— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —
« duper » (verbe transitif )
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Faire prendre à quelqu’un le faux pour le vrai ; tromper, abuser, mystifier / Ses escroqueries ont dupé bien des naïfs. [Dictionnaire Le Larousse]
Débattre du créole dans la société haïtienne est-il un droit, une nécessité, un tabou ou une croisade passionnelle, me demande un correspondant dans un récent courriel ? J’entreprends de lui répondre aujourd’hui par l’exploration de quelques pistes de réflexion et en lien avec le sujet des échanges qui ont eu lieu il y a quelques jours entre deux linguistes haïtiens. Il arrive souvent que les débats sur le créole, et plus largement sur la question linguistique haïtienne, empruntent la voie de propos passionnels et subjectifs émis la plupart du temps par des non-linguistes et parfois par quelques rares linguistes lorsqu’ils cèdent aux sirènes borgnes de l’idéologie. Dans tous les cas de figure, dans un pays où la libre parole et le débat public ont été violemment confisqués par la dictature trentenaire des Duvalier, oser penser, s’attacher à élaborer une pensée analytique et critique est déjà un parti-pris citoyen au creux du vouloir-vivre ensemble dans un futur État de droit. Cela est encore plus prégnant dans l’actuelle conjoncture où le cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste procède au démembrement des institutions républicaines que garantit la Constitution de 1987, et où l’insécurité généralisée qu’imposent les gangs armés conduit à certaines formes de fatalisme et de repli sur soi puisqu’il s’agit de survivre au jour le jour en lieu et place de vivre dans la plénitude des droits citoyens. Dans un contexte aussi mortifère, plusieurs de mes collègues et correspondants témoignent de la difficulté de réfléchir, de penser et de se livrer à des activités intellectuelles et professionnelles liées aux différents champs du savoir et des connaissances : la lutte pour la survie quotidienne génère une diffuse paralysie réflexive et l’anxiété s’est installée dans une grande majorité de foyers du pays.
Alors, dans un tel contexte, débattre du créole dans la société haïtienne est-il une nécessité ou un luxe ? Plusieurs de mes correspondants vivant en Haïti me le disent sans détour : ils refusent d’abdiquer, ils récusent toute zombification de la pensée, toute assignation au silence, et ils s’attachent à produire une pensée analytique dans leurs domaines de compétence. Cela est hautement salutaire et il y a lieu de saluer l’exemplaire courage de nombreux professionnels haïtiens à travers le pays ainsi que leur détermination, individuelle ou au sein d’instances de la société civile, à ne pas courber l’échine devant les menées kleptocratiques et la violence du couple PHTK/gangs armés. D’aucuns estiment qu’il est malgré tout essentiel, dans la conjoncture actuelle de chaos et de délitement des institutions républicaines, de poursuivre des recherches de terrain ainsi que la réflexion analytique sur tous les sujets qui concernent l’avenir du pays, de la santé à l’éducation, de l’insécurité alimentaire à l’agriculture, du « blackout » énergétique chronique au coma de la production nationale et au rôle du créole dans l’École haïtienne, etc.
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Historicité du débat sur la question linguistique haïtienne : quelques repères
L’expérience a montré que la question linguistique haïtienne, et singulièrement celle du créole, est hautement « inflammable » alors même qu’elle est déjà ancienne dans le cours de l’histoire nationale. Ainsi, comme l’a précisé le linguiste Renauld Govain, « En 1898 déjà, Georges Sylvain [déclarait] que « le jour où (…) le créole aura droit de cité dans nos écoles primaires, rurales et urbaines, le problème de l’organisation de notre enseignement populaire sera près d’être résolu » (Renauld Govain : « Le créole haïtien : de langue d’alphabétisation des adultes à langue d’enseignement », researchgate.net, 11 avril 2018). Georges Sylvain, rappelons-le, est l’auteur de « Cric ? Crac ! / Fables de La Fontaine racontées par un montagnard haïtien et transcrites en vers créoles ». Le livre est préfacé en 1899 par Louis Borno, président d’Haïti de 1922 à 1930, et il a été édité en 1901 à Paris aux Ateliers haïtiens. Dans sa « Préface », Louis Borno s’interrogeait déjà sur le manque d’études relatives au créole (« le créole a droit à l’étude »), tandis que Georges Sylvain, dans sa « Notice », expose que « Nous n’écrivons pas assez en créole » et se questionne sur la place du créole dans la littérature haïtienne naissante (source : Digital Library of the Caribbean, University of Florida). En 1947, Charles-Fernand Pressoir a fait paraître à l’Imprimerie de l’État, à Port-au-Prince, le livre « Débats sur le créole et le folklore » (source : Bibliothèque haïtienne des Pères du Saint-Esprit, Port-au-Prince). Un document daté du 5 décembre 2019 paru sur le site www.haitiinter.com et intitulé « Le créole haïtien : histoire de son orthographe » consigne, à propos de l’élaboration de l’orthographe du créole, que « vers 1950, Charles-Fernand Pressoir et Lelio Faublas, deux intellectuels haïtiens, apportèrent quelques changements à l’orthographe Laubach (…) » Le même document consigne qu’« À la fin des années 1970, l’État haïtien via le ministère de l’Éducation nationale allait entrer en jeu et mit sur pied l’IPN (Institut pédagogique national) et le GREKA (Gwoup rechèch pou etidye kreyòl ayisyen/Groupe de recherches pour étudier le créole haïtien). Les deux entités reconsidérèrent l’orthographe Pressoir et en présentèrent plus tard une version revue en six points. Le 31 janvier 1980, le ministère de l’Éducation nationale exposa au public les travaux de l’IPN et du GREKA (…) » qui ont conduit à l’adoption de la première graphie officielle du créole.
