Catégorie : Théâtre

Hervé Deluge : « Je me considère comme un artisan du spectacle qui essaye de faire le mieux possible… »

ITV d’Hervé DELUGE, metteur en scène, propos recueillis par Rodolf Étienne

Après « l’affaire de l’Atrium » en avril 2017 et les déboires qui s’en sont suivis, Hervé Deluge, metteur-en-scène, dans le cadre de son passage au Festival Off d’Avignon avec « Cette guerre que nous n’avons pas faite » sur un texte de Gaël Octavia, revient sur son parcours d’artiste. Il se livre, ne cachant pas une certaine déception. Mais, heureusement, aujourd’hui encore, pour lui, le théâtre demeure…

Rodolf ÉTIENNE : Après tous ces déboires d’avril 2017, aujourd’hui quel est ton bilan, ton ressentiment ?

Hervé DELUGE : Si c’est à propos de mon désaccord avec les dirigeants passés de la Dac et de l’Atrium : Je n’ai pas de ressentiment. Ils sont repartis. Je me réjoui que cet épisode soit terminé. A cette époque là, je venais d’achever le montage de « Romyo et Julie », 27 artistes et techniciens rémunérés. Je ne reviendrai pas sur les circonstances de tous les sabotages dont j’ai été l’objet. Comment ne pas être révolté face à une situation d’injustice ?

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« Roméo et Juliette », « La Gaviota » & « Les valises bleues »

— Par Dominique Daeschler —

Roméo et Juliette
Mise en scène Alain Timar, théâtre des Halles
Par Dominique Daeschler
Alain Timar transpose en 2100 l’histoire de Roméo et Juliette avec K’Arts ( Korean National University of Arts de Séoul). Tout se passe dans les clans qui ne comportent qu’un seul sexe : des hommes chez les Montaigu, des femmes chez les Capulet ce qui bannit l’ hétérosexualité. Ce sont des bandes rivales( petit clin d’oeil à West Side Story ? ) qui se jaugent et appellent Roméo d’un côté , Juliette de l’autre, à résister à leur attirance jugée primitive et quasi contre nature. Quatorze comédiens à la fois danseurs et musiciens se partagent le plateau, circulant avec une souplesse de félins dans des déplacements chorégraphiés avec minutie, jouant de références aux arts martiaux, ce qui donne une certaine rigidité aux corps (pas de rapprochement tendre dans les étreintes) à l’unisson d’un dialogue souvent martelé. La parole semble projetée hors du corps, presque dissociée de ce dernier.
La conscience d’être dans une autre culture, dans la prose de parole le jeu, le rôle du silence, de l’attente et de l’observation ( les groupes assis, levés comme des choeurs) est magnifié par la présence constante sur scène du musicien Yougsuk Choi, qui sait, par sa musique, nous rappeler l’existence de cet ailleurs.

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« Olympe », texte et m.e.s. Franck Salin, Cie du Grand Carbet

— Par Dominique Daeschler

Firmine Richard est sur scène comme un poisson dans l’eau. Olympe de Gouges, elle se la joue tranquille, en féministe et défenseuse pugnace de la place des acteurs et actrices domiens dans les productions françaises. Elle va, vient de son petit lit d’où elle écrit fébrilement au-devant de la scène. Elle est dans sa cellule et elle raconte sa vie : fille d’un noble qui ne l’a pas reconnue mais éduquée, mariée à un homme modeste, elle lutte pour les droits des femmes et l’égalité, quelle que soit la nationalité, des êtres humains tout spécifiquement de ceux qui ont connu l’esclavage.

Firmine Richard ne joue pas d’éclats, de coups de gueule mais assène une parole tranquille empreinte de ce qu’on appelle aux Antilles « le respect » à la connotation plus complexe que le mot. Elle bouge, danse dans la même énergie.

Bien trouvé : se couvrant le visage de blanc elle retourne à son profit les « black faces ». Dans le sud des Etats -Unis, tout particulièrement en Caroline et en Louisiane des planteurs blancs jouaient aux noirs, esclaves ou serviteurs, en étalant du noir sur leur visage.

