Catégorie : Littératures

Le Bureau international de l’éducation de l’Unesco parviendra-t-il à domestiquer le système éducatif national d’Haïti ?

— Par Robert Berrouët-Oriol (*)

Dans le vaste secteur de l’éducation en Haïti, peu d’enseignants, y compris parmi les 17 000 que compte le secteur public, savent véritablement quelle est la mission du Bureau international de l’éducation de Unesco et de quelle manière il intervient en Haïti. Il y a lieu de rappeler que le « Bureau international de l’éducation de Unesco (UNESCO-IBE) a été fondé en 1925 à Genève et qu’il est la première organisation intergouvernementale exclusivement active dans le domaine de l’éducation, le plus ancien institut de l’UNESCO et l’autorité mondiale en matière de transformation des programmes d’études pour un apprentissage de qualité. L’BIE est également une plateforme unique de coopération régionale et internationale en matière d’éducation. En 1929, l’IBE a ouvert ses portes à d’autres pays et est devenu la première organisation intergouvernementale dans le domaine de l’éducation ».

« Depuis 1934, l’IBE organise la Conférence internationale sur l’éducation publique (aujourd’hui la Conférence internationale sur l’éducation). À partir de 1946, cette conférence a été convoquée avec l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), fondée en 1945.

→   Lire Plus

« Trop parler rend sourd… » & « Traces »

Trop parler rend sourd…

Le silence quand on l’écoute
a beaucoup de choses à nous dire…
Tant de signaux sur notre route
que l’on ne sait, hélas, plus lire

dans tous ces bruits de la Nature
depuis qu’on parle trop sans doute…
Comme des oiseaux le murmure
ou ce que le vent nous susurre,

dans nos esprits ce tas d’images
que transmettent les arbres sages
lorsqu’on se promène en forêt,
attentif aux messages muets
de tous ces témoins d’un autre âge…

Et puisque trop parler rend sourd
à d’autres voix plus intérieures,
parfois se taire est la meilleure
façon de ressentir l’Amour…

Traces

Un crayon de graphite
d’un papier blanc profite
pour laisser une trace
avant qu’on ne l’efface…

→   Lire Plus

Frankétienne : Les hommes font parfois de très bons dieux

— Par Faubert Bolivar —

Décidément, l’homme à la peau à l’envers, peau blanche corps noir, aura tout fait à l’envers. Alors que la plupart des gens commencent par être des hommes avant de devenir des légendes, Franck a commencé par être une légende avant de devenir un homme. Lui qui n’aimait pas les cadres, a désormais le nom encadré par deux dates : 12 avril 1936-20 février 2025.

Y’aurait-il un sens à mourir à 88 ans le vingtième jour (20) du deuxième mois (02) de l’année 20/25 ? Que de deux, de nombres jumeaux (88), à parier sur un revers à la borlette – “Le seul Dieu que j’adore c’est le hasard”. Nous n’en saurons pas plus. Nos kabbalistes, maçons-loges, prophètes, prophétesses, empereurs, vénérables et autres spécialistes des mondes invisibles, nombreux jusqu’au vertige, ont mieux à faire que de regarder du côté d’un magicien du verbe.

Étrange. Un événement majeur est arrivé à Frank, et il n’est pas là pour en témoigner. Frankétienne est mort. Curieux tout de même que cette phrase nous surprenne alors que Frankétienne, comme tout bon philosophe, a passé une bonne partie de sa vie à préparer sa mort.

→   Lire Plus

Hommage de James Noël à Frankétienne

Les obsèques nationales du grand poète et plasticien haïtien Frankétienne, mort à 89 ans, auront lieu le 27 février à Port-au-Prince. Son ami et compatriote James Noël lui rend hommage dans un texte inédit, publié le 26-02-25 dans le journal « L’Humanité ».

Pour brûler, Frank brûlait, en soleil de midi sur la peau des tropiques.

