Catégorie : Littératures

Souf (An mémwè Marius Cultier)

— Par Daniel M. Berté —

Kouté pli souvan
Lé bagay ki lé vivan
Yo ka tann vwa difé
Kouté lavwa dlo-a.
Kouté adan van-a
Lé razié ka pléré :
Sé souf lé zansèt

Sa ki mò pa janmen pati :
Yo la dan fènwè ki ka kléré
Ek dan fènwè ka vin pli nwè
Lé mò pa anba tè :
Yo adan piébwa-a ki ka frisonnen,
Yo adan granbwa-a ki ka plenn kò’y,
Yo adan dlo-a ki ka koulé,
Yo adan dlo-a ki ka dòmi,
Yo adan kaz-la, Yo dan lafoul-a:
Lé mò pa mò
(MAWYIS PA MÒ)

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Ils sont mutins ces Mutins

— Par Jacques Brasseul —

  1. Ils sont mutins les Mutins, ces habitants d’un DOM imaginaire des Caraïbes, mutins dans les deux sens du terme. Révoltés d’abord, rebelles, insoumis, puisque le roman nous replace dans la grande grève et les émeutes de 2009 aux Antilles, à l’époque du président Sakko, contre la pwofitasyon, autrement dit l’exploitation outrancière dont les habitants se sentent victimes, levés à la fois contre les patrons locaux et l’Etat français employeur. Mais mutins aussi dans l’autre sens, espiègles, taquins, malicieux, badins, notamment au plan des mœurs, et surtout sexuelles, galipettes, cabrioles et culbutes, dont le livre nous fait part le plus crûment et innocemment du monde.

Ce mélange détonant donne au récit un intérêt constant, analyses politiques, économiques, philosophiques, toujours légères et brillantes, accompagné du déroulé de la vie des personnages, pris dans divers milieux, les jeunes indisciplinés de l’île, les autorités blasées et cyniques, les patrons, ces ‘grands Blancs’, créoles qui tiennent l’économie du pays.

L’humour est aussi au rendez-vous, avec le portrait amusant de deux hommes de main venus de Miami pour une basse besogne, Ted et Nat, faisant irrésistiblement penser, quoique de l’autre côté de la loi, aux célèbres et même immortels Dupond et Dupont.

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Le droit à la langue maternelle créole dans le système éducatif haïtien

Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Publié dans Le National du 5 décembre 2018, l’article « À quand une réforme du système éducatif en Haïti ? » donne la parole à des enseignants et spécialistes de l’éducation qui réclament une fois de plus la réforme du système d’enseignement en Haïti.

Les éléments de diagnostic consignés dans cet article sont éclairants mais ne sont pas nouveaux. Ils ont déjà été étayés dans plusieurs études approfondies, notamment par l’ample analyse du GTEF (Groupe de travail sur l’éducation et la formation, 2009-2010) contenue dans le document intitulé « Façonnons l’avenir » de mars 2009 (voir aussi « Les 33 recommandations du GTEF » et son rapport synthèse « Pour un pacte national pour l’éducation en Haïti » d’août 2010).

L’un des mérites de l’article « À quand une réforme du système éducatif en Haïti ? » consiste à mettre en lumière les préoccupations linguistiques de nombre d’enseignants aujourd’hui en Haïti. Ainsi, « Selon Charlot Jean Baptiste, normalien, la première problématique [de] l’enseignement en Haïti, c’est la langue [d’enseignement] choisie. Il estime que l’apprentissage des élèves serait plus facile si les cours se dispensaient en créole.

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Indifférence

— Par Michèle Lamarchina —

– Bonjour mon chou, tu as bien dormi? Tu as déjà allumé la radio?

Depuis deux semaines, le navire de l’ONG qui porte secours aux naufragés est bloqué dans le port de Marseille car aucune nation n’est prête à lui accorder un pavillon.

-Qu’est-ce que tu prendras ce matin, tu préfères du thé ou du café?

