M' A

A bas le développement durable ! Vive la décroissance conviviale !

 

— Par Serge Latouche —

 

 

 

«Il n’y a pas le moindre doute que le développement durable est l’un des concepts les plus nuisibles». Nicholas Georgescu-Roegen, (correspondance avec J. Berry, 1991) (1).

 

On appelle oxymore (ou antinomie) une figure de rhétorique consistant à juxtaposer deux mots contradictoires, comme «l’obscure clarté», chère à Victor Hugo, «qui tombe des étoiles…». Ce procédé inventé par les poètes pour exprimer l’inexprimable est de plus en plus utilisé par les technocrates pour faire croire à l’impossible. Ainsi, une guerre propre, une mondialisation à visage humain, une économie solidaire ou saine, etc. Le développement durable est une telle antinomie.

 

En 1989, déjà, John Pessey de la Banque mondiale recensait 37 acceptions différentes du concept de «sustainable development» (2). Le seul Rapport Bruntland (World commission 1987) en contiendrait six différentes. François Hatem, qui à la même époque en répertoriait 60, propose de classer les théories principales actuellement disponibles sur le développement durable en deux catégories, «écocentrées» et «anthropocentrées», suivant qu’elles se donnent pour objectif essentiel la protection de la vie en général (et donc de tous les êtres vivants, tout au moins de ceux qui ne sont pas encore condamnés) ou le bien-être de l’homme (3).

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« Ainsi parla l’Oncle » suivi de « Revisiter l’Oncle » de Jean Price-Mars

 ISBN : 978-2-923713-03-8

520 pages

PRIX : 39.50$

En librairie dès le 24 février 2009

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Vient de paraître aux éditions Mémoire d’encrier

Ainsi parla l’Oncle, paru pour la première fois en 1928, est le premier manifeste de la condition noire. Cet ouvrage a influencé l’oeuvre et la pensée des auteurs du mouvement de la négritude comme Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire et Léon-Gontran Damas.

 

Réédité dans un nouveau format, avec une iconographie nouvelle (paysages et figures de l’Afrique et d’Haïti), cet ouvrage propose une relecture de cette oeuvre monumentale qui a servi de bréviaire aux intellectuels des peuples noirs. Pour penser le monde, pour comprendre les mécanismes de l’aliénation, soit du «bovarysme culturel», Jean Price-Mars a mis en avant les traditions, les légendes populaires, le vaudou et tout l’héritage africain qui fondent les cultures noires.

 

Ainsi parla l’Oncle est suivi du collectif Revisiter l’Oncle qui réévalue les incidences et résonances de cette oeuvre dans le monde entier. Revisiter l’Oncle accueille les textes de Maryse Condé, Dany Laferrière, Jean-Daniel Lafond, Raphaël Confiant, André Corten, Jean Bernabé, Léon-François Hoffmann, Maximilien Laroche, Jean Morisset, Romuald Fonkoua, Alain Anselin, Carlo A.

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Martinique et Guadeloupe : le manque de concurrence comme origine de la crise

—  Par Agnès Verdier-Molinié, Samuel-Frédéric Servière —

mardi 24 février 2009

martinique-gwadaDerrière l’augmentation importante des prix à la consommation par rapport à la métropole (de 20 à 60% selon les produits), le véritable problème des DOM est bel et bien issu des monopoles et du manque de concurrence.

 

Monopoles publics parce que les administrations des Antilles ont la haute main sur un certain nombre de services publics (ports, aéroports etc.) qui s’interfacent avec le monde extérieur et renchérissent d’autant le coût des produits importés (taxes et redevances aéroportuaires, octroi de mer etc.).
Monopoles privés, qui vont à l’encontre des règles de concurrence saine et non faussée prônées par Bruxelles y compris dans ces régions dites « ultra-périphiques » (RUP).

 

Pour pallier le renchérissement du coût de la vie lié aux monopoles publics et privés, la métropole dispense subsides et régimes dérogatoires officiellement pour contre-balancer les difficultés supposées nées de l’insularité. Exercice budgétaire après exercice budgétaire, ces financements publics sont distribués à fonds perdus.

