À monsieur Grand Timonier de la caste béké !
Vous César en votre trône siégeant sans faiblesse,
Je m’adresse à l’homme, au mortel, à votre conscience.
Vous puissant, qui êtes prêt à faire tuer et qui le pouvez
D’un seul doigt levé à l’adresse des préfets ou des malfrats,
Vous qui pouvez éliminer quand selon vous la nécessité fait loi,
Vous qui tuez déjà de mille façons nos peuples aux abois,
Vous qui vous regardez toujours comme fils de roi
Et qui nous considérez comme votre peuple de trait,
Ne croyez-vous pas que le temps est déjà venu
De laver votre conscience de cette fierté sanguine ?
Ne sentez-vous pas le poids des cadavres peser sur votre sommeil ?
Mais vous ne dormirez plus, ni vous, ni les vôtres !
Vous apprendrez à entendre les plaintes, les hurlements,
Les bruits d’agonies scellés dans vos fondations.
Vous dormirez satisfaits de vos œuvres d’affairiste séculaire
Mais vous entendrez plus vaste et entêtante
La rumeur des suppliciés sans repos escaladant vos colonnades.
Vous ne connaîtrez pas la paix des innocents, la paix des braves.