Un chalutier espagnol est en errance au beau milieu de la Méditerranée; il détient à son bord treize réfugiés qu’il a recueillis alors que leur embarcation était en perdition depuis deux jours. Affamés, assoiffés et épuisés, les naufragés ont partagé à bord le maigre ravitaillement de l’équipage. Mais le chalutier est ballotté de port en port car aucun pays n’accepte de lui ouvrir un port. Les vivres sont en train de s’épuiser.

– Le thé, tu le prendras avec du citron ou avec du lait?

Le patron du chalutier avance que le seul pays qui accepte de recevoir les réfugiés, c’est la Libye. Mais quand il a prononcé le nom de Libye, les réfugiés ont été pris d’hystérie, assurant qu’ils préféraient se noyer que de retourner là-bas.

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Maryse Condé « Attention à ne pas prendre la place des maîtres et répéter leurs travers »

Née en Guadeloupe en 1937, l’écrivaine Maryse Condé doit recevoir le 9 décembre à Stockholm le prix Nobel alternatif de littérature, une récompense décernée par une nouvelle académie composée d’intellectuels suédois. Une consécration internationale pour celle qui fut la première présidente du Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage.

Je ne serais pas arrivée là si…

Vous me permettez de tordre un peu la formule? Et même de l’inverser ? Car moi, je suis arrivée là… bien que ! C’est ce « bien que » qu’il m’importe de souligner. C’est ce « bien que »qui m’a paralysée pendant près de trente ans.

Vous êtes donc arrivée là, Maryse Condé, lauréate 2018 du prix Nobel alternatif de littérature, bien que…

Bien qu’on m’ait affirmé, quand j’étais petite fille, que les gens comme moi ne pouvaient pas devenir écrivains. J’avais 12 ans à Pointe-à-Pitre quand une amie de ma mère a voulu me faire un cadeau original. Elle savait que j’avais lu tout ce qui pouvait me tomber sous la main : Balzac, Maupassant, Flaubert… Alors elle a opté pour un roman d’Emily Brontë : Les Hauts de Hurlevent.

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Plaidoyer pour parler créole pour de vrai

— Par Térèz Léotin (*) —

Indignez-vous ! disait Stéphane Hessel dans son essai publié en 2010. Un ouvrage d’une trentaine de pages, qui affirme que l’indignation n’est rien d’autre qu’une forme de résistance, c’est en quelque sorte le ferment de l’« esprit de résistance ». Son livre est publié dans la collection :Ceux qui marchent contre le vent”. Hessel nous y exhorte à avancer à rebrousse vent, à ne pas aller moutonnement sur le boulevard de nos habitudes, en tous cas, vers celles que nous sommes tentés de prendre.

Indignez-vous, indignons-nous comme lui, autant que nous savons si bien le faire quand il s’agit de la défense de la langue française, lorsque sortie d’une bouche qui la maîtrise mal, elle arrive déflorée à nos oreilles, oui nous nous indignons de voir que l’autre ne connait pas LA langue, celle de la référence. Aussi, sans être ni gendarme, ni policier, que c’est triste d’entendre un martiniquais ressasser : “man en train de vini”, “man en train de parlé” sans qu’aucune demande de correction ne soit réclamée ou attendue. Pourquoi ne pas s’indigner là aussi lorsque notre langue est blessée, martyrisée ?

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Murs…

— Par Patrick Mathelié-Guinlet —

Murs… Murs… Murs… Murs !
Murs de tous les côtés
pour nous emprisonner !
Et même mur de la pensée
qu’on appelle censure,
sensée mettre en conformité
avec la soi-disant majorité…

Mais quand ce qu’on endure
devient trop dur à supporter,
à l’intérieur de tous ces murs
on entend monter des murmures
incitant à se révolter
et puis abattre tous les murs
qui empêchent de s’éclater
et d’en rond ensemble danser…
Mûrs pour la liberté !