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« Un Démocrate », texte et m.e.s. Julie Timmerman

Par Dominique Daeschler —

Comme à son habitude, au théâtre de l’Oulle, Julie Timmerman empoigne le plateau et le spectateur. Pas de décors : le juste nécessaire ( une table, un fauteuil, un grand tableau) qui permet les changements à vue. De façon quasi obsessionnelle, les murs sont recouverts d’affiches, de photos, de cartes : il convient d’expliquer pour bien comprendre, pour convaincre, faire exister sa pensée. Et il faut aller vite, vite, pardon papa Brecht, car aujourd’hui c’est le temps des fake news, du Big Data.

C’est comme ça que se raconte, face public, l’histoire d’Edward Berneys, neveu de Freud, parti aux États-Unis, pour devenir un manager. Il y a des mots « couverture » à large spectre, comme relations publiques par exemple, qui vont permettre, sans faire peur, de manipuler le désir et l’ envie. On parle de segment, d’émotion. Rien à vendre je vous dis :le tour de force c’est de faire croire à l’autre que c’est lui qui décide, choisit. Tour de passe-passe : introduire une idéologie dans le choix.

Quatre comédiens se démènent, chacun à son tour est Berneys ; ils racontent comment appeler les femmes à fumer dans la rue pour augmenter la vente sous couvert d’égalité et d’émancipation, comment on achète les politiques et les hommes d’affaires ( Guatemala).

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« Une ombre vorace », « Kal », « Elles avant nous »

— Par Dominique Daeschler —

Une ombre vorace, texte et m.e.s. Mariano Pensotti

— Par Dominique Daeschler —

L’argentin Mariano Pensotti, réalisateur et fondateur du groupe Marea, à travers une ascension interrompue de l’Annapurna par la mort de l’alpiniste(Jean Vidal), part à conquête de soi et de ses zones obscures. Aller plus loin que le souvenir, vouloir comprendre, se mettre dans la « peau de »c’est ce que fait le fils de Vidal en partant sur les traces de son père. Parallèlement, un comédien, cherche dans un film sur la vie de Vidal, comment jouer Vidal. Le jouer ? Le vivre ? Le comédien a le même dilemme que le fils : à tarauder le souvenir, à exacerber la mémoire, voilà le réel qui ne sait plus qui a le dessus.

Les récits s’entrechoquent : le fils est le père, le père est le fils, le comédien est Vidal, le fils est le comédien qui devient le fils…tournis… Tout se croise, plusieurs récits, deux monologues se font face. Le double devient obsédant, comme l’idée d’un corps jamais retrouvé. L’argentine n’en a pas fini de chercher ses disparus des années de dictature.

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« Elizabeth Costello », sept leçons et cinq contes moraux, d’après J.M.Coetzee , m.e.s. Krysztof Warlikowski

— Par Michèle Bigot —

J.M. Coetzee est à l’honneur sur les scènes théâtrales cette année. On a déjà eu le plaisir de voir une adaptation de L’Eté de la vie dans Balkony, mise en scène par Krystian Lupa à l’occasion du festival des Comédiens de Montpellier. Le voici de retour chez Warlikowski avec une adaptation de trois textes majeurs: Elizabeth Costello, L’Abattoir de verre et L’Homme ralenti. Parallèlement à ce montage de textes figure une association d’artistes participant à la création théâtrale, Sophie Calle, Philippe Pareno (Anywhere Out of the World). Cette collaboration correspond aux intentions profondes de Warlikowki qui déclare:  » […] je ne me vois plus faire des mises en scène au sens classique du terme, mais mener des projets particuliers, sur le temps long, qui ouvrent le champ du théâtre. » A cet égard, Elizabeth Costello, le texte de Coetzee correspond parfaitement à cette entreprise de déconstruction. En effet, le roman de Coetzee figure une série de conférences prononcées par le personnage éponyme sur des sujets qui lui tiennent à coeur, la question du réalisme, la mise à mort des animaux, éros, enfin la question du mal absolu.

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« Sur les pas de Léonard De Vinci », texte et musique, Estelle Andrea, m.e.s. William Mesguich

Mercredi 24 juillet & Jeudi 25 juillet➽ 19h30 au T.A.C.

Léonard de Vinci, c’est LE génie dans toute sa splendeur.
Peu d’hommes peuvent se targuer d’avoir autant marqué l’Histoire tant d’un point de vue artistique que scientifique.
Obstination et rigueur, telle était sa devise.
Petits et grands, qui n’a pas un jour rêvé de retourner
« Sur les pas de Léonard De Vinci » ?

