— Par Roland Tell —
Le mouvement continu du temps n’apporte toujours pas d’unité citoyenne. C’est pourquoi, plus que jamais, l’acte politique doit procéder de la volonté collective des Martiniquais. Quand la gestion politique s’écarte de la raison sociale, de la volonté du peuple, de l’inclination au travail et au progrès, ne s’écarte-t-elle pas de l’attente voulue par le suffrage populaire ? D’où il suit une déviation de la politique, une dérive entre donner et recevoir, ce qui entraîne, dans le peuple martiniquais, une faim ardente dans l’assouvissement de ses désirs et de ses projets d’avenir.
Comment maintenant faire souffrir celles et ceux que les urnes ont porté à la gouvernance, comment leur reprendre les bulletins de vote, comment les dépouiller, après les avoir comblés ? La solution se trouve dans d’autres modalités électorales, mais qui tardent à venir. C’est pourquoi il faut leur rappeler que leur gouvernance actuelle n’est pas définitive, mais reçue, donc limitée et déterminée aux volontés de l’être collectif, que représente le peuple martiniquais. Leur éloignement progressif des espérances populaires augmente de jour en jour, rendant les Martiniquais encore plus lointains, dans leur manière nouvelle d’attendre des lendemains meilleurs. Oui, le citoyen a soif de changement – toutes aspirations désormais tournées vers toutes sources qui jaillissent, pour étancher la soif de progrès et de bonheur, qu’il porte en lui.
Oui, le mal politique actuel est apathique et impuissant, d’abord en sa déviation originelle par rapport à l’idéologie, qui a entraîné cette gestion artisanale, fermant à clef, dans la Caverne de Plateau Roy, beaucoup de faiblesse d’agir, et d’épouvante à entreprendre, où l’on se méfie de tout et de tous, consentant alors à des plénières solitaires et sombres, comme des naufragés politiques découvrant des peurs nouvelles : les problèmes concernant l’emploi et le chômage, la spirale embauche-salaires des prétendus 5000 fainéants de la Caverne, la demande très forte du TCSP, la formation et le travail des jeunes, l’éducation comme facteur d’émancipation, via le Lycée Schoelcher, et le complexe scolaire de Sainte-Marie, la planification d’actions et d’opérations nécessaires pour le B.T.P, le soutien aux entreprises, sans oublier les hantises quotidiennes du Parc Naturel Régional, du nouveau Maire de Sainte-Marie, et surtout du sort à venir de nos taxis collectifs ! Oui, déjà s’annoncent, et viennent les périls du naufrage politique, où les naufragés seront traités, selon l’œuvre de leurs mains !
Hélas, le mal qui est fait retombe sur toute la communauté martiniquaise. Car il y a beaucoup de démérite dans la gouvernance actuelle, où le mal commis provient d’érreurs idéologiques. Celles-ci nous amènent plutôt à plaindre les gouvernants qu’à les condamner, dans leur conscience politique errante, où le président en exercice, grand maître de l’agir de tous, ne cesse de penser qu’une action bonne est une action qui jouit de la seule plénitude de ses pensées personnelles, et des arguments qui lui conviennent. Chez lui, la conception personnaliste de la politique est maximaliste : tout est identifié à sa personne, jusques et y compris le pont de la Concorde au Prêcheur, qu’il a découvert en l’inaugurant ! Cette conception de la démesure ne recherche que le plein épanouissement électoral de celui-ci, par des efforts constants vers le plus être, sinon vers le seul plus être – plénitude l’amenant à tout tirer vers soi, à s’inventer une perfection, à provoquer la louange des minuscules partisans qui l’entourent, qu’il a unis en les enfermant un à un, de droite comme de gauche, dans le cercle de sa conscience errante. C’est pour lui une question d’hygiène mentale ! C’est l’être-autre des droitistes et des gauchistes, qui s’isolent et se renferment en lui, pour y trouver la source du bonheur politique. Centre de leur univers électoral, le président se construit une perfection à sa mesure, avec leurs dépouilles électorales, pour l’exaltation de soi, donc pour leur anéantissement.
Quelle moralité politique pour demain ? C’est une liberté, ouverte au réel martiniquais, dans toutes ses dimensions politiques, sociales, économiques, se développant dans le sens d’une collaboration, d’une communion avec le peuple martiniquais. Certes, il ne s’agit pas de la liberté d’indifférence, liberté fermée des intellectuels et des économistes, qui se renferment actuellement dans le silence, par peur de se compromettre, de perdre leur indépendance. Au contraire, la liberté populaire, qui intègre la durée électorale à la vie humaine, saura agir, le moment venu, dans sa pleine force, au sein de l’isoloir, par l’acte de votation, pour renouer tous les liens d’harmonie de la communauté martiniquaise : la famille, l’État, les valeurs humaines, les nécessités sociales et économiques, les rapports de formation, de travail, de société, obéissant ainsi à une nécessité vitale, rendue plus exigeante par la prise de conscience du bien commun martiniquais.
ROLAND TELL