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L’avenir du théâtre antillais sera carnavalesque ou ne sera pas

— Par Roland Sabra —

 

Stéphanie Bérard est « Assistant Professor de littérature française et francophone » à l’Université de Virginie aux Etats-unis. Elle publie un essai  » Théâtre des Antilles, traditions et scènes contemporaines. » chez l’Harmattan dans la collections « Images plurielles ». Il faut d’abord saluer le style de l’essai qui use d’une langue claire, compréhensible par tous, sans pour autant affadir le propos ce qui n’est pas si fréquent. On pourra regretter que l’éditeur, (par souci d’économie? ait choisi une taille de police un peu petite, ce qui ne facilite pas la lecture et que la relecture du tapuscrit  n’ait pas fait l’objet d’un peu plus d’attention pour les coquilles inévitables mais aussi pour corriger quelques confusions conceptuelles par exemple entre « hypotexte » et « hypertexte » ( p.47), outils que l’auteure emprunte au linguiste Gérard Genette.

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« Avec Franz Fanon : percevoir, écouter, écrire, dire l’humain. »

  — Par Nabile Farès,  psychanalyste, Paris —

 

 

 

 

 

 

  1. Histoires, guerres et transmissions : violences, dégâts, détresses et traumatismes.

 

 

 

 

 

De nombreux mots pour dire que les textes de Franz Fanon, ceux que chaque lectrice, lecteur, rencontre en librairie, en bibliothèque, en discussion, témoignent d’une vive perception, écoute, écriture, et diction des violences et silences, impunités, qui, à travers les séparations, apartheids, mises à l’écart, viols, forclusions, destitutions structurales et singulières des civilités, ont marqué l’histoire, les sociétés, les individus d’aujourd’hui,  ne laissant nulle personne contemporaine, enfants, nouveaux-nés, femmes, hommes, personnes agées, nulle formation politique, dictature, tyrannie, démocratie, république, à l’abri des conséquences et reconstructions mémorielles et historiques qu’exigent de telles destructions et exclusions  historico- psychiques. Individus et sociétés sont marquées à la surface d’eux-mêmes, d’elles-mêmes et dans les profondeurs, strates, couches, de cette réalité historique et psychique liée : celle-ci étant plurielle, multiple, de surface lisible ou dite, par exemple, par la mise en ghettos, les différences territoriales de logements, de salubrité, les stigmatisations langagières et coutumières, les différences affirmées par la richesse et la pauvreté, les accès ou non aux soins, à la culture, auc cultures, les mises en retard, en question, refus, des langues, leurs acquisitions bénéfiques et différenciées, les ostracismes et anathèmes raciaux sous des légitimations religieuses porteuses de pensées, idéologies faillibles, les mises à mort et enfermements dits exemplaires, les destitutions et inégalités des représentations et histoires, les perturbations et aliénations de soi par des représentations et affirmations, dominations issues de l’Autre par introjection et précipitation du bourreau, du justicier, du vengeur héroïque, d’un maitre, essentiellement dominateur et cruel,  entrainant abandon et chute, détresse de ce que serait une prise en compte affirmation et protection de l’humain.

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Lycée Schœlcher : quels sont les enjeux ?

— Par Serge Letchimy —

Publié le 14/06/2009

Le Député-Maire de Fort-de-France, Serge Letchimy, a publié le 14 juin 2009 le texte qui suit, dans lequel il rappelle ce qui constitue pour lui les enjeux liés à ce dossier de la « démolition-reconstruction » du Lycée Schoelcher en Martinique.

« Inauguré en 1937 l’actuel Lycée Schœlcher est une composante fondamentale du patrimoine de la Martinique. Chef-d’œuvre architectural qui dépasse la Martinique, lieu de la formation de la conscience Martiniquaise où nos « Maitres » nous ont enseigné les multiples possibles de l’Homme pour construire un projet de société au fondement de l’instruction et sortir plus fort de la longue nuit de l’esclavage.

L’école publique devient ainsi le lieu fondateur et la matrice de cette renaissance qui recueillait l’assentiment de la population et le consensus des politiques progressistes.

A la Martinique le Lycée Schœlcher renferme toutes ces valeurs symboliques de l’école publique et démocratique.

