Catégorie : Arts de la scène

RCM 2018 : Raoul Peck présente le Marx d’avant la coupure « épistémologique »

Marx avant Marx?

— Par Roland Sabra—

Le jeune Marx
De Raoul Peck
Avec August Diehl, Stefan Konarske, Vicky Krieps
Genres Drame, Historique, Biopic
Nationalités français, allemand, belge

Synopsis :

1844. De toute part, dans une Europe en ébullition, les ouvriers, premières victimes de la “Révolution industrielle”, cherchent à s’organiser devant un “capital” effréné qui dévore tout sur son passage.

Karl Marx, journaliste et jeune philosophe de 26 ans, victime de la censure d’une Allemagne répressive, s’exile à Paris avec sa femme Jenny où ils vont faire une rencontre décisive : Friedrich Engels, fils révolté d’un riche industriel Allemand.

→   Lire Plus

«  Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre » : essentiel et primordial

— Par Janine Bailly —

Le spectacle conçu par la Compagnie Nova et Fab-Théâtre de Belleville est une mosaïque colorée de tableaux qui pour notre plus grand bonheur se succèdent sans nous laisser reprendre souffle, un patchwork de textes judicieusement choisis et assemblés pour que nous entendions la voix de quelques-uns de nos plus grands penseurs. Fait aussi de poèmes, discours et interviews, illustré de scènes imaginaires qui avec humour ou gravité viennent croiser la réalité historique et littéraire, l’ensemble, dont la cohérence est assurée par le récit de la vie d’Aimé Césaire, a su éviter l’écueil du didactisme comme celui de l’hagiographie ou du discours sentencieux. Parce qu’elles nous parlent de nous-mêmes et des autres, ces littératures poétiques, engagées et salvatrices sont « des armes miraculeuses » offertes pour que nous progressions vers plus de tolérance, d’intelligence et de vivre ensemble. La force de ce montage réside dans le fait que, partant de ce que l’on a appelé le “problème noir”, il ouvre l’éventail au reste du monde et propose un questionnement sur le “multiculturalisme” de nos sociétés qui aujourd’hui, refusant l’arrivée de trop de migrants, tendent à se replier égoïstement sur elles-mêmes.

→   Lire Plus

Aux RCM : secrets de famille et pactes de silence

— Par Janine Bailly —

Il est dans toute famille de ces zones d’ombre que l’on tient secrètes, et qui pourtant marquent notre inconscient, transmises de génération en génération, jusqu’au jour où l’un ou l’autre, parce que plus en souffrance, ou simplement plus curieux, se met en quête d’une vérité souvent pressentie mais jamais dévoilée.

El Pacto de Adriana est un film courageux, essentiel et nécessaire, devenu vital pour la jeune réalisatrice chilienne, Lissette Orozco. Certes, de la tragédie vécue par le Chili, il nous fut déjà superbement conté, et par des créateurs plus expérimentés. Cependant, ce documentaire, dénué de prétention esthétisante, est touchant dans sa sincérité, et dans ce qu’il révèle d’une famille qui pour éviter la souffrance et la honte, s’est condamnée elle-même à ce déni que Sigmund Freud définit comme “la non-considération d’une partie de la réalité”.

Parce que le doute s’est installé, que la sérénité et la crédulité de l’enfance se sont envolées, Lissette a besoin de percer le secret de la vie d’Adriana Rivas, la tante autrefois adulée mais aujourd’hui enfuie en Australie en dépit d’une assignation à résidence, et cernée d’une aura de scandale.

→   Lire Plus

« Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre » les 22, 23 & 24 mars 2018 au T.A.C.

De la négritude au Tout-Monde, histoire d’un dépassement.

A la suite d’une séance de captation supplémentaire ouverte au public il reste des places disponibles les 23 & 24 mars 2018

— Par Roland Sabra —

« Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre », m.e.s. de Margaux Eskenazi

Ils étaient trois, comme les rois mages, les pyramides, les Parques, les Grâces, ou les marches du podium. Sur la plus haute sans doute Césaire, sur la seconde Senghor, sur la troisième Damas le moins connu mais surement le plus combatif, le plus passionné.

