Bill Viola : maître de l’art vidéo et explorateur du temps

— Par Sarha Fauré —

Bill Viola, pionnier américain de l’art vidéo, est décédé paisiblement chez lui le 12 juillet 2024 à l’âge de 73 ans, après avoir souffert de la maladie d’Alzheimer depuis 2012. Né le 25 janvier 1951 à New York, Viola a transformé le paysage artistique avec ses installations vidéo monumentales et ses explorations profondes de la temporalité et de la spiritualité.

Une rencontre fondatrice avec la vidéo

Viola a découvert la vidéo au lycée, et cette rencontre a déterminé son parcours artistique. Inscrit à l’université de Syracuse, il a rapidement quitté les cours traditionnels pour intégrer l’« experimental studio » de Jack Nelson, où il a commencé à expérimenter la vidéo comme un signal électronique, plutôt qu’une simple image. Ses premières installations, utilisant des moniteurs et de grandes projections, ont vu le jour au début des années 1970, période d’effervescence pour l’art vidéo.

Influences et thématiques

Les œuvres de Viola sont marquées par une quête spirituelle profonde, influencée par les mystiques, les peintures de la Renaissance et son immersion dans le zen, après une résidence au Japon en 1980 où il rencontre le maître zen Daien Tanaka. L’expérience de quasi-noyade dans son enfance, sauvée in extremis par son oncle, a également profondément marqué son œuvre, avec l’eau devenant un élément central de sa symbolique, comme dans « Nine Attempts to Achieve Immortality » (1996).

Collaborations et techniques

Aux côtés de sa compagne et collaboratrice de longue date, Kira Perov, Viola a créé des œuvres allant des premières bandes artisanales aux productions quasi-hollywoodiennes. Utilisant le ralenti pour « sculpter le temps », il a toujours cherché à éviter les effets spéciaux, préférant une approche plus directe et méditative. Ensemble, ils ont supervisé des projets nécessitant parfois des centaines de techniciens et comédiens.

Réalisations majeures et héritage

Parmi ses œuvres majeures, on se souvient de « The Greeting » (1995), inspiré de La Visitation de Pontormo, où il ajoutait la dimension temporelle à la peinture, et de « The Passing » (1991), une réflexion sur la vie et la mort. Sa première rétrospective française en 2014 au Grand Palais de Paris a présenté plus de vingt œuvres monumentales, consolidant son statut d’artiste majeur.

Bill Viola laisse derrière lui un héritage inestimable, ayant repoussé les frontières de l’art vidéo et offert une nouvelle compréhension de la temporalité et de la perception. Son influence perdurera à travers ses œuvres et l’empreinte indélébile qu’il a laissée sur l’art contemporain.