Ce grand ensemble architectural moderniste Martiniquais, (1937), qui porte le nom d’un des plus illustres abolitionnistes Français Victor Schœlcher à la demande expresse des républicains radicaux Martiniquais, où a enseigné Aimé Césaire, et réalisé par des entreprises Martiniquaises a acquis une valeur symbolique forte.

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Naissance de notre Art Comtemporain

 —  par Patrick Singaïny —

 

A propos de l’exposition « Mes Martiniques »

 

de Hervé Beuze (juin 2009)

 

 


 

 par Patrick Singaïny.

 


 

Que l’on ne vienne pas me dire que ce qui va suivre a déjà été

 

dit en d’autres temps ou en d’autres lieux.

 

Je me fous de ces époques et de ces lieux.

 

Ce qui compte est que ce qui est exprimé ici et maintenant

 

ne vaut que pour notre ici et notre maintenant.

 

Leitmotiv personnel.

 


 

Le verbe du démiurge Césaire transmute notre paysage mental post-esclavage, broyé par l’assimilation. Il fait de nous des êtres en combat pour le gain d’une humanité en partage contre la fatalité d’être prisonnier du travestissement de la liberté, de l’amour, de l’amitié, de l’entraide, et de la négation de l’Autre.

 

Si j’osais, j’affirmerais sans ambages que, tout génie qu’il était, la tâche de Césaire ne tenait pas de l’impossible. Car il possédait fermement cette « arme miraculeuse » –la Poésie-action- dans un pays où le verbe possède de précieuses vertus rédemptrices et peut se révéler vecteur d’actions transformatrices.

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A propos de la violence dans les collèges.

 

— Par George HUYGHUES DES ETAGES, psychologue, auteure d’ouvrages éducatifs –

Incivilités, ports d’armes, rackets, agressions diverses à l’encontre de professeurs comme d’élèves : voici le lot quotidien de beaucoup de collèges. L’inquiétude des enseignants, des parents et des élèves eux-mêmes va croissant à tel point que certains enfants craignant le passage en 6ème avouent préférer redoubler leur CM2 et que d’autres (des filles en particulier) « prennent leurs précautions » en “s’armant” pour parer à toute éventualité.

Il faut dire que la violence, qui est l’expression de l’agressivité que nous portons tous naturellement en nous, commence très tôt, dès la conception pourrait-on dire. C’est cette force qui nous pousse à agir pour obtenir la satisfaction de nos besoins vitaux, ce dynamisme qui nous permet de lutter, de nous affirmer, de survivre et que nous retrouvons positivement dans la compétition, l’émulation. Mais, si elle n’est pas circonscrite, canalisée, sublimée, dérivée vers des objets et des buts louables, elle devient excessive et – sous l’influence de la frustration, de l’insatisfaction excessive – se transforme en agressivité négative et inadaptée.

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4:48 Psychose de Sarah Kane, une mise en scène de Jandira Bauer à Foyal

—par Roland Sabra —

L’art de l’entre-deux

 

A l’ouverture de la salle, Jeanne Baudry est déjà sur la scène qu’elle arpente de long en large en fond de plateau, irrémédiablement perdue en elle-même.  Sur la partie gauche du tableau  le gril laisse pendre deux immenses lacets noirs, en rappel à ceux qu’utilisa Sarah Kane pour mettre fin à ses jours, sur la droite deux paires de chaussures abandonnées complètent le décor. Et ça commence! C’est une voix de l’intérieur, une voix des cavernes, une voix des profondeurs, une voix qui la parle plus qu »elle ne parle et qui se fait entendre ou plutôt qui nous fait entendre ce que nous voulons bien entendre de notre propre rapport à la déraison. Tout le texte de Sarah Kane est tentative de découvrir ce que la forme poétique  peut contenir de théâtrale. La structure du texte est apparemment brisée, désarticulée, afin de livrer un matériau brut, le plus polysémique possible. Un pur travail sur la langue. C’était l’obsession de l’auteure que de pouvoir unifier la forme et le fond. Sarah Kane :  » La forme et le contenu tentent d’être une seule et même chose – la forme est le sens ». 

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Jandira Bauer à propos de 4.48 Psychose de Sarah Kane

« Il est question dans ce texte de théâtralité explosive,  de lyrisme,  de puissance de l’émotion et d’humour glacé »

Pourquoi cette pièce ici et maintenant ?

