À propos de la déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti relative au respect du droit à l’éducation (13 octobre 2023)
— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —
« L’UNESCO appelle au respect du droit à l’éducation en Haïti et au respect de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles signée par l’État haïtien »
« Déclaration de l’UNESCO / « Pétion-Ville, Haïti, vendredi 13 octobre 2023. L’UNESCO [l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture] appelle au respect du droit à l’éducation des enfants, des jeunes et des adultes en Haïti. Elle renouvelle son engagement à appuyer l’État haïtien et ses partenaires dans la transformation positive de l’éducation formelle et non formelle. Elle demande urgemment de renforcer le plaidoyer de l’urgence éducative. »
« À l’occasion de la rentrée scolaire 2023-2024, qui a eu lieu dans un contexte de crise multidimensionnelle, l’UNESCO invite tous les acteurs à contribuer à la protection des élèves, des universitaires, des parents, du personnel enseignant et des archives des établissements scolaires et universitaires, dans le respect de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles signée [en mai 2015] par plus de 111 pays, dont Haïti, qui « s’engagent à prendre des mesures, notamment à fournir une assistance aux victimes d’attaques, à enquêter sur les accusations de violation du droit national et international et à poursuivre en justice s’il y a lieu les auteurs de telles violations, et à chercher à poursuivre l’enseignement dans des conditions de sécurité pendant les conflits armés et à appuyer les efforts déployés à cette fin ».
Le site Web du Bureau de l’UNESCO en Haïti présente comme suit la mission de cette institution en Haïti :
« La République d’Haïti est un État membre fondateur de l’UNESCO, depuis 1946. L’UNESCO œuvre dans le pays depuis 1947 à travers le projet pilote d’éducation de base, trois ans avant la création de la Commission nationale haïtienne de coopération avec l’UNESCO (CNHCU), instituée par décret en novembre 1950. [Ouvert en] 1994, le Bureau de l’UNESCO (…) à Port-au-Prince collabore depuis avec les autorités haïtiennes dans tous les domaines d’intervention de l’Organisation. L’UNESCO à Port-au-Prince relaie le mandat de l’Organisation pour l’amélioration de la qualité de l’éducation, la promotion et la sauvegarde du patrimoine culturel, le développement d’une culture scientifique et technologique ainsi que la liberté d’expression individuelle et des médias. Le Bureau a pour mission d’accompagner le gouvernement et le peuple haïtiens dans la réalisation d’un développement équitable et durable dans le respect des droits de l’homme. »
La Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti datée du 13 octobre 2023 a été émise dans le contexte de la plus grande crise politique et sécuritaire que connaît le pays depuis l’adoption de la Constitution de 1987. Ce contexte se caractérise principalement (1) par la criminalisation/gangstérisation du pouvoir politique et de la gouvernance du pays mise en œuvre, avec l’appui public du Core Group, par le cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste ; (2) par le quasi-démantèlement des institutions de l’État que le PHTK n’a de cesse de rançonner et de dépecer au fil des assauts des ayant-droit de la « rente financière d’État » ; (3) par la concentration totalitaire des pouvoirs du Parlement haïtien, de la Primature et de la Présidence par Ariel Henry, le supplétif et homme de main du PHTK inconstitutionnellement nommé « Premier ministre » par le Core Group ; (4) par la mainmise violente des bandes armées sur plusieurs quartiers de la capitale et nombre de territoires de la province ; et (5) l’augmentation constante du nombre de victimes de l’insécurité résultant de l’action des bandes armées plus ou moins liées au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste et au secteur mafieux de la grande bourgeoisie compradore. Ainsi, le Cardh (Centre d’analyse et de recherche en droits humains) a récemment confirmé que « 1 564 personnes ont été tuées et 901 autres enlevées, du 1er janvier au 30 septembre 2023, dans le contexte du climat de terreur qui sévit en Haïti, notamment dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince (…) et quelque 200 mille cas de personnes déplacées (dont la moitié sont des enfants), à cause des violences, ont été signalés, selon les Nations unies ». (AlterPresse, 12 octobre 2023).
