecrire, jusqu’à ses dernières ressources physiques, écrire jusqu’à son dernier souffle, telle fut la vie d’Edouard Glissant, chercher à s’installer au Lieu de l’écriture vivante, au Lieu que son œuvre ne cessera maintenant à chaque lecture de configurer, d’occuper, d’interpeller, il dirait certainement de «héler». L’œuvre a brusquement surgi vivante contre la mort, le départ d’Edouard Glissant, lui restitue ses frontières, ses limites, ses traces, ses poétiques, ses esthétiques, sa philosophie : tout ce qu’il a essayé de penser, et d’amasser inlassablement. Elle est devenue autonome et réflexive, point besoin de médiateurs, elle renvoie à elle-même, elle nous renvoie à nous-mêmes, elle pratique la relation, elle relaye, relie, relate, tous ses propres dits. Elle est devenue elle-même un Lieu, comme l’œuvre de W. Faulkner, dont il dévoile les « ouvertures infinies » et les impossibles, «Faulkner, Mississippi» et comme celle de Saint John Perse, ces deux maîtres. Comment écrire la modernité créole dans les propres formes et langues de la parole de sa Culture, issue de la Traite négrière, de la société d’habitation et dans la société coloniale, sinon dans « un suspens de l’être, dans une conception éclatée (dérivée, démultipliée) de la nature et de la nature humaine ».

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L’Acomat. Le Féal. Edouard Glissant.

— Par  Hanétha Vété-Congolo—

 

En grand voyage, sur le chemin de Guiné, travay fait, Glissant pran alé.

Mais chez nous, les morts ne meurent pas.

Chez nous, en dépit de tout, l’Homme demeure.

Un pran alé qui n’est pas le tiré dé pyé.

Ainsi, au soleil couchant, Godbi pran rasin.

Une autre géniture de cette Terre noire grosse Roche-mère, pleine d’humus.

Martinique.

Partant, il nous la révèle.

Car, il est constant que Glissant, du long de sa vie, du monde qu’il porte à fruition dans et par le Monde, a infailliblement honoré l’esprit et la beauté de la féalité.

Comme Césaire, comme Damas, comme Fanon. Féal.

Animé de la foi des croyants. Immensurablement féal. Fidèle au Lieu.

« Le lieu. [qui] est incontournable, pour ce qu’on ne peut le remplacer, ni d’ailleurs en faire le tour. » (Traité du Tout-Monde, 59)

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Les villes assassines d’Alfred Alexandre

aux éditions Écriture

Dans ce quartier où règnent l’inaction et le dénuement, Slack impose ses règles. Qu’il sillonne les rues dans son hummer ou les arpente entouré de ses milices, on le craint autant qu’on le respecte. Il est à la fois le garant d’un certain ordre et le pourvoyeur des plaisirs des vendredis et samedis soirs. Dans l’impasse de la rue Sans-Retour, au rythme de la musique de Big Time, son cheptel de danseuses ravit les spectateurs. Evane, le narrateur, n’a d’yeux que pour Winona, qu’il sait intouchable. Le hasard et le désespoir finissent pourtant par rapprocher ces deux âmes écorchées, les conduisant loin de la ville, sur les collines où ils ne sont guère dérangés que par le bruit du vent et des vagues. En construisant ce fragile bonheur, Winona et Evane enfreignent des lois tacites. Et la riposte de Slack ne tarde pas à venir.

Cette lecture offre une manière de tragédie classique, projetée dans le XXIe siècle des bas-fonds antillais. L’amour interdit, le crime de lèse-majesté, du sang et des larmes. On devine la fin très vite, tant le schéma de l’intrigue en rappelle d’antérieurs.

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Au Ciel… Hommage à Édouard Glissant

— par Malik Duranty —

 

Au Ciel, dit-on, se trouvent ceux qui montent au stade qui dépasse nos savoirs de vivant. Oh Ciel ! Crieront ceux qui voient l’autre, lui, monter sans que la rencontre ne s’oublie et que la relation ne s’efface.