Pourquoi pas ? J’ai souvent entendu dire que chaque public « a droit » au théâtre qui lui correspond. Je me suis toujours élevée contre ce cloisonnement inepte .

En tant que metteur en scène, je ressens le besoin de la mise en abîme, de l’audace qu’impose le théâtre contemporain.

Comment éviter une lecture biographique de la pièce?

Dans son compte rendu de 4h48 Psychose, Michael Billington a mentionné un précédent: une des dernières œuvres de la poètesse américaine Sylvia Plat commence par ces vers:

Cette femme se voit parachevée.

Son corps mort revêt le sourire de l’accomplissement.

Cela était à certains égards, la démarche critique la plus évidente face à la tache difficile de devoir rendre compte de cette pièce: Un billet annonçant un suicide.

Dans 4:48 Sarah Kane a pénétré plus profondément dans son propre psychisme et je crois qu’elle savait qu’elle creusait là profondément, non pas de difficultés avec cette pièce, mais une réaction affective très forte envers elle.

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Un pamphlet : Bloody Niggers

 — par Selim Lander, le 15/05/09 —

Frantz-Fanon aurait-il apprécié le spectacle qui vient d’être présenté dans la salle de l’Atrium qui porte son nom ? Les 14 et 15 mai, le trio Groupov (Dorcy Rugamba, auteur et comédien, à droite sur la photo, accompagné par Younouss Diallo et Pierre Etienne) y a proposé son spectacle Bloody Niggers. L’argument est simple : trois hommes, deux noirs et un blanc, en costume-cravate, chacun devant son micro, énumèrent les violences dont s’est rendu coupable l’homme blanc depuis les croisades. Le sujet est éminemment grave et sérieux mais néanmoins susceptible de devenir fastidieux. On est bien dans le registre du pamphlet tant sur le fond (le procès unilatéral d’une race qui se croit à tort meilleure que les autres) que sur la forme (un acte d’accusation récité sans autre mise en scène que l’alternance des voix qui se partagent le texte).

 Celui qui, lassé après plus d’une heure de ce procès sans défenseur, refuserait d’en entendre davantage, pourrait rendre compte du spectacle comme nous venons de le faire, sans presque trahir la réalité. Car il est vrai que les projections et la musique qui entrecoupent ou complètent le discours ne suffisent pas pour nous convaincre que nous sommes au théâtre et non dans un meeting quelconque consacré au ressassement du passé par les héritiers des victimes (non-européennes) de l’histoire.

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Guyane: les ravages de l’orpaillage


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 L’eau du fleuve qui passe devant notre village est sale. Sale et blanchâtre depuis plusieurs mois. Il devient gênant de laver son linge, de se laver, de laver son enfant qui va boire cette eau en se baignant. C’est à cause d’un nouveau chantier d’orpaillage, très grand, sur la crique Lipolipo

«La terre de Guyane ne sera plus violée impunément», promettait Nicolas Sarkozy, il y a un an, à Camopi, un village amérindien de ce département d’outre-mer, en annonçant un plan de renforcement de la lutte contre l’orpaillage clandestin. Mais pour les villages établis sur le fleuve Maroni, près de la frontière du Surinam, la situation n’a fait que s’aggraver et ils dépérissent, victimes de la pollution et de la violence provoquées par les garimpeiros, les chercheurs d’or clandestins. L’ONG Survival (www.su

Réalisé par É.Pa Kindy Opoya.

«Je suis née en 1986 à Talhuen, un village à environ deux heures de pirogue en amont de Maripasoula. Je suis assistante de vie scolaire. Aujourd’hui, le quotidien dans nos villages, c’est la peur des garimpeiros. La peur, jour et nuit. Ils ont envahi notre vie.

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« Bloody Niggers » « Le théâtre : un lieu où l’on est l’autre »

— Par Roland Sabra, le 05 mai 2009 —

Le mot est de Ariane Mnouchkine dans un texte aujourd’hui célèbre et  intitulé  » Tout théâtre est politique ». Manuel Césaire nous en offre une illustration avec la programmation de « Bloody Niggers » ( cf la critique ci-après de Selim Lander).  Le metteur en scène Jacques Delcuvellerie, est un français installé en Belgique, professeur au Conservatoire Royal de Liège, qui a fondé en 1980 Goupov, un collectif d’artistes pluridisciplinaires ayant vocation à créer un espace d’expérimentation théâtrales. Les années 90 seront consacrées au Projet Vérité qui pointera du doigt les croyances capables de mobiliser un être jusqu’à la mort. C’est dans la suite logique de ce travail qu’il propose en 1999, « Rwanda 1994 » une pièce fleuve de six heures qui remontait aux causes du génocide rwandais.

