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Widad Amra publie « Regards d’errance »

— Par Pierre PINALIE —


Ce ne sont pas des cris, mais tout est dit fortement, et la langue est belle, qui sait glisser du classique au familier sans repousser un seul instant l’intérêt du lecteur. À tel point que les phrases qui font allusion à un dieu restent aimables et séduisantes, sans choquer et sans repousser ceux qui n’entrent pas dans les croyances. D’ailleurs, l’apparition des « vendredi » pourrait même enchanter d’autres croyants venus d’autres lieux. Et sur l’enchaînement des thèmes et des allusions, une dialectique permanente retient l’attention du militant qui déplore la colonisation et du camarade qui aime qu’on le nomme ainsi.

De manière étonnante, les fêtes religieuses voisinent avec l’Indien venu d’ailleurs, et la nature reste un cadre permanent, avec des flamboyants et surtout l’arbre du voyageur, et cela paradoxalement, dans un pays mêlé. Face à la végétation variée, l’homme présente aussi un éventail de peaux différentes jusqu’à ce que se produisent des dérives encanaillées malgré le plaisir du rhum. Et du point de vue de l’Histoire, du droit et de l’espoir, il est normalement attendu que les marrons aient laissé leur souvenir et leur âme.

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Kanel BROSI – sculptures Dans la forêt des ombres – & Nicole DÉCOTÉ – peintures Chemins de lumières –

kanel_brosi_sculptures du samedi 6 au samedi 27 mars 2010

à la Galerie La Véranda de l’ATRIUM

Parlez-vous le « Kanel » ? Des « bâtons » baroques (bois sauvés des plages et des mangroves) s’allient à des « totems » longilignes (troncs évadés des forêts), pour se grouper en « armée » … Une armée pacifique – et de haute taille !
Un soigneux toilettage des « trophées » patiemment récoltés a d’abord régénéré ces déchets maculés. Puis des mains Jivaro ont modelé l’argile autour de ce bois stimulant, déclencheur de formes. Une tête et un corps ont redonné vie à ces résidus abandonnés, qui retrouvent ainsi une identité.
Identité multiple ! Fascinée par la diversité des cultures du monde, Kanel leur rend hommage, avec des visages qui disent l’Afrique, les Antilles ou l’Asie, qui nous parlent de Xian et ses guerriers éternels, de la Grèce et ses sages …
Mais des couleurs contradictoires, au-delà de tout réalisme, proclament une symbolique du métissage, et s’autorisent des glissades fantaisistes.
Armée pacifique, disions-nous, qui exalte la grande famille humaine, matérialise le vivre-ensemble et la tolérance.

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Les Martiniquaises à travers les âges

Compte-rendu par Michel Herland

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Femmes de la Martinique : quelle histoire ? Archives départementales, Fort-de-France, 2009, 98 p., 14 €. Alexandre Cadet-Petit, La Femme – un roman de plus de 69 pages, Desnel, Fort-de-France, 2008, 287 p., 20 €.

La femme est-elle vraiment l’avenir de l’homme ? La confrontation des deux ouvrages consacrés récemment à la femme martiniquaise ne permet pas d’aboutir là-dessus à une réponse bien tranchée.

Modestement présenté comme un « dossier pédagogique », le livret publié à l’initiative du service éducatif des Archives départementales rassemble et commente de nombreux documents écrits, accompagnés d’une riche iconographie. Il en ressort un panorama très varié qui commence par les Indiennes caraïbes portraiturées par le père Labat (« plus petites que les hommes, assez bien faites et grasses, elles ont les yeux et les cheveux noirs, le tour du visage rond, la bouche petite, les dents fort blanches, l’air plus gai, plus ouvert et plus riant que les hommes ; avec tout cela elles sont réservées et fort modestes… ») ; puis les esclaves, « amarreuses » ou servantes-maîtresses (c’est selon), bien différentes des blanches créoles si « indolentes » ; les « schœlchéristes », après 1848, qui prêchaient « l’ordre et le travail », tout en s’efforçant de pratiquer elles-mêmes « l’amour de dieu et des choses honnêtes » ; les charbonnières, un peu plus tard, qui ont créé le premier syndicat martiniquais ; les maîtresses d’école et leurs jeunes élèves ; les militantes de la négritude avant la dernière guerre ; jusqu’à l’actuelle présidente de l’Union des femmes de la Martinique.

