—Par Dominique Daeschler —
La reprise d’Angels in America de l’américain Tony Kushner, réaffirme avec vigueur, la pertinence d’un questionnement sur une Amérique puritaine, obsédée par le mal sa punition divine. C’était hier avec l’explosion du sida et le haro sur les homosexuels C’est aujourd’hui avec l’avortement.
Le texte, s’il n’est plus un texte d’intervention fait toujours écho. Arnaud Desplechin, en cinéaste, découpe en plans, en séquences, s’amuse de jouer du décalage de la parole théâtrale, nous revoyant à nos références shakespeariennes, brechtiennes pour mêler poétique et politique en astucieux travellings. Devant l’Amérique ébahie, des homosexuels se découvrent, s’aiment, se quittent, se renient ou affirment la réalité d’une forme d’amour là même où le sida l’attaque. De Louis à Prior, De Belize à Roy Cohn et Joe, s’échangent des paroles secouées comme dans ces roues de la chance qui cherchent la combinaison gagnante.
File le temps de Reagan à Trump, de Tchernobyl à la fin de l’URSS. Les éléments d’une Amérique melting-pot se trouvent rassemblés par un dénominateur qui s’appelle homosexualité et un révélateur qui s’appelle sida qui sera sauvé, qui sera puni ? Pardon et culpabilité.
Sur fond de planisphère, toile de décor, des anges, représentant chacun un continent, tombent du ciel , aveux d’impuissance ou de rédemption.
Une distribution très homogène de la subtile Dominique Blanc au constant Michel Vuillermoz, enrichie par la présence de jeunes sociétaires : Jennifer Decker, Julien Frisson, Gael Kamilindi, Florence Viala, Jérémy Lopez, Clément Hervieux-Léger nous offre trois heures de pur bonheur.
Dominique Daeschler
Comédie française- salle Richelieu- jusqu’au 14 mai