20 février 2025, Frankétienne a fait le grand saut dans le fond bleu, cet espace sans bornes qui lui semblait déjà si familier. C’est un paradoxe quand cela concerne l’homme le plus vivant d’Haïti, l’incandescence et l’irrévérence (en rêve errant) poussées à son extrême : poète visionnaire, dramaturge, romancier, chanteur, acteur artiste plasticien qui vivait surtout de sa peinture. Né le 12 avril à Ravine Sèche des suites d’un viol d’un riche américain sur une servante adolescente, Jean-Pierre Basilic Dantor D’Argent, dit Frankétienne est élevé par une mère analphabète. Loin de sombrer dans les trous noirs qui s’érigeaient en pièges devant lui, il a appris à dompter les orages afin d’avaler l’univers.

On peut voir, déceler les germes de sa puissance créatrice en ouverture de L’oiseau Schizophone, explosion de langages, de métaphores qui n’appartiennent qu’à lui dans l’univers du tout-monde en spirale : « Au vertige de ma terre saoulée de catastrophes, au naufrage de mon île suspendue sans réchappe au balancier de la mort… », « rien ne rive hors de saison de pure raison, la mort active la dérision que rien ne meurt quand tout arrive en paradoxe.

→   Lire Plus

Le Conseil présidentiel de transition promeut le culte de l’escroquerie impunitaire en Haïti

— Par Robert Berrouët-Oriol (*) —

Impunité – Du latin impunitas, impunité.
(…) absence de sanction, de punition, de châtiment. (…) fait pour quelqu’un de ne pas risquer d’être mis en cause pour les fautes qu’il a commises, d’échapper à toute enquête qui pourrait le mettre en accusation, conduire à son arrestation ou à le juger s’il est reconnu coupable. (…) état dans lequel se trouve celui qui n’est pas exposé à des conséquences fâcheuses en raison des actes qu’il a commis. (toupie.org)

Lors de son séjour à Montréal en 2022, Arnold Antonin, le plus talentueux de tous les cinéastes haïtiens contemporains, nous a fait l’amitié de nous offrir une copie de son magistral film documentaire, « Le règne de l’impunité ». D’une durée de 65 minutes, cette œuvre filmique de premier plan réalisée en 2013 éclaire la nature, le rôle et l’étendue des crimes de masse commis pendant 29 ans par la dictature des Duvalier. « Le règne de l’impunité » –pour lequel le cinéaste a recueilli 50 témoignages sur le terrorisme d’État en Haïti et l’impunité dont les bourreaux ont longtemps bénéficié–, s’inscrit dans la vaste fresque mémorielle que peint depuis nombre d’années Arnold Antonin, réalisateur de plus de cinquante films aux formats long métrage et vidéo.

→   Lire Plus

Ba Frankétienne

— Par Patrick Chamoiseau —

Mapou

lé vyé dlo ka koulé
sépa selman grenn-anba-fey ki ka konté pinèz
(man adan sa osi)

Mapou

chabin à yeux grand ciel

les énergies ne valent qu’au principe des tendresses, et si je garde ce vent solaire qui chante poitrine offerte (sans souci d’une chemise), j’ai bel souvenir du long toucher des galaxies cordiales, de ton genou par terre pour la beauté qui compte, du feu pris dans la langue, à grand vocal, dans les piliers de la création où ne prend jamais fin la substance des étoiles
recommencée
recommencée !

Mapou

zwézo pani zel ba la pli
yo ka rété sispann
an plim mol ek fal frèt
(mi mwen sézi kon yo)

→   Lire Plus

Le décès de Frankétienne

Nous avons appris, avec une grande tristesse, le décès de Frankétienne, ce pilier incontournable de la culture haïtienne, survenu le 20 février 2025 à l’âge de 89 ans. Né Jean-Pierre Basilic Dantor Franck Étienne d’Argent le 12 avril 1936 à Ravine-Sèche, dans l’Artibonite, il laisse derrière lui une œuvre multiple et marquante, qui fait de lui l’un des plus grands écrivains et artistes haïtiens contemporains.