Au Pays, voir les visages avec ou sans les masques de la distorsion monumentale de la réalité, celle des îles paradis dans l’archipel et dans l’infernal entre limitation et infinité. Oh Pays ! Au tant de visages affables de rencontres et de mises en relation, telle est le paysage de la marche. Celle qui est plurielle et, est porteuse de ses Uns qui sont des pas lancés ; non pas, dans l’anéantissement, mais lancés dans le mélange du faire, des savoirs, des êtres en façon et en manière.

Aux Mers et au Soleil, vos accords dans la mélodie du Vent, emportent le souffle de nos dires libres, pour aller vibrer nos méditations, dans le coeur des autres d’autres bords, d’autres lieux et d’autres côtés. D’outres bords, d’outres lieux et d’outres côtés. Oh Mer ! Oh Soleil ! Vos harmonies dans la mélodie du Vent emportent les succulences ou les démences de nos pensées libres, méditées à la face du Monde, depuis notre en-dedans démystifié de notre blés, cette douleur créatrice à la force du cri premier.

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La panse du chacal de Raphaël CONFIANT

 ou la part indienne de la créolité antillaise en Martinique. Entre mer Caraïbe et Golfe du Bengale.

Lu par Jean-Yves CHANDAVOINE.

 

 

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Termine-t-on la lecture d’un livre comme on termine un voyage ?

Un peu, surtout que La panse du chacal de Raphaël CONFIANT, (Folio, Mercure de France, 2004) fait voyager son lecteur, entre l’Inde du Sud ou le Coromandel et la Martinique par la force de la mémoire, de la nostalgie voire de la mélancolie : ce qui vous fait partir, traverser les océans, vivre l’enracinement en Martinique des migrants indiens du Tamil Nadu dans l’univers impitoyable de l’Habitation et de la coupe de la canne à sucre…

Pas tout à fait, néanmoins, car le récit imaginaire et réel de la migration des «coolies» aux Antilles, histoire de la traite et de l’installation indienne au goût amer, n’a rien de commun avec nos voyages touristiques contemporains.

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Edouard Glissant : Négritude, Créolité, Mondialité

par Jean Claude Lebrun

 

 

   La langue française et la littérature mondiale viennent de perdre l’une de leurs grandes figures. Édouard Glissant, né en Martinique, est mort à l’âge de quatre-deux-trois ans, à Paris.

Édouard Glissant était certes poète, romancier, dramaturge, essayiste et philosophe. Mais on ne lui rendrait pas justice si l’on s’en tenait à cette simple énumération. Il était, plus encore, une intelligence et une conscience, qui ne cessa jamais de penser ses différentes pratiques dans le mouvement du monde.

La parution de ses premiers poèmes (Un champ d’îles, la Terre inquiète, les Indes), à partir de 1953, précède de peu son engagement dans la lutte pour la renaissance culturelle négro-africaine. De la même façon, le prix Renaudot, attribué en 1958 à la Lézarde, son premier roman, précède d’un an la fondation, avec Paul Niger, du Front antillo-guyanais. Le créateur et l’être au monde marchent chez lui du même pas. Il est alors un lecteur assidu de Frantz Fanon. Sa proximité avec les milieux indépendantistes algériens lui vaut bientôt une assignation à résidence en France métropolitaine, qui durera jusqu’en 1965.

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« Pour Edouard Glissant » de Ernest Pépin

 

Tant de paroles offertes aux mains du monde
Remaillées aux fleuves souterrains
De grands chaos nous guettaient en bordure de nos îles
De grands rêves soulevaient nos vagues
Et enfouissaient les mots sous les sables du monde

Voici que pleurent les filaos

Nous avons passé le seuil des Indes
Passé le seuil des syllabes inconsolées
Car nul n’est à l’abri du silence
Et la vie est toujours un piège qui recommence
Et ce que nous habitons c’est la pensée du monde

Ivresse des mots
Malemort des mots
Nous sonnerons les pluies métisses
Nous ameuterons la Lézarde
Car
Nous sommes un peuple de traces prophétiques
De paroles dénouées