Younnouss Diallo qui jouait dans Rwanda 1994 participe cette fois non seulement comme comédien mais aussi comme adaptateur et concepteur à « Bloody Niggers » la dernière production de Groupov. Le texte de Dorcy Rugamba, rescapé du génocide rwandais est un long cri de révolte, de dénonciations et de douleurs ensanglantées contre les massacres, les boucheries, les exterminations, commises au nom des Dieux de la Bible, de la Bourse et de Wall Street.

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« Trames » de Gerty Dambury

 — Par Selim Lander —

 Gerty Dambury, d’origine guadeloupéenne et auteure de théâtre déjà confirmée a mis en scène sa dernière pièce, Trames, présentée ces jours-ci au théâtre Aimé Césaire à Fort-de-France.

 

 

 Dans un décor réduit à peu de choses mais qui colle bien avec l’esprit de la pièce, Firmine Richard, la mère, reçoit de temps en temps la visite de Jalil Leclaire, son fils, tandis que Martine Maximin endosse tour à tour plusieurs « petits » rôles : servante de scène, archétype de la femme antillaise, fille perdue au grand cœur. La progression dramatique est plutôt bien menée, nous comprenons peu à peu quelles raisons ont pu conduire le fils vers sa déchéance présente. Bien qu’astucieux et beau parleur, ayant même poursuivi des études d’économie à l’université, il n’arrive pas à sortir du cercle vicieux de la drogue, de la misère et de l’oisiveté. Les rapports entre les deux personnages principaux sont bien décrits dans toute leur ambiguïté. Tous les deux ont bien du mal à faire vivre l’amour qui est pourtant censé exister d’une manière toute naturelle entre une mère et son fils.

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«Le Grand Camouflage», de Suzanne Césaire

Suzanne l’aimée de Césaire

 Dissidence. «Le Grand Camouflage», recueil d’essais poético-politiques de la femme de l’écrivain martiniquais.

 

 

NATALIE LEVISALLES

 

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Suzanne CésaireLe Grand Camouflage. Ecrits de dissidence(1941/1945)Seuil, 130 pp., 14 euros, à paraître le 7 mai.

 

Tout commence quand un bateau faisant route pour New York et transportant des dizaines d’exilés (dont Claude Lévi-Strauss, Anna Seghers, Wifredo Lam, André Breton…) fait escale en Martinique. Breton, qui cherche un ruban pour la petite Aube, entre dans une mercerie de Fort-de-France, il tombe sur la revue et y lit des poèmes qui le bouleversent. Il demande à rencontrer son auteur, Aimé Césaire. La mercière, qui se trouve être la sœur du philosophe René Ménil, un des cofondateurs de la revue avec Aimé Césaire et sa femme Suzanne, met tout le monde en contact. C’est le début d’un réseau d’amitiés croisées et d’influences artistiques étonnamment fécondes.
«Le grand camouflage», l’essai qui donne son nom au livre rassemblé par l’écrivain Daniel Maximin, a été écrit par Suzanne Césaire en 1945, c’est un écho de cette journée, un texte poético-politique d’une grande énergie, à la fois lyrique et ancré dans la géographie et l’anthropologie de la Martinique.

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Daniely Francisque met en scène Nèg Pa Ka Mo

— Par Roland Sabra —

Un talent prometteur

Daniely Francisque présentait à l’occasion du 160ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage une nouvelle version de Nèg Pa Ka Mo, pièce dont elle est l’auteure et qu’elle a créée en 1995 en région parisienne. On peut résumer le propos comme étant : de la capture en Afrique à la mise à mort, sous le fouet, d’un nègre insoumis, figure identificatoire proposée comme miroir valorisant dans l’espace de l’habitation où l’honneur, le respect, la dignité n’avaient droit de citer que pour la caste esclavagiste. Une mamie raconte à sa petite fille ce que ça a été et son récit est entrecoupé de représentations du dire. Disons le tout de suite, il s’agit d’un théâtre porteur d’une parole, d’une affirmation, d’une volonté d’exister, d’un désir de vivre debout tout à fait honorable. Et ce d’autant plus qu’il évite de tomber, de verser dans le théâtre militant réducteur. Si quelques passages pourraient être affinés, les enjeux politiques sous-jacents, les problématiques historiques sont assez bien restituées pour nous inviter à une véritable réflexion. On sort du spectacle non seulement envahi par l’émotion mais aussi habité par des questionnements qui travaillent encore le spectateur longtemps après.