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Misié Joj

— Par Daniel M. Berté —

Lè Man moun ka pasé ek ka ratibwazé
I toujou san fouté si’y ka fè moun kriyé
Nou pa la pou pléré ni pou sa rigrété
Men nou pa ka bliyé épi nou ka sonjé

Joj Elétèw Movwa, misié lawa dé mo
Nonm ki palé anpil ek ki matjé an lo
Adan lé piès téat i mété kréyol wo
Ek sa’y kité ba nou sé pa dé pawol flo

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La mort de Georges Éleuthère Mauvois

Comme un dernier salut!

Georges Éleuthère Mauvois est décédé ce jour à 13 h 30, mardi 4 décembre 2018, presqu’à la date anniversaire de la mort de son fils Ti-Jo.
Georges Mauvois était un grand écrivain, essayiste, dramaturge, poète, biographe, au style talentueux et parfait créoliste.
Nous avions une relation très forte et je suis bouleversé par son décès. Il a été aussi un ex dirigeant du Parti communiste dont il s’était éloigné, très doucement, avec ménagement et sans éclat à partir de 1973 et il s’était alors beaucoup plus investi dans la littérature et la réflexion. J’avais trouvé un homme charmant, curieux et attentif sans pour autant renier ses idéaux de jeunesse et son positionnement pour une société juste, pour la libre pensée, pour la laïcité, pour l’affirmation de la culture martiniquaise et de l’identité caribéenne.
Mes condoléances à Laure, Yves et Roger, mes trois amis et camarades depuis la pré-adolescence, à leurs enfants et petits enfants.

Gilbert Pago

 

Georges Élteuthère Mauvois est né le 28 janvier 1922 à Fort-de-France (Martinique), d’un père policier municipal et d’une mère petite commerçante.

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Misié Mèt Mo (Ba Mèt Marcel Manville)

— Par Daniel M. Berté  —
Mèt Marcel Manville,

misié la pawol, ou méwté vréman tit : « Misié mèt dé mèt di baro »

Misié mèt mo

militan marxsist, mèt défansè ki mouyé kôy pou moun kolonizé maré

Mèt Marcel Manville,

mèt mawtelè dé mo ki matjé ek mannié dé model plodwari

Misié mèt mo

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Fait d’hiver

— Par Michèle Lamarchina —
Déjà à Bardonecchia, la neige tombait depuis plusieurs jours. Qu’est-ce qui nous avait poussés à partir en cette saison? Quelle folie, quel rêve? L’envie et la peur du blanc, ce mélange de désir et de crainte, le champ magnétique du blanc et nos cœurs aspirés comme par un aimant. Consolés par le nom de la route, la Viale della Vittoria: on s’en sortirait peut-être. Pourtant elle était fermée cette route, mauvais signe ! mais pour nous de bon augure. Pas de voiture à l’horizon.
Et nous voilà tous les deux, Moussa et moi, les autres avaient renoncé ou bien nous avaient évités, je ne sais pas. Peut-être qu’ils nous trouvaient trop. Trop quoi, va savoir, peut être trop de lectures, et trop de bon français dans nos bouches. Moussa et moi, on s’était rapprochés. J’avais reconnu en lui un frère de déroute, rien qu’à sa façon de jeter autour de lui des regards éperdus. Crainte de tout et de tous, avec l’idée que le pire ennemi c’est toujours un homme. C’est d’un homme qu’on a tout à craindre, et pourtant même le pire est toujours un homme.

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Laribot

— Par Daniel M. Berté —

Charlòt ki ka fè pòpòt di : « Fòk nou fè an laribot ! »

Ti-Bob an boug ka fè djob, vini épi boutèy schwob

Man Mirèy an machann boutèy vini épi siwo-gwozèy

Pol-Labonm ki té chofè bonm pòté dé ti bidon ronm

Mèt Bewté ki sé kowdonié mennen bwèt paté salé

Gwo-Ako an péchè brigo pòté boutèy ponchokoko

Alèksann ki sé koupè-kann pòté diven épi ji kann

Kay André ki sé palfimié yo tout bay monté a pié

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Jwé mizik pou la Sent Sésil !

