— Par Patrick Chamoiseau —
Mapou
lé vyé dlo ka koulé
sépa selman grenn-anba-fey ki ka konté pinèz
(man adan sa osi)
Mapou
chabin à yeux grand ciel
les énergies ne valent qu’au principe des tendresses, et si je garde ce vent solaire qui chante poitrine offerte (sans souci d’une chemise), j’ai bel souvenir du long toucher des galaxies cordiales, de ton genou par terre pour la beauté qui compte, du feu pris dans la langue, à grand vocal, dans les piliers de la création où ne prend jamais fin la substance des étoiles
recommencée
recommencée !
Mapou
zwézo pani zel ba la pli
yo ka rété sispann
an plim mol ek fal frèt
(mi mwen sézi kon yo)
Mapou
tout dyab pa Dyab
mé ni délè ou ka santiy pasé
kabwit ka pèd fil yo adan difé pikan
ek betafé paka kléré si atoumo pani rimèd
Frankétienne
le mapou régente toutes les racines de la forêt, il ne vit pas tout seul il fait Grands-bois, il ne grimpe pas aux filaos ni ne s’abaisse le front au pays-loin-des-sans-chapeaux, il fait langue défoncée, toutes les langues convoquées dans celle qui nous habite, qui nous lève,
et frissonne jôdijou
au fil de l’archipel
d’une juste gloire offerte au plus vaste des hougans
célébration
reconnaissance
klendenden du respect
dans le verbe à cyclones
Franck ho
piès lanmizé pa jan twé neg :
lè fwa yo fann, yo ka chanté !
devant tant de vie et de force
Baron samedi lui-même
aprézan déféré à la barre
restera sans manœuvre
Legba s’inclinera
à chacun de tes carrefours
à chacune de tes portes
Damballa en personne sifflera la connaissance
Et Erzulie la reine
(réduite à ton sillage)
(séduite déjà, séduite toujours)
fera respect sur ce qui passe
si tellement haut si tellement loin.
Patrick CHAMOISEAU
Tunis, le 21 février 2025