Il est utile de préciser que la Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti datée du 13 octobre 2023 est rigoureusement conforme à son mandat (voir plus haut) et elle se situe dans le droit fil du soutien d’une institution internationale à l’État haïtien au chapitre du droit à l’éducation tel que consigné à l’article 32 de la Constitution de 1987 :
« Section F : De l’éducation et de l’enseignement
Article 32
L’État garantit le droit à l’éducation. Il veille à la formation physique, intellectuelle, morale, professionnelle, sociale et civique de la population.
Article 32.1
L’éducation est une charge de l’État et des collectivités territoriales. Ils doivent mettre l’école gratuitement à la portée de tous, veiller au niveau de formation des enseignements des secteurs public et privé.
Article 32.2
La première charge de l’État et des collectivités territoriales est la scolarisation massive, seule capable de permettre le développement du pays. L’État encourage et facilite l’initiative privée en ce domaine.
Article 32.3
L’enseignement primaire est obligatoire sous peine de sanctions à déterminer par la loi. Les fournitures classiques et le matériel didactique seront mis gratuitement par l’État à la disposition des élèves au niveau de l’enseignement primaire.
Article 32.4
L’enseignement agricole, professionnel, coopératif et technique est une responsabilité primordiale de l’État et des communes.
Article 32.5
La formation pré-scolaire et maternelle ainsi que l’enseignement non formel sont encouragés.
Article 32.6
L’accès aux études supérieures est ouvert en pleine égalité à tous, uniquement en fonction du mérite.
Article 32.7
L’État doit veiller à ce que chaque collectivité territoriale, section communale, commune, département soit doté d’établissements d’enseignement indispensables, adaptés aux besoins de son développement, sans toutefois porter préjudice à la priorité de l’enseignement agricole, professionnel, coopératif et technique qui doit être largement diffusé. »
Les remontées de terrain qui nous parviennent depuis la parution de la Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti le 13 octobre 2023 confirment toutes l’adhésion des différents intervenants du secteur de l’éducation, notamment les enseignants et leurs associations, à la vision et aux principes contenus dans ce document.
La Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti datée du 13 octobre 2023 a également fait l’objet d’une note d’appui critique, consignée par courriel daté du 14 octobre 2023, d’un analyste connu pour la pertinence de ses interventions publiques, Erno Renoncourt, « consultant en technologies de l’intelligence et prospective éthique pour la décision ». Il réagit en ces termes à la Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti :
« (…) si c’est logique de plaider pour le respect de l’effectivité de l’année scolaire, toutefois, l’UNESCO doit savoir que cette effectivité mesurée par le nombre de jours de classe n’a rien à voir avec l’effectivité d’une éducation de qualité. Et de fait, on peut se demander à quoi sert l’aide que l’UNESCO apporte au système éducatif haïtien, si tant est que cette aide reste significative, quand ce système n’a produit sur ces 35 dernières années (pour faire court) que des ressources diplômées ayant parachevé leur cycle d’études, mais privées de valeurs dignes et humaines pour assurer la reliance avec leur environnement. Au-delà de toutes les pseudos évaluations qui peuvent prouver que l’aide internationale au système éducatif haïtien a une importance, le meilleur indicateur pour évaluer la valeur de ce système éducatif est dans la force des liens des Haïtiens éduqués avec leur pays, leur société, leurs institutions. Que tous les artifices d’un pays se soient écroulés en 12 ans de règne d’un pouvoir assumant le banditisme légal jusqu’à le magnifier en gangstérisme d’État suffit pour montrer l’insignifiance du système éducatif et des renforts qui l’ont assisté. (…) J’espère que l’UNESCO fera sous peu un plaidoyer pour l’effectivité d’un système éducatif de qualité en Haïti, et au besoin, je lui fournirai gratuitement mon aide pour une modélisation contextuelle d’un tel écosystème. »
Par-delà l’adhésion des enseignants haïtiens à la Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti datée du 13 octobre 2023, la note critique d’Erno Renoncourt nous remet fort opportunément en mémoire qu’il est nécessaire et indispensable de soumettre au débat public le modèle de coopération instituée entre les institutions internationales et Haïti depuis de longues années dans le domaine de l’éducation ainsi que les résultats de cette coopération en termes qualitatifs. Cela est d’autant plus nécessaire qu’il est amplement attesté que le système éducatif national souffre de lourdes carences sur différents registres (mal-gouvernance, errements quant aux missions institutionnelles, faible qualification du personnel enseignant, absence d’une politique linguistique éducative, etc.).
