Actualité de la décolonisation

Intervention de Alain Liméry, Porte-Parole du CNCP, Lamentin – Vendredi 21 février 2025

Notre Président Jean ABAUL nous a rappelé la sauvagerie des rapports imposés par les pays impérialistes occidentaux aux pays qu’ils dominent. Dans ma contribution, je parlerai du contexte dans lequel se pose la problématique de la décolonisation chez nous.

Notre premier constat, c’est que nous vivons un grand paradoxe !

En effet, alors que notre pays s’enfonce dans les pires difficultés dans tous les domaines, alors que le caractère colonial de la situation ne fait aucun doute, alors que sur tous les continents les Peuples dominés se dressent contre le système oppressif et ses conséquences catastrophiques pour l’ensemble du monde, dans notre pays, la plupart des dirigeants politiques continuent à espérer y porter remède en pactisant avec le Pouvoir colonial et par le biais des institutions qu’il contrôle.

Même parmi ceux qui se revendiquent du patriotisme, certains continuent à privilégier des illusions électoralistes au détriment de l’organisation du Peuple et de la lutte concrète pour l’indépendance et la souveraineté.

Les prétextes donnés pour justifier leur démarche sont toujours que «le Peuple n’est pas prêt» ou pire que «le Peuple a peur de l’indépendance».

Selon nous, le fait que davantage de nos compatriotes ne s’engagent pas dans le combat pour la décolonisation, cela s’explique par la méfiance qu’ils manifestent à l’égard d’une classe politique qui n’a jamais pu porter réponse à leurs préoccupations, et qui évite soigneusement de porter les explications permettant de dénoncer le système et de déconstruire sa propagande. C’est cette classe politique là, elle-même, qui a peur d’accepter les sacrifices que demande la lutte de libération nationale. Tétanisée par cette peur, elle veut maintenir notre pays dans un statu quo qui ne dit pas son nom.

Mais le paradoxe dont nous parlons ne concerne pas que les dirigeants politiques.

Dans la société dite civile, beaucoup contestent les inégalités et les injustices dont ils reconnaissent l’État colonial responsable. Ils martèlent les slogans «Ici, nous sommes chez nous !», «Tous nos droits sont piétinés», etc. En même temps, ils imaginent que la solution aux problèmes ne pourrait venir que de ceux qui les causent !

L’exemple des dernières mobilisations contre la vie chère illustre parfaitement ce paradoxe.

La présentation de ces paradoxes pourrait nous laisser l’image que la Martinique est un paquebot à la dérive piloté par quelques matelots peureux. Heureusement il n’en est rien.

Pendant ces cinquante dernières années, en effet, une mutation profonde s’est manifestée sur les plans politiques et idéologiques.

Différentes organisations politiques ont mené un travail de propagande conséquent sur la question de l’indépendance, d’autres, culturelles, ont permis un essor fulgurant de la conscience identitaire, renforcé par la propagation des idées pan africanistes. Malgré tous les efforts du Pouvoir colonial visant à renforcer l’assimilationisme et à dépolitiser les nouvelles générations ; Une frange de la jeunesse s’est investie pour abattre les symboles de la domination coloniale (statues, etc) et promouvoir nos propres symboles (victoire de notre drapeau Rouge Vert Noir).

La grande mobilisation de 2009, où la lutte de l’ensemble de notre peuple pour obtenir Justice et Réparation pour le crime d’empoisonnement aux pesticides, sont deux marqueurs de la mutation que nous vivons.

Il fau ajouter à cela que le Pouvoir Colonial français qui, lui aussi, est conscient de cette évolution, a mis en œuvre une stratégie brutale pour tenter de sauver son hégémonie qui, comme vous le savez, est fortement ébranlée dans le monde. Aussi elle pratique chez nous :

– l’intensification du génocide par substitution,

– la destruction de l’économie endogène,

– le renforcement de la domination administrative et technologique,

– le quadrillage militaire.

C’est dire que nous sommes à un tournant décisif de notre histoire et que se confirme l’actualité de la décolonisation.

