Albert Moutoudou relance « l’hypothèse panafricaniste »

panafricain— Par Jean Chatain —

L’Hypothèse panafricaniste, d’Albert Moutoudou, Éditions L’Harmattan, 108 pages, 12,50 euros. Dans un ouvrage argumenté, l’auteur camerounais montre en quoi le durcissement des différences ethniques s’accompagne à peu près systématiquement d’une déstabilisation accentuée des sociétés.

L’ethnie, la nation, le continent… trois niveaux de concepts trop souvent utilisés de façon incantatoire par nombre de discours sur l’Afrique, glissant de l’un à l’autre chaque fois que la réflexion se heurte à plusieurs nœuds de contradictions que l’on s’efforcera non pas de résoudre mais de contourner en sautant d’un palier à l’autre, en jouant de l’un contre l’autre (en particulier l’ethnie contre la nation) au mépris de la plus élémentaire cohérence. Mais chaque fois avec un objectif politique identique : « De Moïse Tshombé dans l’ex-Congo belge aux vociférateurs de la Radio des Mille Collines au Rwanda, en passant par Buthelezi en Afrique du Sud, les apprentis sorciers ne peuvent qu’être réduits à deux options : ou bien la tentation hégémonique de leur ethnie (sur les autres ethnies) ou bien la tentation sécessionniste ; l’une et l’autre étant des impasses politiques. » De fait, le durcissement des différences ethniques s’accompagne d’une déstabilisation accentuée des sociétés. Et, bien sûr, de la vassalisation des économies nationales orchestrée par une bourgeoisie néocoloniale créée par l’ancienne administration métropolitaine durant la décennie ayant précédé les indépendances.

Cette bourgeoisie bureaucratique et militaire s’est bien gardée de toute politique à même de prévenir les conflits armés nés des antagonismes inhérents aux tripatouillages des anciennes puissances coloniales. « Il n’est pas dans l’intérêt de la bourgeoisie néocoloniale de faire l’unité nationale : aussi longtemps que les ethnies à l’intérieur des frontières seront entretenues dans la défiance des unes à l’égard des autres, elle restera à la direction des affaires. » De là, la nécessité et l’urgence de renouer avec la perspective panafricaine du Ghanéen Kwame Nkrumah et de concevoir « l’unité politique du continent (comme) l’accomplissement de la mission des États actuels » ainsi que, de façon indissociable, la voie d’une authentique « promotion des activités culturelles de l’ethnie »…

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