M' A

Pourquoi les romanciers français devraient lire Bourdieu

 

Par Olivier Adam.

 

–Pierre Bourdieu est mort il y a dix ans. Et à la manière qu’on a eue en France d’enfouir sa pensée, d’en relativiser la portée (ce qui dit assez bien son caractère encombrant, sa lucidité si brûlante qu’on préfère la soustraire à la vue) ou de ne pas véritablement s’en saisir (et à ce jeu, politiques et écrivains ont été aussi experts les uns que les autres), je me dis parfois qu’il est mort de nombreuses fois depuis.

Je me souviens encore du jour de sa disparition, et de l’émotion qu’elle a provoquée en moi, comparable à celle qui m’a étreint à la mort de Barbara, Pialat ou Bashung – et ces quatre, auxquels il faudrait ajouter Carver, donnent une idée assez précise de mon Panthéon personnel. Pourtant, en ce qui me concerne, Pierre Bourdieu est toujours vivant. Son influence a été si déterminante qu’elle fonde aujourd’hui encore une bonne partie de ma manière de voir, de penser le monde, et in fine de l’écrire.

Découverte

Je l’ai découvert à l’âge de dix-neuf ans, sur la recommandation d’un professeur de sociologie qui s’amusait de me voir trimbaler mes livres de Modiano et mes disques de Léonard Cohen dans un établissement où la plupart de mes semblables se baladaient Les Échos sous le bras, rêvaient de diriger des ressources humaines, de contrôler la gestion ou de manipuler des produits financiers les plus toxiques possible.

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Au fil des voix du monde

Fort de son affiche exigeante et bariolée (Antonio Zambujo, Cheick Tidiane Seck, Vinicio Capossela), le festival Au Fil des Voix réunit le meilleur des musiques du monde à Paris au cœur de l’hiver.

Depuis cinq ans, Saïd Assadi, directeur du label indépendant Accords Croisés, programme chaque hiver LE rendez-vous parisien des musiques du monde. Incontournable, et pour cause. Avec des artistes de la trempe d’Antonio Zambujo, ce portugais qui réinvente le fado avec sa voix d’ange, ou encore Vinicio Capossela, cet italien déjanté qui tient plutôt de Tom Waits, on aurait tort de s’en priver!

C’est à guichet fermé que Zambujo a présenté vendredi dernier Quinto, son cinquième album. Sa démarche, à la fois respectueuse des traditions et innovante, reflète bien l’esprit des artistes sélectionnés par Saïd Assadi. Samedi, dans un tout autre style, tonitruant et décomplexé avec son jazz Mandingue, c’est Cheick Tidiane Seck qui levait le voile sur Guerrier, son dernier opus solo. Connu pour ses collaborations avec Salif Keïta ou Amadou et Mariam, ce claviériste et arrangeur hors pair est l’un des piliers de la scène malienne parisienne, où on le surnomme Black Buddha à cause de sa bouille ronde et toujours joviale.

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Mahomet, le prophète posthume

Qui est le fondateur de l’islam ? Comment vivait-il dans l’Arabie occidentale du VIIe siècle ? L’historienne Jacqueline Chabbi rassemble les rares pièces du puzzle de l’édification de sa légende.

Au Mali, les guerriers jihadistes d’Al-Qaeda ont détruit mosquées et mausolées, symboles du soufisme. Pour imposer par la terreur leur vision de l’islam et de son fondateur. Cette lecture fondamentaliste s’impose de plus en plus. La figure de Mahomet, elle, alimente la controverse en faisant monter la tension entre l’Occident et le monde musulman. Depuis l’affaire des caricatures de Mahomet, publiées en septembre 2005 dans un journal danois, jusqu’au film l’Innocence des musulmans, diffusé cet automne sur Internet, les polémiques se succèdent. Pourtant, comme l’explique Jacqueline Chabbi, l’une des meilleures spécialistes françaises des origines de l’islam, cette «sacralisation» du prophète a une histoire, malheureusement trop méconnue.

Que sait-on historiquement de Mahomet ?