Notre Peuple ne pourra résoudre aucun de ses problèmes et notre pays ne pourra prétendre à aucun développement alternatif permettant un mieux-vivre, si nous n’empruntons pas résolument le chemin de la décolonisation.

Nous ne devons nous faire aucune illusion quant à la possibilité que le Pouvoir colonial se résigne à accepter de mettre fin à sa domination. Son comportement scélérat concernant Mayotte et la Kanaky devrait suffire à nous en convaincre. Aussi faut-il abandonner toute illusion concernant les lois programmes, les évolutions institutionnelles ou constitutionnelles et autres «autonomies totales». La pseudo démocratie de la soi-disant «République Française» n’a jamais empêché à sa barbarie coloniale de s’exercer.

Dans notre pays, comme dans l’ensemble du monde, c’est une lutte sans concession pour imposer une véritable décolonisation qui ouvrira la voie de l’émancipation et du mieux-vivre.

Pour vaincre la puissance coloniale, il est essentiel de mettre en œuvre, dans l’unité, une stratégie globale et pensée collectivement.

A cet égard, nous voulons insister sur quelques aspects.

C’est d’abord à la décolonisation des esprits qu’il faut nous atteler : il s’agit de lutter

– contre les aliénations relatives à la conception du développement économique et au leurre de la démocratie faussement représentative, au piège de la lutte par procuration, etc.

– contre les divisions superficielles propagées au sein de notre Peuple (Syndrome de Lynch)

Deuxièmement, il nous faut sortir des postures de dénonciation pour investir le champ de la construction. Nous devons continuer à apporter des réponses concrètes par des actions alternatives en n’hésitant pas à nous opposer au pouvoir colonial.

Troisièmement, Il est essentiel de renforcer notre cohésion nationale. Ceci nous appelle à respecter les choix stratégiques de chaque organisation sans jamais dénier à quiconque son droit à l’analyse et au partage de sa vision. La diversité des engagements reflète la diversité de la société et la complémentarité des initiatives peut être un atout dans le combat contre les colonialistes. Par exemple, si nous nous démarquons des revendications du RPPRAC que nous jugeons assimilationnistes, nous devons relever le fait que leur mouvement a considérablement contribué à faire connaître la réalité de la colonisation de notre pays par la France à l’échelle internationale.

Quatrièmement: Justement l’une des conditions indispensables à la victoire de notre lutte pour la décolonisation est son internationalisation.

Enfin, nous voulons insister sur l’importance de ne jamais sous-estimer l’ennemi. Faut-il rappeler toutes les atrocités qu’il a commises au cours de toute l’histoire de son empire colonial? Faut-il rappeler le chapelet de crimes commis dans notre pays par le pouvoir colonial, le suprémacisme raciste dont tous ses représentants font preuve?

A l’heure où a commencé le combat décisif, ne fermons pas les yeux sur les méthodes que le pouvoir colonial a toujours utilisées pour écraser le mouvement populaire: répression judiciaire et policière, infiltration de provocateurs dans les organisations et les manifestations, etc.

Méfions-nous de la capacité du Pouvoir colonial à dévoyer les luttes et à les détourner de leur objectif. C’est, par exemple, ce qu’il fait actuellement, en faisant semblant de découvrir les abus de la caste béké et en voulant se donner le bon rôle de justicier. Tout cela c’est de la mascarade! Les deux piliers de la domination coloniale que sont l’État Français et la caste béké resteront indéfectiblement liés et à aucun moment nous ne devons prendre le parti de l’un contre l’autre.

En conclusion, nous voulons réaffirmer que la seule option correspondant aux intérêts de notre peuple, c’est celle de la décolonisation. Nous devons exiger que soit respecté notre droit à l’autodétermination. Nous devons nous organiser et nous battre pour conquérir notre indépendance nationale et pour bâtir notre souveraineté.