Romancier, poète, dramaturge, peintre, musicien et enseignant, Frankétienne est surtout reconnu pour avoir fondé le mouvement spiraliste, une démarche littéraire révolutionnaire inspirée des « Chants de Maldoror » de Lautréamont. À travers des œuvres majeures comme Mûr à crever (1968), Ultravocal (1972), Dézafi (1975) et Les Affres d’un Défi, il a su réinventer la littérature haïtienne, mêlant créole et français, et abordant les questions sociales et politiques de son pays avec une audace inégalée.

Sa contribution ne se limitait pas à la littérature. En tant que peintre et musicien, Frankétienne a enrichi le paysage artistique haïtien, et a formé plusieurs générations d’artistes. Il a également occupé des fonctions publiques, notamment en tant que ministre de la Culture et a reçu de nombreux prix, dont le Grand Prix de la Francophonie de l’Académie française en 2021, récompensant sa contribution exceptionnelle à la culture et à la langue française.

→   Lire Plus

« TGV » & « Mise en scène »

TGV

À ce train-là je n’ai
pas vu le temps passer !
Au train où il allait,
c’était un TGV…

Pas le temps d’un regret
de n’avoir de l’été
pas su mieux profiter
que déjà vient l’automne
sur le chemin de l’homme !

Pas moyen de migrer
et de se mettre au vert,
d’échapper à l’hiver
comme font les oiseaux…

Les ailes sont rouillées
et s’est courbé le dos.
En souvenirs trop flous
se muent les rêves fous

et des feux du printemps
s’évanouit la fumée…
Plus le temps d’espérer,
juste un dernier regard
dans le vague s’égare

avant qu’arrive en gare
sans le moindre retard
ce TGV du temps…
Au terminus, c’est quand
tout le monde descend !

Mise en scène

→   Lire Plus

Chamoiseau : « Nous sommes en face du surgissement de l’inconcevable »

Présent aux États-Unis lors de l’élection de Donald Trump, l’écrivain martiniquais en revient avec un manuel de résistance, invitant à dresser « un imaginaire de la Relation » face à l’obscurantisme capitaliste.

Edwy Plenel

14 février 2025 à 18h50

« L’indigence« L’indigence que créent les dominations est d’abord une disparition de la Beauté », écrit Patrick Chamoiseau dans le « Libelle » qu’il vient de publier aux éditions du Seuil, Que peut Littérature quand elle ne peut ? « Dans le capitalisme extrême, on a un renforcement de la bêtise et de l’obscurantisme. Nous sommes en face du surgissement de l’inconcevable », prolonge-t-il dans cet entretien pour Mediapart, quatrième numéro de notre émission « L’échappée ».

De retour d’une tournée universitaire aux États-Unis d’Amérique, où il a été témoin de l’élection de Donald Trump, l’écrivain martiniquais invite à ne pas se dérober face au défi que l’avènement de cet inconcevable lance aux principes d’humanité et d’égalité. « Pour imaginer le monde qui nous manque, la pensée a besoin de l’impossible », explique-t-il, en appelant à l’affirmation d’un « imaginaire de la Relation », dans le sillage de ses compatriotes Aimé Césaire et Édouard Glissant.

→   Lire Plus

La triste histoire du Président John-Fitz Ken

— Par Gary Klang —
Après le passage tumultueux à la Maison dite Blanche du président Blondinet, dont le patronyme trompeur fait penser à un gamin folâtre, l’Américanistan en eut assez de l’entendre vociférer contre le monde entier, le menaçant sans cesse de lui infliger des droits de douane exorbitants, ou encore d’accaparer le Canada, Gaza, le Groenland et le canal de Panama. Et c’est ainsi que tout sembla changer avec la venue d’un certain John Fitz-Ken, marchand de cacahuètes de son état et dont le discours d’investiture fit l’effet d’une brise fraîche :

Mes Chers Compatriotes,

J’ai honte de Blondinet et de ses conneries; j’ai honte chaque fois que je repense à la scène de la fiole à l’ONU où un général indigne sacrifia son honneur pour une guerre absurde qui fit plus d’un million de morts en un soir à Bagdad; j’ai honte de notre façon d’agir, de tout ce que nous faisons et cela doit changer.