 

L’économie de ces îles semble stagner et pourtant les transferts d’argent public n’ont jamais été aussi importants : près de 13,3 milliards € en 2009 vers les DOM/TOM, soit une augmentation de 3,4% par rapport à 2008.

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L’outre-mer coûte près de sept milliards à l’État

 — par Cécile Crouzel —

La Guadeloupe coûte déjà 2,5 milliards d’euros à l’État et la Martinique 1,8 milliard.

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Le pouvoir et le président de la République en particulier sont la cible des protestations sur l’île. Crédits photo : AFP

Avec un taux de chômage qui dépasse les 20 %  et une proportion de RMistes presque quatre fois plus élevée qu’en métropole, les Antilles souffrent de nombreux handicaps économiques. Pourtant, l’État ne lésine pas sur les moyens qu’il accorde à l’outre-mer. L’effort global programmé jusqu’à présent pour 2009 est de 16,7 milliards d’euros. Pour la Guadeloupe, la facture s’élève à 2,5 milliards, et pour la Martinique à 1,8 milliard. «Toutefois, ces chiffrages agrègent tous les coûts, y compris ceux liés aux missions régaliennes de l’État, comme l’Éducation, la Justice, la police, qui existent dans l’ensemble des départements français», nuance Éric Doligé, sénateur UMP rapporteur du budget de l’outre-mer. Or ces charges «habituelles» ne sont pas négligeables : en Guadeloupe, l’État dépense près de 700 millions d’euros pour l’enseignement scolaire. «Il est donc plus juste de se concentrer sur le coût, pour l’État, des mesures spécifiques à ces territoires», explique Jérôme Cahuzac, député socialiste, rapporteur de ce budget à l’Assemblée.

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Cinéma à l’Atrium : Echo au 16ème FEMI

par Selim Lander

On sait fragile la situation du cinéma d’art et essai en Martinique ; néanmoins il survit. En dépit du mouvement de grève générale qui affectait tous les lieux publics, y compris l’Atrium, ce dernier est resté entrouvert pour permettre le bon déroulement des projections prévues dans le cadre de l’Echo au 16ème FEMI (Festival international de cinéma de Guadeloupe)i. Au programme : Le Silence de Lorna des frères Dardenne, qui ont remporté avec ce film un prix du scénario amplement méritée au festival de Cannes ; Chop Shop, film américain de Ramin Bahrani, centré sur l’histoire d’un gamin des rues à New-York (que nous n’avons malheureusement pas pu voir) ; Mataharis, film espagnol de Iciar Bollain ; enfin Faro, film malien de Salif Traoré.

Mataharis conjugue agréablement les destinées de trois femmes employées dans le même bureau de détective, qui balancent entre cynisme et émotion, tout en s’efforçant de raccommoder une vie privée mise à mal par l’usure du temps ou par les aléas de la vie. Du bon travail, plein de sensibilité, d’une jeune réalisatrice prometteuse.

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« L’intraitable beauté du monde » par Patrick Chamoiseau et Édouard Glissant

Toute l’œuvre d’Édouard Glissant a appelé de ses vœux un événement comme celui qui vient de se produire aux Etats-Unis : Barack Obama est l’incarnation de ce qu’il nomme depuis trente ans la « créolisation » du monde.

Son élection est un fait sur lequel on ne peut désormais plus revenir. Qu’est-ce que Barack Obama fera de cette victoire ? C’est aujourd’hui impossible à dire.

Dans cette lettre ouverte écrite un an après Quand les murs tombent, Édouard Glissant et Patrick Chamoiseau s’adressent au 44e président des États-Unis, premier Africain-américain à accéder à la Maison Blanche, et appellent à une réflexion entre poétique et politique sur ce que pourrait être demain l’action d’Obama, président de la première puissance mondiale.

 

En voici un extrait :

 

 

“C’est une rumeur de plusieurs siècles. Et c’est le chant des plaines de l’océan.

 

Les coquillages sonores se frottent aux crânes, aux os et aux boulets verdis, au fond de l’Atlantique. Il y a dans ces abysses des cimetières de bateaux négriers, beaucoup de leurs marins. Les rapacités, les frontières violées, les drapeaux, relevés et tombés, du monde occidental.