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Intervention de Jean Abaul , Président du CNCP Lamentin le 21 Février 2025

Le contexte international

kanmarad konpatriot, tout antikolonialis, pèp matinitché, Lonnè épi respé ba nou tout.

Depuis que Donald TRUMP est redevenu Président des États Unis, il a annoncé son intention d’occuper le Groenland, de reprendre le contrôle du Canal de Panama et d’imposer au Canada d’être le 51 ème États des USA. Il a déclaré son projet de chasser tous les Palestiniens de Gaza pour construire des installations touristiques de luxe. Le multimilliardaire ELON MUSK qu’il a désigné pour détruire l’administration fédérale – un million de fonctionnaires doivent être virés – finance ouvertement les organisations fascistes dans d’autres pays pour qu’ils prennent le pouvoir.

Si nous parlons de TRUMP et MUNSK en introduction, c’est pour illustrer le contexte international dans lequel se pose la question de la décolonisation aujourd’hui.

Moun pa ka rantré an la wonn danmyé si yo pa konnnèt goumen !

Notre Pays est une colonie, notre Peuple est opprimé et discriminé. Aucun doute n’est possible à cet égard. Nous sommes fondés à exiger le respect de notre droit à l’autodétermination et l’inscription de notre Nation sur la liste de l’ONU des pays à décoloniser.

Dans la Résolution 1514 de l’organisation des Nations Unies sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux Peuples colonisés datée du 14 décembre 1960, il est clairement stipulé que «Tous les Peuples ont droit à la libre détermination». En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et poursuivent librement leur développement économique social et culturel.

Mais aujourd’hui, l’ONU est devenue le «chien de garde» des puissances impérialistes occidentales. Elle mène une politique de «deux poids deux mesures». Elle organise des agressions injustifiées, viole la souveraineté de certains pays et leur impose de sanctions illégitimes. Le droit International est systématiquement bafoué.

La Cour Pénale Internationale est à la solde des pays impérialistes occidentaux. Ces derniers n’hésitent pas à saboter les processus électoraux dans les pays qui s’opposent à leur hégémonie. Leurs dirigeants nagent dans la corruption comme nous le rappelle la pause d’un bracelet au pied d’un Président français délinquant. Plusieurs d’entre eux sont impliqués dans des trafics de drogue ou d’armes.

C’est un véritable gangstérisme mafieux que les gouvernements téléguidés par les multinationales et les spéculateurs ont imposé à l’échelle mondiale.

Qu’ils soient maffieux ou pas, tous les gouvernements des pays occidentaux appliquent une politique ultralibérale avec l’objectif de brader les compétences des États et des collectivités locales afin de livrer ce qu’ils appellent «le marché» à des institutions non-élues, aux multinationales, aux banques et aux spéculateurs. La fausse démocratie soi-disant représentative ne suffit plus aux milliardaires. Aujourd’hui, ils s’installent directement en tête des pouvoirs politiques.

Nous devons nous débarrasser une fois pour toutes des espwa malpapay dans lesquels certains veulent nous entraîner en nous faisant croire que nous pourrions changer les choses simplement en allant aux élections ou en persuadant les gouvernements d’être moins méchants.

Konpatryot, nous devons tous prendre conscience de la gravité de la situation pour définir notre propre trajectoire.

Notre pays, comme tout le reste du monde, est confronté à 5 énormes défis :

1 – la menace omniprésente des catastrophes liées au dérèglement climatique. (Citer exemples)

2 – l’imminence des crises économiques majeures

3 – la marche en cours vers un conflit militaire mondial

4 – le renforcement du fascisme dans l’ensemble des pays et la remise en cause systématique du droit international par les puissances impérialistes

5 – un dérèglement sociétal généralisé qui provoque le mal-être des populations .

C’est une véritable décolonisation que les Peuples doivent imposer pour mettre fin à la domination impérialiste et pour pouvoir affronter tous ces défis.

Il serait illusoire d’espérer faire bouger les lignes sans avoir systématisé le travail de dénonciation de la domination coloniale et la coordination de la lutte des Peuples au plan international. Seule la lutte des Peuples pourra mettre fin à la domination, au pillage et à la barbarie des impérialistes.