Dans les années 1940, la question de l’usage scolaire du créole a été abordée notamment par Christian Beaulieu, compagnon de lutte de Jacques Roumain et auteur de « Pour écrire le créole » (Les Griots, 1939), et qui fut l’un des premiers, à cette époque, à réclamer l’utilisation du créole à des fins pédagogiques. De manière plus programmatique, la question de l’aménagement et de l’usage scolaire du créole dans le système éducatif haïtien a été posée avec la réforme Bernard de 1979, réforme fortement inspirée par les partenaires internationaux d’Haïti. Cette réforme, qui faisait du créole langue d’enseignement et langue enseignée pour la première fois en Haïti, a été mise en veilleuse en 1987.
Au creux du débat public, durant les années 1970 – 1990, la question linguistique haïtienne ainsi que le statut et le rôle du créole dans l’enseignement ont été débattus sous différents angles (culturel, politique, didactique, etc.) comme l’a bien noté Roody Edmée, enseignant et analyste, dans un remarquable éditorial paru le 27 avril 2021 dans Le National et intitulé « Créole : la longue marche ! »). Rappelant de manière tout à fait pertinente les débats qui ont traversé la société haïtienne durant cette époque, Roody Edmée précise qu’ « À la fin des années 70, les émissions en créole de Radio Haïti inter et la parution du journal Bon nouvèl donnèrent à la langue populaire une dimension médiatique qui n’allait pas manquer d’avoir un impact social certain. » Il poursuit en disant qu’ « Il y avait là une belle bataille à mener pour sortir la langue populaire des murs de complexe construits autour d’elle et la faire entrer avec des habits neufs dans le monde de la pensée scientifique. » L’éclairage de Roody Edmée est confirmé dans un entretien peu connu du romancier Franketienne avec le célèbre journaliste Jean L. Dominique, « Sur le créole, réponse [de] Jean L. Dominique et Frankétienne au journal Le Nouveau Monde ». Dans la présentation de cette archive sonore, il est précisé que « Frankétienne et Jean Dominique réagissent à l’éditorial du journal Le Nouveau Monde, paru le 6 juin 1975, concernant le statut du créole en Haïti. Tous deux [réfutent] l’idée que le français et le créole soient en opposition. Cette discussion s’inscrit dans un débat plus large au sein des intellectuels haïtiens de l’époque : la réflexion sur « l’haïtianité » (l’identité haïtienne) ». (Source : Duke University, Digital Collection, Radio Haiti Archive) Plusieurs thèmes de l’entretien-dialogue de Franketienne avec Jean L. Dominique (le créole langue nationale, le créole et l’identité nationale, etc.) se retrouveront un an plus tard dans un retentissant article du célèbre journaliste, « Collier maldioc et transistor : une quête d’haïtianité » paru en mai 1976 dans le magazine Conjonction (volume 129), le bulletin de l’Institut français d’Haïti. Jean L. Dominique a également conduit en avril 1975 l’entrevue intitulée « Albert Valdman au sujet du créole haïtien, interview [avec] Jean Dominique » (Source : Duke University, Digital Collection, Radio Haiti Archive). Dans cette entrevue, « Le linguiste Albert Valdman, professeur à l’Université de l’Indiana, parle de la langue créole, de ses origines, et également de ses intentions de rédiger un dictionnaire créole. » L’un des plus grands spécialistes du créole et de la lexicographie créole, Albert Valdman est l’auteur entre autres du monumental « Haitian Creole-English Bilingual Dictionnary » (Indiana University, Creole Institute, 2007), une œuvre dictionnairique rigoureusement élaborée selon la méthodologie de la lexicographie scientifique.