Le monde entier nous hait. Mais comment en serait-il autrement ? Serions-nous le préfet de discipline d’une école appelée monde ? Jamais un geste venant du cœur!

→   Lire Plus

Ôter du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco la « soup jounou »

Lettre ouverte à Patrick DELATOUR, ministre de la Culture

« Haïti doit imérativement faire désinscrire la « soup joumou » de la liste du patrimoine immatériel de l’Unesco.

— Par Robert Berrouët-Oriol (*) —

M. Patrick DELATOUR
Ministre de la Culture
République d’Haïti
Port-au-Prince
Haïti

Montréal, le 7 février 2025.

OBJET / (1) Désinscription la « Soup joumou » de la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. (2) Inscription de l’Acte de l’Indépendance d’Haïti du 1er janvier 1804 sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.

Au cours des dernières années, au creux du continuum contextuel et politique où l’on a vu le PHTK néo-duvaliériste confier diverses missions à plusieurs « intellectuels serviles », une vaste opération de propagande identitaire affabulatrice a été conduite à l’échelle internationale auprès de l’Unesco. En dehors des moindres fondements historiques, cette vaste opération de propagande identitaire affabulatrice a permis de faire accéder la « Soup joumou » au statut a-historique de « Soupe de l’Indépendance », de « Soupe de l’identité nationale haïtienne » sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.

→   Lire Plus

« Prise de conscience » & « Onde tropicale »

— Par Patrick Mathelié-Guinlet —

Prise de conscience

Huîtres, saumon, caviar, homard
et, sans l’oublier, le foie gras
tandis qu’ailleurs meurent de faim
des hommes qui ne le sont pas !

De l’inégalité j’ai marre
et pourtant n’en vois pas la fin…
Pourquoi ne peut-on partager
aujourd’hui entre tous les hommes

les ressources comme la joie
des fêtes autour d’un bon repas
puisqu’à ce qu’il paraît nous sommes
dans un monde globalisé ?

Si soi-disant fut créé l’homme,
comme prétend la religion,
à l’image et la ressemblance
d’un dieu idéalement bon,

comment croire à la vraisemblance
d’un tel mythe lorsqu’on contemple
un spectacle aussi affligeant
donné par les marchands du temple ?

Face à de telles incohérences,
on se pose alors des questions…
Et à partir de maintenant,
faudra combien de temps encore
pour qu’enfin la situation
dans ce bas monde s’améliore ?

Onde tropicale

Mornes tropiques sous la pluie
que déverse le ciel tout gris
par cette longue après-midi
sentant la tristesse et l’ennui…

Mais bientôt jaillit l’arc-en-ciel
sous les rayons d’un chaud soleil
comme un philtre attendu d’oubli
des moments de mélancolie…

Et quand enfin tombe la nuit,
des tas d’étoiles vous sourient,
dansant dans vos yeux réjouis…
Des tropiques, c’est la magie !

→   Lire Plus

« Un Égyptien peut-il parler anglais ? » de Noor Naga

— Par Michel Herland —

«Une Américaine au Caire », ce titre eût été plus clair. En anglais d’où le livre est traduit, c’était If un Egyptian Cannot Speak english, ce qui ne valait pas mieux que le titre retenu pour l’édition française. Outre leur manque d’élégance, ces deux titres, l’anglais comme le français, ont le défaut de nous mettre sur une fausse piste en nous promettant une histoire plutôt drôle, ce qui est loin d’être le cas ; nous nageons au contraire en plein drame.

Oublions le titre puisque l’histoire – dramatique donc – contée par Noor Naga ne manque pas d’intérêt, d’autant qu’elle est astucieusement menée. L’auteure, à l’instar de son héroïne, est américaine d’origine égyptienne, comme elle venue enseigner l’anglais au Caire à la recherche de ses racines. À la différence de son héroïne Noor Naga a bénéficié d’une bourse d’écriture et, à voir comment ce roman plus ou moins auto-fictif (dans quelle mesure, le lecteur ne peut le savoir) est construit, elle a dû participer à un atelier d’écriture romanesque (creative writing) comme il s’en donne tant dans les université d’Amérique du Nord.