Et s’ils se préparent à la guerre mondiale, c’est parce qu’ils réalisent que leur hégémonie est sérieusement remise en cause. Des pays de plus en plus nombreux exigent la refonte de l’ONU. Leur suprématie est mise à mal par des puissances économiques concurrentes et par la consolidation d’institutions internationales rivales telles que les BRICS. La création de l’AES en Afrique montre qu’un pas décisif a été réalisé dans la marche pour une véritable décolonisation.

A terme, la domination des impérialistes occidentaux sera éradiquée et c’est la convergence entre les mouvements populaires et les forces anti impérialistes à l’échelle mondiale, sur des bases idéologiques et politiques claires qui rendra cela possible.

Mais, cela ne s’improvise pas. Il faut le concevoir dans un cadre organisé.

En ce qui nous concerne au CNCP, depuis sa création, notre organisation s’efforce de contribuer à cette coordination indispensable en participant à des réseaux internationaux tels que l’ Assemblée des Peuples de la Caraïbe (APC), le Forum de Sao Paulo, ALBA Movimientos et l’Assemblée Internationale des Peuples. Nous collaborons avec de nombreuses organisations de par le monde et essayons de soutenir de façon conséquente tous les Peuples en lutte. Mais, Aucune organisation à elle seule, ne suffirait à s’opposer à la politique coloniale. Comme nous le répétons souvent, toutes les initiatives allant dans la même direction sont nécessaires, complémentaires et nous font avancer vers la victoire.

Ce qui nous amène à saluer :

– toutes les mobilisations de soutien aux autres Peuples en lutte,

– toutes les actions coordonnées au niveau international pour lutter contre les violences policières, le droit des femmes, des immigrés et des peuples autochtones, pour boycotter les intérêts économiques des prédateurs,

– le travail réalisé par chacun pour populariser notre lutte,

– les passerelles jetées pour favoriser les échanges culturels etc.

En ce 21 février, Journée Internationale de la Décolonisation, nous tenons à exprimer notre soutien total à tous les Peuples dominés en lutte pour leur émancipation. Nous pensons tout particulièrement :

– au Peuple frère AYSIEN jeté dans la tourmente par les impérialistes occidentaux

– aux Peuples de Kanaky et des Comores dont le droit à l’autodétermination est scandaleusement piétiné par l’État colonial Français.

– au Peuple Palestinien qui résiste héroïquement au génocide entrepris par l’armée d’occupation Israélienne encouragé par les impérialistes occidentaux.

Compatriotes, anticolonialistes, Peuple Martiniquais,

Dans le contexte international que nous avons présenté nous comprenons qu’on ne peut plus accepter les «zanzola»j et les «jé makak».

Unissons nous et organisons nous pour chasser les colonialistes français de notre pays et porter notre contribution au progrès de l’Humanité.

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— Intervention de Robert Saé, Lamentin le vendredi 21 février 2025 —

Nous pouvons retenir des deux contributions précédentes qu’il n’existe pas un seul recoin de la planète où l’on puisse prétendre résoudre un quelconque problème sans prendre en compte les interrelations entre les différents facteurs environnementaux, économiques, politiques ou autres qui prévalent au niveau international. Nous vivons dans un MONDE GLOBALISÉ. Nous sommes à un moment de l’histoire de l’humanité où le système capitaliste et impérialistes occidental qui avait, jusqu’alors, imposé sa dictature au reste du monde voit son hégémonie structurellement remise en cause par l’essor des puissances rivales et par les assauts répétés des luttes populaires. C’est ce qui a amené tous les gouvernements occidentaux représentant les multinationales et les spéculateurs à se débarrasser du masque de leur fausse démocratie, à saccager le droit international, à bafouer la souveraineté des États qui leur sont opposés, et à planifier un conflit militaire généralisé contre ceux-ci.