Au plan historique, il est avéré que ce que l’on a convenu d’appeler « le débat sur le créole » est une constante en Haïti tant sous l’angle sociologique qu’anthropologique et politique depuis les années 1898 et de manière plus ample depuis les années 1970. Au cours des cinquante dernières années, avec l’apport des linguistes et des historiens, la très grande majorité des personnes s’intéressant au créole a parfaitement intégré le constat que le créole est une langue naturelle qui possède, comme toutes les langues naturelles, ses propres règles grammaticales : le débat sur le créole faussement perçu comme un « patois » ou un « dialecte » s’est donc peu à peu éteint. Comme celui sur la graphie officielle, qui date de 1980, de sorte que seuls de rares récalcitrants plaident encore aujourd’hui pour une graphie de type étymologique proche de l’orthographe du français. Le débat des années 1990 – 2000 sur le changement de nom de la langue créole au profit de l’appellation générique « Ayisyen », sauf de rares exceptions, n’a plus cours de nos jours. Le faible argumentaire de type idéologique soutenant cette improbable aventure a été vigoureusement contesté par plusieurs linguistes : voir notamment la réfutation produite par Yves Dejean, « Changer le nom de la rose ? » paru dans Haïti Nation du 6 juillet 2012 ; voir aussi le texte de Hugues St-Fort « Conservons la dénomination ‘créole’ », texte non daté paru sur le site Potomitan ; voir enfin le remarquable livre de Hugues Saint-Fort, « Haïti : questions de langues, langues en question » (Éditions de l’Université d’État d’Haïti, 2011), au chapitre XXIII intitulé « Faut-il cesser de se servir du terme créole ».
D’autres interventions ont marqué ces dernières années le débat sur le créole et/ou les rapports entre le créole et le français. L’une d’entre elles a été la publication du livre de référence du linguiste Pradel Pompilus, « Contribution à l’étude du créole et du français à partir du créole haïtien », Éditions Caraïbes, 1973, 1976). Cette œuvre de premier plan a été précédée du monumental livre issu de sa thèse de doctorat soutenue à la Sorbonne en 1961, « La langue française en Haïti » (Éditions de l’IHEA, collection Travaux et mémoires | 7, Paris, 1961), et il a été republié en 1981 en Haïti aux Éditions Fardin. Ces publications, issues de travaux de terrain, font de Pradel Pompilus le pionnier de la lexicographie haïtienne, et aucune démarche lexicographique qui se veut rigoureuse ne peut être effectuée dans l’ignorance de son apport méthodologique. Il y a aussi lieu de citer la parution en 1979 du livre de Frantz Lofficial, ancien cadre de l’Institut pédagogique national (IPN), « Créole – français : une fausse querelle ? Bilinguisme et réforme de l’enseignement en Haïti » (Éditions Collectif paroles, Montréal). L’auteur invite à la réflexion sur le bilinguisme au pays, conteste l’idée d’une « guerre linguistique » en Haïti et il s’interroge sur la place du français langue seconde dans les circuits de communication en ces termes : « (…) vraiment maîtrisé par une petite minorité, qui d’ailleurs la réserve pour les circonstances sortant du commun, le français est loin d’être la langue de grande communication et de culture qu’elle pourrait être ».
Plus près de nous dans le temps, Lyonel Trouillot, romancier et essayiste, est l’auteur d’un vigoureux plaidoyer intitulé « Ki politk lengwistik pou Ayiti ? ». Il pose avec hauteur de vue que « La seule politique linguistique pouvant corriger le déficit de citoyenneté perpétué par la situation linguistique d’Haïti me semble être la construction à moyen terme d’un bilinguisme créole-français pour l’ensemble de la nation. La tentation facile de considérer le français comme une langue étrangère comme une autre, l’anglais par exemple, me semble un refus délibéré de tenir compte d’une donnée fondamentale : la nécessité de préserver la spécificité culturelle de notre État nation dont l’une des composantes est le patrimoine linguistique. Par ailleurs le fait qu’il n’existe nulle part un bilinguisme « parfait » ne constitue pas une objection à la politique que je propose. Il ne s’agit pas d’atteindre la perfection mais de mener une politique équitable assurant un minimum d’égalité de chances et offrant des repères symboliques communs de manière à fonder un sentiment d’appartenance » (Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 7 juillet 2005). En dépit de son caractère hors-sol sinon lunaire, il faut également prendre en compte la vaine et chimérique tentative d’une très petite minorité de « créolistes » fondamentalistes de « déchouquer » totalement le français en Haïti et de proclamer le créole seule langue officielle (voir le livre de Gérard-Marie Tardieu, « Yon sèl lang ofisyel », Éditions Kopivit l’Action sociale, 2018). Ce livre-plaidoyer pour « une seule langue officielle », le créole, est étranger à toute analyse linguistique crédible et il n’a pas été pris au sérieux par les linguistes et les enseignants haïtiens ; il a vite fait d’être remisé au musée des OVNI… Dans le débat sur la question linguistique haïtienne, il est toutefois important d’être à l’écoute de ce type de dérive unijambiste pour en mesurer à la fois l’inanité et la toxicité : la petite minorité de « créolistes » fondamentalistes, parfaitement scolarisée dans les meilleures écoles francophones du pays, appelle à la « guerre des langues », au combat contre la langue française en Haïti au motif qu’elle serait la « langue du colon » responsable de tous les maux du pays. Dépourvue de projet linguistique autre que l’allégeance volontariste à l’unilinguisme créole, elle appelle à transgresser l’article 5 de la Constitution de 1987 en donnant la préséance à sa chimère, « Yon sèl lang ofisyel », sur le vote majoritaire de notre Charte fondamentale en 1987. « Yon sèl lang ofisyel » n’est pas seulement anticonstitutionnel, il est également antidémocratique puisqu’un individu, seul sinon esseulé, entend se substituer au vote de la majorité de la population pour faire école dans le système éducatif haïtien et dans l’espace public en s’adossant au nationalisme de l’enfermement.
