Art-thérapie : des patients en psychiatrie font leur carnaval à Rio

Un joyeux défilé qui réunit plusieurs centaines de personnes, patients, membres de leurs famille, personnel soignant et badauds.

Aux abords d’un hôpital psychiatrique de Rio de Janeiro, il est difficile de distinguer les patients des autres fêtards en pleine folie du carnaval.

Depuis 20 ans, l’Institut municipal Nise da Silveira, hôpital de référence au Brésil, ouvre ses portes pour le cortège Loucura suburbana (la folie des faubourgs), à Engenho de Dentro, quartier populaire du nord de Rio, un joyeux défilé qui réunit plusieurs centaines de personnes, entre patients, membres de leurs famille, personnel soignant et badauds.

« C’est ça le carnaval : tout le monde fait ressortir sa folie »

Costumes multicolores, paillettes à gogo, pas de danse de samba du haut d’échasses : un authentique « bloco », cortège musical comme il en existe des dizaines d’autres à Rio, mais avec en plus un vrai esprit d’inclusion et de mise en valeur de la diversité.

« Qui est fou et qui ne l’est pas dans notre société? C’est ça le carnaval : tout le monde fait ressortir sa folie », dit à l’AFP Adriana Carvalho Lopes, enseignante de 46 ans déguisée en diable, avec des cornes, un trident et une cape rouge.

« Les gens qui se disent normaux pensent que les patients n’ont pas de rêves, qu’ils vivent dans un monde à part, mais ils sont aussi très créatifs », renchérit son mari Bruno Coutinho, 42 ans.

Percussionistes patients

Adriana et Bruno dansent sur une musique rythmée par une quarantaine de percussionnistes, la plupart d’entre eux sont des patients de l’hôpital.

À la grosse caisse, Renata Alves, 23 ans. Victime d’abus sexuels à l’âge de six ans, elle a eu des problèmes de drogues et fait une tentative de suicide.

C’est ça le carnaval : tout le monde fait ressortir sa folie »Renata Alvesatiente

Elle fréquente depuis 2016 un Centre de soins psycho-social (CAPS), unité de santé mentale ouverte, qui accueille des patients qui vivent à l’extérieur et ne se rendent à l’hôpital que pour des consultations ou pour pratiquer toute sorte d’activités.

Tout au long de l’année, elle prend part à un atelier de musique, où elle apprend à jouer des percussions, mais aussi à écrire, composer et même dessiner. « J’aime bien ces activités culturelles. Quand j’avais des crises, j’écrivais des vers sur ce que je ressentais, je dessinais », dit-elle.

Art thérapie
L’art-thérapie pour soigner les maladies mentales est un héritage de la psychiatre Nise da Silveira, qui a donné son nom à l’hôpital, anciennement appelé Pedro II. Disciple de Jung, elle y a travaillé dans les années 40, se refusant à suivre les pratiques de l’époque comme la lobotomie ou les électrochocs. Au lieu de ça, ses patients étaient initiés aux arts plastiques.

Membres de Loucura Suburbana,  lors des répétitions pour le carnaval de rue \ »Loucura Suburbana\ » (folie de banlieue) à l\’hôpital psychiatrique municipal Nise da Silveira, à Rio de Janeiro, Brésil, le 14 janvier 2020.Membres de Loucura Suburbana, lors des répétitions pour le carnaval de rue « Loucura Suburbana » (folie de banlieue) à l’hôpital psychiatrique municipal Nise da Silveira, à Rio de Janeiro, Brésil, le 14 janvier 2020. (MAURO PIMENTEL / AFP)
« L’art permet de stimuler l’inconscient et aide dans le processus de guérison », explique la psychologue Ariadne Mendes, 69 ans, cofondatrice de Loucura suburbana. « Auparavant, les patients étaient isolés de leur famille, de la société. Ils étaient enfermés, cachés », poursuit-elle…

Lire la Suite & Plus => Francetvinfo.fr