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Nathaly Coualy et le One Woman stand up: un équilibre fragile

 — Par Alvina Ruprecht —

Texte de Nathaly Coualy avec la collaboration de Pascal Legitimus

Interprété par Nathaly Coualy

Mise en scène de Juliette Moltes

Au Théâtre Côté Cour

Lumières : Julien Lambert

Décor Thierry Derivot

Nathaly Coualy

Oui, le titre de la pièce est le nom de la comédienne – Nathaly Coualy- que nous avons vue pour la première fois en Avignon « off » (2008) au théâtre de la Chapelle du verbe incarné où elle a joué la copine blonde du mari volage (interprété par Philippe Calodat) dans Projection Privée, sur un texte de Rémi de Vos mis en scène par Greg Germain. Dans sa prestation récente, Nathaly, redevenue semblable à elle-même (car elle n’est pas blonde), nous fait un monologue « confession » qui vire vite au « stand up » interactif, profitant ainsi d’une petite salle (60 places?) où la disposition salle-scène invite les échanges intimes.

Ce spectacle serait une version retravaillée (avec Légitimus) d’un monologue (intitulé Seule), présenté l’année dernière. Cette fois-ci, l’idée était justement de réduire les artifices d’un spectacle théâtral pour créer l’illusion d’une rencontre entre un public qui tient lieu de psychiatre, voire de psychanalyste, et la comédienne.

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De la race en Amérique : Barack Obama à Paris

 

— Par Alvina Ruprecht —

 

Mise en scène : José Pliya

 

D’apres les traductions de François Clemençeau, Gilles Berton et Vincent Byrd le Sage

 

Interprète : Vincent Byrd le Sage

 

 

Un défi de taille : mettre en scène un discours politique de Barak Obama, qui aborde une question aussi délicate, aussi complexe et surtout aussi tabou en France que celui de la question « raciale ».

 

 

D’ailleurs le moment était bien choisi, il faut le reconnaître. L’auteur et metteur en scène José Pliya en tandem avec l’acteur Vincent Byrd le Sage ont réalisé ce projet par suite d’un désir de faire connaître à ceux qui ne connaissent pas l’anglais, ce grand texte, au moment où son auteur s’apprête à devenir le premier président noir des États-unis .

 

 

La réflexion d’Obama sur La Race , prononcée le 18 mars à Philadelphie, fait suite aux critiques proférées contre lui lorsque le révérend Wright de l’Église de la Trinité, une force importante dans la formation spirituelle du jeune Obama, semblait exprimer une haine non mitigée contre les Blancs, en déclarant « que Dieu maudisse l’Amérique ».

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« De maux tus en mots dits » Une idée originale d’Orélie Dalmat

— Par Roland Sabra —

Il s’agit d’une reprise d’un spectacle de pas tout à fait dix ans mais presque. Un exercice difficile et en partie réussi. Dalmat Aurélie, pardon Orélie Dalmat, coquetterie graphique de l’artiste, est la maitresse d’œuvre de ce travail qui raconte, mais y-a-t-il vraiment un fil conducteur? L’éternelle et triste histoire de l’arrachement des terres originelles vers des terres d’asservissement. Les textes proviennent de plusieurs sources, notamment d’auteurs de la diaspora « noire ».

Cette démarche, on le sait n’est pas des plus facile. Quid de la cohérence, de l’homogénéité du propos? Cet écueil est évité par la forme musicale et chantée retenue par le metteur en scène. C’était sans doute là que résidant la véritable difficulté : faire travailler ensemble, des musiciens, des chanteurs, des danseurs et des comédiens martiniquais. Aurélie, pardon, Orélie Dalmat remporte ce pari audacieux. La partition musicale est la grande réussite de cette soirée et l’ajustement des voix se fait sans trop de problèmes. Même Amel Aïdoudi, dont les qualités de chanteuse ne sont pas de celles qui sautent à l’oreille, se tire de cet exercice avec les honneurs.