→   Lire Plus

Une table et des chaises en bois mahogany

— Poème de Philippe Charvein —

Plus que des objets de décoration que l’on remarquerait à peine, les yeux fatigués par l’habitude

Formes immobiles la plupart du temps épousant néanmoins le mouvement de la vie dans lequel s’inscrit la maisonnée En attente de quelque présence, vous vous prédisposez aux échanges, aux agapes, aux dialogues enflammés ou sereins à l’écriture solitaire, parfois.

Cette famille, oui, dont vous facilitez les échanges, les débats parfois houleux ces moments de bonheur loin des heurts du quotidien où le plus important est cette heure où la famille justement fait corps et cœur en dépit des malheurs qui heurtent

Point d’éclat, point de fulgurance, point de présence qui écrase plutôt une présence qui rassure, qui tranquillise, apaise, donne l’assurance d’une stabilité dans un monde où l’éphémère prend ses aises, ne dédaigne pas s’ériger en modèle

Nous devinons vous regardant la sérénité du bois dont vous êtes issus

Ce bois confident des secrets d’une terre première

Ce bois confident de ces voix humaines faisant monter leurs secrets et leurs désirs

Ce tronc qui s’élançait entre terre et ciel et duquel vous avez puisé l’énergie, de même que la force secrète des racines implantées dans la terre nourricière.

→   Lire Plus

Petites histoires fantaisistes, de Jean-Bernard Bayard (5)

— Par Jean-Bernard Bayard —

« Saut-D’Eau »
Saut-D’Eau est une commune de l’arrondissement de Mirbalais, qui fait partie du département du Centre d’Haïti, avec une population de quarante mille habitants. Elle a été fondée en 1905 et du 8 au 16 juillet, chaque année reçoit près de deux cent mille visiteurs. En 1948 un homme âgé d’une soixantaine d’années dénommé Fortuné, égaré avec son cheval dans une petite fôret à l’entrée de cette commune, aurait vu l’apparition d’une femme couronnée d’étoiles portant dans ses bras un nourrisson, et depuis lors, la fête patronale de la Vierge Marie du Mont-Carmel est célébrée à cette date et à ce site. Saut-D’Eau est considéré un endroit sacré tant bien pour les chrétiens que pour les vaudouisants. Ses fameuses chutes d’eau proviennent de la Montagne Terrible et cette eau miraculeuse produit une riche végétation, irrigant une terre rouge fertile, où les plantations abondent de denrées de toutes sortes. Le bétail trouve une herbe féconde pour se nourrir. En 2013 il y eu un forum communautaire de dix jours pour protéger les cascades de ce lieu saint qui montraient d’inquiétants signes de tarissement.

→   Lire Plus

« Les nuits de la lecture » en Martinique : le programme

23, 24 & 25 janvier 2025

Organisées pour la quatrième année consécutive par le Centre national du livre (CNL) sur proposition du ministère de la Culture pour célébrer le plaisir de lire, les Nuits de la lecture reviennent du 23 au 26 janvier 2025, sur le thème « les patrimoines ».

Ce thème renvoie d’abord à la littérature de l’intime : au patrimoine que nous ont légué nos aïeux, à ce qui nous a été transmis, ou non, à travers les générations et que l’auteur choisit d’évoquer dans son œuvre.

Le patrimoine est aussi collectif et procède d’un héritage commun, qui se mesure à l’échelle d’un territoire, d’une nation et parfois, de l’humanité.

La littérature est à la fois une composante de ce patrimoine, et une manière de le rendre vivant. Elle nourrit le patrimoine culturel matériel, à travers la transmission de bibliothèques  exceptionnelles, et immatériel, façonnant aussi nos connaissances, nos représentations et nos savoir-faire. Un pan de la littérature et de ses écrivains peut devenir « patrimonial », et nos auteurs contemporains constitueront le patrimoine de demain.

Jeudi 23 janvier
Saint-Pierre
18h30 – 21h : L’association culturelle l’Art Gonds Tout annonce le vernissage de l’exposition Patrimoines en écho à la Nuit.