Au cours de la bal(l)ade qui va des pères de la négritude aux chantres de la créolisation du monde Margaux Eskenazi dans « Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre » revisite les textes fondateurs autour desquels s’articule la recherche identitaire afro-caribéenne. C’est par un extrait opportun d’ « Écrire en pays dominé » qui d’emblée contextualise le propos que se fait l’ouverture, vite suivie de Black Label avec son refrain incantatoire et imprécatoire, Black-Label à boire / Pour ne pas changer / Black-Label à boire / A quoi bon changer.

→   Lire Plus

« Mary Prince » disponible en DVD!

Mary Prince, spectacle salué unanimement par la critique et plébiscité par le public est désormais disponible en DVD sur la boutique du site de la compagnie Man Lala www.ciemanlala.com et à partir du 1er avril sur le site de Colaco pour les médiathèques et les établissements scolaires.

Le coffret comprend :

— la recréation de la pièce Mary Prince

— des bonus sur Mary Prince aux Bermudes, à Turks-et-Caïcos, à Londres…

— un livret pédagogique L’histoire de Mary Prince, la condition d’esclave et les abolitions dans la Caraïbe.

Un bel outil et une superbe idée de cadeau!

Ce spectacle présenté en 2015 à l’Albatros, dans le cadre du festival d’Avignon par la compagnie Man Lala, présente une séquence de textes extraits d’un récit autobiographique. Il s’agit du premier témoignage publié en 1831 à Londres, sur les conditions de vie de son auteur, Mary Prince dans les colonies britanniques. Née esclave dans une colonie des Bermudes vers 1790, elle est vite séparée de ses parents lors d’une vente des esclaves de la maison. Ses premiers maîtres la traitent avec humanité; elle bénéficie même d’un enseignement rudimentaire, et elle est trop jeune pour comprendre sa condition d’esclave.

→   Lire Plus

Les Rencontres Cinémas Martinique 2018 (3)

Carré 35 et Corniche Kennedy, deux films qui sans jamais toucher au fantastique ressortissent néanmoins de l’étrange.

— Par Selim Lander —

Carré 35 d’Eric Caravaca, qui est présenté comme un documentaire, est en réalité un récit intimiste au cours duquel le réalisateur, hors champ, fait part de ses états d’âme ou interroge ses parents. Il a appris tardivement qu’il y avait eu un premier enfant avant lui et son frère, avant que la famille n’émigre en  France, une sœur nommée Catherine, morte à l’âge de trois ans de la maladie bleue (malformation cardiaque qui entraîne le décès par asphyxie). Cette maladie étant fréquente chez les enfants trisomiques, il interroge là-dessus sa mère : en vain. Par ailleurs ses parents vivaient à Casablanca quand ils se sont mariés, là justement où Catherine est morte et où elle est enterrée. Cependant le narrateur découvre que ses parents étaient absents de Casablanca au moment de la mort de Catherine. Et il ne reste a priori aucune photo de la petite fille. Lorsque le narrateur se rend sur la tombe de sa sœur, au carré 35 du cimetière des Français, la photo a là aussi disparu de la pierre supportant la croix.

→   Lire Plus

Sur les écrans des RCM, grandir : « Bad Lucky Goat, Ava, Corniche Kennedy »

— par Janine Bailly —

Que l’on soit en Colombie, dans Bad Lucky Goat, dans une station balnéaire en France avec Ava, à Marseille sur Corniche Kennedy, l’adolescence est un passage obligé, un sas à franchir entre l’enfance évanescente et l’âge adulte qui s’approche, avec son cortège de découvertes, de choses neuves à appréhender, heureuses ou contraignantes, consenties ou imposées. Nombreux sont les réalisateurs qui s’attachent à en décrire les bonheurs et les affres, les consentements et les réticences.