La nécessité de soumettre au débat public le modèle de coopération instituée entre les institutions internationales et Haïti depuis de longues années dans le domaine de l’éducation ainsi que les résultats de cette coopération en termes qualitatifs n’ont pas jusqu’ici fait l’objet d’une attention documentée des créolistes fondamentalistes et des Ayatollahs du créole engagés dans une compulsive « fatwa » contre la langue française en Haïti. Cette compulsive et récurrente « fatwa » est portée par quelques « fanatiques » qui plaident –à contre-courant de l’article 5 de la Constitution de 1987 consignant la co-officialité des deux langues de notre patrimoine linguistique historique, le créole et le français–, pour l’établissement de « yon sèl lang ofosyèl », le créole. Pareillement, cette compulsive et récurrente « fatwa » est aussi portée –à contre-courant de l’article 5 de la Constitution de 1987–, par des Ayatollahs du créole au motif fantasmé que le français est en Haïti une « langue coloniale », un « virus mental », la langue de la « gwojemoni neyokolonyal » responsable de tous les maux de l’École haïtienne. Illustration : l’article écrit par Tara García Mathewson, « How Discrimination Nearly Stalled a Dual-Language Program in Boston » (The Atlantic.com, 7 avril 2017), dans lequel le linguiste Michel DeGraff, cité par l’auteure, assène que « We became free in 1804 but through the french language we did remain colonized ». (« Nous sommes devenus libres en 1804 mais à travers la langue française, nous sommes demeurés colonisés. ») [Ma traduction] Les 11 millions d’Haïtiens, majoritairement créolophones, seraient donc aujourd’hui des « colonisés »… à travers la langue française, ce présumé statut « colonial » étant intrinsèquement produit par la langue française du seul fait de sa présence en Haïti. Pire : ce présumé statut « colonial » n’aurait rien à voir avec la configuration des rapports socio-économiques du pays, avec le mode d’exercice kleptocratique du pouvoir d’État, avec l’inféodation de l’économie haïtienne à celle du « Loup impérial » américain depuis 1915. Le démagogique amalgame « langue française + colonisation » renvoie à une vision rachitique, volontairement partiale et partielle, qui fait l’impasse sur les mécanismes de la domination économique et politique exercée sur Haïti principalement par les États-Unis (sur les mécanismes de la domination impériale des États-Unis sur Haïti, voir l’article fort éclairant de Gary Olius, « L’ordre néocolonialiste et impérialiste dans le chaos d’Haïti », AlterPresse, 5 janvier 2021 ; voir aussi l’article de Frédéric Thomas, enseignant-chercheur au CETRI, Université de Louvain, « Haïti : la crise au prisme d’un autre regard », La Revue nouvelle 2021/4, n° 4 ; sur la politique américaine en Haïti, on écoutera avec profit l’intervention (non datée) du linguiste Noam Chmosky, professeur émérite au Département de linguistique du MIT, « US role in Haiti destruction », consignée sur le site « Haiti Now ». À lire également, sur le site du « Haitian Support Group », l’entrevue de Noam Chmosky en date du 15 décembre 2012, « Interview : Noam Chomsky on Latin America »).
En réaction à la Déclaration du Bureau de l’UNESCO en Haïti datée du 13 octobre 2023, Michel DeGraff, le linguiste responsable du MIT Haiti Initiative, a diffusé par courriel, le 14 octobre 2023, les remarques suivantes : « (…) kòlèg Tondreau, ki mesaj w ap lanse lè UNESCO Ayiti kontinye ap kominike nan yon grenn lang (franse) alòs ke peyi a gen 2 lang ofisyèl (kreyòl ak franse) ak yon sèl lang nasyonal [sic] (kreyòl) dapre Konstitisyon peyi a. Tanpri èske w ka esplike nou ki jan lidèchip UNESCO Ayiti a rive panse yo ka mande respè dwa pou edikasyon ann Ayiti pandan UNESCO Ayiti ap derespekte dwa pou lang matènèl — ki se yon zouti ki endispansab pou ediksayon ? ».