De paroles volées au mur de l’horizon
Et le conte en nous a toujours fait sa ronde

Pays fêlé et de mers dilatées aux flancs du monde
Nous en savons l’usage et le boucan de soleil noir

Le balan du souffrir
L’allégresse des argiles
La roche ingouvernable aux portes des rivières

Pays de sel

Le poète a jeté les dés des secrets
Tapissé le gouffre de nos lumières
Et défroissé les midis de la mer
Naissance des naissances
Le poète fait foule
Et sa mort justifie le soleil des consciences

Chacun inventera ses mots
Chacun sondera son propre sel
Allumera

Sa propre bougie
Sa propre étoile
Pour mieux se souvenir que
Le ciel s’est incliné pour ramasser sa lumière
Mais il nous appartient
Son rêve nous appartient

Nous garderons l’empreinte du Prince
Nous avons rendez-vous avec l’informulable
Sa parole

Est un siècle
Une jungle en veilleuse
Ame inquiète du monde
Un archipel aux yeux d’éclipse

Sa parole
Tant de soleils déménagés
Tant d’océans bouclés aux chevilles des racines
Tant de villes enjambées
Tant d’étoiles déterrées
Je parle au nom d’un poète
D’une écriture totale et totalement indélébile

Et je regarde mûrir l’horizon
Et je demande l’hospitalité du Tout-Monde
Et je plante un acomat
Et je ceins le rocher du Diamant
Qui emprunte ton visage à venir
Cette louange couronnée d’oiseaux marins
Ce gardien royal inspiré par tes songes
Et dans ce lieu
Où la pierre se fait flamme
Dans ce lieu de beauté intraitable
Je regarde passer l’âme du monde
La belle parole du monde

Ernest Pépin

Faugas le 04 février 2011

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Tunisie: Ce que Glissant nous lègue aujourd’hui

Une contribution de S. Kassab-Charfi, professeur de littérature à Tunis

 

 

Par-delà l’Océan Atlantique, c’est une autre dimension de l’Histoire qui nous a été donnée, transmise lentement, obstinément, se cherchant elle-même, démantelant les récits épiques des conquêtes, et découvrant à chaque livre, essai, poème, roman, l’inflexion encore inquiète mais assurée de sa propre voix.

Ce qu’il nous lègue est le soleil d’une conscience nouvelle, mûrie sur plus de cinquante ans : celle qu’incarne la nécessité pour les peuples anciennement dominés de connaître ce qu’il appelait, en 1956, dans un de ses plus beaux poèmes, Les Indes, « et l’une et l’autre face des choses ». Cette exigence drue le liait en fraternité à Kateb Yacine, le « vagabond sublime de Kabylie » dont il partagea un temps la destinée littéraire et politique, elle lui faisait porter la voix de poètes et d’artistes d’Amérique du Sud, de la Caraïbe, d’Afrique.

Mais ce qu’il nous lègue presque au même moment que cette lucide réappropriation de notre Histoire commune, c’est aussi la générosité de la penser dans un futur qui ne soit pas pris en otage par le ressentiment, c’est un dépassement de la conscience éclairante vers ce qu’il appelait une poétique de la Relation : tout le contraire d’une riposte procédurière et grinçante.

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Le souffle du pays, Nabd El Jazirah, de Widad Amra

 — Par Roland Sabra —

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La terre et le temps

 Après Regards d’errance en 2007, Salam shalon, en 2008, voici le troisième recueil poétique de Widad Amra. Il s’intitule  Le souffle du pays, Nabd El Jazirah.  C’est le souffle de l’île.

 

Une cinquantaine de pages sur la terre et les temps.

 

Le temps de sa terre. En ses temps .

 

En ces temps de tremblements où jamais la terre ne ment, où l’humain clame et réclame, où la mort célèbre l’âme des grands. De l’enterrement du poète au tremblement de Février. Ou l’inverse. Peu importe : « Le temps n’est pas dans la chronologie, la chronologie n’est qu’humaine ».  Des soubresauts du sol à ce temps, qui va et vient, qui se cherche quand le temps n’est plus, quand la mort engloutit terre et temps. Mais que reste l’espoir.