La figure de Mahomet n’est pas historique, comme les musulmans se l’imaginent. La réalité historique de cette figure s’est effacée depuis très longtemps, depuis le Moyen Age. En fait, la tradition musulmane va raconter Mahomet et créer, au début du IXe siècle, cette figure de prophète, soit deux siècles après sa mort.

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« Il faut enseigner les langues régionales le plus tôt possible à l’école »

Par Michel Feltin-Palas,

–Une manifestation est organisée par le mouvement occitaniste ce samedi à Montpellier. L’occasion de se pencher sur le sort des langues régionales avec l’une des meilleures spécialistes du sujet, la linguiste Henriette Walter.

Le français s’est-il imposé comme langue nationale au détriment des langues régionales en raison de ses vertus linguistiques?

Pas du tout. Au départ, il s’agissait simplement d’un idiome parmi d’autres, à ceci près qu’il s’était développé dans une région qui allait devenir le berceau du royaume de France. C’est donc une langue qui a « réussi » en s’imposant sur les territoires voisins.

Ce n’est donc pas une langue supérieure aux « patois », comme on le croit souvent?

Nullement. Les patois ne sont pas des parlers « inférieurs »: ce sont des variations locales d’une même langue. Aucune langue n’est supérieure à une autre: cela, c’est de la propagande.

Pour quelles raisons les langues régionales sont-elles en déclin?

Plusieurs facteurs se sont conjugués. L’école, qui a imposé l’usage exclusif du français. Le service militaire et la guerre de 1914-1918, qui ont obligé les masses paysannes à recourir à une langue commune.

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Pour une véritable régulation bancaire au niveau européen

Par MICHEL DESTOT Député, maire de Grenoble et président d’Inventer à gauche, DOMINIQUE LEFEBVRE Député, membre de la Commission des finances, JEAN PEYRELEVADE Ancien président du Crédit lyonnais, MICHEL ROCARD ancien Premier ministre et président d’honneur d’Inventer à gauche, BERNARD SOULAGE Professeur d’économie et vice-président de la région Rhône-Alpes délégué à l’Europe

–La crise financière et bancaire n’est peut-être pas derrière nous, il y a fort à parier que les banques, hedge funds et autres véhicules financiers n’ont pas dit leur dernier mot. En juin 2011, la Banque des règlements internationaux (BRI) mettait en avant les dangers systémiques qui nous guettent : l’encours total des produits dérivés (vendu de gré à gré) s’élevait à un niveau vertigineux : 708 000 milliards de dollars (contre un PIB mondial à peine supérieur à 62 000 milliards de dollars).La crise menace toujours, nous devons donc protéger les épargnants des écueils de la finance de marché.

Après la crise de 1929, le Glass-Steagall Act avait, en 1933, instauré l’incompatibilité entre les banques de dépôt et celles d’investissement. Ce choix de régulation, adapté aux circonstances de l’époque, a participé de l’absence de crise financière systémique durant plusieurs décennies.

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Illogique  » Homo economicus « 

Daniel Kahneman, psychologue, et Prix Nobel, explore le fossé entre la rationalité de l’économie et les comportements irrationnels de l’homme. Ce qui expliquerait la folie de la finance

 

 

Le 23 octobre 2008 est pour Daniel Kahneman  » un des moments les plus émouvants de la crise économique  » de 2007-2008. Ce jour-là, Alan Greenspan, l’ex-président de la Réserve fédérale américaine, surnommé le  » maestro  » de la finance, reconnaît devant le Congrès s’être trompé sur la capacité des marchés à s’autoréguler et sur celle des acteurs de l’économie à agir rationnellement.

Daniel Kahneman, né en Israël en 1934, obligé de porter l’étoile jaune à Paris durant l’Occupation, est professeur à l’université de Princeton. Il est le seul psychologue à avoir obtenu le prix Nobel d’économie (en 2002). Pour lui, Alan Greenspan a sous-estimé  » les facteurs psychologiques «  et  » les erreurs cognitives «  qui faussent les raisonnements des acteurs économiques et financiers, ce qui les pousse parfois à prendre des décisions catastrophiques, comme on a l’a vu pendant la crise des subprimes et comme on le constate encore.