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Tanya ELISABETH : l’Art Performance

— Par Christian Antourel —

 Le corps dans le décor

  Un art qui apparaît d’autant plus vivant, qu’il semble n’obéir à aucune règle définie, fourmillant d’imprévus et d’inventions.

 Tanya Elisabeth est une artiste au devenir prometteur. L’imaginaire artistique qu’elle développe, ses représentations quelle réalise comme dans l’envolée d’une apparition de colombes font de cette artiste plasticienne, une magicienne, mais aussi une danseuse a la recherche du temps perdu qu’elle retient dans l’étreinte spontanée d’une interprétation de la nature. Elle vit une aventure qui la porte dans des ressentis tenaces, volatils et fugitifs qu’elle envisage en connivence entre corps et décors, dans un accord tacite, un périple audacieux ou des espaces vides s’habillent entre transparence et apparence de couleurs vraies et fugaces. Elle danse dans l’espace de nos regards, maintenue en équilibre entre les surfaces modulables de toute la réalité d’un rêve, par essence, évanescente et éphémère.

 Cette sensualité du risque immédiat

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« MAR NUESTRO » d’Alberto Pedro Torriente : quand c’est mal parti… c’est mal parti!

—Par Roland Sabra —

 

Pour la seconde fois la compagnie  » Corps Beaux » présentait « Mar Nuestro » aux Martiniquais La mise en scène avait été revisitée, on pouvait donc penser qu’il s’agissait d’un travail différent. Et il l’était. En mieux ? En pire ? Ni l’un ni l’autre. Ricardo Miranda en « Vierge folle » était au moins deux tons en dessous de sa prestation de la première version. Ce qui était un mieux incontestable mais encore très indigeste. Un interprétation beaucoup moins « Cage aux folles » que  dans la première version, mais comment revenir, comment atténuer un tel parti pris de mise en scène?  Reste que la diction mange toujours autant de syllabes et rend le texte par moment  totalement incompréhensible.

Et nos regrets n’en sont que plus grands. Car s’il y a quelques qualités a retenir du travail de Miranda et de son compère Lopez c’est la passion qu’ils mettent à faire les choses, cette abnégation dont ils font preuve quand ils mettent en scène, avec très peu de moyens, presque rien, un texte d’auteur.

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Un coup de gueule qui coûte cher!

 

Par Roland Sabra

Edito du 17/12/2009

La situation n’était pas brillante mais d’un étiage de 19% d’intention de votes en septembre 2009 on arrivait fin novembre à 32% d’intention de votes en faveur du oui. Dans le même temps le Non s’étiolait doucement en passant de 53% à 49%. La progression du oui était lente mais continue. C’est cet élan qui semble aujourd’hui brisé. Le dernier sondage LH2 dom enregistre un score de 28 % pour le Oui soit une  baisse  en valeur absolue de 4 points de % ou de 12.5% en valeur relative.  Cette baisse ne profite pas au camp du non qui stagne à 49%, incapable qu’il est lui aussi de faire campagne sur un projet, mais profite intégralement, si l’on peut dire aux indécis.. comme le suggère Rudy Rabathaly dans France-Antilles du 15-12-09 c’est très certainement le coup de gueule de M. Alfred Marie-Jeanne contre un professeur qui lui posait sereinement la question : « Pourquoi ne pouvez-vous pas rencontrer M; Letchimy pour trouver une solution à la reconstruction du lycée Schoelcher » qui a brisé ( momentanément?)

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« Bintou » de Koffi Kwahulé dans une mise en scène de Laetitia Guédon

— Par Roland Sabra, 

Un talent prometteur !