Michel DeGraff n’en est pas à sa première interpellation et/ou mise en cause frauduleuse du Bureau de l’UNESCO en Haïti. Il a déjà accusé l’UNESCO de s’adonner à « des pratiques anti-créole en Haïti » dans un courriel daté du 9 février 2023 dans lequel il cible des initiatives de l’UNESCO « k ap plede ankouraje pratik anti-kreyòl mi wo mi ba sa yo ». Ce courriel du 9 février 2023 exposait ce qui suit : « Lè m ap li mesaj manch long sa yo w ap ekri an FRANSE sèlman sou tematik « éducation MULTILINGUE basée sur la langue MATERNELLE » nan yon peyi ki gen 2 lang ofisyèl (FRANSE ak KREYÒL) e yon SÈL lang nasyonal [sic] (KREYÒL), sa fè m sonje pawòl ki di : « Mwen pa fouti kwè sa w ap di lè m ap gade sa w ap fè ». Ki jan nou ka kreye yon « KLIMA FAVORAB » — pou sosyete a valorize KREYÒL kòm lang ansèyman — si UNESCO Haiti ap plede simaye mesaj li yo an FRANSE sèlman ? Se nòt ki esplike webinè sa yo ki te pale sou bezwen pou KLIMA FAVORAB sa a. Enben, se kòm si n ap plede lave men epi siye atè — ki fè n ap kontinye make pa an plas depi 1953 lè UNESCO te pibliye dokiman ki te dokimante enpòtans LANG MANMAN nan edikasyon epi jounen jodi a (an 2023 !) nou kontinye ap fè webinè sou … enpòtans lang manman nan edikasyon miltileng epi se an FRANSE n ap anonse webinè sa yo (sòf fwa pase lè, pou 1e fwa, UNESCO Ayiti te ekri yon afich an kreyòl pou webinè sou Akademi Kreyòl Ayisyen an). M ap rekòmande pou lidèchip UNESCO analize orijin ak fonksyonnman chapant nan enstitisyon UNESCO sa a k ap plede ankouraje pratik anti-kreyòl mi wo mi ba sa yo k ap kontredi pwòp done ak rezilta nan rechèch syantifik UNESCO. »
Dans un gazouillis (tweet) daté du 29 septembre 2020, Michel DeGraff consignait ceci : « Why is @UNESCO*BLOCKING* universal access to information even as it “celebrates” #AccessToInfoDay? Haiti is 100% kreyòl-speaking @UNESCO_Haiti‘s use of French blocks access to most Haitians—who speak kreyòl only ». De surcroît, dans un article qu’il a fait paraître le 14 octobre 2022 dans le New York Times —“As a Child in Haiti, I Was Taught to Despise My Language and Myself ”–, Michel DeGraff, qui n’est pas de langue maternelle créole, assène que « Even UNESCO, which declares its commitment to local cultures and languages, favors French on its website and social media in Haiti. » [« Même l’UNESCO, qui se déclare attachée aux cultures et aux langues locales, privilégie le français sur son site Web et ses médias sociaux en Haïti ». [Traduction : RBO]
Il est attesté que Michel DeGraff, promoteur assidu d’une aventureuse et compulsive « fatwa » contre tout ce qui a trait à la langue française en Haïti, s’en est pris publiquement à de jeunes professionnels de l’Agence universitaire de la Francophonie en Haïti, aux Éditions Legs et littérature, au peintre Philippe Dodard ancien directeur de l’ENARTS, à la rédaction du journal Le National, au linguiste Rochambeau Lainy ainsi qu’aux « hérétiques » du ministère de l’Éducation nationale qui ne publie que des documents rédigés en français…
Sur le registre d’une aventureuse et compulsive « fatwa » contre tout ce qui a trait à la langue française en Haïti, et comme nous l’avons étayé dans notre article « L’unilatéralisme « créoliste » sectaire et dogmatique du linguiste Michel DeGraff contesté par le linguiste Rochambeau Lainy : documents à consulter » (Rezonòdwès, 14 avril 2022), Michel DeGraff a trafiqué le 9 avril 2022 –sans même l’avoir lu–, le texte entier de la communication du linguiste Rochambeau Lainy donnée à Indiana University le 1er avril 2022 et qui a pour titre « Créole haïtien et français côte à côte en Haïti : un cas de bilinguisme mal géré ». Sans même avoir pris connaissance du texte entier de la communication de Rochambeau Lainy, Michel DeGraff l’interpelle en ces termes : « Ki jan n konprann gen Akademisyen nan Akademi kreyòl ayisyen tankou pwòf Rochambeau Lainy ki bay tèt yo misyon pou yo pwoteje lang franse ann Ayiti » ? Sa se pawòl Akademisyen an nan konferans li bay nan Indiana University nan dat 1 avril 2022… » Cette interpellation de Rochambeau Lainy est frauduleusement « justifiée » par une présumée « mission » de service consignée en ces