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Les Femen seins nus à Notre-Dame : le déchaînement médiatique est écœurant

Par Nathalie Blu-Perou
Chroniqueuse société
— Entrer dans Notre-Dame de Paris seins nus, était-ce le happening de trop pour les Femen ? C’est ce que semble dire les nombreuses réactions offusquées qui ont suivi l’événement. Autrefois symbole de liberté, le groupe d’action d’origine ukrainienne n’est plus en odeur de sainteté. Une mise au pilori qui choque notre contributrice.

Vade retro, Satanas. Les Femen ne sont décidément plus en odeur de sainteté. Ce groupuscule féministe d’origine ukrainienne, connu pour ses actions basées sur la provocation et le plus souvent illégales aurait, semble-t-il, inventé à lui seul, le 8e péché capital.

Quel fait est à l’origine de ce drame ? Un happening « topless », organisé en la cathédrale Notre-Dame de Paris, et qui a provoqué cette avalanche de réactions outrées, au sein de la bien-pensance de droite comme de gauche.

Des causes trop diverses

De façon générale, j’éprouve une certaine méfiance vis à vis des groupes de féministes radicales et agressives qui, tirant trop la couverture médiatique à elles, prennent la parole des autres femmes en otage, et imposent ipso facto (et parfois manu militari) leur propre conception du féminisme.

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J’aime le rap : je vais redoubler et devenir délinquant

Par Pierre Mercklé
La musique adoucit les mœurs, dit-on. Mais est-ce vraiment le cas de toutes les musiques ? C’est ce qu’ont sans doute voulu déterminer des hercheurs de l’université d’Utrecht (Pays-Bas), dont les conclusions viennent d’être publiées dans la prestigieuse revue de médecine américaine Pediatrics. A partir d’une étude longitudinale sur un panel de 309 adolescents, ils « démontrent » que ceux qui, au début de l’adolescence, appréciaient les genres musicaux « bruyants » ou « rebelles » (rap, rock, punk, metal, électro…) auront une plus forte tendance à développer des comportements déviants au cours de l’adolescence, tandis que ce n’est pas le cas de ceux qui préféraient des genres musicaux conventionnels (R & B, variétés commerciales) ou « intellectuels » (classique, jazz).

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« Goodbye Morocco » : du rififi à Tanger

Nadir Moknèche signe un polar inattendu, peinture saisissante du Maroc avec ses trafics, ses immigrés, ses homosexuels.

En Algérie, comme en France, ses films ne sont ni convenus ni tout à fait convenables. Nadir Moknèche, cinéaste jaloux de sa liberté âprement acquise et plaidée au fil de ses trois premiers longs métrages – Le Harem de Mme Osmane, Viva Laldgérie, Délice Paloma –, c’est une évidence et cela ne se négocie pas. Depuis que l’Algérie a refusé son visa d’exploitation à Délice Paloma, pourtant réalisé à Alger en 2006 avec le soutien des autorités locales, il n’est toujours pas retourné dans le pays de son enfance. Il vit en France, va souvent au Maroc ainsi qu’en Italie, où le scénario de Goobye Morocco a pris forme alors qu’il était pensionnaire à la villa Médicis en 2010.

« Ce refus de visa a été dur, témoigne le cinéaste. J’ai eu le sentiment d’être amputé de ma source d’inspiration. Il a fallu que je coupe émotionnellement avec Alger. » Goodbye Morocco, tourné à Tanger et hanté de l’intérieur par le désir d’exil de ses personnages, s’en ressent.

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L’illettrisme des cadres, un phénomène méconnu et tabou

Grâce à des  » stratégies de contournement « , ces salariés parviennent à cacher leurs difficultés

Comme 2,5 millions de Français, des cadres sont en situation d’illettrisme dans l’entreprise. Le phénomène, impossible à quantifier, échappe à tous les dispositifs prévus en matière de lutte et de détection. Les responsabilités qu’ils occupent en font des illettrés à la marge de la marge.