→   Lire Plus

1 jour – 1 mot

— Par Patrick Chamoiseau —

22/01/25

« L’entrée en responsabilisation (mentale, statutaire, écologique, sociale, économique, culturelle, individuelle et collective) nous élèverait d’emblée à quelque chose de plus grand que nous. […] Toute vie humaine aspire à ce plus aérien ; et c’est la grande misère du capitalisme de nous avoir réduits (dans les fers de ses commodités) au vide existentiel de la consommation… ».

Faire-Pays, Éloge de la responsabilisation.

23/08/24
Une carte de « Citoyen Indien d’Outre-mer » pour les Martiniquais d’ascendance indienne
C’est une mise en œuvre de la complexité de la » Relation » qu’a proposée Glissant :

nul ne saurait être enfermé dans un monolithe identitaire, une culture, une langue, un territoire ou une nation…

Notre arbre relationnel individuel est un rhizome, une liane, un feuillage et un souffle du vent..

C’est sans doute pourquoi Césaire disait : la chose à espérer, c’est le vent….P.C.

23/08/24
Tiède petit matin de vertus ancestrales

Sang ! Sang

tout notre sang ému par le cœur mâle du soleil…

ceux qui savent la féminité de la lune au corps d’huile
l’exaltation réconciliée de l’antilope et de l’étoile
ceux dont la survie chemine en la germination de l’herbe !..

→   Lire Plus

L’éphéméride du 22 janvier

Léon-Gontran Damas décède à Washington le 22 janvier 1978

Léon-Gontran Damas (né le 28 mars 1912 à Cayenne, mort le 22 janvier 1978 à Washington, DC), est un poète, écrivain et homme politique français.

Il est cofondateur du mouvement de la négritude avec Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor dans les années 1940. Grand amateur de jazz, il publia en 1937 Pigments, recueil de poèmes préfacé par Robert Desnos où il se révolte avec violence contre une certaine éducation créole d’inspiration bourgeoise qu’il voit comme une acculturation imposée. Un de ses grands thèmes est la honte de l’assimilation. Engagé dans la politique, il fut député de Guyane.

Il fit à Paris des études de droit puis, à l’École des langues orientales, de russe, de japonais et de baoulé.

Biographie
Allée des Trois fleuves à Cayenne, dont le nom fait référence à Black-Label de Léon-Gontran Damas.

Léon-Gontran Damas est né à Cayenne, dernier des cinq enfants de Ernest Damas (1866-?), mulâtre européen-africain, et de Marie Aline (1878-1913), métisse amérindienne-africaine originaire de Martinique. Une sœur jumelle, Gabrielle, née quelques minutes avant lui, mourut en bas âge.

→   Lire Plus

L’île de Chido : L’espoir sous la tempête

— Par Ymane Alihamidi-Chanfi(*) —

Dans l’océan profond, un petit caillou seul,
Bijou vert et rubis dans l’écrin d’azur.
Cette île au grand cœur, sous des cieux si cruels,
Portait déjà le poids de ses sombres blessures.

Le volcan, rugissant, y forgea des douleurs,
Les séismes ont brisé son fragile équilibre.
Des bandes de jeunes fauves sèment aussi la peur,
Et l’abandon du loin rend son destin moins libre.

Quand Chido s’élança, un cyclone infernal,
Ses vents hurlaient si fort qu’ils fendaient l’horizon.
Les toits s’effondraient sous le ciel abyssal,
Emportant les écoles et brisant les maisons.

Femmes et enfants pleuraient leurs biens, leurs morts,
Les cœurs lourds de chagrin dans l’étreinte des cendres.
Les makis terrifiés fuyaient leurs arbres d’or,
Et les roussettes affamées cessaient de s’étendre.

Certains regardaient loin, avec un air hautain,
Méprisant ce caillou balayé par la mer.
Mais d’autres, valeureux, contre vents et destins,
Trouvaient dans leur courage une flamme sincère.