Dans la dynamique des débats publics sur la culture haïtienne et le créole, il est essentiel de rappeler que les deux langues de notre patrimoine linguistique historique, le créole et le français, ont accédé au statut de langues co-officielles dans la Constitution de 1987. La co-officialisation des deux langues –résultant principalement des luttes démocratiques ayant conduit à la défaite de la dictature duvaliériste–, est une conquête historique majeure dans la vie des langues au pays et elle se situe dans le prolongement logique de la réforme Bernard de 1979 (voir nos articles « L’aménagement du créole en Haïti et la réforme Bernard de 1979 : le bilan exhaustif reste à faire », Le National, 16 mars 2021 ; et « Sanctuariser et sacraliser les reliques de la réforme Bernard, un évangile aventureux au mitan du système éducatif haïtien », Le National, 14 avril 2022). La co-officialisation des deux langues de notre patrimoine linguistique historique confère depuis lors aux débats sur la question linguistique en Haïti une tonalité nouvelle et, surtout, une perspective inédite, celle de l’aménagement simultané des deux langues en conformité avec l’article 5 de la Constitution de 1987.
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Les Ayatollahs du créole et la « duperie argumentative » : un exemple récent
Le débat sur la problématique linguistique haïtienne a connu un très récent chapitre. Ainsi, dans le mini dossier que j’ai fait paraître le 14 avril 2022 sur le site rezonòdwès, sous le titre « L’unilatéralisme « créoliste » sectaire et dogmatique du linguiste Michel DeGraff contesté par le linguiste Rochambeau Lainy : documents à consulter », j’ai à dessein rappelé en introduction à mon propos que « Le débat d’idées sur la problématique linguistique haïtienne est nécessaire et salutaire. Lorsqu’il est rigoureux et documenté, il permet d’éclairer les positions et perspectives des uns et des autres et de prendre toute la mesure des enjeux de l’aménagement linguistique en Haïti. »
La relecture du résumé de la communication donnée par le linguiste Rochambeau Lainy à Indiana University le 1er avril 2022 (voir plus bas) et la revue de la réponse que lui a infligée le linguiste Michel DeGraff le 9 avril 2022 (voir plus bas) révèlent qu’il y a chez les « Ayatollahs du créole » une constante « duperie argumentative ». Pareille duperie est très clairement mise en oeuvre dans la réponse de Michel DeGraff, notamment dans les deux extraits suivants de son texte :
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« Ki jan n konprann gen Akademisyen nan Akademi Kreyòl Ayisyen tankou Pwòf Rochambeau Lainy ki bay tèt yo misyon pou yo « pwoteje lang franse ann Ayiti » ? Sa se pawòl Akademisyen an nan konferans li bay nan Indiana University nan dat 1 avril 2022… »
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« (…) ou ki di lang kreyòl la pa nesesè nan aprantisaj ti moun ki pale kreyòl epi w di lang kreyòl la, si l ta sèvi kòm zouti pou ansèyman pami ti moun ki pale kreyòl, se yon lang k ap bloke ti moun yo nan echanj ak lòt peyi. »
La « duperie argumentative » dans laquelle excelle Michel DeGraff consiste ici à faire croire que l’essentiel de la conférence de Rochambeau Lainy aurait eu pour objectif de « pwoteje lang franse ann Ayiti ». Ce qui est rigoureusement faux comme on le constate à la lecture du texte de Rochambeau Lainy. J’invite les lecteurs à lire l’intégralité de la version française de la conférence de Rochambeau Lainy (voir plus bas) pour débusquer la « duperie argumentative » de Michel DeGraff. À aucun moment dans l’énoncé présentatif de sa conférence Rochambeau Lainy n’a défendu la perspective, que lui prête frauduleusement Michel DeGraff, de « protéger la langue française en Haïti »… Au contraire, Rochambeau Lainy annonce qu’il entend traiter certaines questions de fond –par exemple la problématique de l’usage du créole dans l’apprentissage scolaire versus l’usage du français–, et il précise qu’il entend les examiner d’un œil critique au cours de sa communication. Il signale qu’il y a des différences d’approche dans la question du bilinguisme en Haïti et que « le bilinguisme français-créole en Haïti est mal géré ».