Lorsqu’il pénètre dans la salle des marchés de sa banque, située sur l’esplanade de la Défense (Hauts-de-Seine), il entre dans son monde,  » celui des chiffres « . Costume et cravate noirs ajustés, Mickaël, 32 ans, cultive un look à la Jérôme Kerviel, son confrère trader. Bien qu’il occupe ce poste prestigieux, aussi rentable qu’impopulaire, ce grand brun est illettré. Et ce malgré des études à l’Inseec, une école de commerce parisienne, durant lesquelles il n’a  » quasiment jamais écrit « .

Le cas de cet as des équations mathématiques est bien connu des chercheurs spécialisés : il s’agit d’un  » illettrisme de retour « . A force de ne pas utiliser l’écriture, Mickaël en a perdu l’usage.  » Dans mon quotidien, ça me sert rarement, reconnaît-il.

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« Ladivine » de Marie NDiaye : la famille décomposée

–Le Prix Goncourt 2009 pour Trois Femmes puissantes revient avec un roman sur les relations mères-filles–

 

Elles sont trois femmes. Leurs vies opaques possèdent peu de points de contact. On ne sait pas si elles sont victimes ou bourreaux. Elles sont sans doute les deux puisqu’elles courent en avant sans avoir la force de ne pas regarder en arrière. La culpabilité et la ténacité forment leur terreau commun. Y poussent toujours des êtres de froideur et de pleurs. On les observe ainsi de l’extérieur. Ladivine Sylla s’ennuie dans un sombre rez-de-chaussée du quartier Sainte-Croix de Bordeaux après une existence de dur labeur. Clarisse Rivière coule des jours paisibles auprès d’un mari vendeur de voitures à Langon, en Gironde. Ladivine Berger habite Berlin, où elle enseigne la langue française et s’occupe de ses deux enfants. On les observe ainsi mais elles ne sont pas ainsi. Elles sont unies par les liens du sang sur trois générations.

Mère, fille, petite-fille. La romancière Marie NDiaye raconte leurs liens effilés comme des couteaux de cuisine. Les trois femmes s’y blessent en voulant s’y soustraire.

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«En France, les Africains du Nord et du Sahel se sont retrouvés entre eux»

 Hugues Lagrange, l’auteur du «Déni des cultures», publie un essai passionnant sur la vie des immigrés du Sahel en Ile-de-France, qui fait un singulier écho à la guerre du Mali. Entretien.

Au moment où sort votre nouveau livre – «En terre étrangère» consacré aux immigrés du Sahel qui vivent en Ile-de-France, la France est en guerre au Mali…

Hugues Lagrange : Cette guerre jette une lumière vive sur les divisions morales des sociétés du Sahel. Bien avant les indépendances, à la fin du XIXe siècle, des réformateurs musulmans avaient affirmé la nécessité d’adapter la loi familiale musulmane à la modernisation des sociétés. En 2009, au Mali, l’adoption d’un Code de la Famille égalitaire entre les sexes a suscité des affrontements. Aujourd’hui, les djihadistes prétendent instaurer la charia. Les enjeux moraux, notamment la place de la femme, escamotés au moment des indépendances, surgissent ainsi, et ces débats qui s’énoncent dans la violence de la guerre ne sont pas sans résonance dans l’immigration.

Cette immigration, vous la racontez dans un texte singulier. Parfois même poétique. Pourquoi avoir choisi ce ton si personnel?

Cela vient peut-être du sentiment d’un échec (auquel j’ai participé) des sciences sociales qui peinent à rendre compte du rapport à des êtres qui vous impliquent.

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Mauvaises filles. « Autour de ton cou », de Chimamanda Ngozi Adichie,

Méfiez-vous de l’eau qui dort – et des femmes dociles. Celles qu’on croise dans Autour de ton cou, recueil de nouvelles de Chimamanda Ngozi Adichie, sont aussi radicales qu’imprévisibles. Non pas que, tout à trac, provoquant chalands et caméras, elles se mettent torse nu dans la rue, à la façon des féministes du réseau Femen ; ou qu’elles se lancent, en pleine église, dans un rock endiablé à la Pussy Riot. Non : quand elles tournent le dos à la norme, les femmes de Ngozi Adichie le font sans cri, sans bruit. Elles quittent la scène en solitaire. Leur départ inattendu rompt net avec le passé, comme le fil d’un rasoir.