— Par Daniel M. Berté —

Bat tanbou, tibwa, batri ek dé lanmen’w
Pran siyak, bwa-ronflé, chacha ek dé pyé’w
Mennen piano, violon, awmonyòm ek djòl-ou
Pòté tronpèt, sakso, tronbòn ek Zorè’y-ou

Epi klarinet, flit, awmonika ek dé zié’w
Plis djita, siyak, manman-kochon ek tout kò’w
Mayé tousa an awmoni ek kadans épi lespri’w
Pou mété bel anbians ek jwé bel lanmizik

Mizisien ! Akòwdé !
Balansé lasòs ! Twa-kat !
Jwé pou la Sent Sésil !

Jwé zouk épi salsa, slo épi lambada
Jwé wòkannwol épi konpa, vals épi kalenda
Jwé bel mizik pou la Sent Sésil !

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Festival Ecritures des Amériques avec Lyonel Trouillot

Du 10 au 17 novembre 2018 en Guadeloupe

Depuis 2000, date de sa création, l’association Prix des Amériques insulaires, dédiée à la promotion et à la diffusion des littératures a reçu plus d’une cinquantaine d’écrivains. Pour cette édition 2018 du Festival Écritures des Amériques qu’elle organise, Pierre Ducrozet, Viktor Lazlo, Adriana Lisboa, Wilfried N’ Sondé, Karla Suárez, Sylvain Tesson, Lyonel Trouillot et Robert Whitaker, répondent à son invitation et ouvrent de nouveaux espaces romanesques au public.

Ce festival s’inspire de la transatlantique en solitaire « Route du rhum ». Lyonel Trouillot y animera un atelier d’écriture en tant que romancier, fondateur de l’Atelier du Jeudi soir, dont la vocation est de « travailler l’imaginaire et le goût de dire, le goût d’inventer des espaces de parole qui magnifient le mot et rendent possible un rapport avec l’autre ». Le 10 nov, rencontre autour de son roman Ne m’appelle pas Capitaine (Actes Sud)

Biennale depuis sa création en 2000 par l’écrivain Maryse Condé et l’industriel Amédée Huyghues Despointes, la manifestation, plébiscitée par un public enthousiaste lors de l’édition 2017 du Festival Écritures des Amériques dont l’horizon littéraire s’inspirait de l’année France Colombie, devient annuelle.

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« Les Jours de Silence », l’histoire d’une relation père-fils par Phillip Lewis

— Par Karen Lajon —
La vie en noir – Never trust a lawyer! Ne jamais faire confiance à un avocat! C’est un peu ce que l’on s’est dit lorsqu’après une heure d’interview contenue, voire hésitante, avec Phillip Lewis, on assiste dans la foulée à la métamorphose du bonhomme, au cours d’un débat en compagnie notamment de Gabriel Tallent. Drôle, limite bateleur, l’écrivain américain brouille les pistes et se révèle être un sacré numéro lors de son passage au Festival America à Vincennes, il y a quelques semaines.

Avec Les Jours de Silence, l’avocat qu’il est à l’origine, Phillip Lewis signe son premier roman et quel roman. Maîtrisé, brillant, « une symphonie », selon les propres mots de l’auteur, actuelle et surannée tout à la fois. Un peu comme lui avec son physique de gendre parfait et sa trajectoire au fond pas si classique que ça. « Suis écrivain, dit il, je n’aime pas mon métier d’avocat. » Ok. Un écrivain qui a pris son temps. Lewis a 47 ans, il a mis cinq ans à rédiger l’ouvrage. Pour les adeptes du « tout se joue avant six ans », vous voyez ce que je veux dire.