 Virilisme « Réaction virile exacerbée face à l’évolution des rapports hommes-femmes, le virilisme, surtout dans les banlieues, est aussi l’indicateur d’un malaise social plus large. » Telle est la définition du sociologue  Daniel Welzer-Lang qui semble s’appliquer à la lettre à la thématique déclinée par Koffi Kwahulé dans « Bintou » mis en scène par Laetitia Guédon et jouée le 09 octobre2009 à Fort-de-France. Une jeune fille de treize ans, qui n’est plus une enfant, exceptée pour les contempteurs de Polansky, issue de l’immigration africaine refuse les codes machistes d’une acculturation batârde. Ou plutôt, Bintou, puisque c’est d’elle dont il s’agit, va se jouer des acquis d’une socialisation apparemment conflictuelle, entre Europe et Afrique mais fondamentalement convergente quand à perpétuation de la domination masculine.   Noyée dans le sang sous le couteau de l’exciseuse,  avec la complicité des femmes plus âgées, elle paiera de sa vie de n’avoir pas voulu rester à la place que l’ordre des hommes lui avait assignée. Le thème développé n’est  pas tant l’excision que celui des ravages de socialisations différentielles et conflictuelles dans un contexte d’acculturation postcoloniale et de virilisme mortifère.

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Lycée Schoelcher : une solution existe!

— Interview de Roland Sabra par Camille Chauvet —

Camille Chauvet : Roland Sabra tu as beaucoup écrit sur la reconstruction du Lycée Schoelcher pourquoi?

Roland Sabra : Comme tu le sais je m’intéresse un peu aux arts de la scène et plus particulièrement au théâtre et comme tu le sais encore mieux le Lycée Schoelcher est le seul Lycée de Martinique qui offre aux élèves une option théâtre dite « lourde » la L3 dans le jargon educnat. Par ailleurs je crois que la culture est le premier vecteur d’une possible indépendance. Pouvoir affirmer des valeurs, des normes qui échappent au cycle infernal de la dépendance et de la contre-dépendance est le socle sur lequel se bâtit le reste. Les caciques marxiens ne seront pas d’accord mais c’est leur affaire. Réciter Marx comme un bréviaire en un temps où l’économie immatérielle devient dominante n’est sans doute pas la meilleure façon d’avancer dans ce siècle.

Camille Chauvet : Dans la phase finale du concours il restait 3 projets. Celui retenu par la Région avait-il ton assentiment?

Roland Sabra : Non mais le pire avait été évité.

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La question du Lycéee Schoelcher : un révélateur du comportement de monsieur Alfred Marie-Jeanne

—Par Karl Paolo —

Les vociférations qui ont émaillées la venue des jeunes du lycée Schœlcher à la simple évocation du nom de Serge LETCHIMY ont mis au devant de la scène, un des aspects majeurs du comportement comme des pratiques d’Alfred MARIE-JEANNE que certains avaient sans doute oublié.
Pourtant et contrairement à ce que certains journalistes ont prétendu, il ne s’agit pas d’une perte de contrôle qui aurait été provoquée lors d’un échange un peu vif avec d’autres interlocuteurs. Même dans ce cas, un élu, un « décideur », un responsable politique, l’exécutif d’une des deux principales assemblées locale, se doit de garder son self contrôle et de tenir, en toute circonstance, un langage et des propos exempts d’agressivité.
Il ne s’agit pas davantage d’un brusque coup de fièvre qui aurait été provoqué par la question d’un professeur, dont le seul objet était de débloquer la situation : « Ne pourriez pas rencontrer Monsieur LETCHIMY pour débloquer la situation ? »

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Lycée Schoelcher : sous quel régime vivons-nous ?

par Charles Savannah —

L’article 74 n’a pas encore voté que nous sommes déjà contraints de nous demander quel régime nous régit. Il semble pourtant que nous sommes toujours régit par les lois de la République, et que les élus ont été désignés pour répondre aux besoins et aux vœux d’une population….