Synopsis :
Lors d’une de ses visites au Louvre, Lisa, jeune artiste peintre et son frère Léo vont être transportés 500 ans en arrière par l’intrigante Joconde…Ce voyage fantastique et musical en pleine Renaissance italienne va être l’occasion pour eux de rencontrer et côtoyer le grand maître Da Vinci, peintre, sculpteur, inventeur fou, humaniste, précurseur dans de nombreux domaines et rêvant par-dessus tout de faire voler l’homme. Parce que le présent se nourrit de l’héritage du passé et que la transmission est essentielle, Léo et Lisa ne seront plus jamais les mêmes après cette rencontre unique et initiatique.

Envisager un spectacle sur Léonard de Vinci tout juste 500 ans après sa mort (1519-2019) c’est d’abord et avant tout l’occasion unique de rendre hommage à un homme qui n’a jamais cessé d’observer, d’apprendre, de vouloir comprendre et tenter d’améliorer la Vie dans bien des domaines.

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« Trois contes et quelques », texte Emmanuel Adely, m.e.s. Joël Fesel

— Par Michèle Bigot —

On a vu des spectacles tragiques, d’autres émouvants, d’autres encore poétiques, mais ici on a affaire à un spectacle follement drôle, puissamment drôle, sans rien perdre de sa finesse et de son intelligence. Parfaitement adapté au jardin du musée Angladon.

Vous entrez là le matin de bonne heure, encore à la fraîche (relativement!) et vous êtes accueilli par un petit marquis tout revêtu de velours jaune moutarde, trônant sur son siège Louis XVI, figé dans une attitude impassible, tandis que se déploie à vos pieds un parterre de gazon synthétique d’où sortiront tous les objets nécessaires au spectacle. Bientôt le portail s’ouvre et vous voyez arriver deux gaillards à la Laurel et Hardy (un petit râblé barbu et un grand maigre osseux) perchés sur une sorte de petit véhicule à roulettes, hautement improbable et qui glisse sur ses rails de façon déjà comique.

Le ton est donné, vous allez naviguer entre le grand siècle et l’actualité des VIP les plus populaires, stars des media et rois du pétrole croulant sous les dollars. En plein burlesque, le vrai, le désopilant burlesque, dans la meilleure tradition du théâtre français.

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« Malaise dans la civilisation », texte & m.e.s. Étienne Lepage & Alix Dufresne

Joli pied-de-nez freudien
— Par Michèle Bigot —
Entre pied-de-nez et clin d’œil, l’allusion au texte de Freud publié en 1929 est moins innocente qu’il n’y paraît. Le propos de Freud n’était pas des plus réjouissant. Il y constatait l’impuissance des humains à être heureux, l’omniprésence de la violence, de l’insatisfaction et de la souffrance occupant la plus large partie des émotions. La même thématique va se déployer sur le plateau, mais dans un genre original: c’est le comique, la bouffonnerie et l’absurde qui occupent la scène et les personnages sont désorientés voire parfaitement déjantés. Les quatre comédiens sont à l’unisson, entre dérangement mental et acrobatie de jeu. A la mode québécoise.
Face à vous, sortent du rideau de scène quatre touristes débarqués là par hasard, qui découvrent les lieux, et font mine de retourner se planquer quand ils aperçoivent la masse des spectateurs. Ils découvrent avec stupeur le quatrième mur. Peu à peu, ils vont s’enhardir, explorer les lieux, le plateau, le rideau de scène, prendre contact avec cet étrange public, domestiquer l’espace du théâtre. Ils se testent, ils jouent, ils se délient et au fur et à mesure de leur exploration, c’est une mise en cause et une interrogation vivante de ce mystère que reste une scène théâtrale.

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« Nannetti, le colonel astral », texte, jeu et m.e.s. Gustavo Giacosa

— Par Michèle Bigot —

Voilà une révélation comme on en voit parfois (souvent?) au festival off d’Avignon. Certes ce n’est pas une création pour Avignon, puisque la compagnie SIC12 n’en est pas à son coup d’essai. Elle s’est fait une spécialité de produire sur le plateau les plus fortes manifestations de l’art brut. SIC12 est une plateforme multidisciplinaire installée à Aix-en-Provence qui regroupe une diversité de productions, théâtre, musique, exposition. Ainsi Nannetti, colonel astral s’est déjà produit à la Manufacture d’Aix-en -PRovence, en lien avec l’exposition Ecritures en errance..

