— Par Djénaba Diallo & Michel Pennetier—
Chapitre III
Les années Dakar
La jeune femme habillée à l’européenne, simplement mais avec goût, marche d’un pas ferme dans les rues de Dakar. Elle traverse les ruelles populeuses encombrées de marchands, elle arpente les grandes avenues sous les eucalyptus bordées de grands immeubles modernes où prospèrent les banques et les boutiques de luxe. Dakar, c’est déjà la France, se dit Djenaba, et elle respire l’air de la liberté. Pour autant, elle ne rêve pas, elle laisse sans regret le passé, l’ambiance de la famille et du village, l’oppression de la coutume où on ne peut rien dire, où la notion d’autonomie et de droits de l’individu, surtout pour la femme, n’a pas de sens. Non, ce monde-là, elle n’en a jamais voulu. Quelque part, se dit-elle, j’ai toujours été émancipée, je n’ai pas eu besoin de faire un chemin vers cela, c’était toujours en moi. Et maintenant, elle a ce sentiment de plénitude d’elle-même et d’indépendance. Cela se voit à sa démarche et à son regard assuré. Elle est entièrement dans le présent de sa vie à Dakar, une vie active de travail, ici le ménage et la cuisine chez des Français, là à l’ambassade de France chez un diplomate, autre part encore dans les bureaux d’une organisation de jeunesse.