Le Lycée Schœlcher doit disparaître

Il doit disparaître pour des raisons idéologiques et parce qu’il est l’enjeu d’une lutte politique dans laquelle ses utilisateurs – professeurs, personnels techniques et élèves – n’ont pas accepté de prendre parti !

Des Arguments contradictoires

La première réponse de la Région a consisté à demander au recteur de fermer le lycée et d’éparpiller élèves et professeurs sur les autres lycées de la Martinique.

L’argument utilisé est la dangerosité: il y a urgence, car le lycée est dangereux. Et, à l’appui de cet argument:

· le bâtiment G qu’on a détruit parce qu’il était dangereux.

· le bâtiment G, lorsqu’on l’a détruit se serait écroulé sur lui-même dès la première poussée….

· d’ailleurs, c’est pour mettre les petits Martiniquais à l’abri qu’on a décidé de reconstruire le lycée !

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Reconstruction du lycée Schoelcher : la tragi-comédie « Serge & Alfred »

 

— Par Roland Sabra —

 

 


Serge Letchimy a invité le 25 novembre 2009 les personnels de la communauté scolaire du lycée Schoelcher a une séance d’explication à propos de son refus de délivrer le permis de construire du nouveau lycée. Après avoir distribué une épaisse brochure au public il a fait une lecture commentée de l’article 11-UA du Plan d’urbanisme Local ( PLU) de la ville, sur lequel il s’appuie pour motiver son refus. Il s’est attardé sur l’alinéa intitulé « Restauration, rénovation, extension de constructions existantes » qui précise : « Les interventions doivent notamment respecter la typologie architecturale,, les matériaux d’origine, la composition des façades ( reprise des proportions, du rythme et des éléments de modénature) les pentes et la volumétrie des toitures. » Il va de soi que le projet retenu par la Région ne répond pas à ces exigences. La question est de savoir si cet alinéa invoqué est propre à soutenir le refus de permis. « Restauration, rénovation ou l’ extension de constructions existantes sont une chose, la reconstruction en est une autre.

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Mar nuestro » : Narcisse se suffit à lui-même

— Par Roland Sabra —

 

 La Compagnie « Les corps beaux » qui s’inscrit dans le sillage du Théâtre Si de Médina a le grand mérite de nous faire découvrir un immense auteur cubain, Alberto Pedro Torriente. Le précédent travail de la troupe nous avait présenté « Mantéca » ( lire la critique ) il y a deux ans déjà, avant d’aller à Avignon et d’y retourner l’an dernier avec une version plus aboutie. La troupe de Ricardo Miranda poursuit avec « Mar Nuestra » l’exploration du répertoire de cet auteur, décédé en 2004 à l’âge de 50 ans d’une cirrhose du foie à l’hôpital Allende de La Havane. Trois femmes, une noire, une métisse et une blanche sur un radeau sont à la fois unies dans la recherche d’un paradis, une terre ferme, occidentale il va de soi, et par les conditions nécessaires à leur survies, le partage du peu de biens alimentaires dont elles disposent et divisées, partagées par ce qui structure leur identité, à savoir, le racisme, les superstitions, le dogmatisme. Sur ce radeau à la dérive sur une mer sans limites, avec lequel elles prétendent franchir les frontières dans leur quête d’un paradis elles se heurtent à l’infranchissable barrière de l’enfer des préjugés de races, de classes et d’idéologies qu’elles ont embarqués avec elles.

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La Guadeloupe mixe les arts

 

MIX’Art : L’Art en liberté, exposition inaugurée en juin dernier au Grand Palais à Paris, arrive samedi en Guadeloupe à l’occasion du festival de musique caribéenne. Le but de l’opération: promouvoir l’égalité des chances et la diversité culturelle, grâce à des artistes de différents horizons.