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« Monsieur de Pourceaugnac » de Molière

— Par Laurence Aurry —

 

Par la Compagnie STAR THEATRE

de_pourceaugnacThéâtre Aimé Césaire, les 15,16, 17 et 18 avril 2009
Monsieur de Pourceaugnac fait partie des comédies grinçantes de Molière que l’on classe communément parmi les farces. Moins connue que ses autres comédies ballets, L’Amour médecin, Le bourgeois gentilhomme ou l’incontournable Malade imaginaire, elle est aussi souvent moins appréciée. Les personnages n’ont pas de profondeur humaine, tout préoccupés qu’ils sont à jouer des mauvais tours à Mr de Pourceaugnac ; ils rivalisent seulement d’imagination et de perfidie. Même le couple de jeunes amoureux, par sa férocité et son acharnement n’arrive pas à attirer notre sympathie. Quant à Mr de Pourceaugnac, doit-on le considérer comme une victime ou comme le parfait ridicule justement puni de sa prétention et de sa bêtise ? Molière se garde bien de nous répondre. C’est au metteur en scène de faire des choix, de trouver la tonalité propre à donner sens à cette pièce assez déconcertante. La Compagnie STAR THEATRE a su habilement relever ce défi sans tomber dans le convenu et sans perdre non plus la dimension comique de la pièce.

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Nèg pa ka mô : par Daniély Francisque, interprétée par la troupe Mawon

— Par Selim Lander —

Théâtre populaire à l’Atrium

Une pièce écrite et mise en scène par Daniély Francisque, interprétée par la troupe Mawon

Voir la grande salle de l’Atrium complètement remplie pour une pièce de théâtre ! Qui voudrait bouder son plaisir. Sans doute le fait que ce spectacle ait été offert gratuitement a-t-il contribué à son succès, mais si c’est là la condition pour amener au théâtre de nouveaux spectateurs, on ne le regrettera pas. Cela étant, les spectateurs étaient-ils vraiment nouveaux ? Il est difficile de l’affirmer car la pièce a pu attirer les habitués des comédies créoles, Bankoulélé ou autres.

Nèg pa ka mô mêle en effet assez agréablement des genres différents. Des scènes de comédie pure, en créole, à des scènes plus dramatiques souvent en français, des évocations de la vie des noirs au temps de l’esclavage – déportation, travaux des champs, etc. – sous forme de tableaux chorégraphiés, enfin des scènes plus proches de notre présent, comme celle de la veillée qui suit l’exécution du nèg marron. Le tout relié par le récit du temps d’antan qu’une grand-mère adresse à sa petite fille.

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« Le Prophète » de Khalil Gibran par la Compagnie Airac

— Par Laurence Aurry —

les 22è Rencontres théâtrales (les 8 et 9 avril 2009, salle Frantz Fanon, ATRIUM)

le_propheteA la question, « qu’est-ce que le théâtre ? », on peut répondre en s’aidant de l’étymologie. En grec « drama » signifie action. Le théâtre est un genre hybride qui donne aussi bien à entendre, à voir ou à ressentir ce que suggèrent les acteurs par leur voix, leur corps, la scénographie par le décor, l’éclairage et la musique, et la mise en scène, par les choix personnels du metteur en scène. Le théâtre est un art vivant qui fait appel à tous les sens du spectateur. C’est pourquoi la représentation est une véritable épreuve pour les acteurs qui sentent dès le lever du rideau la réceptivité de la salle, son frémissement ou son apathie. Le théâtre ne pardonne pas ! Quoi de plus décevant que d’entendre des spectateurs s’assoupir ou bien de voir la salle se vider après quelques timides applaudissements ? Comment éviter cela ? Molière pourrait répondre : « la grande règle est de plaire ». Pour y arriver, il ne s’agit pas seulement de satisfaire aux attentes du spectateur, mais plutôt de le bousculer, de le surprendre et surtout de susciter son attention.