Bad Lucky Goat, de Samir Oliveros, emprunte avec humour sa trame au genre du road movie, le fil conducteur du scénario étant un périple aux causes inattendues, accompli sur les petites routes de l’île de la Providence, en mer des Antilles, avec pour moyen de locomotion une moto empruntée après que “le gros méchant bouc” eut percuté l’avant de la voiture familiale, conduite par la fille de la maison. Chargés d’une mission importante — aller chercher des bancs pour l’hôtel que tiennent les parents avant que n’arrive le catamaran des touristes —, le frère et la sœur adolescents voient bientôt leur plan contrarié par ce bouc noir aux longues cornes, échappé, après avoir rongé sa corde, de l’arbre-sanctuaire auquel son maître l’avait attaché, et qui traverse inopinément la route.

→   Lire Plus

Aux RCM, trois visages de la tragédie : « Médée, Ailleurs, Carpinteros »

— Par Janine Bailly —

Ce dimanche matin-là, la journée consacrée aux RCM s’est ouverte, au cinéma Madiana, sur Médée, une œuvre majeure de Pier Paolo Pasolini. Fidèle pour l’essentiel au mythe, le réalisateur italien en donne pourtant une version personnelle, flamboyante et poétique, où le personnage éponyme confié à Maria Callas nous tient tout au long sous son charme, au sens premier du terme, au sens où l’on se sent comme ensorcelé. Princesse et magicienne hiératique, femme amoureuse, épouse trahie, sœur et mère acculée par le destin à la cruauté : toutes ces figures, elle les incarne davantage par le corps que par la parole, et dans son regard, sombre et tout à la fois lumineux, cruel ou tendre, révolté ou apaisé, se lisent les nuances infinies des sentiments qui la traversent. Pasolini ouvre le film sur la figuration d’un des rituels agricoles de la mythologie grecque, accompli pour que se régénère la végétation, rituel sanglant qui repose sur le sacrifice humain. Il le ferme sur la colère démesurée d’une Médée échevelée défigurée par la haine, qui pour accomplir sa vengeance contre Jason l’infidèle vient de sacrifier ses deux fils, accomplissant ainsi son inéluctable destin.

→   Lire Plus

Les Rencontres Cinémas Martinique 2018 (2)

— Par Selim Lander —

Soleil noir. Même si les Martiniquais ont déjà pu voir et revoir ce documentaire qui date de 1983, il a toute sa place dans la section « Patrimoine » qui rend hommage à quelques cinéastes martiniquais. Il s’agit ici de Michel Traoré, ancien élève de l’IDHEC (qui deviendra la FEMIS). Après une introduction consacrée à un déplacement du groupe Fromajé à Washington, à l’invitation de l’université Howard[i], le film se concentre sur un membre du groupe, Victor Anicet (né en 1938), artiste talentueux et personnalité charismatique. Le film nous promène dans son œuvre, au gré des rencontres avec quelques-uns de ses amis (poète, romancier, chanteur, architecte, « inventeur » ou simple paysan). Cela permet de découvrir les multiples facettes de cet artiste d’abord formé à l’art du feu (il sortit premier de sa promotion à l’école des Métiers d’art de Paris dans la section céramique) mais qui est aussi peintre et qui travaille souvent un matériau composite.

Le film s’attarde sur des peintures en noir et blanc qui furent montrées au public lors de l’exposition princeps intitulée « Soleil noir » (en 1970).

→   Lire Plus

La Maison Rouge : conférence dansée

23 mars 2018 à 19h Quartier Terres Sainville à FdF

La Maison Rouge:Maison des Arts a le plaisir de vous présenter ,le vendredi 23 Mars 2018 à 19h, le travail du chorégraphe Jean-Hugues MIREDIN et l’artiste Laurent TROUDART (Cie Art&Fact). 
Ils présenteront un extrait de la pièce « Salut Mon Frère » suivi d’un échange autour de la démarche artistique.

A propos de « Salut Mon Frère »
Deux inconnus convergeant d’un pas calme et assuré vers le point de coïncidence d’une rencontre prometteuse. On ne sait trop s’ils se cherchaient mais tout indique qu’ils se sont trouvés.
L’exercice d’approche que nous dévoile le prologue de Salut mon frère, pantomime réjouissant des multiples codes de salutations en cours dans différentes cultures, fournit d’emblée un matériau de choix et une mise en scène engageante pour interroger la question de l’Autre et de l’identité.
Salut mon frère est porté par une chorégraphie inventive qui revisite l’image stéréotypée qui accompagne le Noir – d’être et de corps – depuis des siècles.
Le sérieux du propos s’appuie volontiers sur l’humour et l’autodérision ; les situations et les figures s’enchaînent au gré d’une variété musicale mêlant kora, accents discos et rythmes rocks.