 

Des bédéistes, des graffeurs, des danseurs, des musiciens… A l’occasion du festival de musique caribéenne, le public guadeloupéen va pouvoir découvrir une manifestation qui vise la « fusion artistique ». Avec MIX’ART : l’Art et Liberté, l’association Ariana, organisatrice de l’événement, veut promouvoir la richesse culturelle via cette « fusion artistique ». Du 21 au 28 novembre prochain, sur le parvis de l’hôtel de ville de Point-à-Pitre, le public pourra admirer une cinquantaine de toiles réalisées par des graffeurs et des bédéistes de premier plan, en forme d’abécédaire sur la diversité. Une manière de sensibiliser les Guadeloupéens sur le sujet. Les artistes présents à l’opération initieront également le public aux liaisons qui peuvent se créer entre des procédés créatifs et la prise de conscience de problèmes de société. Rencontre et échange sont les maîtres mots de l’opération.

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L’imprévisible ruse avec le temps quand le prévisible réapparaît.

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— par Patrice Ganot —

Fin de matinée de ce jeudi 19 novembre 2009.

Je viens d’allumer mon ordinateur et me suis mis à l’écoute de Radio Classique sur Internet. Le site (et la radio) nous donne du Beethoven, une de ses symphonies.

J’ai préalablement tenté à plusieurs reprises, sans succès, d’ouvrir ma boîte aux courriels. Les aléas des messageries sont agaçants aussi vais-je rechercher de la musique qui a pour vocation d’adoucir les moeurs de l’internaute excédé (la musique dite classique est dans ce cas tout particulièrement recommandée), pour retourner, apaisé, aux tentatives d’accès à ma messagerie.

Midi. Il est 17h00, en France.

La symphonie se termine et laisse place au flash d’information.

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La ruse de l’imprévisible

par Manuel NORVAT —




On ne présente plus l’imprévisible : il s’invite par définition sans prévenir. On peut seulement tenter de l’approcher. En vérité, l’imprévisible nous apparaît sous les aspects les plus incroyables du quotidien et de l’imaginaire, sans compter les méditations savantes, peu être trop savantes, ou encore les expressions non-conventionnelles, et pas forcément iconoclastes, des œuvres d’art que sont les installations. Les exemples fourmillent : l’inopiné des tremblés de la terre ; l’apparition d’un cheval à trois pattes ; une grève générale en colonie de surconsommation ; les fureurs poétiques des conteurs et autres tireurs de merveilles ; les bougres-à-livres habités de « cadavres exquis » dans un univers de baroque naturel (où de réel-merveilleux si vous voulez) que nous criions tout bonnement créole ; appellation dont nul peuple ne devrait détenir le monopole. Et puis, l’imprévisible, d’universaux en lieu commun, c’est bien là son paradoxe, cela devient du réchauffé avec, à présent, le carême au mitan de l’hivernage.

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Les premières rencontres dramaturgiques de la Caraïbe

 par Michel Dural* —

theatre_drameDu 22 au 24 octobre 2009, les « 1ères Rencontres Dramaturgiques de la Caraïbe » se sont tenues au Lycée Schoelcher dans la salle de théâtre Aimé Césaire, ainsi nommée il y a dix ans, à un moment où ni l’homme Césaire, ni son oeuvre, ni sa pensée ne faisaient l’unanimité à la Martinique. Schoelcher, Césaire, même combat? Le programme de ces « Rencontres… » prévoyait deux Tables Rondes avec comme thèmes « Le théâtre Jeune Public » et « Théâtre et actualité politique ». On ne pouvait rêver meilleur parrainage.
Ni meilleur espace que cette petite salle, avec ses murs noirs, son parquet noir et ses gradins rouges, où, depuis dix ans, les élèves martiniquais passionnés de théâtre apprennent à lire, à regarder, à jouer du théâtre, et à en parler.
Ils étaient là, d’ailleurs, ces élèves, dans les gradins où l’on aurait souhaité voir au moins quelques uns de ceux qui, à la Martinique, ont en charge le développement culturel et la promotion du spectacle vivant.
Ils étaient là sur scène, aussi, puisque c’est l’Option-théâtre du lycée qui ouvrait la manifestation par la lecture-mise en espace de « La robe de Gulnara », une pièce de l’un des auteurs invités, Ia québécoise Isabelle Hubert.