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Haïti : à propos d’un « Plan décennal d’éducation et de formation 2018 – 2028 »

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue—

Un « Plan décennal d’éducation et de formation 2018 – 2028 » en Haïti dénué d’une véritable politique linguistique éducative

Le « Plan décennal d’éducation et de formation 2018 – 2028 » n’est presque plus un document… confidentiel : au terme d’une patiente recherche, nous disposons désormais d’un exemplaire de ce document qui, faut-il le souligner, ne figure pas encore sur le site officiel du ministère de l’Éducation d’Haïti. 

Le document porte l’en-tête du ministère de l’Éducation et de la formation professionnelle ; il s’intitule précisément « Plan décennal d’éducation et de formation (PDEF) octobre 2018 septembre 2028 » et consigne le surtitre « Planifier l’éducation, préparer le futur », ainsi que sa date d’émission, à savoir octobre 2018.

Ce document de 96 pages comprend 4 chapitres :

Le chapitre I consigne les « contexte et justification » du « plan » ; le chapitre II, le « plan 2017-2027 », comprend une « analyse de la situation », les « orientations stratégiques » du ministère de l’Éducation, « les cibles pour l’horizon 2027 », ainsi que les « interventions » programmées ; le chapitre III énumère la « stratégie de mise en œuvre », le « dispositif organisationnel », les « modalités de suivi », les « modalités d’évaluation »  et la « stratégie d’information et de communication » ; quant à lui le chapitre IV aborde les « coûts et stratégies de finacement du Plan décennal d’éducation et de formation ».

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Les tremblantes disparitions de la Québécoise Andrée A. Michaud

LA VIE EN NOIR – La Québécoise Andrée A. Michaud, Prix des lecteurs Quai du Polar en 2017, faisait partie des têtes d’affiches du Festival America, fin septembre à Vincennes. Son dernière livre, Rivière tremblante, y a fait sensation.

« Je suis Québécoise. Officiellement Canadienne. En d’autres termes, je m’inscris dans la territorialité québécoise. » Et voilà, c’est dit. Il suffit d’observer le tressaillement d’Andrée A. Michaud pour comprendre que cette question demeure sensible, voire un poil agaçante. Mais promotion oblige, la dame qui fut récompensée par le Prix des lecteurs Quai du Polar pour Bondrée en 2017, a fait bonne figure en cette première journée du Festival America – qui a eu lieu du 20 au 23 septembre à Vincennes (Val-de-Marne) – où justement cette autre entité territoriale, le Canada, est à l’honneur.

Il n’est donc pas surprenant que l’œuvre de l’écrivain soit imprégnée de nature. « Quand on vit dans un lieu où les espaces sauvages sont conséquents, on a une autre façon de voir les choses, de comprendre ce qui nous entoure, de se comporter. On a les deux pieds ancrés dans le sol.

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Yonndé mo kréyol

— Par Daniel M. Berté —

Yonndé ti mo kréyol
Pou pé sa konsolé
Moun lapenn ka pijé
Pou kouraj yo trapé

Yonndé mo dou kréyol
Pou palé di lanmou
An pawol swa ki dou
Pou lé chou ek doudou

Yonndé gro mo kréyol
Pou lakolè monté
Pou nou pé sa kontré
lé mové malmaké

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Ta-Nehisi Coates : « Le grand combat »

— par Janine Bailly —

Ce 18 octobre, j’ai eu le bonheur de réaliser un de mes rêves, voir et entendre enfin Ta-Nehisi Coates, et ce fut au Grand Carbet du Parc culturel Aimé Césaire. C’est pourquoi j’ai envie de me remettre en mémoire ce modeste compte-rendu de lecture que je fis le jour où je découvris ce grand écrivain américain.