Il s’agit d’un long poème musical inspiré des écritures murales réellement effectuées par Oreste Fernando Nannetti sur les murs de l’hopital psychiatrique de Volterra. A l’heure de la promenade, Nannetti grave sur les murs de pierre ses divagations à l’aide de la pointe métallique de la boucle de son gilet, produit un texte sublime, entre rêverie et élaboration poétique. Le quotidien de l’enfermement s’efface alors devant les images cosmiques produites par l’imagination. La vidéo permet de prendre la mesure de ce texte gravé. Le comédien Gustavo Giacosa fait de Nannetti un poète inspiré, un clown solaire, astral (son nez rouge en carton donne le ton).

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« Manuela et le boxeur »: un vrai théâtre populaire!

— Par M’A —

C’est dans la rue qui porte son nom, dans le centre culturel qui porte son nom, que l’avant-première de la toute première pièce de théâtre évoquant sa vie a été jouée et saluée par un tonnerre d’applaudissements grandement mérités.

J. José Alpha s’est livré à un long travail d’enquête, multipliant les entretiens avec les proches, relisant les articles de presse locale, française et étrangère, exhumant les archives de la Bibliothèque Schoelcher et les documents de la Fédération Française de Boxe (BoxTime) pour nous proposer « Manuella et le boxeur », « Drame d’inspiration tragique » à propos de la vie de François Pavilla. Un travail d’historien et de sociologue qui restitue avec justesse le climat et les contradictions sociétales dans lesquelles s’est construite la phénoménale carrière du boxeur martiniquais. Arrivé en métropole dans les années 1950, il fait partie de cette génération de migrants venus d’outre-mer à qui l’État, préfigurant le BUMIDOM, promettait opportunité et vie meilleure. Cependant, ils ont souvent dû lutter contre l’exil et la misère, l’ostracisme et le racisme. François Pavilla, grâce à la boxe, parvient à se sortir de la pauvreté, incarnant l’espoir et la détermination de ceux qui ont cru en un avenir meilleur.

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« Chorus » : le retour d’Amel Aïdoudi

— Par Selim Lander

« Et je dis que la vie est ténèbre, en effet, sans un désir ardent.
Et tout désir ardent est aveugle, s’il n’y a pas connaissance.
Et toute connaissance est vaine, s’il n’y a pas travail.
Et tout travail est vide, s’il n’y a pas amour ;
et lorsque vous travaillez avec amour, vous liez vous-même à vous-même, et aux uns et aux autres, et à Dieu.»
Khalil Gibran, Le Prophète.

Tel est le texte qu’Amel Aïdoudi a choisi de travailler pour le porter sur les planches, un texte intemporel, un succès mondial. Sur le fond les poèmes en forme d’aphorismes ne sont souvent que des évidences, des préceptes convenus pour une « vie bonne », c’est-à-dire ordonnée par la sagesse (cf. Aristote in Éthique à Nicomaque). Mais, d’une part, s’il s’agit de banalités elles sont toujours bonnes à entendre par la plupart d’entre nous qui passons notre (brève) existence le nez dans le guidon, en écartant surtout tout ce qui pourrait nous ramener à l’essentiel. Et, d’autre part, même si ces aphorismes peuvent apparaître à certains banals et sans intérêt, ils sont transcendés par la poésie.