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L’ici et l’ailleurs de l’Atrium

 — Par Roland Sabra —

 

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 Guillaume Gallienne :  » Un acteur qui sent le public est comme un violoniste qui ne regarde plus ses mains ni son archet. Il entend les notes qu’il fait et écoute la résonance. »

Les 22 èmes Rencontres théâtrales de Fort-de-France battent son plein. Commencées au lendemain de la reprise générale du travail dans l’ile elles ont atteint aujourd’hui leur rythme de croisière : une quinzaine de manifestations en quatre semaines, du 26 mars au 23 avril 2009. Le programme est un mélange de théâtre amateur, innovation de cette année, avec du théâtre professionnel, de théâtre d’outre-Atlantique avec des productions locales. Toujours ce même souci de métissage, d’allées et venues entre un ici et un ailleurs, qui est semble-t-il la ligne directrice de Manuel Césaire , qu’il s’agisse de théâtre, de musiques ou de tout autre art de la scène. On ne peut que saluer ce souci d’ouverture au monde. Reste bien sûr la question du contenu. Sage comme toujours, trop sage diront certains, mais tous se retrouveront sur la qualité. L’ouverture s’est faite avec l’excellent travail de Claude Mathieu qui mettait en scène Guillaume Gallienne sur un texte de Dario Fo, Prix Nobel de littérature 1997, et qui s’intitule « Saint-François, le divin jongleur ». 

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Culture et Politique culturelle : quoi de neuf ?

 par José Alpha

Pourquoi n’existe-t-il pas une entreprise des métiers de la scène et du spectacle vivant en Martinique ? Une des nombreuses interrogations posées par de nombreux Martiniquais qui ont l’audace d’imaginer la production culturelle et artistique comme source de revenus et de développement pour la Martinique mais aussi comme vecteur dans le monde d’une culture insulaire caribéenne issue de notre métissage.

Cette question pose l’évident problème de la gestion des potentiels humains et culturels martiniquais quand on mesure les efforts consentis depuis plusieurs années par les collectivités aux nombreuses aides aux projets d’actions et d’exploitations culturelles et touristiques, à la formation des hommes et à la validation des acquis, dont les objectifs sont bien de favoriser l’économie culturelle et d’élever l’esprit critique populaire à la compréhension de ses origines et de ses potentiels existentiels.

Qu’a-t-on fait de nos expériences humaines et structurelles ?

Que deviennent les musiciens, les comédiens, les acteurs, les éclairagistes, les maquilleurs, les accessoiristes, les régisseurs de plateau, les costumiers, les dramaturges, les scénaristes, les auteurs, les administrateurs, les décorateurs, le public, qui ont été formés lors des nombreuses formations et stages dispensés à grands frais par les institutions associatives et les organismes de formation largement soutenus financièrement par les collectivités territoriales avec en arrière plan le ministère de la culture et de la communication ?

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A bas le développement durable ! Vive la décroissance conviviale !

 

— Par Serge Latouche —

 

 

 

«Il n’y a pas le moindre doute que le développement durable est l’un des concepts les plus nuisibles». Nicholas Georgescu-Roegen, (correspondance avec J. Berry, 1991) (1).

 

On appelle oxymore (ou antinomie) une figure de rhétorique consistant à juxtaposer deux mots contradictoires, comme «l’obscure clarté», chère à Victor Hugo, «qui tombe des étoiles…». Ce procédé inventé par les poètes pour exprimer l’inexprimable est de plus en plus utilisé par les technocrates pour faire croire à l’impossible. Ainsi, une guerre propre, une mondialisation à visage humain, une économie solidaire ou saine, etc. Le développement durable est une telle antinomie.

 

En 1989, déjà, John Pessey de la Banque mondiale recensait 37 acceptions différentes du concept de «sustainable development» (2). Le seul Rapport Bruntland (World commission 1987) en contiendrait six différentes. François Hatem, qui à la même époque en répertoriait 60, propose de classer les théories principales actuellement disponibles sur le développement durable en deux catégories, «écocentrées» et «anthropocentrées», suivant qu’elles se donnent pour objectif essentiel la protection de la vie en général (et donc de tous les êtres vivants, tout au moins de ceux qui ne sont pas encore condamnés) ou le bien-être de l’homme (3).