→   Lire Plus

Premières impressions des RCM 2018

— Par Selim Lander —

Une fois de plus les cinéphiles seront comblés par l’abondance et (souvent) la qualité des films proposés dans les cadre des « Rencontres Cinémas Martinique » concoctées par Steve Zebina. Comme à l’accoutumé des réalisateurs seront présents avec lesquels il sera possible de dialoguer. Devant l’impossibilité pour un critique amateur (lequel, contrairement au critique professionnel, n’est pas mobilisé à 100% pour le festival) de rendre compte d’un sous-ensemble quelque peu significatif d’une sélection qui compte près de quatre-vingt films, nous signalerons simplement quelques films, au gré de notre curiosité et de nos disponibilités. Heureusement, Madinin’Art bénéficie des services d’autres critiques, parmi lesquels Jeanine Bailly qui participe au jury de la compétition dans la catégorie « Documentaires », signe de la  reconnaissance de Madinin’art comme médium culturel incontournable en Martinique. Une reconnaissance dont Roland Sabra, le directeur et fondateur du site, peut se glorifier.

La soirée d’ouverture, le 16 mars, a proposé après les discours d’usage un spectacle original aux deux sens du terme. Original au sens d’inusité, puisque deux films muets étaient accompagnés par un ensemble instrumental (deux violons, alto, violoncelle, contrebasse, tambour en plus du piano utilisé au temps du cinéma muet).

→   Lire Plus

Rencontres Cinémas Martinique 2018 du 16 au 24 mars

— Présentation par Steve Zébina —
Le temps comme mesure, celui d’histoires vécues, d’histoires imaginées, d’histoires racontées. Pour cette 13 e édition, nous avons choisi l’ancrage temporel comme fil conducteur de notre voyage. Un voyage qui ravive les mémoires, questionne le temps présent et se tourne vers l’avenir.
Les films s’immiscent dans la vie de ceux qui les regardent ; aimés, détestés, ils ne laissent jamais le spectateur indifférent. Une relation intime et sentimentale qui « colonise notre inconscient » nous dit Wim Wenders. Ils sont le reflet d’une histoire familiale, d’une génération, d’une époque.

Télécharger le programme

De ces souvenirs, de cette intimité se dessine une véritable mémoire collective.
Ces films « qui nous ont fait », pour reprendre la formule de Martin Scorcese, n’ont pas de frontières. Une conviction que nous avons portée depuis plusieurs années en présentant des œuvres du monde entier. Elles ont toujours révélés qu’au-delà des connotations culturelles, se trouve une même humanité, traversée par les mêmes rêves et espoirs, par les mêmes émotions.
Ces films rappellent que les lieux géographiques sont aussi des espaces dans lesquels les temporalités prennent vie : des vecteurs de mémoire, des rhizomes qui participent à la construction
des individus et de leur devenir.

→   Lire Plus

« Départ » de Stéphane Martelly. José Exélis met en scène Jann Beaudry.

— Par Selim Lander —

Tropiques-Atrium-Scène Nationale contribue de plusieurs manières à la création théâtrale. Une fois par trimestre, ou à peu près, le metteur en scène José Exélis présente l’ébauche d’un spectacle qui sera appelé ou non à devenir une production à part entière. Mise en lecture, mise en espace ou davantage comme dans le cas de Départ, qui, en dehors du fait que Jann Beaudry lit une partie de son texte, lequel texte n’est que la fin de la pièce de Stéphane Martelly, apparaît déjà très abouti.