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« Manuela et le boxeur », texte & m.e.s. J.José Alpha

Vendredi 19 juillet à 19h30 Centre culturel François Pavilla Trénelle
Par la Cie Téatlari – Théâtre de l’histoire des cultures créoles
Le récit de la tragédie qui marque l’histoire du grand boxeur martiniquais François Pavilla (1937-1968), triple champion de France de boxe des poids welters et super welters de 1964 à 1968, est pour la première fois, porté à la scène théâtrale par son épouse Manuela Pavilla née Graça (1931-2009).
C’est à partir des témoignages des ses proches et partenaires, du Club Spirit of Pavilla des Terres Sainville, des archives de la presse locale et nationale et de la Fédération Française de boxe (palmarès) que J. José Alpha va se nourrir pour créer une biographie romancée de la vie du champion de boxe .lequel tire sa révérence 10 ans après la naissance de la Vème République Française
Distribution : Gladys Arnaud / Eric Bonnegrace / Laurent.Troudard Texte et mise en scène : J. José Alpha (2023)

François Pavilla, né le 10 octobre 1937 à Fort-de-France en Martinique, est une figure marquante de la boxe française. Son parcours, tant sur le plan sportif que personnel, témoigne de la résilience et de la détermination d’un homme ayant surmonté de nombreux obstacles pour atteindre les sommets de sa discipline.

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« Chorus », texte de Rim Laredj, m.e.s. Amel Aïdoudi

Jeudi 18 juillet à 19h30 | Vendredi 19 juillet à 19h30 Payant | Théâtre Aimé Césaire à Fort-de-France
Texte : d’après « Le prophète » de Khalil Gibran et « Psaumes »
Les périodes de troubles et de bouleversements nous ramènent généralement aux questions essentielles, celles qu’on ne pose même plus à voix haute et intelligible.
Les aspects de la vie semblent échapper à toutes formes d’entendement.
De part la simplicité puissante de sa poésie, « CHORUS » d’après « Le Prophète » de Khalil Gibran propose un type de réponse suffisamment claire pour être amplifié par le théâtre et donc mis en chair….
Mise en scène : Amel AIDOUDI
Chant, musique, images vidéo, calligraphie : Rim LAREDJ
Assistante à la mise en scène : Sana AÏDOUDI
Texte : d’après le prophète de Khalil Gibran et « Psaumes » texte de Rim Laredj

Gibran Khalil est un poète libanais d’expression arabe et anglaise et un peintre.
Sa mère est la fille d’un prêtre dont la famille était d’origine musulmane. Les prêtres qui rendent visite régulièrement à sa famille lui apprennent la langue arabe et ainsi que la langue syriaque aussi bien que l’étude de la Bible.

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« Humour Ô Féminin »

22 & 23 juillet au Grand Carbet de Fort-de-France à 20h

Depuis sa création en 2014, l’association Bik Kreasyon s’attache à valoriser l’humour antillais, en particulier guadeloupéen. Elle a également fondé le seul café-théâtre de Guadeloupe. Chaque premier mercredi du mois, la scène du Comik Kréyol Show é lé zanmi accueille aussi bien de jeunes comédiens, parfois lycéens, que des grands noms de l’humour.

La troupe du Comik Kréyol Show ne se limite pas à la Guadeloupe. Elle se produit également en Martinique, à Saint-Barthélemy, en Guyane, en France métropolitaine, et partage la scène avec des artistes renommés comme Jamel Debbouze et Anne Roumanoff. Bik Kreasyon organise aussi des événements annuels majeurs tels que le 30 Décembre du Rire et Humour Ô Féminin.

En 2019, face à la nette différence entre le nombre de femmes pratiquant le théâtre et celles visibles sur scène, le Président de Bik Kreasyon a eu l’idée de créer un festival exclusivement féminin. L’objectif de cet événement est de mettre en lumière les talents féminins souvent méconnus du grand public. La première édition d’Humour Ô Féminin s’est tenue les 22 et 23 mars 2019 au centre culturel de Sonis.

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« Lieux Communs », texte & m.e.s. Baptiste Amann

— Par Michèle Bigot —

En forme de préambule, le fronton de la scène affiche ce superbe avertissement: « Ceci est la reconstitution très réelle d’événements absolument fictifs, décrivant les trajectoires de personnages absolument fictifs, par la médiation d’acteur.rices bien réel.les qui ont accepté, à partir d’éléments absolument fictifs, de restituer dans le réel les vérités absolument fictives de chacun.unes d’entre elleeux. »

Pour alambiquée qu’elle paraisse cette maxime est la définition la plus rigoureuse de la représentation théâtrale. Nous voilà avertis. Tout le jeu va reposer sur la dialectique entre fiction et réel. S’il est vrai que la fiction est une modalité du réel, le vrai est souvent plus du côté de celle-là que de celui-ci.