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Delta Airlines : les vraies raisons de l’échec

— par Jean Crusol —
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C’est la faute à l’euro…

Delta Airlines va interrompre les dessertes qu’elle assurait, depuis décembre 2006, entre Atlanta et les Antilles Françaises. Selon les explications données par la Présidente de Comité Martiniquais du Tourisme et par le Vice Président du Conseil Régional, voici la raison : « quand nous avons commencé cette opération en décembre 2006, le taux de change entre le dollar Us et l’euro était très attractifs. Depuis, le dollar a beaucoup baissé. Nos tarifs hôteliers désormais trop élevés pour la clientèle américaine. Delta a donc décidé de partir. Ce n’est pas de notre faute, et nous n’y pouvons rien ». C’est la faute à l’euro! Un peu court comme explication…et bien loin de la vérité.

Voyons d’abord ce que vaut cette explication. En décembre 2006, un euro valait 1,321 dollars Us, en février 2008, il vaut 1,474 dollars Us. Cela signifie qu’une chambre à 200 euros la nuit qui valait 264,2 dollars en décembre 2006, vaut 294,8 dollars en 2008. Soit une différence de 30,6 dollars ou 11% d’augmentation 15 mois. Une telle différence pourrait avoir une influence si la clientèle touristique américaine attirée par notre destination était de bas de gamme.

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« La part de l’autre », de MarlèneParize

— Par Elodie Quidal, professeur de philosophie au lycée Frantz Fanon, Martinique.

Ce livre, où se mêlent histoire et mythologie, est écrit du coeur de notre présent – présent des Antilles, de la France, de ce monde ouvert à de multiples transversalités qui est le nôtre. Marlène Parize y défend une proposition radicale contre tous les nationalismes et communautarismes, contre tous les mépris de soi: il est temps, il est grand temps de reconnaître, au sein même de notre modernité, de notre république, de nos valeurs, la trace de ces « lieux creusets » où est née, et naît encore, l’énergie qui nous porte à présent.

Jean Bourgault, professeur de philosophie au lycée Jeanne d’Arc, Rouen.

Plus que des héritiers de l’esclavage et de la colonisation, les Antillais sont le réceptacle des cultures et des philosophies de tous les continents. Parce qu’ils ont connu toutes les douleurs, ils se doivent de porter l’humanité à un autre niveau de conscience : continuer à se chercher et à se trouver sur le mode de l’ouverture « en abandonnant nos croyances d’avant la veille » (F.

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Le festival de Jazz de Martinique 2008

— Par Roland Sabra —

Chyco Jéhelmann au piano -Photo Philippe Bourgade- Droits réservés-

Il y a treize ans que Chyco Jéhelmann ne s’était pas produit sur scène. C’est dire l’attente du public le 27 novembre 2008 dans la grande salle de l’Atrium à Fort-de-France ! Attente comblée. Le pianiste martiniquais, seul en scène, en s’installant dans la durée a su créer un climat d’échanges intimes avec le public fort nombreux ce soir là. Quelques phrases musicales, en vérité peu nombreuses, mais exprimées sur une large palette de tonalités, avec des découpes, des inflexions, des reprises, des inversions de schèmes musicaux, des réitérations voilées, qui s’articulent autour d’une thématique servant de fil conducteur, ont donné une cohérence au propos pianistique. Il y a quelque chose  qui inexorablement faisait penser aux Exercices de style façon Queneau. Chyco Jéhelmann, tour à tour mordant et caressant, enjôleur et distant, livre un corps à corps bienveillant avec son piano. La thématique est déclinée, par moment avec une dextérité, au sens fort du mot, et curieusement ce ne sont pas ces passages les plus applaudis. L’approbation du public se manifeste aux passages joués les plus fortement.

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Traite des blancs, traites des noirs, par Rosa Amelia Plumelle-Uribe,

 

l’Harmattan, octobre 2008, 230 p.

par Maria Poumier

Sur l’origine de l’humanité, faute de la moindre science, on ne doit s’appuyer que sur la phylogenèse de nos mythes fondateurs. Ainsi, au lieu d’en rester à l’histoire médusante de la pomme et du serpent, qui fait que l’on soupçonne Dieu de malveillance imméritée en nous interdisant les fruits de l’arbre de la science, on devrait plutôt écouter sa conscience, et reconnaître que c’est le crime de cannibalisme contre nos semblables qui nous rassemble tous dans l’humanité pécheresse et à juste titre chassée du paradis. Comme les rats, comme les cochons, mais de façon bien plus systématique qu’eux, ce qui nous a rendus plus forts que d’autres espèces animales c’est que nous ne reculons pas devant le crime contre nos frères, et que c’est même notre nourriture hallucinogène, notre drogue vitale.