Disons tout de suite que nous fûmes constamment sous le charme de l’interprète déjà citée, J. Beaudry, qui démontre ici qu’elle est une comédienne complète, capable de montrer aussi bien la colère que la séduction, capable également de nous émouvoir en faisant sonner quelques notes sur un piano ou, dans un tout autre genre, de camper une chanteuse de music-hall accrochée à son micro dans une pose quelque peu équivoque. Dans une simple robe blanche qui pourrait être une chemise de nuit, jouant de sa longue chevelure blonde et bouclée, elle se livre devant nous à la comédie de la mort.

→   Lire Plus

« Le Fabuleux destin d’Amadou Hampâté Bâ », message subliminal ?

— Par Selim Lander —

« En Afrique, chaque fois qu’un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ». Cette maxime a été si souvent citée qu’on en a perdu la trace. Elle est pourtant d’un écrivain connu, Amadou Hampâté Bâ (ci-après AHB, né en 1900 – mort en 1991), qui l’a prononcée au moins à deux reprises sous des formes légèrement différentes[i]. La vie d’AHB est un roman (fils – adoptif – de chef, initié à la voie soufie des Tidianes, membre du conseil exécutif de l’Unesco, etc.) et cela pourrait suffire pour légitimer un spectacle autour de sa personne. Entre autres anecdotes, alors qu’il était admis à la prestigieuse école William Ponty de Gorée, il fut empêché par sa mère de se rendre au Sénégal. En rétorsion, l’administration coloniale le nomma « écrivain auxiliaire temporaire à titre essentiellement précaire et révocable » (sic, ce qui ne manque pas de sel quand on sait qu’AHB passera sa vie à écrire), avec obligation de rejoindre son poste à pied (à 900 km du domicile familial !) sous la surveillance d’un policier. Bienheureuse punition, puisque c’est en cheminant ainsi qu’AHB prit l’habitude transcrire les éléments de littérature orale qu’il récoltait sur sa route.

→   Lire Plus

Une figure emblématique : Amadou Hampâté Bâ

— par Janine Bailly —

Plus qu’une représentation théâtrale traditionnelle, le spectacle Le fabuleux destin d’ Amadou Hampâté Bâ, qui se donne les 13 et 14 mars à Tropiques Atrium, m’est apparu comme une leçon de littérature vivante et pleine d’intelligence, comme aussi le portrait animé d’un homme grand et sage, et de belle humanité. Une impression qui s’est confirmée lors du bord de scène final, où Hassan Kassi Kouyaté nous dit la genèse de la pièce, écrite par le conseiller littéraire Bernard Magnier, et qui s’inscrit dans un projet mené en collaboration avec le Tarmac, théâtre parisien dédié à la création francophone contemporaine. Un projet qui a pour finalité de faire découvrir, ou mieux connaître, des hommes et des femmes disparus, admirables non seulement par leur écriture, mais encore par leur engagement auprès de leurs semblables, par ce qu’ils ont été et par ce qu’ils ont fait. Après Sony Labou Tansi, dont « la chouette petite vie bien osée » nous fut montrée ici-même dans Sony Congo, après Hampâté Bâ, il est déjà prévu un opus sur Kateb Yacine, un autre sur Fanon… en espérant que place soit bientôt faite à une femme ?

→   Lire Plus

Le fabuleux destin d’Amadou Hampâté Bâ

Mardi 13 et Mercredi 14 Mars – 20h Tropiques Atrium

Texte : Bernard Magnier
Mise en scène : Hassane Kassi Kouyaté
Avec : Habib Dembélé, Tom Diakité
« En Afrique, un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle ». Une phrase prononcée l’un des plus grands auteurs maliens, Amadou Hampâté Bâ, à l’Unesco en 1960. Bernard Magnier et Hassane Kassi Kouyaté rendent hommage à l’homme aux multiples vies, dans un spectacle plein d’humour et de sagesse.

De la falaise dogon de Bandiagara au Mali, où il est né en 1900, aux assemblées de l’Unesco et aux palais présidentiels, des bureaux de l’Institut Français d’Afrique Noire de Dakar aux pupitres des conférences internationales, des correspondances échangées de par le monde aux audiences accordées dans sa résidence d’Abidjan jusqu’à la fin de sa vie en 1990, Amadou Hampâté Bâ n’a cessé de s’adresser au plus grand nombre. Les multiples variantes de ses contes en attestent, de la version savante à la traduction littérale et à la version aménagée pour les jeunes lecteurs, une même volonté de transmettre, de partager.