termes : « Èske pledwaye sa a mache men nan men ak misyon AKA oswa èske se yon pledwaye ki ka bloke misyon AKA pandan l ap sèvi misyon Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Ambassade de France en Haïti, Institut Français En Haïti e latriye ? ». Il y a lieu de rappeler qu’à aucun moment dans le seul résumé du texte de la conférence auquel Michel DeGraff a eu accès, Rochambeau Lainy n’a défendu la perspective, que lui prête frauduleusement Michel DeGraff, de « protéger la langue française en Haïti »… Au contraire, Rochambeau Lainy a annoncé qu’il entendait traiter certaines questions de fond –par exemple la problématique de l’usage du créole dans l’apprentissage scolaire versus l’usage du français–, et il a précisé qu’il entendait les examiner d’un œil critique au cours de sa communication. Il avait également signalé qu’il y a des différences d’approche dans la question du bilinguisme en Haïti et que « le bilinguisme français-créole en Haïti est mal géré ».
La vision et l’action de toutes les institutions de coopération internationale oeuvrant en Haïti peuvent et doivent être soumises à l’analyse critique adéquatement documentée de tous les citoyens haïtiens qui en font un légitime combat. À l’inverse, la mise en cause abusive et réitérée de la vision et de l’action du Bureau de l’UNESCO en Haïti par Michel DeGraff ainsi que son aventureuse et compulsive « fatwa » contre tout ce qui a trait à la langue française en Haïti servent (1) à détourner la réflexion critique sur l’aménagement linguistique en Haïti de ses véritables objectifs ; (2) à masquer le support du linguiste du MIT Haiti Initiative au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste à travers la propagande qu’il n’a cessé de faire publiquement en faveur du PSUGO de Michel Martelly/Laurent Lamothe ; (3) à masquer le très lourd échec de la lexicographie créole au MIT Haiti Initiative repérable notamment dans le « Glossary of STEM terms from the MIT-Haiti Initiative ». Ce lexique anglais-français d’environ 800 termes comprend un grand nombre de pseudo équivalents « créoles » fantaisistes, erratiques, souvent faux, sémantiquement opaques et non conformes au système morphosyntaxique du créole (voir nos articles « Le traitement lexicographique du créole dans le « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative », Le National, 21 juillet 2020 ; « Le naufrage de la lexicographie créole au MIT Haiti Initiative », Le National, 15 février 2022 ; « Le naufrage de la lexicographie créole dans certaines institutions universitaires américaines », Rezonòdwès, 5 octobre 2023). Michel DeGraff –qui est le seul linguiste haïtien à soutenir publiquement le cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste à travers la propagande qu’il mène en faveur du PSUGO–, a fait paraître dans la Revue transatlantique d’études suisses (livraison du 6/7, 2016/17) l’article « La langue maternelle comme fondement du savoir : l’initiative MIT-Haïti : vers une éducation en créole efficace et inclusive ». Dans cet article, Michel DeGraff prétend frauduleusement qu’« Il existe déjà de louables efforts pour améliorer la situation en Haïti, où une éducation de qualité a traditionnellement été réservée au petit nombre. Un exemple récent est le Programme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire (PSUGO) lancé par le gouvernement haïtien en 2011 dans le but de garantir à tous les enfants une scolarité libre et obligatoire. » Le soutien de Michel DeGraff au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste s’est également exprimé par la promotion du même PSUGO dans une vidéo mise en ligne sur YouTube au cours du mois de juin 2014. Dans cette vidéo, il soutient frauduleusement, sans révéler ses sources ni fournir de preuve irréfutable, que 88 % des écoliers haïtiens sont scolarisés en Haïti grâce au PSUGO : « Gras a program Psugo a 88 pousan timoun ale lekòl ». D’où provient l’affirmation selon laquelle 88% des écoliers haïtiens –soit plus de 3 millions d’apprenants–, seraient scolarisés « grâce au PSUGO » ? Sur quelles données d’enquête, accessibles et vérifiables, s’appuie donc Michel DeGraff pour vanter ce « grand succès de scolarisation massive » réalisé en Haïti par le cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste ? Le parti-pris idéologique et politique de Michel DeGraff pour l’arnaque que constitue le PSUGO aurait ainsi la valeur d’un axiome scientifique pour analyser les résultats de la scolarisation des apprenants en Haïti ? Michel DeGraff soutient du même souffle, pince sans rire, que « L’initiative MIT-HAITI vise à former les cadres de l’État » dans le domaine éducatif… Aucun bilan public n’a jusqu’à présent étayé la mise en œuvre d’un quelconque programme de formation…