Les préhistoriens africains vont plus loin dans le dévoilement de notre inconscient coupable : ils affirment que du tronc noir, dans les contrées paradisiaques où l’on peut vivre nu et se nourrir simplement des fruits qui pendent aux branches, se sont détachés de pauvres types, des erreurs de la nature, blanchâtres et mauvais, probablement le fruit de quelque péché de leurs parents.

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La Voyageuse : un magnifique hommage théâtral à Maryse Condé


Jean-Michel Martial

Ce voyage théâtral à travers les extraits de huit œuvres de Maryse Condé, narré par l’écrivaine « voyageuse » et guidé par la main du metteur en scène Jean-Michel Martial, a eu sa première au Ciné-théâtre Lamentin lors du Premier congrès international des écrivains de la Caraïbe en Guadeloupe. Cette traversée scénique des multiples personnages femmes venus de tous les lieux, toutes les classes sociales, toutes les origines culturelles voire de divers moments historiques, semblait symboliser le réseau de relations constitutif de la Caraïbe évoqué lors du colloque. Et surtout, cette pièce incarne le projet Théâtre Caraïbe – le Répertoire, une entreprise que Jean-Michel Martial et son équipe de spécialistes sont en train de réaliser, grâce à l’appui de la Région Guadeloupe. Disons-le en passant, cette vision d’un rassemblement des meilleurs écrits dramaturgiques sélectionnés de l’ensemble de la production théâtrale caribéenne (écrits qui seront analysés, mis en scène, traduits en français et publiés avec commentaires à l’appui), rentre tout à fait dans l’esprit des conclusions énoncées par les fondateurs de la nouvelle association des écrivains, mise en place pendant le congrès en Guadeloupe.

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« Un marmonneur providentiel? Je suis un Gueuleur » de Hervé Deluge

 — Par Roland Sabra —

On connait bien Hervé Deluge . Il a  travaillé ces derniers temps sous la direction de Lucette Salibur. Les résultats étaient inégaux, avec une question lancinante : qui du comédien ou du metteur en scène devait payer la facture? Le spectacle proposé les 20 et 21 novembre 2008 à l’Atrium donne une réponse en forme de pirouette. Hervé Deluge se met en scène lui-même. Avec un coup de main de Rudy Sylaire il est vrai. Le matériau central d »Un marmonneur providentiel » est tiré de « Cahier d’un retour au pays natal« , « Et les chiens se taisaient » et aussi d’autres textes césairiens. Hervé Deluge connait son Césaire. Une des qualités de ce travail, il en a plusieurs, est de mettre en évidence une force d’interprétation du verbe du poète qui le porte à une telle incandescence que la forme se consume ne laissant subsister que le trait acéré qu’elle enveloppait. Hervé Deluge  a fait une vraie lecture des textes de Césaire, en se les appropriant de façon charnelle, en leur faisant l’amour, et nous les restituant, transformés par la seule magie du dire, en une langue presque naturelle.

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Un marmonneur providentiel? Je suis un Gueuleur de Hervé Deluge

On connait bien Hervé Deluge . Il a  travaillé ces derniers temps sous la direction de Lucette Salibur. Les résultats étaient inégaux, avec une question lancinante : qui du comédien ou du metteur en scène devait payer la facture? Le spectacle proposé les 20 et 21 novembre 2008 à l’Atrium donne une réponse en forme de pirouette. Hervé Deluge se met en scène lui-même. Avec un coup de main de Rudy Sylaire il est vrai. Le matériau central d »Un marmonneur providentiel » est tiré de « Cahier d’un retour au pays natal », « Et les chiens se taisaient » et aussi d’autres textes césairiens. Hervé Deluge connait son Césaire. Une des qualités de ce travail, il en a plusieurs, est de mettre en évidence une force d’interprétation du verbe du poète qui le porte à une telle incandescence que la forme se consume ne laissant subsister que le trait acéré qu’elle enveloppait. Hervé Deluge  a fait une vraie lecture des textes de Césaire, en se les appropriant de façon charnelle, en leur faisant l’amour, et nous les restituant, transformés par la seule magie du dire, en une langue presque naturelle.