Il est avéré que Michel DeGraff n’en est pas à sa première « duperie argumentative ». Il a eu recours à ce procédé toxique au constat que, dénué de toute compétence lexicographique connue, il lui a fallu assurer la défense du médiocre « Glossary of STEM terms from the MIT – Haiti Initiative » (pour une lecture critique de ce « Glossary » pré-scientifique et pré-lexicographique, voir mon texte « Le naufrage de la lexicographie créole au MIT Haiti Initiative », Le National, 15 février 2022). Dans cet article j’ai rigoureusement démontré que ce « Glossary » est une « arnaque lexicographique », que le MIT Haiti Initiative promeut un « modèle » lexicographique amateur en dehors de la méthodologie de la lexicographie professionnelle et que les pseudo équivalents « créoles » qu’il a concoctés sont pour la plupart fantaisistes, erratiques, a-sémantiques et non conformes aux règles morphosyntaxiques du créole.
Également, au chapitre des dérives idéologiques qui sont l’une des caractéristiques majeures des « Ayatollahs du créole », j’ai exposé, dans plusieurs articles que j’ai publiés en Haïti dans Le National, que la diffusion du médiocre « Glossary of STEM terms from the MIT – Haiti Initiative » s’accompagne de prises de positions publiques de Michel DeGraff en faveur du cartel politico-mafieux du PHTK. Les documents que je cite peuvent être consultés par tous les lecteurs de ce dossier : (1) D’une part la promotion du PSUGO de Michel Martelly/Laurent Lamothe dans l’article publié par Michel DeGraff dans la Revue transatlantique d’études suisses, 6/7, 2016/17 : « La langue maternelle comme fondement du savoir : l’initiative MIT-Haïti : vers une éducation en créole efficace et inclusive ». Dans cet article, Michel DeGraff prétend qu’« Il existe déjà de louables efforts pour améliorer la situation en Haïti, où une éducation de qualité a traditionnellement été réservée au petit nombre. Un exemple récent est le Programme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire (PSUGO) lancé par le gouvernement haïtien en 2011 dans le but de garantir à tous les enfants une scolarité libre et obligatoire. » D’autre part (2) la promotion du même PSUGO dans une vidéo mise en ligne sur YouTube au cours du mois de juin 2014, dans laquelle il soutient, sans révéler ses sources ni fournir de preuve irréfutable, que 88 % des enfants vont à l’école grâce au PSUGO : « Gras a program Psugo a 88 pousan timoun ale lekòl ».
Toujours au chapitre des dérives idéologiques, il y a lieu de mettre en lumière, au creux de ses commentaires, que pour donner davantage de « crédibilité » à la « fraude argumentative » qu’il a mise en œuvre dans la falsification du propos de Rochambeau Lainy, Michel DeGraff manie l’amalgame en laissant entendre avec complaisance que Rochambeau Lainy ne serait qu’un supplétif au service des institutions « coloniales » en Haïti que sont… l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), l’ambassade de France en Haïti et l’Institut français : « l ap sèvi misyon Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Ambassade de France en Haïti, Institut Français en Haïti e latriye ». Expert en « stratégie de l’amalgame » comme en « fraude argumentative », Michel DeGraff est le seul linguiste haïtien à amalgamer les sciences du langage et l’appui politique public qu’il accorde depuis plusieurs années au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste comme je l’ai démontré dans plusieurs articles parus en Haïti dans Le National. Et dans le présent article (voir paragraphe précédent), j’en fais le rappel en citant des sources documentaires que j’invite chaque lecteur à consulter.
Aux paragraphes suivants (2.1. et 2.2.), je fournis aux lecteurs les deux principales pièces du dossier. Leur lecture attentive est fort révélatrice et tout à fait éclairante de la « duperie argumentative » dont il est question dans cette « Tribune ».
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Communication du linguiste Rochambeau Lainy, Indiana University, 1er avril 2022 : « Créole haïtien et français côte à côte en Haïti : un cas de bilinguisme mal géré »
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« La situation sociolinguistique en Haïti soulève de nombreuses questions. Chercheurs, éducateurs, partenaires internationaux et simples citoyens haïtiens expriment des préoccupations, certaines plus évidentes que d’autres. Ces préoccupations tournent principalement autour du créole et du français, dont le statut et l’usage occupent une place importante dans les discussions. Le statut et l’usage du français sont contestés par des auteurs qui défendent l’hypothèse que le français est la principale cause d’exclusion et d’échec scolaire en Haïti (Dejean, 2006 ; DeGraff, 2005).