C’est pour cela que nous considérons, non seulement, que la question de la décolonisation est d’une actualité brûlante, mais plus encore, que l’impulsion d’une véritable décolonisation de tous les pays soumis à la domination impérialiste est une exigence incontournable afin que soit éradiqué ce système fossoyeur de la planète et de l’humanité.

C’est donc dans le contexte d’une guerre décisive entre deux camps et entre deux mondes que s’inscrit la lutte de décolonisation de notre Peuple.

– Aussi, le premier élément sur lequel nous allons insister, c’est la nécessité d’intégrer notre lutte de décolonisation dans une dynamique internationaliste. La collusion entre les forces impérialistes est sans faille. Partout dans le monde, elles mènent une offensive forcenée et coordonnée afin de réprimer les mouvements populaires et d’alimenter la subversion dans les pays anti-impérialistes. Leur stratégie ne pourra être mise en échec que par la coordination des luttes populaires au niveau international.

– En deuxième lieu, nous noterons que le droit à l’autodétermination de notre peuple devrait normalement être garanti par l’ONU, cependant, suite aux manœuvres de l’État Français, la Martinique n’est pas inscrite sur la liste des pays à décoloniser. Rappelons, d’autre part, qu’aujourd’hui, les principales institutions internationales sont sous la coupe des impérialistes occidentaux. Aussi, devons-nous faire preuve d’une extrême lucidité : Nous ne pourrons imposer le respect de nos droits qu’à condition d’être soutenus par des pays anti-impérialistes et opposés au camp occidental.

Ce soutien là, nous ne pourrons réellement l’obtenir que dans la seule mesure où ceux qui le sollicitent soient effectivement représentatifs d’un Peuple Martiniquais organisé et rassemblé autour un projet alternatif assumé.

Car nous parlons bien d’autodétermination du Peuple, non pas de porter à la tête d’un État devenu indépendant quiconque s’octroierait arbitrairement le droit de le diriger.

L’autodétermination est une voie qu’emprunte un peuple pour être acteur de son destin, pour porter les réponses qui sont siennes quant à l’organisation de sa vie. Cela veut dire que pour être en capacité d’exercer sa pleine souveraineté, tout Peuple doit être structuré à la base.

C’est pourquoi nous affirmons qu’aucune décolonisation n’est possible si la lutte contre le pouvoir colonial n’est pas corrélée à la construction de la société alternative.

En clair, nous sommes tenus de jeter, dès aujourd’hui, les bases d’une démocratie directe et d’une économie alternative.

– Pour qu’un peuple puisse contrôler le pouvoir et ses institutions, il est indispensable qu’il soit en capacité d’intervenir réellement dans les prises de décision concernant sa vie. Les réponses portées par de prétendus «sachant», les luttes par procuration menées par des leaders autoproclamés ou la confiance accordée à des gourous aboutissent inéluctablement à des déconvenues. Une véritable décolonisation demande de prendre le contre pied de l’idéologie individualiste et élitiste cultivée par la bourgeoisie occidentale et de faire confiance à l’intelligence populaire et collective .

– Nous avons déjà eu l’occasion d’écrire que, je cite, «Dans les faits, et cela de tous temps, que ce soit sur les plans du logement, de l’économie, de la gestion des contradictions au sein de la société, les réponses correspondant aux besoins de l’écrasante majorité des populations ont toujours été portées par les peuples eux-mêmes».

Établir les bases de la décolonisation implique donc la nécessité de s’appuyer sur les multiples initiatives alternatives développées par nos compatriotes en matière de production, de distribution, de services, d’éducation et de culture, mais également de renforcer les réseaux existant déjà, pour consolider le tissu économique et social endogène. C’est la raison pour laquelle nos militants soutiennent l’«Administration Alternative Populaire» (AAP) qui s’est donnée pour objectif de favoriser la synergie entre toutes les initiatives alternatives.