 

Widad Amra construit son livre en quatre temps donc.

 

Premier temps. Celui du dernier tremblement de terre, ici en sa terre. Elle nous dit l’étonnement, l’effroi et la peur de redécouvrir ce qu’elle savait depuis toujours.

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Outremer, Trois océans en poésie

         — Par Bruno Doucey —    


Aussi curieux que cela puisse paraître, aucune anthologie de poésie n’avait jusqu’alors été consacrée aux territoires de l’Outre-mer français.Bien sûr, depuis des années, des livres nous permettent de découvrir les poètes de Tahiti, de la Réunion ou des Antilles, mais aucun tour du monde en poésie n’avait encore été entrepris. C’est désormais chose faite : Outremer, trois océans en poésie se veut une invitation au voyage et à la rencontre. Celle qui permettra au lecteur de découvrir les richesses insoupçonnées des contrées ultra-marines.

Mais de quels territoires parle-t-on ? De ceux qui constituent, avec 2,6 millions d’habitants pour 120 000 km2, la France d’outre-mer. Départements, collectivités, territoires… les mots ont un sens, un passé, une histoire qui nous convient à découvrir la part métisse de nos identités, sans cesser d’élargir le champ de nos représentations.

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Vénus et Adam de Alain Foix : roman inclassable et iconoclaste

 Alain Foix, guadeloupéen, est écrivain, docteur en philosophie, directeur artistique, documentariste et consultant. Journaliste et critique de spectacles, il est également auteur d’un grand nombre d’articles et de courts essais, notamment sur l’art et le spectacle, directeur artistique et d’établissements artistiques et culturels il a notamment dirigé la scène nationale de la Guadeloupe de 1988 à 1991. Il s’est vu décerné le Premier prix Beaumarchais/ Etc_Caraïbe d’écriture théâtrale de la Caraïbe pour Vénus et Adam (2005) et Prix de la meilleure émission créole au Festival Vues d’Afrique de Montréal (1989) etc. Fort-de-France a eu la chance d’être le lieu l’an dernier  d’une création mondiale d’Antoine Bourseiller : la mise en scène de Pas de prison pour le vent une pièce écrite par Alain Foix. Il publie aujourd’hui aux Editions Galaade, Vénus et Adam.

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« Nabd El Jazirah », de Widad AMRA

— Par Isabelle Alfonso-Damico —

Nabd El Jazirah

 

widad_amra-1Parce que d’habitude, … disons en règle générale, l’auteur chouchoute son lecteur, le protège…

Parce que Widad est une femme, une mère, et même une jeune et merveilleuse grand mère…

Parce que le titre, écrit en arabe, sonnait à mes oreilles avec le souvenir, les racines, et la douceur de l’enfance…

Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore tel que son sourire et son empathie à l’autre…

Je suis entrée avec douceur dans ce livre « Nabd El Jazirah »

je ne me suis pas méfiée…

Emportée par le rythme, entrainée par la passion, happée par la force de l’écriture,

j’ai été bousculée, renversée, malmenée par une plume

« Nabd el Jazirah »… le souffle cyclonique et tourbillonnant d’un délire. Me suis retrouvée littéralement scotché à mon oreiller

oui, …oui, j’étais tranquillement allongée dans mon lit, livre à la main, prête à voyager dans les racines « widadiennes.

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« La blessure du nom », ouvrage de Philippe Chanson

Une anthropologie d’une séquelle de l’esclavage aux Antilles-Guyane

Ouvrage de Philippe Chanson

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—Anonyme – Passavoir – Crétinoir – Trouabal – Dément – Comestible – Macabre – Zéro – Malcousu – Savon – Gouacide – Négrobar – Satan – Peccatus – Dangeros… Tels sont quelques-uns des centaines de noms d’Etat civil saugrenus, dégradants et injurieux, redonnés aux esclaves africains des Antilles et de la Guyane françaises libérés en 1848. Cette blessure identitaire, largement et curieusement occultée, suinte encore sur ces terres créoles travaillées par trois siècles d’histoire coloniale traumatique.