Sur scène, Abib Dembélé, acteur incontournable au Mali, donne vie à l’écrivain et penseur malien.

→   Lire Plus

« Wild West Women » : des femmes à la conquête d’elles-mêmes

— par Janine Bailly —

Sur scène, elles ne seront, pendant ces presque quatre heures de spectacle, que trois comédiennes, pour nous entraîner à leur suite dans cette épopée américaine, sorte de western palpitant, version femmes. Elles nous guideront, dans une sorte de “chevauchée fantastique” à la John Ford, mais légèrement parodique car poussant à l’extrême les codes du genre, sur la route des pionniers partis à la conquête de l’Ouest. Elles nous feront suivre la piste de l’Oregon et partager leurs aventures tumultueuses, au hasard de rencontres imprévues, heureuses ou malheureuses, et soumises souvent à la cruauté des hommes comme aux rigueurs du climat, car ici tout est paroxystique — chaleur, froidure extrême, tempête de neige qui oblige à rebrousser chemin…

Mais dans notre imaginaire, ils seront bien des dizaines, les personnages qu’elles auront créés dans une dynamique, une fougue, une inventivité qui ne se démentiront jamais, bien que l’on ait noté une certaine baisse  d’intensité dramatique dans le second volet, due sans doute à la multiplication de ces hommes  pris “du côté obscur de la force”, et qui ne font dans l’histoire qu’un rapide passage.

→   Lire Plus

« Wild West Women » de Caroline Le Forestier

Au Far West, les filles n’ont pas froid aux yeux

— Par Selim Lander —

Trois femmes américaines. Parmi elles Charlotte, une esclave noire échappée à la recherche de son fils blanc de peau, le fils du maître que ce dernier a confié à un orphelinat. Sally, la seconde, est une prostituée trop adroite au pistolet, d’où sa fuite du saloon où elle exerçait ses talents. Quant à la troisième, Rose, la tête pensante du trio, féministe qui croit au progrès de l’humanité, elle a quitté son mari, sombre brute épousée par erreur. A la recherche de l’enfant de Charlotte qui a été adopté par des pionniers, elles entament la traversée de l’Amérique par la piste de l’Oregon… où les attendent diverses aventures.

Nous sommes en 1851 dans l’Amérique des westerns, avec des bons et des méchants, les premiers finissant inévitablement par gagner et les seconds par se faire trucider. Mais ici la fin arrive moins vite que dans un film, le spectacle dure presque quatre heures (deux entractes compris) ce qui laisse de l’espace pour de nombreuses péripéties. Les trois jeunes femmes sont aimées tour à tour par des hommes qui les tirent des pattes des mauvais coucheurs rencontrés sur leur route, avant, le plus souvent, de disparaître à leur tour.

→   Lire Plus

Comme en hommage à Simone Veil

— par Janine Bailly —

Quatre comédiennes, appartenant à la compagnie Les Buv’Art, maintenant bien connue des scènes martiniquaises, ont eu la judicieuse idée, pour marquer de leur pierre cette semaine où l’on célèbre la Femme, de s’attaquer à un monument du théâtre dit populaire, Et pendant ce temps, Simone veille, qui tient la scène à Paris depuis de longs mois, et qui s’apparenterait plutôt au genre cabaret-théâtre, par ses jeux de mots, ses calembours, ses chansons, qu’elles soient dans leur forme originelle ou réécrites en version humoristique sur des airs célèbres, comme par une certaine volonté caricaturale dans la composition de ses personnages. On n’oubliera pas la parodie de “Bambino”, mimée et chantée, extrêmement drôle, où il est parlé de la libido des femmes, et des transformations qui se sont opérées grâce à la contraception.

