Jusqu’au 16 décembre 2017. Tropiques-Atrium
— Par Christian Antourel —
Un évènement, que l’exposition « Alive en vie »d’Habdaphaï. Une exhibition à ciel ouvert, si l’on peut dire. Pourquoi faire simple, quand on peut faire compliqué ? Cette question rhétorique qui sous-entend juste qu’il existe des options plus faciles pour parvenir à notre but, serait-elle l’étendard de notre artiste qui n’est pas simple. Cette exposition, tout un programme, qu’Habdaphaï nous décline par le menu.
Cherche-t-il à se faire expulser du groupe homogène de ses semblables ? Plasticien
multiculturel, faut-il le dire, il mixe au gré de ses envies, littérature, mémoire, performance, philosophie, contes, maison du bagnard, et tous les ateliers dont il est le maitre, ouverts à tout un chacun. Atelier à la KAZ -Atelier empreinte, Atelier de création, Atelier livres sculptures. Et chantier artistique-Atelier performance à la KAZ. Tout cela sur l’ensemble de, la durée de l’exposition. Bien entendu aux murs se trouvent des œuvres de l’artiste. Il affirme : « J’essaie de faire une approche technique, esthétique et spirituelle de cette contenance qu’est la Martinique, forme de subsistance pour l’émancipation de mon entité concise de vie… » Rien d’incompréhensible à cela, il a une approche multiculturelle de l’art, par trop avant-gardiste disent certains qui n’ont jamais manqué vertueusement de s’indigner devant son style et sa démarche. D’autres, les plus nombreux, ont toujours fait silence sur le feeling et sur les œuvres d’Habdaphaï. On peut légitimement se poser la question est-ce les nouvelles toiles ou le « papier bible » utilisé pour ses écrits qui transfigure la bête en ange. Ses actuels thuriféraires qui semblent comblés au-delà de toutes espérances, détiennent évidemment la réponse. Et nous voyons que bien des fois lors de polémiques qui l’opposèrent à ses détracteurs que c’est par un pied de nez bien envoyé qu’il éludait le sujet. N’attendons pas d’Habdaphaï la démarche du créateur qui cherche dans un labyrinthe virtuel le fil d’Ariane susceptible de le conduire au pays des originalités sans cesse renouvelées.
Ses idées dont l’art aussi est fait.
Les transfigurations dont une certaine peinture aime à se parer au travers d’esthétismes capricieux, d’incalculables « mouvements » pis…de modes, sont chez lui rejetées avec mépris mais avec fermeté. Il ne faut pas lier cette rigueur au respect d’une éthique, mais davantage à celui des sensations qui dès son jeune âge, ont façonné son style et l’atmosphère de ses compositions. Ça ressemble à la trace mémorielle qu’aurait gardée un robot vielle école de toute sa culture humaine. Et puis il y a, au détour de cette exposition, puissantes, éparses, à capter au passage, ses idées dont l’art aussi est fait : toute une virologie, une dissémination virale qui le hante depuis ses premières œuvres et qui renvoie ici à la mosaïque de motifs dont est tissé le visible, à la beauté, bien sûr, qui se donne mais aussi se garde inaccessible. Déjà rompu aux grands-messes de l’art contemporain, il aspire à une connivence implicite, à une soumission acceptée. Son travail révèle le souvenir d’un autrefois permanent, mais autant un devenir haché d’une ponctuation forte. Retrouver la ferveur, l’émotion, la compassion, la révolte mais aussi la tendresse qui ont toujours animé son art, quand bien même des orages caraïbes avancent leurs menaces et les mers, leurs vagues démontées. C’était donc bien de ça qu’il s’agissait autour du vide, du décalage, du regard… D’amour et de sa déconstruction.
En pratique :
Une exposition personnelle de
Jean Habdaphaî
A Tropiques Atrium Galerie André Arsenec
Jusqu’au 16 Décembre 2017
Christian Antourel