Elles sont les cousines, version classe moyenne, du petit peuple batailleur et désenchanté de Sefi Atta, dépeint dans Nouvelles du pays (Actes Sud, « Le Monde des livres » du 9 novembre 2012), et de l’adolescence meurtrie racontée par Chris Abani dans Le Corps rebelle d’Abigail Tansi (Albin Michel, 2010). Nouvelle génération, nouvelles manières de voir : du chaudron anglophone du Nigeria, une constellation d’écrivains de haut vol, la plupart installés aux Etats-Unis, est en train de naître.

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Et le chef s’imposa…

Alors que la question du charisme en politique s’invite de nouveau dans le débat public, plusieurs essais interrogent l’évidence de la soumission au leader et à l’Etat

Il n’est pas rare de voir s’afficher des déplorations sur la  » crise de l’autorité « . Un récent sondage a même fait un certain bruit en laissant entendre que 87 % des Français désireraient un chef énergique pour la France. Il est plus rare en revanche de lire sur ces sujets des livres aussi stimulants que les deux ouvrages dont il est question ici. L’un – Le Siècle des chefs. Une histoire transnationale du commandement et de l’autorité, de l’historien Yves Cohen – est publié chez Amsterdam, petite maison d’édition dont il faut saluer le courage de publier un ouvrage aussi volumineux. L’autre est la traduction en français d’un livre de James C. Scott, professeur à l’université de Yale, Zomia ou l’art de ne pas être gouverné, publié aux Etats-Unis en 2009 et dont il manque malheureusement dans la version française le sous-titre provocateur : Une histoire anarchiste des hautes terres d’Asie du Sud-Est.

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L’agonie d’un empire malade

Habile geste pour fuir la crise

–Par Olivier Bobineau,  Sociologue des religions–

Des commentateurs et certains ecclésiastiques considèrent que la démission de Benoît XVI est courageuse et moderne dans la mesure où le dirigeant romain reconnaît par cet acte qu’il n’a plus  » la force  » de gouverner l’Eglise, ce qui est rarissime dans l’histoire du catholicisme. En un mot, le capitaine fait preuve de responsabilité politique en quittant le navire. Notre thèse est opposée : cette démission montre l’agonie d’un vieil empire qui connaît de plein fouet une crise majeure du pouvoir. Il convient d’abord de tirer une leçon politique des trois démissions volontaires antérieures avant d’apprécier la crise contemporaine du pouvoir catholique, puis de proposer trois hypothèses quant à l’avenir de l’Eglise.

Première démission, historique s’il en est : celle du pape Pontien au IIIe siècle. En effet, Maximin le Thrace, lorsqu’il se fait acclamer empereur en mars 235, tourne le dos à la tolérance et fait des chefs chrétiens la cible de ses attaques. Arrêté, Pontien est déporté en Sardaigne. Ne pouvant plus gouverner son Eglise, il renonce à sa fonction le 28 septembre 235.

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La lettre de Daniel Mesguich à ses élèves

 Mes chers élèves,

Vous avez, tous ou presque, signé au bas d’une lettre, que quelques-uns avaient pris soin de rédiger pour vous.

Eh voici qu’à mon tour je vous fais une lettre.

Quoi ? Ce sera donc lettre contre lettre ?

Non.

Nos deux lettres, je le crains, ne seront pas, ne pourront pas être, symétriques. La mienne sera d’une autre teneur, et d’une autre visée, que la vôtre. D’un autre style, aussi (elle sera plus longue – encore –, je vous prie de m’en excuser).

Au fond, ma lettre « réagira » à la vôtre, mais ne lui « répondra » pas.