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« Ainsi parla l’Oncle » suivi de « Revisiter l’Oncle » de Jean Price-Mars

 ISBN : 978-2-923713-03-8

520 pages

PRIX : 39.50$

En librairie dès le 24 février 2009

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Vient de paraître aux éditions Mémoire d’encrier

Ainsi parla l’Oncle, paru pour la première fois en 1928, est le premier manifeste de la condition noire. Cet ouvrage a influencé l’oeuvre et la pensée des auteurs du mouvement de la négritude comme Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire et Léon-Gontran Damas.

 

Réédité dans un nouveau format, avec une iconographie nouvelle (paysages et figures de l’Afrique et d’Haïti), cet ouvrage propose une relecture de cette oeuvre monumentale qui a servi de bréviaire aux intellectuels des peuples noirs. Pour penser le monde, pour comprendre les mécanismes de l’aliénation, soit du «bovarysme culturel», Jean Price-Mars a mis en avant les traditions, les légendes populaires, le vaudou et tout l’héritage africain qui fondent les cultures noires.

 

Ainsi parla l’Oncle est suivi du collectif Revisiter l’Oncle qui réévalue les incidences et résonances de cette oeuvre dans le monde entier. Revisiter l’Oncle accueille les textes de Maryse Condé, Dany Laferrière, Jean-Daniel Lafond, Raphaël Confiant, André Corten, Jean Bernabé, Léon-François Hoffmann, Maximilien Laroche, Jean Morisset, Romuald Fonkoua, Alain Anselin, Carlo A.

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Martinique et Guadeloupe : le manque de concurrence comme origine de la crise

—  Par Agnès Verdier-Molinié, Samuel-Frédéric Servière —

mardi 24 février 2009

martinique-gwadaDerrière l’augmentation importante des prix à la consommation par rapport à la métropole (de 20 à 60% selon les produits), le véritable problème des DOM est bel et bien issu des monopoles et du manque de concurrence.

 

Monopoles publics parce que les administrations des Antilles ont la haute main sur un certain nombre de services publics (ports, aéroports etc.) qui s’interfacent avec le monde extérieur et renchérissent d’autant le coût des produits importés (taxes et redevances aéroportuaires, octroi de mer etc.).
Monopoles privés, qui vont à l’encontre des règles de concurrence saine et non faussée prônées par Bruxelles y compris dans ces régions dites « ultra-périphiques » (RUP).

 

Pour pallier le renchérissement du coût de la vie lié aux monopoles publics et privés, la métropole dispense subsides et régimes dérogatoires officiellement pour contre-balancer les difficultés supposées nées de l’insularité. Exercice budgétaire après exercice budgétaire, ces financements publics sont distribués à fonds perdus.

 

L’économie de ces îles semble stagner et pourtant les transferts d’argent public n’ont jamais été aussi importants : près de 13,3 milliards € en 2009 vers les DOM/TOM, soit une augmentation de 3,4% par rapport à 2008.

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L’outre-mer coûte près de sept milliards à l’État

 — par Cécile Crouzel —

La Guadeloupe coûte déjà 2,5 milliards d’euros à l’État et la Martinique 1,8 milliard.

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Le pouvoir et le président de la République en particulier sont la cible des protestations sur l’île. Crédits photo : AFP

Avec un taux de chômage qui dépasse les 20 %  et une proportion de RMistes presque quatre fois plus élevée qu’en métropole, les Antilles souffrent de nombreux handicaps économiques. Pourtant, l’État ne lésine pas sur les moyens qu’il accorde à l’outre-mer. L’effort global programmé jusqu’à présent pour 2009 est de 16,7 milliards d’euros. Pour la Guadeloupe, la facture s’élève à 2,5 milliards, et pour la Martinique à 1,8 milliard. «Toutefois, ces chiffrages agrègent tous les coûts, y compris ceux liés aux missions régaliennes de l’État, comme l’Éducation, la Justice, la police, qui existent dans l’ensemble des départements français», nuance Éric Doligé, sénateur UMP rapporteur du budget de l’outre-mer. Or ces charges «habituelles» ne sont pas négligeables : en Guadeloupe, l’État dépense près de 700 millions d’euros pour l’enseignement scolaire. «Il est donc plus juste de se concentrer sur le coût, pour l’État, des mesures spécifiques à ces territoires», explique Jérôme Cahuzac, député socialiste, rapporteur de ce budget à l’Assemblée.