Idée généreuse aussi, la première s’étant donnée gratuitement au restaurant Les Arômes du Carbet, dans la salle transformée pour accueillir un public venu nombreux, et qui s’est montré enthousiaste devant la prestation enlevée de la petite troupe. Troupe féminine à l’exception de Rachid, habituellement acteur mais préposé à la technique, qui accomplit, dans ces circonstances improvisées, la performance d’illustrer le propos à l’aide d’une bande-son originale et de projections vidéo d’époque particulièrement parlantes.

→   Lire Plus

« Simone Veille » : divertissant et instructif

Le 10 mars au Robert à 19h30.

Quatre comédiennes de la troupe martiniquaise les « Buv’Art » ont monté Simone Veille, résultat d’une écriture de plateau par quatre comédiennes (TrinidadCorinne BerronBonbonHélène SerresVanina Sicurani), parisiennes celles-là. Sous les apparences d’une comédie, elles déroulent l’histoire du féminisme, en France, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Un thème sérieux et toujours d’actualité traité avec humour et fantaisie : martingale gagnante qui explique que la pièce ait été jouée presque sans interruption, en Métropole, depuis sa création.

Elles sont donc quatre sur la scène, quatre jeunes dames pleines d’entrain qui nous font partager leur récit enjoué des transformations de la condition féminine. La plus grande, qui incarne Simone Veil, tient le rôle de la meneuse de jeu, celle aussi qui est chargée des rappels historiques qui s’imposent concernant les principales lois qui ont fait évoluer les règles concernant la participation des femmes à la politique, le divorce, la contraception, l’avortement, la parité…

→   Lire Plus

« Wild West Women », de Caroline Le Foretsier, m.e.s. Augustin Bécard

Jeudi 8 Mars  2018 à 20h. Tropiques-Atrium

Un spectacle drôle et touchant, haletant, composé de multiples rebondissements..

Wild West Women est un feuilleton théâtral, une épopée de 3200 kms pour deux comédiennes et une bruiteuse dans l’Amérique du 19e siècle.

Trois femmes issues de milieux différents mais toutes privées de liberté, décident un jour de bousculer le cours de leur vie. L’une est esclave dans une plantation, l’autre esclave domestique, tyrannisée tant moralement que physiquement par son époux qui lui refuse tout accès à la culture, et la dernière, esclave sexuelle.
Elles se rencontrent en mai 1851, au cours de leur fuite vers l’Ouest, seule destination pouvant leur faire espérer un avenir meilleur. Mais cette traversée de l’Amérique d’Est en Ouest est loin d’être de tout repos. Traquées par leurs tortionnaires, moquées, attaquées, elles ne baissent jamais les bras et continuent leur périple vaille que vaille. Bousculant les stéréotypes du Far West et de ses virils héros, le spectacle parle des profondes mutations qui émergent en cette fin de siècle. Les bruitages en direct nous transportent immédiatement dans les vastes plaines de la piste de l’Oregon, au rythme des chevaux et des coups de feu… Yeehaw !

→   Lire Plus

Théâtre : « Et pendant ce temps, Simone veille ! »

Un spectacle désopilant sur l’histoire des droits des femmes

Ce spectacle concocté par quatre auteures, TrinidadCorinne BerronBonbonHélène Serres et Vanina Sicurani, raconte avec humour l’évolution de la condition féminine en France, des années 50 à nos jours, au travers de trois lignées de femmes sous le regard historico-comique de Simone qui veille.

De scènes de la vie quotidienne en parodies de chansons, une autre façon de parler des femmes.

Mi revue, mi comédie, le spectacle est amusant, son grand mérite étant de ne se prendre jamais au sérieux.

→   Lire Plus

« Mami Wata » de et avec Astrid Bayiha

— Par Selim Lander —

Astrid Bayiha est une comédienne talentueuse et l’on est toujours curieux de la retrouver dans des rôles où elle tient la vedette (l’adaptation de La Vie sans fard de Maryse Condé, Jazz de Koffi Kwahulé), ou non (Tram 83, au dernier festival de Limoges, d’après le roman du Congolais YY). Dans Mami Wata elle est à la fois auteure, metteuse en scène et interprète.