La première différence entre nos deux lettres sera que la mienne, elle, s’adresse à vous. A vous, non pas à notre ministère de tutelle, ni à quiconque d’autre. Je vais pourtant, moi aussi, envoyer cette lettre au ministère de la Culture. En copie. Mais – et c’est la deuxième différence – ce n’est pas dans l’intention que le ministère la lise, et dans je ne sais quel espoir qu’il l’utilise. Non. C’est, comment dire… pour archive. Pour l’Histoire, oserais-je dire, si je ne craignais pas d’exciter là les ricanements de la Malveillance.

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Conservatoire : la lettre des élèves contre Mesguich

Par Armelle Heliot


Le Figaro s’est procuré une copie du courrier envoyé par les étudiants du Conservatoire national supérieur d’art dramatique à la ministre de la Culture, contestant leur directeur Daniel Mesguich.
Comme Le Figaro s’en est fait l’écho il y a quarante-huit heures, rien ne va plus dans la première école d’art dramatique de France entre les trois promotions et leur directeur, Daniel Mesguich. La lettre que nous reproduisons ci-dessous a été approuvée et signée, à quelques très rares exceptions près (6 élèves sur 99), par l’ensemble des étudiants.
Le ministère, qui disait, il y a deux jours, n’avoir aucune connaissance de ce courrier, a admis hier être en possession de cette lettre. Ainsi annonce-t-il que les délégués seront reçus Rue de Valois. Voici cette lettre datée du 28 janvier 2013.
Madame la Ministre,
L’ensemble des élèves du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris tenait avant tout à remercier votre ministère d’avoir épargné au mieux notre école à l’heure où les institutions doivent composer avec les contraintes économiques imposées par la crise actuelle. Nous vous sommes profondément reconnaissants d’avoir par là même considéré que la formation de l’acteur, et des artistes en général, demeurait un des objectifs du gouvernement actuel.

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Tous contre le mariage pour tous ?

Par Serge Larcher, sénateur

A l’heure où s’est engagé à l’Assemblée Nationale le débat relatif au projet de loi visant à instituer le mariage pour tous, il m’a semblé utile de faire quelques mises au point. Il s’agit de rappeler et d’expliquer ce que sont mes convictions et ce que sera ma position quant à ce sujet.
J’entends que la quasi-totalité des élus des outre-mer seraient opposés à ce texte. S’il est évident que les plus farouches opposants ne manquent jamais de se faire entendre, j’ai le sentiment que la majorité est bien silencieuse. Nombreux sont ceux qui en réalité ne prennent pas ou ne défendent pas leurs positions.
J’entends que ce silence serait une façon de ne pas se mettre « en porte-à-faux » avec un électorat très majoritairement opposé au mariage homosexuel. J’ignore s’il faut donner foi à cette explication. Dans le même temps, j’ignore également si une étude sérieuse a été conduite quant à l’état de l’opinion sur ce sujet dans les outremer, et singulièrement en Martinique. Pour ma part, non seulement je voterai ce texte, mais je m’efforcerai également de le défendre toutes les fois où l’occasion m’en sera donnée.

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« Travail, Famille, Patrie » ?

Par Maurice Laouchez

Les débats en cours sur le mariage homosexuel et la procréation médicalement assistée interpellent sur les véritables valeurs de la République.
La Révolution française a imaginé la devise qui devait faire le tour du monde et, à tort ou à raison, a désigné la France comme LE pays des droits de l’Homme. Liberté, Egalité, Fraternité. Or, de nombreuses attitudes montrent que nous sommes davantage dans la défense du travail, de la famille et de la patrie que dans la mise en oeuvre concrète de la liberté, de l’égalité et de la fraternité.
La formule de « l’Etat Français » , Travail, Famille, Patrie, trouve son origine dans les pleins pouvoirs accordés au Maréchal Pétain le 10 juillet 1940 par des Parlementaires issus des élections de 1936.
En ce temps-là, la France était occupée par les troupes nazies. Il s’agissait d’obtenir d’une population vaincue et humiliée l’Obeissance à l’ennemi vainqueur et au gouvernement qui avait accepté de collaborer avec lui.
La devise « Travail, Famille, Patrie » correspondait à cette situation-là, dans ce lieu-là.
Travailler et obéir à l’employeur, s’occuper de sa famille et obéir au père de Famille, servir la Patrie en respectant les instructions venues de dirigeants asservis et de leurs maîtres étrangers : telles étaient les raisons profondes de la nouvelle devise nationale.