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Cinéma à l’Atrium : Echo au 16ème FEMI

par Selim Lander

On sait fragile la situation du cinéma d’art et essai en Martinique ; néanmoins il survit. En dépit du mouvement de grève générale qui affectait tous les lieux publics, y compris l’Atrium, ce dernier est resté entrouvert pour permettre le bon déroulement des projections prévues dans le cadre de l’Echo au 16ème FEMI (Festival international de cinéma de Guadeloupe)i. Au programme : Le Silence de Lorna des frères Dardenne, qui ont remporté avec ce film un prix du scénario amplement méritée au festival de Cannes ; Chop Shop, film américain de Ramin Bahrani, centré sur l’histoire d’un gamin des rues à New-York (que nous n’avons malheureusement pas pu voir) ; Mataharis, film espagnol de Iciar Bollain ; enfin Faro, film malien de Salif Traoré.

Mataharis conjugue agréablement les destinées de trois femmes employées dans le même bureau de détective, qui balancent entre cynisme et émotion, tout en s’efforçant de raccommoder une vie privée mise à mal par l’usure du temps ou par les aléas de la vie. Du bon travail, plein de sensibilité, d’une jeune réalisatrice prometteuse.

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« L’intraitable beauté du monde » par Patrick Chamoiseau et Édouard Glissant

Toute l’œuvre d’Édouard Glissant a appelé de ses vœux un événement comme celui qui vient de se produire aux Etats-Unis : Barack Obama est l’incarnation de ce qu’il nomme depuis trente ans la « créolisation » du monde.

Son élection est un fait sur lequel on ne peut désormais plus revenir. Qu’est-ce que Barack Obama fera de cette victoire ? C’est aujourd’hui impossible à dire.

Dans cette lettre ouverte écrite un an après Quand les murs tombent, Édouard Glissant et Patrick Chamoiseau s’adressent au 44e président des États-Unis, premier Africain-américain à accéder à la Maison Blanche, et appellent à une réflexion entre poétique et politique sur ce que pourrait être demain l’action d’Obama, président de la première puissance mondiale.

 

En voici un extrait :

 

 

“C’est une rumeur de plusieurs siècles. Et c’est le chant des plaines de l’océan.

 

Les coquillages sonores se frottent aux crânes, aux os et aux boulets verdis, au fond de l’Atlantique. Il y a dans ces abysses des cimetières de bateaux négriers, beaucoup de leurs marins. Les rapacités, les frontières violées, les drapeaux, relevés et tombés, du monde occidental.

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Nathaly Coualy et le One Woman stand up: un équilibre fragile

 — Par Alvina Ruprecht —

Texte de Nathaly Coualy avec la collaboration de Pascal Legitimus

Interprété par Nathaly Coualy

Mise en scène de Juliette Moltes

Au Théâtre Côté Cour

Lumières : Julien Lambert

Décor Thierry Derivot

Nathaly Coualy

Oui, le titre de la pièce est le nom de la comédienne – Nathaly Coualy- que nous avons vue pour la première fois en Avignon « off » (2008) au théâtre de la Chapelle du verbe incarné où elle a joué la copine blonde du mari volage (interprété par Philippe Calodat) dans Projection Privée, sur un texte de Rémi de Vos mis en scène par Greg Germain. Dans sa prestation récente, Nathaly, redevenue semblable à elle-même (car elle n’est pas blonde), nous fait un monologue « confession » qui vire vite au « stand up » interactif, profitant ainsi d’une petite salle (60 places?) où la disposition salle-scène invite les échanges intimes.

Ce spectacle serait une version retravaillée (avec Légitimus) d’un monologue (intitulé Seule), présenté l’année dernière. Cette fois-ci, l’idée était justement de réduire les artifices d’un spectacle théâtral pour créer l’illusion d’une rencontre entre un public qui tient lieu de psychiatre, voire de psychanalyste, et la comédienne.

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