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Widad Amra à la Bibliothèque Schoelcher : la poétesse assassinée

 

— par Selim Lander —

Ma voix ténue de femme

en oriflamme

tremble de si peu de lumière.


Widad Amra est professeur de lettres au couvent de Cluny. Elle y préside aux destinées des classes à option théâtre dont on a pu admirer quelques remarquables productions lors des dernières rencontres académiques, au mois de juin dernier. Elle est aussi poète et présentait son dernier opus, Salam Shalom (L’Harmattan, 2008) à la Bibliothèque Schoelcher, le vendredi 14 novembre 2008. Alors que tant de poètes ne parviennent pas à communiquer oralement leurs œuvres, Widad Amra sait dire la poésie comme une comédienne confirmée, ce qui ne l’a pas empêché de donner de son texte une lecture pleine d’émotion et de sincérité.

Elle pratique une poésie sans contrainte de mètre ou de rime, une absence de règle qui se révèle trop souvent pleine de risque, comme le démontent tant de textes contemporains qui n’ont d’autre mérite que la bonne volonté (ou la naïveté) de leurs auteurs. Ce n’est nullement le cas ici, même si l’on doit admettre avec humilité que la poésie contemporaine présente tout autant de risque pour le critique que pour l’auteur.

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« Salam Shalom » de Widad Amra

— Par Pierre Pinalie—

 Salam Shalom de Widad AMRA

Il s’agit d’une belle poésie qui s’étire et se chante comme une cantate longue et fine, une expression émise par une femme apparaissant en tant que symbole ethnique, linguistique et géographique. Sous sa plume, on se sent quelque peu au centre du monde, comme si la terre avait un axe autour duquel nous tournons tous, et le désir de l’auteur s’envole vers un espoir de paix. La série de jugements politiquement exprimés révèle une atmosphère difficile où le fanatisme crée des horreurs à l’image des doigts d’un artiste chilien coupés par l’abominable dictateur d’un pays où la liberté fut muselée pendant longtemps.

 

Il y a dans le titre un très émouvant bilinguisme fondamental dans lequel deux langues, deux sociétés, deux philosophies expriment la paix entre les humains. Il y a là, donc, la plus profonde prière pour l’amour des uns pour les autres sur une planète où, malheureusement, l’attentat et la haine se répètent dans la quotidienneté. Widad, l’auteur, est le fruit d’un métissage réalisé sur une île où flotte, chez certains incurables malades, un racisme aussi condamnable que celui que pratiquaient les esclavagistes d’hier.

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« Salam Shalom » de Widad Amra

—de Roland Sabra —

Salam Shalom ( Arshav)

Un livre de Widad AMRA

Arshav voilà le mot que l’on a envie d’ajouter au beau titre que nous offre Widad Amra. Shalom Arshav, la Paix Maintenant, est en effet un mouvement extra-parlementaire fondé en 1978 par 348 officiers de réserve et soldats de Tsahal qui, inquiets de l’évolution politique, déclaraient : «  nous aurions du mal à accepter un gouvernement qui préférerait exister dans les frontières du « Grand Israël » plutôt qu’exister en paix avec ses voisins. Un gouvernement qui préférerait les colonies au-delà de la ligne Verte au règlement de ce conflit historique par la normalisation des relations dans notre région nous poserait un problème quant à l’attitude que nous devrons avoir. Une politique qui provoquerait la perpétuation de la domination d’un million d’Arabes porterait atteinte au caractère juif et démocratique de l’Etat, et nous aurions du mal à nous identifier avec la voie choisie par l’Etat d’Israël. »

L’opuscule que nous livre Widad Amra est singulier. D’abord parce qu’il s’agit d’un texte personnel, tout à fait particulier, écrit à la première personne, ensuite parce qu’il sort totalement de l’ordinaire et qu’il mérite d’être remarqué par ses traits peu communs, et enfin parce qu’il recèle une densité, une épaisseur assez rare.