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Lycée Schœlcher : le train de la raison peut toujours se remettre sur les rails…

Par le SNES du Lycée Schoelcher 

Au stade où nous en sommes, et concernant le lycée Schœlcher, la dernière malveillance de la Région à l’égard de celui-ci – la demande faite au recteur de supprimer des divisions pour ramener l’établissement à 700 élèves – témoigne bien de l’impasse dans laquelle se trouve la collectivité. L’état d’abandon et par voie de conséquence de délabrement dans lequel a été maintenu le lycée – y compris en investissement de matériel pédagogique moderne ou classique – sous prétexte de reconstruction témoigne de la volonté de faire disparaître le fleuron de la Martinique. Las ! Dans le même temps, la qualité du lycée Schœlcher s’impose régulièrement à tous.
Le jeu dangereux qui a consisté pour la Région à vouloir faire cavalier seul dans la reconstruction du lycée en refusant le terrain fourni par la ville de Fort-de-France – en l’occurrence la CACEM – à l’étang Zabricot – puis en abandonnant l’idée de lycée de transit portée par le SNES du lycée Schœlcher, et enfin en considérant que l’implantation d’un bâtiment de cette ampleur, à cet endroit, pouvait se faire sans collaboration étroite avec la ville de Fort-de-France ; bref, ce jeu dangereux s’est retourné contre ses initiateurs malgré leur ultime tentative d’exploiter politiquement le rejet du permis de construire.

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« Le Paradoxe amoureux », de Pascal Bruckner

par Jean Sévillia

Il n’existe pas d’amour libre

 

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«Le Paradoxe amoureux» de Pascal Bruckner, Grasset, 276 p, 19,80 €.

 

Dans «Le Paradoxe amoureux», le philosophe Pascal Bruckner, en ex de Mai 68, explore le nouveau visage du sentiment amoureux, pendant qu’un groupe d’historiens se penche sur l’institution du mariage.

De Roman Polanski à Frédéric Mitterrand, de récentes affaires ont illustré combien, en dépit du bouleversement des mœurs, il est impossible de cantonner la vie amoureuse au strict plan privé. Rien d’étonnant à cela : l’amour, étant un lien entre individus, possède par nature une dimension sociale. Et cette dimension appelle des règles, des codes et des lois, fût-ce pour les transgresser.

C’est donc avec raison que Pascal Bruckner, dans son dernier essai (1), relève un paradoxe : «Les années 60-70 auront accouché de cette étrangeté conceptuelle, l’amour libre.» L’amour libre, précise-t-il, c’est un oxymore : l’amour attache, alors que la liberté sépare. Comment résoudre cette contradiction ? L’auteur s’emploie à répondre à la question, reprenant à frais nouveaux un sujet exploré en 1977, dans un ouvrage coécrit avec Alain Finkielkraut (Le Nouveau Désordre amoureux).

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Condorcet,  » Réflexions sur l’esclavage des Nègres « .

Un admirable  » éclat de conscience  »

Ecrit en 1781 pour dénoncer une pratique qui ne sera définitivement abolie par la France qu’en 1848, ce texte témoigne, selon l’écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau, de la clairvoyance du philosophe, qui sut s’affranchir des structures de l’imaginaire dominant

Dans quelles circonstances avez-vous découvert ce texte ?

C’est une découverte un peu neutralisée, comme le système scolaire sait en produire. Un extrait quelconque dans un cours d’histoire ou de philo, je ne sais plus très bien. Mais, en ce temps, je n’avais pas de problématique particulière. L’humanisme des Lumières, pour moi, restait quelque chose d’un peu désincarné, en tout cas pas directement fonctionnel. Plus tard, les livres se sont réveillés, et je n’arrête pas de m’émerveiller de la clairvoyance de ces esprits magnifiques. Malgré des aveuglements liés à leur époque, ils sont étonnants de lucidité et surtout de générosité. Et puis cette capacité à sortir de soi, de sa quiétude et de sa prééminence, pour s’ouvrir à une altérité, lointaine, invisible, incompréhensible ou méprisable… C’est mon angoisse quotidienne que de me demander sur quoi je suis aveugle, quel est le grand crime actuel que je ne dénonce pas, dont je m’accommode…

Le texte de Condorcet arrive près d’un siècle après l’édiction du Code noir, qui ravalait des hommes au rang de  » biens meubles « .