Un argument classique est que le créole serait un facteur déterminant dans l’apprentissage, car il s’agit de la langue maternelle des enfants. A cela s’ajoute l’idée que l’enseignement en français est un désavantage, une violence psychologique et symbolique, et un abus, car seule une petite minorité de la population scolaire connaît déjà cette langue. Ceux qui réclament un système d’enseignement en créole s’appuient sur des dossiers scolaires sur 15 ans (De Regt, 1984 ; Hadjad, 2000), des données statistiques non actualisées sur la population des élèves inscrits (Hebblewaithe & Weber, 2012), et les recommandations de la réforme éducative de Joseph Claude Bernard adoptée le 18 septembre 1979. Ils contestent l’utilisation du français comme langue d’enseignement, car cette langue provoquerait la pauvreté, l’inclusion sociale et un système scolaire inadapté (Coulmas, 1992 ; Hebblewaithe, 2012). D’autre part, les partisans de l’enseignement en français estiment que le remplacement du français par le créole serait une décision qui pénalise les enfants dans leurs échanges avec le monde extérieur.
Dans cette présentation, je montrerai que le type de bilinguisme créole-français décrié par de nombreux auteurs a clairement évolué en Haïti. Je me concentrerai sur des faits qui contrediront une vision du bilinguisme basée sur la tradition dont les racines remontent à Bloomfield (1933). Je contesterai également Lebrun (1982) qui a noté que les bilingues seraient ceux qui ont un niveau élevé de maîtrise des langues en question. Cependant, les écoles et les universités étant les principaux lieux d’acquisition du français en Haïti, il serait inapproprié de parler du nombre de bilingues français-créole, sans considérer le pourcentage d’étudiants inscrits au baccalauréat et à l’université chaque année, étant donné qu’une bonne partie de l’enseignement se fait en français. Ainsi, je considérerai les documents de référence que l’ACTFL (American Council on the Teaching of Foreign Languages) et le CERF (Common European Framework of Reference) ont élaboré pour évaluer le niveau de compétence des apprenants non natifs. Cela me donnera bien sûr l’occasion de soulever la question suivante : si les enfants haïtiens ne réussissent pas à l’école et n’ont pas de chances dans la vie, ce n’est pas ostensiblement parce que leur enseignement est en français, mais plutôt parce que la politique éducative que les dirigeants mettent en œuvre n’est pas appropriée. L’enseignement en créole dans le contexte actuel ne changerait pas non plus cette situation, si le bilinguisme français-créole en Haïti est mal géré. » (Fin du document de Rochambeau Lainy)
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Commentaires frauduleux et manipulateurs du linguiste Michel DeGraff, 9 avril 2022
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« Ki jan n konprann gen Akademisyen nan Akademi Kreyòl Ayisyen tankou Pwòf Rochambeau Lainy ki bay tèt yo misyon pou yo « pwoteje lang franse ann Ayiti » ? Sa se pawòl Akademisyen an nan konferans li bay nan Indiana University nan dat 1 avril 2022…
An tou ka, fòk nou poze 4 kesyon sa yo — 4 kesyon ki klè, 4 kesyon ki antre nan nannan entèvansyon Pwòf Rochambeau a, 4 kesyon ki mande repons san demagoji :
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Ki sa k ap menase lang franse ann Ayiti e ki mande « pwoteksyon » nan men yon Akademisyen nan Akademi Kreyòl Ayisyen ?
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Ki menas ki pi malouk ann Ayiti — menas kont moun ki pale FRANSE e k ap sèvi ak franse pou demele gèt yo oswa menas kont moun ki pale KREYÒL sèlman e ki bezwen lang kreyòl la pou yo jwenn konesans ak lòt mwayen pou demen miyò ?
3. Kot done ak analiz Pwòf Rochambeau yo ki ka kore ipotèz li sa a ki di ti moun ki pale KREYÒL e k ap aprann *AN* KREYÒL ta gen pi plis difikilte pou yo aprann lòt lang pase ti moun ki pale KREYÒL e k ap aprann an FRANSE ?
4. Selon lwa peyi a, Akademi KREYÒL Ayisyen se yon enstitisyon leta. Selon lwa sa a, ki sa misyon Akademi KREYÒL Ayisyen an mande konsènan dosye lang ak edikasyon ann AYITI ? Ki wòl pledwaye Pwòf Rochambeau nan kontèks misyon Akademi an ? Èske pledwaye sa a mache men nan men ak misyon AKA oswa èske se yon pledwaye ki ka bloke misyon AKA pandan l ap sèvi misyon Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Ambassade de France en Haïti, Institut Français en Haïti e latriye ?