→   Lire Plus

Suzanne Césaire. Archéologie littéraire et artistique d’une mémoire empêchée d’Anny-Dominique Curtius.

— Par Sarha Fauré —

Suzanne Césaire, souvent éclipsée par la renommée de son mari Aimé Césaire, mérite pourtant une attention particulière pour la profondeur de sa pensée intellectuelle et esthétique. Née en 1915 en Martinique, elle fut une figure centrale du mouvement surréaliste antillais, tout en restant, durant de nombreuses années, une voix marginalisée dans le paysage littéraire. Son œuvre trouve une nouvelle reconnaissance grâce à l’ouvrage Suzanne Césaire. Archéologie littéraire et artistique d’une mémoire empêchée d’Anny-Dominique Curtius. À travers cette étude, Curtius éclaire une pensée radicale et originale qui, de 1941 à 1945, a interrogé les rapports de domination coloniale et proposé des alternatives esthétiques et théoriques avant-gardistes.

L’une des raisons pour lesquelles l’œuvre de Suzanne Césaire est restée dans l’ombre réside dans l’histoire de Tropiques, revue qu’elle cofonde en 1941 avec Aimé Césaire, René Ménil et Aristide Maugée. Bien que cette revue ait été un lieu majeur d’expression intellectuelle et artistique, sa diffusion restreinte et la censure qu’elle subit après 1943 ont contribué à l’effacement de la pensée de Suzanne Césaire. À cela s’ajoute le fait que son rôle a souvent été relégué à celui d’épouse d’Aimé Césaire, ce qui a occulté la force de ses propres idées.

→   Lire Plus

« De feu, de fer et de sang! » & « L’espoir est un oiseau de feu »

De feu, de fer et de sang!

De sang, de feu et de fer…
On devrait ajouter : de sueur, de peur et de pleurs
et ça pourrait faire une assez bonne description de l’enfer…
Mais ce n’est, hélas, que celle
de notre ère industrielle
pour laquelle fut versé
le sang de tant d’ouvriers exploités !
Et même si, à l’ère chimique,
le fer a fait place au plastique,
les victimes sont encore et toujours les prolétaires,
tous ces damnés de la Terre
condamnés par la malbouffe et la pauvreté
à une usante vie de misère
pour la jouissance de quelques milliardaires…

→   Lire Plus

« Les Merveilleuses Années 60 », de Gary Klang

— Par Gary Klang —
Rien ne remplacera les années 60. J’ai eu la chance de vivre Mai 68 aux premières loges, habitant au 34 de la rue Gay-Lussac, à l’endroit même où fut érigée la première barricade. Je revois encore Dany le Rouge passant devant chez moi et haranguant ses troupes. Dans mon appartement, se trouvaient plusieurs de mes amis ainsi que des habitants de l’immeuble dont une fille que nous appelions Tête de Poisson, une communiste endurcie qui nous chantait des airs de balalaïka. Mon copain Bobby Labrousse, alias Brebis Galeuse, enfonça rageusement dans le nez de Jules Badeau – autre surnom – une plume qu’il tira d’un coussin, n’en pouvant plus de l’entendre déconner. Ce soir-là, Jean-Claude O’Garro resta dormir chez nous de peur d’être arrêté par les CRS. Je dus le faire asseoir sur une chaise n’ayant pas assez de lits. Soulignons que, juste en dessous de chez moi, vivait mon amie, Madame Paul Fort, la femme du poète, qui me parlait des célébrités qui venaient autrefois la visiter, tels Paul Valéry ou Georges Brassens.
Les années 60 me donnèrent également l’occasion de voir le Général de Gaulle, accompagné de André Malraux lors de l’hommage rendu à Jean Moulin sur la place du Panthéon, à deux pas du 34 de la rue Gay-Lussac.