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« Marie Stuart »

 –Par Roland Sabra —

 

Assis en fond de scène du début à la fin du spectacle, ils attendent leur tour pour venir dans la lumière sur le devant du plateau. Peut-être figurent ils aussi, par leur présence immobile le rôle des conseillers de l’ombre? Avant de prendre la parole le plus souvent ils contournent le cercle de feu dessiné sur le sable de la scène, se tenant à la lisière du jour et de la nuit. Seules les deux reines occupent plus systématiquement le centre de l’espace. Les comédiens se font souvent récitants comme pour mieux s’effacer derrière le texte. Il s’agit là d’un théâtre minimaliste dans sa figuration et d’une exigence affirmée dans sa conception, d’une grande épure qui use de sobriété pour faire valoir un texte dont la traduction retenue est la plus classique. L’atemporalité de la thématique abordée dans la pièce relève d’un affrontement éternel, celui qui oppose principe de plaisir et principe de réalité. La mise en scène valorise la soumission douloureuse de Elisabeth 1ère aux impératifs qui sont ceux de sa charge. Elle  sacrifie sa vie de femme, demeurant une reine vierge en n’acceptant dans son lit que la raison d’Etat.

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« L’invention de la culture hétérosexuelle » par Louis-Georges Tin

(Ed. Autrement) 

Introduction

Pour éclaircir le propos, on pourrait établir une comparaison avec la nourriture. Dans toutes les sociétés humaines, il y a bien sûr des pratiques alimentaires, et elles sont indispensables à la survie des individus. Pour autant, toutes les sociétés ne construisent pas nécessairement une culture gastronomique, comme c’est le cas en France. L’art de la table, du vin et des fromages, les rituels, le service, la convivialité, les livres de recettes, les guides, les classements et les étoiles pour les bons restaurants, les émissions culinaires à la télé, sont autant d’éléments qui définissent la gastronomie à la française. D’autres sociétés développent des pratiques alimentaires moins diverses et moins ritualisées, elles se fondent sur les ressources matérielles nécessaires pour vivre. Certes, ces pratiques s’organisent selon des principes et des codes, et  elles s’inscrivent parfois dans des célébrations où l’alimentation occupe une place particulière. Pour autant, elles ne produisent pas ce que l’on pourrait appeler véritablement une culture de la gastronomie. Dans ces contextes nombreux, et pas seulement dans les sociétés anciennes ou éloignées, en Amazonie ou en Nouvelle Guinée, l’alimentation est à la fois nécessaire et secondaire, et on ne se croit pas obligé d’en faire un objet d’euphorie, un rite permanent, une exaltation collective.

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Entre cynisme et arrogance

Poster-Tabou

Par Roland Sabra

Edito du 13/10/2008

La crise financière des pays riches a éclipsé la crise alimentaire qui frappe les pays pauvres de puis 2007. Les deux sont pourtant liées, ne serait-ce que par les spéculations du monde de la finance sur les matières agricoles, comme par exemple le stockage de denrées alimentaires pour alimenter la pénurie et faire monter les prix, comme par exemple le développement des bioénergies autrement juteuses en termes de profits que la production  de denrées alimentaires. Chaque année 100  millions de tonnes  de ces denrées sont consacrées à faire le plein des réservoirs automobiles et sont donc retirées du marché alimentaire. « Tu peux crever de faim mais ne touche pas à ma bagnole » tel semble être le mot d’ordre des populations des pays riches…

L’indice FAO des prix alimentaires montre une hausse de 12% en 2006 par rapport à l’année précédente, de 24% en 2007 pour exploser à 50% au cours des sept premiers mois de l’année 2008. Dans le même temps les subventions agricoles octroyées aux agriculteurs des pays riches desservent les agriculteurs des pays pauvres, les produits subventionnés des pays riches étant inaccessibles et insurmontables pour les pays en voie de développement.