Ce jeu acrobatique de la représentation prend ici la forme d’un thriller en trois parties: il s’agit donc d’une enquête, c’est-à-dire d’une recherche et d’une reconstitution problématique. Tout tourne autour d’un crime : un homme a tué une femme. Le contraire nous aurait étonnés. Ni le criminel ni la victime ne seront présents du scène: la victime pour des raisons évidentes, puisque son crime l’efface de l’espace et le criminel parce qu’on ignore qui il est .

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« Il n’y a pas de Ajar », texte de Delphine Horvilleur, m.e.s. Johanna Nizard et Arnaud Aldigé, jeu: Johanna Nizard

— Par Michèle Bigot —

C’est un monologue, une charge contre l’identité que Delphine Horvilleur publie en 2022. Il est plus que jamais d’actualité aujourd’hui alors que les « identitaires » menacent de prendre le pouvoir. Identitaires que l’on ne trouve pas seulement à l’extrême droite, quoique ce soit leur terreau naturel. « Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part » font florès aujourd’hui, comme ceux qui croient dur comme fer être quelqu’un, un seul et unique quelqu’un, que les thérapies douces et la spiritualité new age californienne nous inviteraenit à retrouver, à cultiver. Que ces idéologies soient funestes autant que risibles, ça ne fait aucun doute.
Delphine Horvilleur appuie sa démonstration sur l’exemple de caméléon qu’a fourni Romain Gary avant de disparaître. Fiction littéraire, double de papier savamment entretenu, supercherie d’écriture, autant de figure de la multiplicité de l’être et Emile Ajar est là pour nosu le rappeler. Delphine horvilleur en rajoute une couche en imaginant un fils pour Emile Ajar, Abraham Ajar, fils d’un père ficitf , enfant d’un livre. elle va chercher dans les textes de la tradition juive l’aliment de cette philosophie du manque et de la pluralité: on reconnaît ici la philosophie de Marc-Alain Ouaknin, précieuse pour les temps qui nous attendent.

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« Exit » adaptation de Karine Dubernet et Benjamin Gautier, d’après le documentaire de Fernand Malgar, m.e.s. Charles Templon

— Par Michèle Bigot —

Voici un spectacle original et courageux qui relève d’une thématique difficile et éminemment contemporaine: le suicide assisté. L’assemblée nationale était en pleine discussion sur le projet de loi ouvrant enfin une perspective d’espoir à ce sujet quand est arrivée la dissolution. Dès lors il est à craindre que le projet passe aux oubliettes, surtout si l’extrême-droite arrive au pouvoir de façon imminente. D’autant plus nécessaire paraît cette proposition théâtrale, qui a vu le jour au moment où la convention citoyenne s’était prononcée en faveur de l’euthanasie et du suicide assisté. Que de recul en quelques mois!

Charles Templon, le metteur en scène s’empare du sujet après avoir vu le documentaire de Fernand Melgar Exit. Totu le travail d’adaptation théâtrale reste à faire, qui implique remaniement du texte, coupes choisies, montage inédit, distribution des rôles aux acteurs, scénographie, bref une véritable mise en scène de théâtre. On est en droit de se demander pourquoi faire un tel travail quand le documentaire pouvait suffire à faire le tour de la question. La réponse est apportée par le metteur en scène lui-même.

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« Le journal d’un fou », de Nikolaï Gogol, adaptation et m.e.s. Ronan Rivière

— Par Michèle Bigot —

En dépit du tire, il s’agit moins d’un journal que d’une narration au fil des jours de la vie du petit fonctionnaire Pétersbourgeois, Aksenty Ivanovitch Poprichtchine. quoique d’antique noblesse et fier de son sang bleu, Aksenty a tout d’un déclassé., un de ces ronds de cuir dont fourmillent les administrations du XIXèsiècle et pas seulement en Russie: voir chez Balzac ou Maupassant. Le réalisme littéraire raffole de cette triste figure. Mais chez Gogol la figure se teinte d’une dimension métaphysique; il fait sombrer son anti-héros dans la folie . Vivant seule avec sa domestique ( Mavra, une paysanne ukrainienne nostalgique de la vie au village et qui éprouve un secret mépris pour ces hobereaux russes perdus dans le système et fort incultes à ses yeux, déjà!!), Aksenty se voit contrarié dans son ambition comme dans ses amours. La frustration qu’il accumule est telle qu’il finit pas sombrer dans la folie. L’univers parallèle que lui inspire ses bouffées délirantes le protège de sa déception. Il s’y accroche comme au seul remède à sa solitude et à son désespoir.