Mais comment donc de tels noms ont-ils pu être attribués ?

L’étude ethnographique que propose cet ouvrage, travaillée par de longues années de terrain, tente d’en entendre les réponses. Elle s’étaye tout à la fois sur le dépouillement de plus de 350 000 patronymes collectés dans ces départements français d’Outre-mer, des entretiens notamment avec quelques figures éminentes de l’intelligentsia créole (Césaire, Glissant, Pépin, Chamoiseau), le cumul de données historiques, culturelles, linguistiques, littéraires, ainsi que sur la mise en œuvre d’une anthropologie dite ’fictionnelle’ et pourtant contemporaine.

L’auteur, sensible au poids moral du nom, se penche d’abord sur le choc, la prégnance, la proportion, les causes et les avatars de cette problématique si délicate ; reconstitue ensuite les circonstances et conditions des processus d’attribution qui ont pu aboutir à de tels dénis ; dégage également les pratiques et parades cathartiques de résistances mentales et culturelles pour contrer l’affront du nom ; et termine en ouvrant la question de cette grave blessure également subie par les créoles de l’Ile Maurice, tout en s’interrogeant sur une possible réparation du nom.

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Pour Patrick Saint-Eloi

par Gérard DELVER
Patrick CHAMOISEAU

  Il y a d’abord le respect dont il faisait preuve à l’égard de tous.
Puis sa bonté.
Puis sa simplicité.
Puis cette humilité qui faisait partie de son talent, en intensité, en force et en fragilité.
Il y a encore, l’absence de renoncement, ou de désengagement, dans une vie qu’il a voulu mener en solitaire pour mieux être solidaire.
Ce qui nous reste, c’est cette célébration constante de sa terre, de son pays et de son peuple. C’est son inclinaison naturelle à associer aux rythmiques de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane, les mélodies et harmonies de toute la Caraïbe et des autres faces du monde ; comme si, dessus la base féconde de la polyrythmie du zouk, pouvait se capter et se vivre au mieux ce que nous sommes : des identités enracinées mais ouvertes, opaques mais tellement claires d’amour, de danse, d’amitié, de la joie et de la douleur du vivre…
Ce qui nous reste, c’est cette langue créole menée vers les intensités de la douceur la plus extrême, exaltée dans les célébrations du sentiment, forcée d’accorder son éclat aux labyrinthes des vieux lenbé.

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Une anthologie de la poésie du Tout-Monde

   réunie par Edouard Glissant (La Terre, le Feu, l’Eau et les Vents, Paris, Galaade, 2010, 350 p.).

 — par Michel Herland —

 

« L’imaginaire est un champ de fleuves et de replis qui sans cesse bougent », écrit Edouard Glissant dans la préface à cette anthologie poétique d’un nouveau genre. Elle est nouvelle en effet en ce qu’elle ne fixe pas de bornes géographiques ou linguistiques au choix des auteurs (même si les versions originales des textes non francophones sont rarement reproduites) et en ce qu’elle ne suit aucun ordre : ni temporel, ni spatial, ni même thématique. Il y a néanmoins un fil conducteur, labyrinthique ou plutôt – pour mieux coller aux concepts glissantiens – rhizomatique, celui qu’a trouvé Glissant, poète lui-même, à travers le champ immense qu’il nous propose d’explorer à sa suite.

Il y a des embranchements inopinés, des retours vers des auteurs déjà rencontrés, la reprise de thèmes qu’on croyait épuisés. Libre à chacun de suivre le guide dans son cheminement, de parcourir après lui les thèmes qui semblent organiser la succession des poèmes (ou extraits de poèmes) retenus dans l’anthologie : la mort, l’humanité dans sa diversité, l’esclavage et la traite négrière, le dépaysement, la poésie, le paradis terrestre et la chute, les intermittences du cœur, la fusion de l’homme dans l’univers, la succession des âges et des saisons, la négritude, les sans-papiers, etc.

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