Parlant d’économie, j’en profite pour attirer l’attention sur le caractère dérisoire de la critique rabâchée par ceux qu’ Alain LIMERY a qualifié de «matelots peureux» et qui, pour s’accrocher au statu quo, se cachent derrière le prétexte que «les indépendantistes ne seraient pas crédibles puisqu’ils ne présentent pas de programme pour l’État futur !». Cela pourrait prêter à rire quand on pense au nombre de programmes affichés et mis en œuvre dans le cadre de la départementalisation, sous les applaudissements de nos détracteurs, et qui n’ont cessé d’enfoncer notre pays dans la déchéance. Les accros à la morphine du statu quo et à la dépendance colonialiste ne veulent pas comprendre qu’il appartiendra à notre Peuple de décider souverainement, au moment opportun et en fonction des nouvelles conjonctures, des mesures qui lui seront assurément plus bénéfiques.

Il est certain que nous aurons d’énormes défis à affronter car, indépendance ou pas, les menaces qui pèsent sur notre monde seront toujours présentes ! Catastrophes liées au dérèglement climatique, crise économique majeure, guerre mondiale, agressivité du fascisme occidental, dérèglement sociétal, tout cela ne disparaîtra pas magiquement du fait de la libération Nationale. Ce qui, par contre, est indéniable, c’est que :

– si nous sommes maîtres de notre destin, libres de prendre les lois et décisions que nous jugeons salutaires pour notre peuple et notre pays,- si nous brisons les chaînes de cette aliénation qui conduit à croire qu’il serait possible de mettre fin à nos tourments en faisant confiance aux prédateurs psychopathes qui dirigent le système et imposent au monde un ultralibéralisme barbare,

– si notre pays libéré est doté d’un pouvoir qui fonde sa légitimité sur l’organisation de notre Peuple à la base et sur la richesse de la pensée collective,

alors, nous serons mieux armés pour surmonter toutes les épreuves.

Par contre, rester paralysé par le venin du statu quo néocolonial revient à accepter de baisser la tête sur le billot pour qu’elle soit coupée par le bourreau. La seule option responsable est donc que nous nous battions pour imposer à l’État Français la décolonisation de notre pays! Car, comme le dit le proverbe africain : «Qui veut du miel doit avoir le courage d’affronter les abeilles.»

On entend de plus en plus de gens reprendre la célèbre citation de Frantz FANON qui dit que «Chaque génération doit dans une relative opacité découvrir sa mission, la remplir ou la trahir.». Eh bien, nous souhaitons préciser que, selon nous, dans le contexte délétère actuel, la mission suprême qui est confiée à notre génération nous appelle

1) à mettre en œuvre une stratégie globale visant à éveiller les consciences, consolider des contre-pouvoirs et internationaliser notre lutte.

2) à rendre notre Peuple acteur du processus de décolonisation en contribuant à son organisation, à son unité et à sa mobilisation éclairée.

3) à porter concrètement notre contribution individuelle et collective à la lutte contre le pouvoir colonial et les profiteurs de la caste suprémaciste béké.

Au CNCP, nous entendons remplir pleinement cette mission et tant pis pour les «matelots peureux» s’ils préfèrent la trahir.

Nous conclurons notre contribution en affirmant que les conditions sont réunies pour que notre pays emprunte la voie d’une véritable décolonisation.

Parce qu’en effet, la décrépitude de la France, chassée d’Afrique et dont l’économie est détruite du fait de sa soumission masochiste aux USA, est inéluctable, que, d’autre part, la conjoncture internationale est de plus en plus favorable aux forces anti-impérialistes. Et, qu’enfin, l’essor spectaculaire de la conscience identitaire au sein de notre Peuple annonce l’ère de mobilisations conséquentes.

Notre Peuple qui, aux moments les plus tragiques de son histoire, a toujours su faire preuve de courage et de créativité pour surmonter les pires difficultés, est tout à fait capable de prendre son destin en mains.

Marchons donc sur la trace de nos ancêtres. Mobilisons-nous pour imposer la décolonisation de notre pays. Ainsi, notre Peuple pourra emprunter la voie de l’émancipation.

Je vous remercie de votre attention.