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Le mariage pour tous, une mesure de gauche

Par Olivier Ernest Jean-Marie

Après 10 jours de bataille parlementaire, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi sur le mariage pour tous. La position des députés et des maires martiniquais sur cette mesure sociétale interroge la classique division de l’échiquier politique entre droite et gauche.
Une majorité de maires de Martinique rejette l’idée du mariage homosexuel. 3 députés martiniquais sur 4 ont voté contre le texte défendu par Christiane Taubira.
Or, il est convenu que la Martinique est aujourd’hui une terre de gauche où François Hollande a recueilli plus de 68% des suffrages le 6 mai 2012.
Il est surprenant que des élus qui se qualifient d’« homme de gauche » ne soutiennent pas la mesure du mariage pour tous qui figurait pourtant dans le programme de François Hollande.
Ceux qui se bousculaient pour être à la table de François Hollande, ou aux premiers rangs du Grand Carbet le 15 janvier 2012 lors de l’escale martiniquaise du candidat socialiste n’ont pas gagné en crédibilité en se positionnant contre cette mesure majeure du quinquennat du président de la République.
Ni ceux qui, lors de la campagne des élections législatives de juin 2012, se présentaient sur les plateaux de télévision comme les plus grands supporters de François Hollande en brandissant à bout de bras son programme (Bruno Nestor Azerot) ou en affichant les photos démontrant leur proximité avec les leaders du parti socialiste français (Raymond Occolier).

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100.000 couples homosexuels en France selon l’Insee

43% des couples homosexuels sont pacsés. Difficile pour autant d’en conclure qu’ils vont se bousculer pour se dire «oui» devant le maire.

Après le vote par l’Assemblée du texte sur le mariage pour tous, l’Insee dévoile une enquête réalisée sur un échantillon de 360.000 personnes.

C’est un calcul qui n’avait jamais été réalisé de manière précise, qui restait inconnu alors même que le débat sur le mariage pour tous a déjà fait rage des mois durant. Environ 200.000 Français déclarent être en couple avec une personne de même sexe, soit 100.000 couples, et 0,6% du total des personnes qui vivent à deux, dévoile une enquête de l’Insee Première (Institut national des statistiques), parue jeudi, et réalisée sur un échantillon de 360.000 personnes.

«C’est un chiffre inédit, avec un degré de fiabilité jamais atteint car l’enquête a été réalisée sur un échantillon très important, commente Pascale Breuil, de l’Insee. Les chiffres précédents étaient en partie fondés sur des estimations et des déductions». Une étude de l’Ined avançait le chiffre de 150.000 couples en 1999. Un calcul fondé sur l’estimation des couples corésidents autour de 1% et un pourcentage analogue à celui des pays voisins.

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Quand Sergio se drappe dans la jupe de Taubira pour prendre position…

 

Par Francis Carole

Après un silence pesant durant les longues semaines qui ont précédé le débat sur le mariage pour tous, après un silence dense durant tout le débat parlementaire sur cette question, après avoir laissé Christiane Taubira batailler contre les opposants à cette loi, Serge Letchimy, courageux, sort enfin de son mutisme !

Il évoque, toujours avec le même courage, sa « mission parlementaire à propos de l’article 349 du Traité de Lisbonne » pour justifier sa défection.

Le prétexte est à la fois enfantin, facile et fallacieux, tant il reste évident que cette mission ne pouvait pas constituer un obstacle à une prise de décision moins tardive, sur une question aussi sensible. Surtout quand on est parlementaire !

Pas un mot donc de soutien à la garde des sceaux durant les débats, malgré des attaques brutales, souvent injustes, le tout dans un climat politique d’une rare hostilité !