La pièce se tient dans la chambre d’un hôpital psychiatrique. Lorsque les spectateurs pénètrent dans la salle, A. Bayiha est déjà là, couchée sur un lit blanc, unique élément de décor (mais qui deviendra pendant un moment l’ébauche d’une table de restaurant). Rêve-t-elle où les deux personnages supplémentaires qui apparaissent lorsque les lumières s’éteignent sur les gradins sont-ils des créatures autonomes, comme la note d’intention nous invite à le penser ? Peu importe, en fait, car Mami Wata ne raconte pas vraiment une histoire. C’est une pièce plus visuelle que bavarde, une affaire d’instincts, d’élans brisés et repris, de corps qui se défient et s’entrechoquent. Avec deux ennemis qui peuvent néanmoins se montrer tendres et complices, Mami Wata et « Lui », la fille et le garçon, l’envers et l’endroit.

→   Lire Plus

« Billes de verre, éclats de plomb » de Thérèse Bonnétat

—Par Selim Lander —

Langue des signes. On a beau aller et re-aller au théâtre, assister à quelques dizaines de pièces chaque année, une surprise est toujours possible. On ne pense pas seulement aux grosses machines comme le festival d’Avignon les affectionne, qui jouent sur une esthétique parfaite (The Great Tamer de Dimitris Papaioannou, en 2017) ou vous frappent comme un coup de poing (Bestie di scena d’Emma Dante, la même année). On pense plutôt ici à des productions plus modestes, qui relèvent d’un théâtre expérimental. L’originalité de Billes de verre, éclats de plomb réside dans la présence sur la scène d’un interprète de la langue des signes à côté d’un conteur. Interprète et non pas simple traducteur : Carlos Carreras est un comédien à part entière, un mime à la gestuelle aussi précise qu’éloquente, qui rend le texte accessible aux malentendants tout en fascinant le public ordinaire (celui dont l’ouïe fonctionne encore à peu près).

Si C. Carrera semble le principal atout de cette pièce hors norme, il est au service du beau texte de Thérèse Bonnétat, une réminiscence poétique de Marseille, de son Vieux-Port, devenu le lieu d’une rencontre imaginaire entre deux figures capitales, néanmoins en marge, du XXe siècle français, le psychiatre Fanon et Arthaud l’insensé qui se rejoignent pourtant dans la conception d’un engagement sans concession et dont quelques citations bien choisies viennent émailler la partition écrite par Th.

→   Lire Plus

« Billes de verre, éclats de plomb », chronique phantasmée d’une rencontre

— par Janine Bailly —

Dans le « paysage » qu’est Artaud, il faut  « s’y promener, il faut prendre le temps d’aller de saillie en trou, de sentier en piste, il faut s’y exposer, s’y aventurer. » (Kenneth White, in Le monde d’Antonin Artaud, essai, 1989). C’est bien à cette sorte d’aventure que nous convie l’écrivaine, responsable de la mise en scène de son propre texte, Billes de verre, éclats de plomb, avec la complicité de deux comédiens chargés d’assumer ses paroles, comme aussi celles d’ Antonin Artaud et Frantz Fanon, qui traversent en fulgurantes insertions l’écriture ardente et métaphorique de Thérèse Bonnétat.

Quand commence le jeu, l’un se tient de dos en fond de plateau, l’autre est couché au devant de la scène, blotti sous des linges qui d’abord le dissimulent. Et le temps s’arrête, un moment qui peut sembler durer, un moment fait de silence, d’immobilité recueillie, comme une transition entre le « ici-maintenant » et « l’ailleurs » d’un univers théâtral où on nous inviterait à entrer. Pour venir à nous, il faudra à l’un se retourner, à l’autre émerger de linges qu’il déposera à l’avant-scène ; l’un de ces linges, clair, étant à prendre quand il sera parlé pour la première fois d’Antonin Artaud, poète maudit né sous le ciel de Provence, « grand Monsieur masqué de blanc », qui « tel un oiseau de proie » s’offre au grand vent ; l’autre de ces linges, sombre, étant à saisir pour parler de Frantz Fanon, médecin-psychiatre et essayiste, « petit Monsieur à la peau noire », imaginé se tenant face au poète sur le port de Marseille.

→   Lire Plus