Pwòf Akademisyen Kreyolis Rochambeau Lainy, Tanpri, konsidere done ak analiz mwen pataje yo — mwen pataje referans ki byen dokimante enpòtans lang natif natal pou lekòl tèt an wo, depi nan ti klas yo rive nan inivèsite. Nan rezime ak nan prezantasyon ou fè nan Indiana University a, ou mal reprezante ni pozisyon Pwòf Yves Dejean, ni pozisyon m sou dosye fondamantal sa a epi ou pa prezante okenn done solid ki pou ta kore pozisyon pa w la — konsènan « bilengwis » ann Ayiti ak analiz ou ki di lang kreyòl la pa nesesè nan aprantisaj ti moun ki pale kreyòl epi w di lang kreyòl la, si l ta sèvi kòm zouti pou ansèyman pami ti moun ki pale kreyòl, se yon lang k ap bloke ti moun yo nan echanj ak lòt peyi. Vreman ?!? Se kòm ki dirè, kòm lengwis, ou panse lè yon ti moun ki pale KREYÒL ap aprann *AN* kreyòl, li pa ka aprann okenn lòt lang. Vreman ?!? ….
Si w ta vreman pare pou w fè yon deba sou bon fondasyon, se done ak analiz mwen pataje yo pou w ta gade e se sou done ak analiz sa yo pou w ta baze repons ou… Ann atandan, tout lòt koze pèsonèl w ap vin pale kounye a konsènan pitit ou, pitit mwen, tit ou, tit mwen e latriye, sa p ap antre ditou pyès nan okenn analiz oswa agimantasyon syantifik ki ta dwe aplike pou yon sistèm lekòl tèt an wo pou *TOUT* popilasyon an.
Ki donk, Pwòf Rochambeau, ou pa bezwen antre nan okenn dosye pèsonèl. Kesyon fondamantal se kesyon SYANTIFIK ki na. Ipotèz ou kòm LENGWIS nan prezantasyon ou te fè nan Indiana University nan dat 1 avril 2022 :
KOTE DONE AK ANALIZ KI DEMONTRE LANG KREYÒL SE *PA* YON ZOUTI KI LONTAN PI DJANM PASE LANG FRANSE KÒM ZOUTI POU ANSÈYMAN ANN AYITI ?
Se la kesyon fondamantal la chita.
Kreyòl pale, kreyòl konprann, pa vre ? » (Fin du document de Michel DeGraff)
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À contre-courant de la « fraude argumentative », plaider pour des débats rigoureux et documentés et promouvoir l’aménagement simultané des deux langues officielles d’Haïti.
Sur le registre de l’enfermement idéologique à l’œuvre dans le narratif des Ayatollahs du créole, j’ai enregistré l’éclairage d’Alain Saint-Victor, historien et auteur du livre de référence « De l’exil à la communauté, une histoire de l’immigration haïtienne à Montréal, 1960-1990 » (Éditions DAMI 2020). Dans son courriel daté du 15 avril 2022, il expose que « À bien y penser, malgré que je n’aie pas lu au complet l’intervention de Rochambeau [Lainy], ce que [Michel] Degraff lui reproche est plutôt d’ordre idéologique. (…) Je crois que l’attitude de Degraff à l’égard de la langue française, langue qu’il considère comme langue du colon, sans prendre le soin de distinguer la langue en tant que telle et son instrumentalisation dans le cadre de la domination coloniale et néocoloniale, est similaire à l’attitude des noiristes ou encore à certains éléments qui défendent le vodou en le considérant comme l’unique religion du peuple haïtien, qui serait par essence vodouisant. Nous revenons encore à cette mystification que Fanon a beaucoup dénoncée. »
De son côté, le sociolinguiste et sociodidacticien Bartholy Pierre Louis, ancien étudiant de la Faculté de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti, est l’auteur d’une exemplaire thèse de doctorat soutenue à l’Université européenne de Bretagne en 2015 et intitulée « Quelle autogestion des pratiques sociolinguistiques haïtiennes dans les interactions verbales scolaires et extrascolaires en Haïti ? : une approche sociodidactique de la pluralité linguistique ». Dans cette thèse, Bartholy Pierre Louis ausculte « L’idéologie linguistique haïtienne : pour ou contre le français ? » (chapitre 4.3.1.3, p. 201 et suiv.). Il note de manière fort pertinente, à propos de l’« idéologie linguistique haïtienne », que les « créolistes » fondamentalistes « (…) rendent le français en partie responsable du sous-développement du pays, car les taux d’échecs majeurs sont liés au français comme langue d’enseignement ; ce qui est largement discutable et même réfuté dans certaines publications scientifiques dont celles de Berrouët-Oriol (2011 : 182) qui voit, au contraire, la possibilité d’aménager les deux langues : « Mais contrairement à certains qui croient, de bonne foi ou avec d’ingénues ornières, qu’il faudrait désormais passer de manière exclusive au « tout en créole », nous plaidons ouvertement pour un aménagement linguistique fondé sur l’effectivité des droits linguistiques dans les deux langues haïtiennes » (op. cit. p. 201-202).