Le Grand Combat

Interpellée par l’article « Je ne suis pas votre nègre », paru sur le site Madinin’Art, il me faut ici parler d’identité noire, puisque dire que le problème de couleur n’existe pas s’avère malheureusement être encore du domaine de l’utopie.

Parler de cela, au travers d’abord de la littérature, le lien se faisant par l’écrivain James Baldwin, figure du film documentaire précité, et figure présente aussi dans Le grand combat, ce deuxième opus traduit en français de l’américain Ta-Nehisi Coates, qui fait suite à Une colère noire/lettre adressée à mon fils. Une colère noire, un essai bouleversant publié par l’écrivain-journaliste après la mort de son ami d’université, Prince Jones, tué par un officier de police qui l’avait pris pour un trafiquant de drogue.

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Ta-Nehisi Coates, en ce 18 octobre : une découverte !

— par Janine Bailly —

Amphithéâtre plein au lycée de Bellevue, et salle du Grand Carbet au Parc Culturel pleine aussi comme un œuf pour recevoir ainsi qu’il se devait Ta-Nehisi Coates, un journaliste-écrivain qui aujourd’hui s’affirme comme une des grandes voix afro-américaines des États-Unis.

Invité par la municipalité de Fort-de-France, Ta-Nehisi Coates découvrait en compagnie de son épouse l’île de la Martinique, lui qui n’a pu se rendre à Paris que tardivement il y a quelques années, lui qui ne connaît aucune autre île des Antilles, et qui jamais n’eut l’opportunité de se rendre en Afrique, les ressources à sa disposition n’étant en rien comparables aux nôtres, ou à celles des écrivains blancs de son pays !

Le public, souriant et chaleureux, visiblement conscient du privilège qui lui était offert, très tôt dans la soirée se pressait sous une pluie fine aux portes du Grand Carbet pour voir et entendre un des intellectuels qui, en dépit de certaines contestations, s’affirme comme un des plus influents penseurs de l’Amérique contemporaine. Et ce public tous âges confondus sut pendant plus de deux heures prêter une oreille attentive à la conversation initiée par deux intervenants universitaires particulièrement compétents en raison de leurs domaines de recherches, Steve Gadet et Audrey Célestine.

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« Le grand combat », de Ta-Nehisi Coates

Résumé :
«Je me réveillais enfin, avide de comprendre.»À West Baltimore dans les années 1980, les gangs et le crack sont le seul horizon des gosses du quartier. Ta-Nehisi est voué lui aussi à devenir un bad boy. Mais son père Paul, ancien Black Panther passionné de littérature, lui fait découvrir Malcolm X et James Baldwin. C’est une révélation. L’adolescent rêveur, égaré dans les frasques d’une famille hors norme, se jure d’échapper à son destin.Épopée lyrique aux accents hip-hop, portée par l’amour et l’ambition, Le Grand Combat est l’histoire magnifique d’un éveil au monde, un formidable message d’espoir.

Ta-Nehisi Coates
ISBN : 2290148504
Éditeur : J’AI LU (16/05/2018)

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« Tribulations archipéliques », vues par Patrick Mathelié-Guinlet

J’ai la mémoire de l’escalier
qui ne va nulle part.
En redescendant ses supermarches,
je me souviens de l’île
mais lorsque je te décode,
Martinique, tu te barres !

Archipel de visions émergentes
volcaniques, magmatiques, bouillonnantes,
explosives !
Points chauds
entre le ciel et l’eau…

Kaléidoscope d’ethnies, de cultures et de couleurs de peau,
rencontres, croisements, métissages,
fusions, échanges, transmissions,
la créolité du “tout-monde”
reflétée dans des miroirs
comme en les yeux de l’autre…

Les valises de l’exîle sont posées,
au voyage invitation
d’un peintre qui a changé de palette.