→   Lire Plus

Petites histoires fantaisistes, de Jean-Bernard Bayard (4)

« Marche Nocturne »
La lune cette nuit brillait sur une cime couverte d’une toute nouvelle couche de neige. Les étoiles brillaient d’une intensité remarquable et semblaient scintiller comme de beaux diamants dansl’immense firmament. L’air était hivernal, et faisait mal au nez si on respirait trop fort. Je marchais dans la clairière comme chaque soir après dîner, je n’avais même pas besoin de la torche de poche car il faisait presque clair ce soir-là. Les hibous semblaient déjà en train de chasser des rongeurs, je les entendais hululer, siffler, et même aboyer. Je pouvais voir les yeux lumineux d’animaux nocturnes et j’espérais ne pas rencontrer un putois sur mon passage. En admirant le ciel, je vis un astre tracer l’espace avec une traînée de feu comme queue. J’observais ce phénomène naturel, quand l’astre commença à changer de couleurs et à apparaître comme un engin plutôt qu’un astre. Le lendemain, j’allai au commissariat de police afin de rapporter ce que j’avais vu et pour demander s’il y avait une explication à ce qui était arrivé la veille au soir. Non seulement qu’ils ont tout nié, mais toutes les personnes avec qui j’ai parlé ne voulaient aucunement s’y impliquer.

→   Lire Plus

À propos de « Suzanne Césaire. Archéologie littéraire et artistique d’une mémoire empêchée »

— Par Rodolf Etienne —

Le vendredi 10 janvier dernier, la médiathèque de Sainte-Luce accueillait une rencontre littéraire autour de l’œuvre de Suzanne Césaire proposée par le Club Soroptimist Diamant les Rivières et accueillant l’universitaire Anny-Dominique Curtius, auteure de l’ouvrage « Suzanne Césaire. Archéologie littéraire et artistique d’une mémoire empêchée ». Un moment riche d’enseignements et de partage autour d’une œuvre et d’un patrimoine qui subjugue et passionne de plus en plus et qui tend, au fil des études et des recherches, à retrouver sa place dans le panthéon littéraire martiniquais.

Pour ceux et celles qui s’intéressent à la littérature antillaise et singulièrement à la littérature martiniquaise, la figure de Suzanne Césaire pose de nombreuses interrogations. Son œuvre, brève, fulgurante, empêchée, a posé tout de même les bases du renouveau de la littérature antillaise et martiniquaise. Trop longtemps méconnue, masquée par l’aura quasi démiurgique de son mari, Aimé Césaire,  son legs suscite aujourd’hui, plus d’une cinquantaine d’années après sa mort, un regain d’intérêt de la part de nombreux universitaires, artistes ou critiques littéraires. Pour le plus grand bonheur des autres passionnés, heureux de s’enrichir de cette quête inaboutie vers la mémoire retrouvée, quête encore à mûrir, encore à satisfaire, encore à explorer.

→   Lire Plus

Gérard de Catalogne et l’édition canadienne-française

Le rôle de Gérard de Catalogne dans l’introduction des idées fascistes en Haïti… par Virginie Belony(*)

Source : haitianhistoryblog.com

Lien https://haitianhistoryblog.com/gerard-de-catalogne-et-ledition-canadienne-francaise-un-haitien-au-centre-dune-crise-1941-1948/

Note contextuelle

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

En raison de sa rigueur conceptuelle et analytique adossée à des références documentaires de premier plan, je recommande hautement cet article de Virginie Belony. L’historienne Virginie Belony a soutenu avec succès en septembre 2022, à l’Université de Montréal, une originale thèse de doctorat en histoire intitulée « Tout [n]était pas si négatif que ça » : les mémoires contestées du duvaliérisme au sein de la diaspora haïtienne de Montréal, 1964-2014 ». Aujourd’hui Virginie Belony est professeure adjointe au Département d’histoire de la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal. À l’instar de sa thèse de doctorat, le présent article de Virginie Belony est incontournable et fort éclairant sur plusieurs registres. D’une part, depuis la défaite du nazillon Jean-Claude Duvalier en 1986, la société haïtienne n’a toujours pas entrepris sa déduvaliérisation et, d’autre part, l’analyse approfondie de la pensée duvaliérienne vue de l’intérieur, dans l’enclos de son dispositif narratif, n’a pas encore fait l’objet de travaux spécifique de recherche universitaire.

→   Lire Plus