La lecture attentive des textes des deux linguistes haïtiens auxquels je viens de donner intégralement accès (aux paragraphes 2.1. et 2.2.) illustre bien qu’il y a eu une indéfendable « duperie argumentative » de la part de Michel DeGraff. L’extrême gravité de cette nouvelle « arnaque argumentative » de Michel DeGraff ne doit toutefois pas nous priver d’en tirer d’utiles leçons. La toute première est le respect de l’intégrité de la démarche académique et le respect du travail de recherche d’un linguiste –ici Rochambeau Lainy–, enseignant-chercheur à la Faculté de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti et auteur en 2010 d’une remarquable thèse de doctorat intitulée « Temps et aspect dans la structure de l’énonciation rapportée : comparaison entre le français et le créole haïtien » (Université de Rouen, France). Manifestement, le sujet de la conférence de Rochambeau Lainy le 1er avril 2022 est issu de ses travaux de recherche et à ce titre il a droit au respect de la valeur scientifique de ses interventions. Ce respect lui est dû, que l’on soit d’accord ou pas avec l’argumentaire qu’il présente durant une conférence ou dans un article scientifique. De manière liée, la « duperie argumentative » de Michel DeGraff éclaire l’obligation, dans tout débat sur l’un ou l’autre aspect de la problématique linguistique haïtienne, de s’en tenir à des arguments rigoureusement documentés plutôt que de se livrer à une borgne, arrogante et volontaire falsification de la pensée et des écrits d’un collègue linguiste. Michel DeGraff, spécialiste et promoteur de ce type d’« arnaque argumentative », rabaisse le débat sur le créole au niveau d’un « voye monte » amateur et démagogique, et il décrédibilise ainsi la nécessaire et légitime défense du créole. Cela produit chez le lecteur non-linguiste, comme je l’ai plusieurs fois constaté, le sentiment que la légitime et nécessaire défense du créole est l’affaire d’une petite secte de prédicateurs fondamentalistes « fanatiques » et emmurés dans diverses formes de dérives idéologiques et incapables d’élaborer une vision consensuelle et rassembleuse de l’aménagement linguistique en Haïti. L’« arnaque argumentative » dont Michel DeGraff se fait le bavard hérault agit comme un repoussoir démobilisateur et elle est porteuse de dommages potentiels en particulier au chapitre de l’opérationnalisation de l’usage du créole dans l’apprentissage scolaire au sein de l’École haïtienne.
De manière plus centrale et essentielle, la « duperie argumentative » de Michel DeGraff sert à masquer sinon à évacuer des questions de fond qui doivent impérativement être étudiées et débattues : (1) quelles sont les lacunes identifiables, au niveau didactique, dans l’usage scolaire du français et également du créole dans les cursus de l’École haïtienne ? ; (2) quelle didactique spécifique faut-il élaborer pour l’enseignement en créole et du créole ? ; (3) quel doit être l’apport des linguistes, des didacticiens et des enseignants à la nécessaire « didactisation » du créole ? (voir le livre de référence « La didactisation du créole au cœur de l’aménagement linguistique en Haïti » (par Berrouët-Oriol et al., Éditions Zémès et Éditions du Cidihca, 2021) ; (4) quels sont les freins institutionnels et politiques à l’élaboration et à la mise en œuvre d’une véritable politique linguistique éducative en Haïti ? ; (5) quelle doit être la contribution des linguistes, des didacticiens et des enseignants à la fabrication d’outils didactiques et lexicographiques de haute qualité scientifique en langue créole ? (6) comment adapter en la refondant la formation didactique des enseignants dans le cadre de l’École normale supérieure et des ENI, les Écoles normales d’instituteurs ?
À contre-courant de toute « duperie argumentative » et autres chimères parachutées dans le débat sur la question linguistique haïtienne –et singulièrement sur le créole langue de transmission des savoirs et des connaissances–, à contre-courant d’une aventureuse doxa captive de la « logique » fondamentaliste de l’enfermement idéologique, ce sont là des questions de fond auxquelles nous devons répondre en une démarche ouverte, rigoureuse et documentée, consensuelle et rassembleuse : il en va de la qualité de l’éducation en Haïti et de l’avenir de plus de 1,5 millions d’élèves aujourd’hui scolarisés dans l’École haïtienne.
Montréal, le 20 avril 2022