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Contribution à l’avancée de la langue créole. Notre rapport à la langue

—Par Fernand Tiburce Fortuné —

Selon ULLMAN, « tout système linguistique renferme une analyse du monde extérieur qui lui est propre et qui diffère de celles d’autres langues ou d’autres étapes de la même langue. Dépositaire de l’expérience accumulée de générations passées, il fournit à la génération future une façon de voir, une interprétation de l’univers ». (1)

C’est pourquoi, selon nous, la relation à notre langue est une relation à la terre, donc à la poésie, donc à la création. Elle est par conséquent une relation à la mère, un cordon ombilical essentiel qui nous singularise, et en même temps nous préserve de la solitude.

La langue s’exprime alors comme patrimoine, c’est-à-dire comme un lieu non clos où s’engrangent drus, les temps forts de notre vécu. Dans ce contexte, le parler d’un peuple signifie volonté d’amour et acte de fidélité.

La langue, c’est nous-mêmes, mais c’est encore le contact, la présence, l’existence même de l’Autre. En effet, toute langue est à un certain degré ce mouvement multiforme vers une fraternité partageable, une communauté à essentialiser.

Comment ne pas aimer sa langue ?

Pourquoi tenter d’ériger un «mur de la honte» entre sa langue et soi-même ?

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Création du Centre international d’études Édouard Glissant

L’Institut du Tout-Monde est heureux d’annoncer la création du Centre international d’études Édouard Glissant, nouvelle entité dédiée à la recherche concernant l’œuvre d’Édouard Glissant et à la diffusion de sa pensée. Fondée sur sept partenariats internationaux, le Centre entend promouvoir l’engouement considérable qui se joue actuellement autour de l’œuvre d’Édouard Glissant, en coordonnant autant que possible le renouvellement du discours critique à son propos. Vous pouvez découvrir d’ores et déjà le tout nouveau site Internet du Centre, hébergé par l’ITM et Édouard Glissant.fr.

La première réalisation d’envergure du Centre : la tenue en 2019 d’un colloque international « Édouard Glissant et Le Discours antillais : la source et le delta », mené en partenariat avec l’Université de Cambridge (Magdalene College) et l’Université des Antilles (pôle Martinique), colloque-rhizome qui se déroulera en trois phases : du 25 au 28 avril 2019 à Paris (FMSH et Maison de l’Amérique latine) ; en juin 2019 à l’Université de Cambridge (Royaume-Uni) ; en novembre 2019 à l’Université des Antilles, pôle Martinique. Ces trois temps seront également accompagnés de toute une série d’événements internationaux que nous aurons l’occasion d’annoncer ultérieurement. 

La présentation détaillée du colloque est à consulter dès à présent sur le site du Centre.

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Le « nègre littéraire » parle-t-il créole en Haïti ?

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Les sociolinguistes, toutes écoles de pensée confondues, soutiennent que la langue est une institution sociale historiquement articulée et qu’elle exprime sur des registres différenciés les réalités de son époque. À ce titre, les mots du lexique peuvent être « marqués », objets d’une singulière connotation (au sens de : « Ensemble de significations secondes provoquées par l’utilisation d’un matériau linguistique particulier et qui viennent s’ajouter au sens conceptuel, fondamental et stable, qui constitue la dénotation. Ainsi, cheval, destrier, canasson ont la même dénotation, mais ils diffèrent par leurs connotations : destrier a une connotation poétique, canasson une connotation familière » (Larousse). Il en est ainsi du sens connoté, en anglais comme en français, des termes « nigger » et « nègre ».

Suite au massacre de Charleston le 17 juin 2015, aux États-Unis, on a pu voir Barak Obama monter au créneau et se faire le chantre d’un discours rassembleur durant lequel il a ouvertement employé le terme « nigger ». La presse américaine l’a amplement souligné et le magazine français NouvelObs s’en est fait l’écho par deux articles publiés successivement les 24 et 25 juin 2015 : « Nigger : pourquoi le « N word » rend fou aux Etats-Unis (1) », et « Le N-word pour « nègre », mot le plus tabou des États-Unis (2) ».

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