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« Houellebecq au laser » de Bruno Viard

Compte-rendu de Michel Herland.

Bruno Viard : Houellebecq au laser – La faute à mai 68, Nice : Éditions Ovadia, 2008, 125 p.

 

 

  moraliste malgré lui :

« La pratique du bien est une liaison, la pratique du mal une déliaison »,

M. Houellebecq, Les Particules élémentaires, p. 377.



 

La publication récente des mémoires de la mère de Michel Houellebecq (MH) a permis de mesurer combien l’œuvre de MH était marquée par l’expérience personnelle de l’auteur. Dans un petit livre que l’on ne saurait trop recommander à tous les admirateurs de MH, Bruno Viard (BV), professeur de littérature française à l’Université de Provence, spécialiste des dix-neuvième et vingtième siècles, rapproche la souffrance filiale de MH de celle d’un Balzac : « Si vous saviez ce qu’est ma mère, écrivait ce dernier à madame d’Abrantès, c’est à la fois un monstre et une monstruosité » (BV p. 96). Les Particules élémentaires, le roman sans doute le plus abouti de MH, peut être lu ainsi comme le cri d’un fils abandonné qui n’en peut plus de cracher sa haine à la face de celle qui lui a refusé l’amour que pourtant elle lui devait, et qui, par extension, s’en prend à l’humanité tout entière dont il noircit à plaisir le tableau.

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Obama et la possibilité d’une sortie de la crise financière

par Roland Sabra

Ce n’est qu’un début… Pourquoi les bourses plongent-elles? On connait l’origine de la crise actuelle : la déréglementation et/ou le détournement des règles des activités de crédits dans le monde de la finance. Les banques pour échapper à ce qui restait de réglementation en ce qui concerne l’octroi de crédits, notamment dans l’immobilier, ont créé des succursales, des sociétés annexes, qui démarchaient les plus pauvres et leur refourguaient des crédits, en dehors de tout contrôle, dont elles savaient qu’ils étaient irrécouvrables. Ce qui à leurs yeux n’étaient pas bien grave puisqu’elles avaient la claire intention de s’en débarrasser au plus tôt. Elles les ont donc soit dissimulé hors bilan, soit  revendus, cachés dans des paquets beaucoup plus présentables, à d’autres banques ou des compagnies d’assurances. Elles se sont donc arnaquées entre elles. Dès lors comment faire confiance à une consœur qui se fait si facilement rouler tout en roulant les autres? Le marché interbancaire, marché sur lequel les banques se refinancent mutuellement à court terme se tarit. Aucune ne veut prêter à une voisine dont on risque d’apprendre dans les heures qui suivent la faillite et donc l’impossibilité de recouvrer la créance.

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TEXACO , les 26 et 27 septembre 2008 à l’Atrium

 

— Par Laurence Aurry —

Certes, quand on lit Texaco, le roman de Patrick Chamoiseau, récompensé du Prix Goncourt en 1992, et qu’on imagine une adaptation théâtrale de cette œuvre, on pense spontanément, pour représenter les personnages haut en couleur de la vieille câpresse, Marie-Sophie Laborieux ou de son père, le « nègre-chien » affranchi, Esternome, à des acteurs antillais talentueux comme Aurélie Dalmat ou Jacques Martial, par exemple. Et lorsqu’on découvre la scène avec ce jeune comédien fluet, Jean-Stéphane Souchaud, plus blanc qu’un mabouya, on reste circonspect. Il semblait si logique et naturel de la voir jouer par des acteurs qui portent encore en eux l’empreinte indélibile du lourd passé de l’esclavage.

Il soufflait donc, vendredi 26 septembre, dans la salle Frantz Fanon, un vent de scepticisme assez perceptible que l’accent plat de Jean-Stéphane Souchaud attisait.

Cependant, si l’on dépasse nos attentes, nos a priori, nous devons reconnaître que ce jeune acteur est bien méritant d’avoir eu l’audace le premier, avec Gilles Lefeuvre, le metteur en scène ainsi que toute l’équipe de la compagnie de La Nuit Venue, de s’attaquer à cette œuvre magistrale de la littérature antillaise.

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