La lettre ouverte de Letchimy à sa « chère Christiane » n’intervient qu’après que celle-ci, en raison de qualités qui lui sont propres et grâce à un effort de pédagogie remarqué, a contribué à dépassionner le débat et a suscité respect et admiration pour sa maîtrise des dossiers et la qualité de ses interventions.

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Mariage gay: l’envolée lyrique de Christiane Taubira après le vote du projet de loi

La garde des Sceaux Christiane Taubira a été ovationnée après l’adoption du projet de loi sur le mariage pour tous à l’Assemblée nationale.Le texte « ne supprimera pas le jeu amoureux, ni chez les homosexuels ni chez les hétérosexuels » a lancé la ministre de la Justice Christiane Taubira, après l’adoption du projet de loi sur le mariage pour tous à l’Assemblée.

« Merci à tous pour ces jours et ces nuits passés ensemble. » Complimentée, même par la droite, tout au long du débat sur le mariage pour tous, la ministre de la Justice Christiane Taubira a été ovationnée ce mardi après le vote de l’Assemblée sur le projet de loi. Il faut dire qu’elle n’a pas manqué d’humour. Ni de poésie.

« Il y a des choses que ce texte ne pourra pas accomplir. Il ne supprimera pas le jeu amoureux, ni chez les homosexuels ni chez les hétérosexuels », a-t-elle lancé. « Il restera toujours beaucoup beaucoup de femmes, pour vous regarder, messieurs, pour vous observer, pour essayer de percevoir derrière vos carapaces la tendresse qui parfois vous habite, pour essayer de percer les défauts qui se cachent parfois sous des dehors affables, et pour discerner dans l’entrelac de vos talents et vos faiblesses si vous êtes capables de tracer des chemins sur la mer, comme l’écrivait Antonio Machado » (poète espagnol, ndlr), a-t-elle dit.

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Le pyromane adolescent, recueil de James Noël.

Un livre qui se déploie en fraîcheur et en beauté. James Noël est ce pyromane qui revendique en toute saison le feu pour allumer les rires et pour effacer les désastres de la nuit. Sa poésie est magique, elle convoque ce côté primesautier et pur en nous, le meilleur peut-être. Les expériences de la vie et du langage sont ici dans la vision d’un adolescent qui refuse de sauter les barrières pour parvenir dans le monde des adultes. Le poète arrête le temps et navigue dans ces espaces d’encre et de lumière. La pyromanie est sa nouvelle marque de James Noël. Il
nous dit ceci :
« Vice viscéral, je revendique la pyromanie comme une poétique, un état second, pour traverser le froid, la mort, et autres pièges de notre temps. La pyromanie est en vérité la dernière planche de salut de la chaleur humaine. »
j’ai déboité mon fémur gauche
je l’ai mis dans un foyer
et puis un long feu s’est mis en marche
j’étais heureux comme une allumette
Les poètes sont-ils des pyromanes adolescents qui chantent l’espoir du monde ?

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Serge Letchimy : « OUI au mariage pour tous »

Madame la Ministre, chère Christiane,

Parlementaire en mission, à propos de l’article 349 du Traité de Lisbonne, il ne m’a pas été pas possible de participer en personne aux débats concernant le mariage pour tous. Les champs de bataille ne sont jamais consécutifs et, par ces temps de crise, il nous faut très souvent faire des choix qui permettent de démultiplier nos avancées sur de larges amplitudes et de manière simultanée.

Néanmoins, il me paraissait indispensable d’expliciter mon vote et cela pour deux raisons.

La première, c’est de vous rendre hommage. Hommage à votre courage, à votre hauteur de vue. La seconde, c’est de rappeler cette coïncidence qui me semble hautement symbolique : celle qui aura porté si brillamment le projet de loi concernant la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité, est aujourd’hui la même qui se retrouve à batailler, avec tout autant de force et d’intensité, pour une transformation de nos états de conscience.

Chère Christiane, j’ai le sentiment que c’est le même combat.

Nous avons en commun ce que Césaire appelait une pression historique. Nous qui avons vécu la négation de notre humanité durant les temps esclavagistes.

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