— Par Dominique Daeschler —
Ces « démons » ,que l’on connaît le plus souvent sous le nom des possédés, « kaléidoscopés » par Guy Cassiers, directeur artistique de la Toneelhuis d’Anvers, ne manquent pas, dans la solennité de la salle Richelieu de la Comédie Française, de solliciter le spectateur.
Ce récit choral qui joue de la dérive, adapté du roman de Dostoïevski par Erwin Mortier, nous plonge dans la Russie tsariste. Un vieil intellectuel (Stepane) et Varvara, son amie et soutien financier, sont confrontés à une jeune génération qui, d’une façon ou d’une autre va bousculer la société russe (opposition à Nicolaï 1er, terrorisme, athéisme, nationalisme religieux). Autour de leurs fils respectifs (Piotr le terroriste nihiliste et Nicolaï le séducteur manipulateur charismatique) , des individus caricaturaux : Dacha séduite et naïve, Maria mystique et folle, Liza riche et poète de salon, entourées d’une flopée d’hommes aux idées virevoltantes. Chacun combine, se fourvoie ou laisse faire : convictions politiques, foi reniée… tout se défait. Le monde de demain ne peut être construit dans la violence et l’absence des valeurs traditionnelles russes auxquelles tient tant Dostoïevski, peu sensible à l’apport des Lumières.