Connu pour ses interventions clivantes et conflictuelles à répétition, Michel DeGraff adresse depuis un certain temps au ministère de l’Éducation nationale des rafales acrimonieuses et querelleuses, des salves « piman bouk » qui semblent indiquer que son appui public au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste à travers la promotion du PSUGO n’aurait pas rapporté les dividendes politiques et/ou éducationnels escomptés : dans le système éducatif national, le MIT Haiti Initiative demeure inconnu et isolé de la très grande majorité des enseignants haïtiens, y compris ceux avec lesquels nous dialoguons depuis plusieurs années. Et sur le registre de la lexicographie créole, le pseudo « modèle » lexicographique du « Glossary of STEM terms from the MIT – Haiti Initiative » –inconnu tant de la lexicographie professionnelle que dans les Écoles de traduction à travers le monde et qui promeut la « lexicographie borlette »/« lexicographie lamayòt »–, n’est jamais parvenu à s’implanter dans les universités haïtiennes et encore moins dans le système éducatif national (voir notre article « La « lexicographie borlette » du MIT Haiti Initiative n’a jamais pu s’implanter en Haïti dans l’enseignement en créole des sciences et des techniques », Le National, 3 juillet 2023). Malgré cela, le support de Michel DeGraff au cartel politico-mafieux du PHTK néo-duvaliériste s’est encore récemment manifesté, le 7 juillet 2023, par la publication dans Le Nouvelliste de l’article « Politik lengwistik nan istwa lekòl ann Ayiti » dans lequel il vante sans aucune analyse adéquate et crédible l’aventureuse saga du LIV INIK AN KREYÒL bricolé par le ministère de l’Éducation nationale. Les enseignants et directeurs d’école en Haïti ont bien noté que le ministère de l’Éducation nationale a introduit dans le système éducatif national, dans la plus grande confusion administrative, SEPT VERSIONS DIFFÉRENTES DU LIV INIK AN KREYÒL…
Il y a lieu de rappeler que le PSUGO, tant vanté et promu par Michel DeGraff, s’est avéré être une vaste entreprise de corruption, de clientélisme et de dilapidation à grande échelle des fonds publics. Il a été amplement dénoncé par les enseignants et leurs associations comme en fait foi la série d’enquêtes très fouillées publiée par AlterPresse, « Le Psugo, une menace à l’enseignement en Haïti ? (I à IV) / Un processus d’affaiblissement du système éducatif » (AltrPresse, 7 septembre 2914). Le PSUGO a également fait l’objet d’un rigoureux et ample bilan analytique de Charles Tardieu, spécialiste de l’éducation, ancien ministre de l’Éducation nationale, dans son article daté de juin 2016, « Le PSUGO et l’obligation de scolarisation universelle / Catastrophe programmée et violation des droits de la nation et de ses enfants ». Charles Tardieu met entre autres en lumière que « La loi votée à la Chambre des députés sur le FNÉ a été pensée et structurée dans le seul but de légaliser le pillage des taxes spéciales des contribuables haïtiens perçues en faveur du programme de scolarisation universelle [le PSUGO] ; elle a déjà fourni des instruments facilitant le détournement de centaines de millions de dollars américains; il ne s’agit même pas d’en corriger certains articles, elle doit être complètement repensée et réécrite dans une perspective de financement d’un service public essentiel par des fonds provenant d’une « cotisation sociale » (sur la corruption généralisée au PSUGO, voir aussi notre article « Le système éducatif haïtien à l’épreuve de malversations multiples au PSUGO », Le National, 24 mars 2022).
