— Par Guy Gabriel —
Vu à Madiana. Séance VO.
Carol – Réalisateur : Haynes Todd. Acteurs : Cate Blanchett, Sarah Paulson, Rooney Mara, Kyle Chandler, Cory Michael Smith Genre : Drame, Romance, Mélodrame Nationalité : Américain, Britannique Durée : 1h58mn
Dans le New York des années 1950, Thérèse, jeune employée d’un grand magasin de Manhattan, fait la connaissance d’une cliente distinguée, Carol, femme séduisante, prisonnière d’un mariage peu heureux. À l’étincelle de la première rencontre succède rapidement un sentiment plus profond. Les deux femmes se retrouvent bientôt prises au piège entre les conventions et leur attirance mutuelle.
Amours interdites, solitude et différence, voilà ce que l’on pourrait considérer comme les éléments essentiels de ce qui nous ramène aux mélos flamboyants des Douglas Sirk ou Billy Wilder ; tout cela, sans l’ombre d’une nuance péjorative.
Tiré du roman (semble-t-il autobiographique) d’une romancière de haut niveau, puis qu’il s’agit, ni plus, ni moins de Patricia Highsmith*, qui signe son roman sous le pseudo de Claire Morgan. (The price of salt)
En effet, on est au début des années 50 (1954), et l’homosexualité est considérée comme une tare, une maladie dont il faut se soigner ; seulement, l’amour étant ce qu’il est, il faut savoir assumer sa passion ; ce que vont faire Thérèse et Carol ; d’un côté, la petite vendeuse émerveillée, de l’autre, la grande bourgeoise qui a mal du côté du cœur, car elle est en instance de divorce, mais merveilleuse. A partir de là Todd Hayne va nous faire entrer dans l’univers d’une morale étriquée, parfois brutale qui intègre l’intolérance dans son fonctionnement. Mais au mépris des conventions, elles vont vivre leur amour sur fond de road-movie sous la neige de l’Ohio.
Mais le film ne se contente pas de montrer cette belle histoire d’amour de deux femmes en quête d’elles-mêmes, il montre aussi des hommes pétris de certitudes, à qui il ne reste que leur amour-propre, une époque qui se sentait agressée par ce qui ne rentrait pas dans ce qu’elle considérait comme la norme , l’ensemble avec une grâce, une élégance qui ne se démentent jamais, épousant ainsi celles des deux comédiennes ; il filme cette impossibilité d’aimer en la magnifiant.
Cate Blanchett, sous sa douleur, respire la classe, en plus de la grâce ; Rooney Mara (Prix d’interprétation féminine à Cannes en 2015 pour son rôle), est remarquable de subtilité et d’aisance., toutes deux faisant passer l’émotion nécessaire à une telle histoire ; il faut dire que Todd Haynes sait faire passer cette émotion, par une mise en scène faite d’une succession de plans courts et rapprochés, qui arrivent à donner sens même à une gouttelette, à un regard à travers une vitre.
Un vrai beau film qui respire la mélancolie, mais aussi donne sens à la notion de fascination ; on ne saurai toublier une superbe bande originale signée Carter Burwell( Twilight, True grit des frères Cohen, entre autres…)
Kechiche(La vie d’Adèle) va se sentir moins seul.
Guy Gabriel
*Auteur des romans « L’inconnu du Nord-Express » dont Hitchkock a fait un magnifique film et M. Ripley qui a fait l’objet de deux films, « Plein soleil » de René Clément et « Le talentueux M.Ripley d’Anthony Minghella, sans oublier « Le cri du hibou » de Claude Chabrol