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Aimé Césaire Précurseur d’une métamorphose. Tracé d’une aliénation par Rodolf Etienne

 

Aimé Césaire

 

Précurseur d’une métamorphose
Tracé d’une aliénation

 

 par Rodolf Etienne

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 I. Tracé d’une aliénation

 Eléments de définition

 

Puisqu’il en faut une pour ouvrir le débat, considérons la définition suivante du terme créole, tirée du dictionnaire Larousse,

 

n. et adj. d’abord attesté sous les formes hispanisantes crollo (1598), criollo (1643), puis francisé en créole, en 1670. Il est emprunté à l’espagnol criollo (1590), lui-même emprunté au portugais crioulo, seulement attesté en 1632 au sens de « métis noir né au Brésil ». Ce mot est dérivé, avec un suffixe mal éclairci, de cria, dérivé régressif de criar « élever » (espagnol criar), issu du latin creare, signifiant « créer ».

 (…)

L’expression  langue créole, attestée en 1688 et reprise au XIXème siècle, est probablement un emprunt direct au portugais, à en juger par la localisation de la première attestation relative au créole portugais parlé au Sénégal1. Et jusqu’à la fin du XIXème siècle, les créoles étaient considérées comme une simple altération du français, de l’anglais, du néerlandais, du portugais ou de l’espagnol.

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Marie Stuart, fable sur le pouvoir de Friedrich Schiller

 

— Par Laurence Aurry —

 

 

Théâtre de Fort-de-France les 7,8,9,10,11 octobre à 19h30

 

 

Choisir un drame romantique historique comme Marie Stuart aujourd’hui où le théâtre se fait de moins en moins politique et où la politique se donne de plus en plus en spectacle, relève de la gageure. Comment intéresser les spectateurs contemporains à un conflit qui peut leur paraître si lointain ? Comment rendre la force et le souffle du grand dramaturge allemand, Schiller ? Comment traduire à travers la rivalité de ces figures féminines héroïques, Marie Stuart et Élisabeth 1ère, les enjeux idéologiques, moraux et religieux qui traversèrent le XVIè siècle, en proie aux guerres de religion, et le XVIIIè siècle, avide de libertés ?

 

La tentative est louable. Le choix des costumes et la scénographie témoignent d’une recherche intéressante. La couleur des vêtements, le rouge, le mauve, le gris, symbolise assez bien la passion ou l’austérité selon qu’il s’agit de la séduisante Marie Stuart, de la digne Élisabeth ou des sombres lords, juges de Marie Stuart. Les lignes droites des costumes masculins renforcent le caractère martial de leur personnage.

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« Anjo Negro » : La programmation audacieuse de Michelle Césaire

— Par Roland Sabra —


Ces dernières années elle ne nous avait pas habitués à une telle prise de risque. Une programmation sage, sérieuse, de qualité qui concourrait à former un public qui appréciait ce louable effort de pédagogie. On allait au Théâtre de Foyal, les yeux fermés, il suffisait de les ouvrir dans la salle et de découvrir ce que la programmatrice avait sélectionné bien souvent pour notre bohneur. C’était oublier un peu vite que Michelle Césaire est une femme de théâtre, qu’elle est aussi metteur en scène, et que son regard  s’est affuté à des choix artistiques exigeants, déroutants et parfois élitistes, dans le bon sens du mot. Elle ne a fait la preuve en ramenant de la Chapelle du Verbe Incarné à Avignon Angelo Negro une pièce de Nelson Rodrigues. L’auteur brésilien, cinquième enfant d’une famille de journalistes est né, en 1912 à Recife. Son enfance se déroule dans un climat pulsionnel intense, entre une mère jalouse et possessive et un père absent  de par son implication dans la politique et le journalisme. A l’âge de huit ans il participe à un concours de rédaction en classe et fait la narration d’un adultère!