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« Hécube, pas Hécube », d’après la tragédie d’Euripide, texte et m.e.s. Tiago Rodriuez

— Par Michèle Bigot —

Le texte imaginé par Tiego Rodriguez est une adaptation libre de la tragédie d’Euripide: la répétition de la tragédie antique par la troupe de la Comédie-Française est l’occasion de l’écriture d’une nouvelle tragédie, contemporaine, qui vient s’inscrire entre les lignes du texte d’Euripide. C’est une réplique moderne dans laquelle Nadia, l’interprète d’Hécube (jouée en l’occurrence l’excellente Elsa Lepoivre), apprenant que son fils Otis, atteint de troubles autistiques est l’objet de maltraitance dans l’institution qui l’a pris en charge.

Hécube femme de Priam eut de nombreux enfants dont Hector et Cassandre. Mais ce sont les deux derniers qu’elle perd dans cette tragédie: son dernier fils Polydore avait été confié au roi de thrace, Polymnestor, avec de grands trésors. Polymnestor, le traître fait assassiner Polydore pour lui dérober ses trésors. Hécube trouve le corps de son fils abandonné sur le rivage. Elle s’introduit dans le palais de Polymnestor, lui crève les yeux à l’aide de ses servantes troyennes et assassine ses fils. Elle représente donc une image de la vengeance en action et la question posée par la tragédie est celle de la justice.

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« Un pas de chat sauvage », de Marie Ndiaye, m.e.s. de Blandine Savatier

— Par Michèle Bigot —

Impressionnée et quelque peu déroutée de voir son texte porté sur scène , Marie NDiaye écrit: « Le spectacle somptueux, furieusement féerique de Blandine Savatier m’a mise en présence de ce que je n’avais pas su ni compris en l’écrivant: cette histoire est un télescopage d’apparitions ou, plus précisément de revenantes. » Belle expérience d’extériorité par rapport à son propre texte, résultat de ce qu’on nomme publication. En rendant un texte public , on le lâche dans la société, il a désormais libre cours et fait son chemin loin de l’auteur. Cette extériorisation est décuplée lorsque ce texte est adapté à la scène: miracle de la scénographie, de l’incarnation par des actrices, des chanteuses, éclairé par des lumières , porté par des voix, des effets de rythme, des évolutions chorégraphiées.

L’affaire est complexe et d’un actualité étonnante: Une femme écrivaine, intellectuelle et blanche , double fictionnel de Marie Ndiaye, envisage d’écrire un roman à propos d’une chanteuse cubaine du XIX ème siècle, Maria Martinez. Mais pour ce faire, elle a recours à une femme faisant office d’intermédiaire, Marie Sachs, elle-même chanteuse noire, qui ayant eu vent de l’ambition de l’écrivaine la relance en lui demandant où elle en est de ses recherches.

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« Entrée des artistes », texte & m.e.s. d’Ahmed Madani

— Par Michèle Bigot —

Voici un petit bijou à ne rater sous aucun prétexte. Ceux qui ont eu la chance de voir F(l)ammes et Incandescences retrouveront ici la fête théâtrale qui les a charmés. C’est tout un esprit d’équipe, un vrai travail collectif qui anime le groupe. Ce sont des jeunes issus de tous les milieux et de toutes les régions qui ont été sauvés par le théâtre. Sur les planches, ils ont appris la liberté du corps, la juste expression des voix, le choix mesuré des mots, la danse, la musique, l’exultation des corps délivrés des pesanteurs familiales et sociales. Tous les personnages jouent ensemble cet hymne au théâtre libérateur. A la faveur d’un apprentissage long et exigent, ils se tiennent au bord du quatrième mur, fiers, libres et joyeux. On leur a enseigné que « Se tenir debout sur une scène et faire de son corps, de sa voix, de ses sentiments, le matériau premier de son art n’est pas donné de tout le monde » (dixit Ahmed Madani). Cette authenticité, cette absolue sincérité ne s’obtient certes pas à coup de match d’impro; c’est le fruit d’un intense travail.