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Gabriel Garcia Marquez – Une vie» de Gerald Martin

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 Les vies d’un homme nommé Marquez

 

— Par Étienne de Montety —

  – Cette biographie de Gabo a nécessité dix-sept années de travail.

 

En 1957, Gabriel Garcia Marquez est à Paris. Il vit dans la dèche, inconnu, désespéré de ne pouvoir s’adonner à ce vice impuni, l’écriture. Il erre dans les milieux latinos du Quartier latin. Un jour, il croise un colosse barbu qui porte jean et chemise de bûcheron et une casquette de base-ball. C’est Ernest Hemingway, son idole, qu’il apostrophe : «Maestro !» L’écrivain lève la main et lui répond d’une voix juvénile : «Adios, amigo !» L’anecdote comme tant d’autres est rapportée par le biographe de Garcia Marquez, Gerald Martin, dans un ouvrage dont le titre, Une vie, à la sobriété «maupassante», dit mal l’abondance de faits et d’analyses qu’il contient de bout en bout.

 

Le salut d’Hemingway a valeur d’adoubement. À l’époque, Garcia Marquez n’est pas encore entré en littérature. Il voyage en Europe (Berlin-Est, Moscou, Budapest), fourbit ses amis. Mais dans les années qui vont suivre, Gabo – le surnom de l’écrivain – va peu à peu sortir de sa gangue de personnage famélique.

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Sylviane Quitman maquilleuse.

Christian Antourel —

« Les illusions sont nécessaires et font partie intégrante de l’ordre des choses »

Eloge du maquillage

Peu importe que la ruse et l’artifice soit connu du public le maquillage n’a pas à se cacher si l’effet parvient à faire disparaître du teint toutes les taches et disgrâces que dame nature y a volontairement semé. Il répond à une unité esthétique abstraite devenue incontournable. C’est là que l’artiste maquilleuse est reconnue dans toutes les pratiques, les astuces employées pour subtiliser les traits rebels, dont l’unanimité réclame la fluidité audiovisuelle imperturbable, pour une accroche sur un fond de lumière infernale.
Il est une condition qui ajoute beaucoup à la force d’action du maquillage :
C’est que son exécution reste une légèreté dans le temps et qu’en n’aucune manière, hormis l’exception mise en scène, son passage ne conclut à des immobilisations prostrées dans des attitudes lisses de statues antiques ou à un portrait dans son cadre d’innombrables poupées agissantes. C’eût été lui manquer de respect que d’ôter au maquillage sa nature vivante.

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André Schwarz-Bart, le Juif de nulle part

 

 

 

L’Arche n° 583, décembre 2006, p. 84-89
Par Francine Kaufmann
André Schwarz-Bart a choisi de ne laisser de son passage charnel sur cette terre qu’un mince filet de fumée blanche et quelques cendres. Il a été incinéré au lendemain de Kippour, le 3 octobre 2006, sur l’île de Grande-Terre, dans cette Guadeloupe qu’il avait choisie pour demeure. On se souvient de la dernière page de son chef d’oeuvre, Le dernier des Justes, consacré au massacre des communautés juives d’Europe : « Ainsi donc cette histoire ne s’achèvera pas sur quelque tombe à visiter en souvenir. Car la fumée qui sort des crématoires obéit tout comme une autre aux lois physiques : les particules s’assemblent et se dispersent au vent, qui les pousse. Le seul pèlerinage serait, estimable lecteur, de regarder parfois un ciel d’orage avec mélancolie. »
Il est parti sur la pointe des pieds, comme il avait vécu. Rien d’étonnant, donc, si les jeunes générations connaissent à peine son nom et si les adolescents d’après-guerre se souviennent de lui comme de l’homme d’un seul livre, ce Dernier des Justes qui s’imposa avec évidence comme prix Goncourt 1959.

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