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« Dämon. El funeral de Bergman », texte, m.e.s., scénographie, costumes d’ Angelica Liddell

— Par Michèle Bigot —

Angelica Liddell est désormais une habituée du Festival d’Avigon, où elle avait présenté Liebestod. L’odeur du sang ne me quitte pas des yeux et plus récemment Juan Belmonte (histoire du théâtre III). Voici qu’aujourd’hui elle s’empare de l’espace de la Cour d’honneur, gageure qu’elle tient avec succès, quoique occupant la scène à elle seule dans le plus grand dénuement pendant la première moitié du spectacle. Comme dramaturge et comme actrice, cet espace scénique est investi d’une valeur symbolique forte: il est porteur de la mémoire de tous les spectacles qui l’ont précédée depuis la création du festival, mais pour elle il est surtout le lieu de quantité de massacres aussi vieux que la cour papale: « Pour moi, la cour n’est pas un bâtiment. Le gradin est une représentation du monde, mais le château lui-même est l’âme, une âme hantée par les fantômes de la Tour Glacière et les cadavres de l’Inquisition. C’est un lieu de mort, de torture, rongé par des fantômes nés de corps torturés, battus, transpercés, violés, décapités, éviscérés et roués de coups de pied, des fantômes d’une guerre contre la pensée humaine, comme le dit Michelet. 

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« L’Os à moelle Pierre DAC » un projet imaginé et m.e.s. par Anne-Marie Lazarini

— Par Michèle Bigot —

Le 13 mai 1938 paraît dans les kiosques français un hebdomadaire intitulé L’Os à moelle. Quatre pages, d’apparence sérieuse, mais entièrement dédié au non-sens , « Organe officiel des loufoques » selon son éditorialiste. Absurde, délirant , l’hebdomadaire ne tarde pas à essuyer des critiques acerbes, en un temps où la plaisanterie dérangeait l’esprit de sérieux dont on sait où il a mené la France. Pourtant le succès fut également considérable, 400 000 exemplaires s’arrachent la première semaine. L’hebdomadaire regorge de petites annonces loufoques , d’articles désopilants , de reportages fantaisistes, d’incongruités en tout genre, de maximes à toute épreuve: L’artichaut est la plus nobles conquête de l’homme après l’arrosoir. Pierre Dac se moque de tout et son sens de l’absurde vise à miner l’idéologie fasciste qui menace. Il entre même ouvertement en résistance en raillant Hitler: ainsi cette annonce: On recherche: recherchons mort ou vif le dénommé Adolf, taille 1m.47, cheveux bruns avec une mèche sur le front. Signes particuliers: tend toujours la main, comme pour voir s’il pleut. Signe spécial, le seul le rapprochant un peu d’un être humain: moustache à la Charlot.

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« Le Mythe de Sisyphe », d’après Albert Camus, adaptation et jeu Pierre Martot

— Par Michèle Bigot —

Qu’il est étrange d’assister à une représentation du texte adapté de Camus au lendemain d’un premier tour des élections portant le RN en tête des suffrages et dans l’attente d’un deuxième tour ne promettant guère de lendemains qui chantent. Alors même que ce texte fut écrit en février 1941 au lendemain de la défaite de la France face au nazisme triomphant. Peut-on y puiser quelque espoir?

Oui et non, répondra la critique pondérée. Oui, car cette adaptation est un hymne au théâtre et à l’humanisme en général, en forme de pied-de-nez au totalitarisme qui monte. Pierre Martot qui incarne à merveille la figure de l’homme absurde portant son désespoir et sa révolte en étendard, illuminant notre nuit d’une lucidité vengeresse, portant haut la fierté des humains, laquelle consiste à accepter sa condition en dehors de toute transcendance. En tant qu’homme de théâtre, Camus voit dans l’art dramatique et le jeu des acteurs une parfaite image de l’humaine condition, se résumant au corps qu’il incarne dans sa finitude consentie et même revendiquée. En ce sens Pierre Martot continue et sublime ce message , par son jeu épuré quoique fortement incarné, sa diction claire, sa gestuelle éloquente non moins que par le jeu avec les rythmes et les tonalités.

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