Il est de notoriété publique qu’à l’instar des autres secteurs de la vie nationale, le secteur de l’éducation est lui aussi gangréné par la corruption, les détournements de fonds et autres tares systémiques héritées de la dictature duvaliériste. Pour mémoire, il est utile de rappeler que « Le ministre de l’Éducation nationale, Nesmy Manigat, affirm[ait] [en 2015] que les 85 directeurs d’écoles récemment épinglés pour corruption dans le cadre du PSUGO ne représentent qu’une infirme partie des détournements de fonds publics dans le secteur éducatif. » Et sans identifier les mécanismes institutionnels de ces détournements de fonds publics, Nesmy Manigat a précisé que « Plusieurs centaines d’écoles sont impliquées dans ces détournements, (…) rappelant que les directeurs corrompus ont des connexions au sein du ministère de l’Éducation » (voir l’article « Important réseau de corruption au sein du PSUGO », Radio Métropole, 13 juillet 2015). Les directeurs d’écoles épinglés et leurs zélés « correspondants » au sein du ministère de l’Éducation nationale n’ont pas été traduits en justice et ont certainement bénéficié de l’impunité qui gangrène le corps social haïtien. Les intervenants du secteur de l’éducation et la presse haïtienne ont bien noté que le ministre de facto de l’Éducation nationale Nesmy Manigat, qui critiquait ainsi ouvertement le PSUGO en 2015, est celui qui s’est empressé de… reconduire le PSUGO dès sa seconde nomination à la direction de l’Éducation nationale en novembre 2021.
À contre-courant de toute démagogie et de tout populisme linguistique, il est utile de rappeler que le Bureau de l’UNESCO en Haïti n’a pas vocation à remplir un quelconque mandat d’aménagement linguistique en Haïti –et dans ce domaine, comme dans tout autre domaine–, ce Bureau ne saurait remplacer l’État haïtien à qui revient constitutionnellement l’obligation d’instituer l’aménagement simultané de nos deux langues officielles. De la manière la plus rigoureuse, il faut prendre toute la mesure que le Bureau de l’UNESCO en Haïti peut, de manière innovante et en conformité avec les termes de sa mission institutionnelle, entreprendre d’accompagner l’État haïtien dans des activités de formation des enseignants, de renforcement de la gouvernance du système éducatif national et, surtout, dans la mise en œuvre de toute mesure découlant d’une future Loi de politique linguistique éducative en Haïti. Le Bureau de l’UNESCO en Haïti peut également accompagner l’État haïtien dans toute activité rassembleuse et innovante de promotion du créole alors même qu’il n’est pas assujetti aux obligations découlant de l’article 40 de la Constitution de 1987. Tel semble être l’orientation prise ces derniers temps par les responsables haïtiens de l’UNESCO. Ainsi, « Lors d’une rencontre fructueuse tenue le 29 janvier 2021 avec la haute hiérarchie de l’UNESCO, Dominique Dupuy, ambassadrice, déléguée permanente d’Haïti auprès de l’Unesco, a sollicité que le créole, autant que le français, soit utilisé comme langue de travail au Bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince. La représentante d’Haïti a exprimé, pendant cette rencontre, le souhait que les communications et les publications de l’Organisation dans le pays soient désormais réalisées aussi en créole afin d’assurer un meilleur accès à la population haïtienne. Autrement dit, elle a soulevé des préoccupations très importantes : l’usage du créole aux conférences et activités tenues dans le pays, la mise en œuvre d’un mécanisme d’interprétation simultanée lors des séances, la traduction des principaux ouvrages de travail. L’UNESCO a pris note de ces points et s’est engagée à mobiliser les ressources requises à partir du mois de février 2021. « Je salue l’UNESCO qui, fidèle à son mandat de préserver la diversité des expressions culturelles, a entendu notre requête pour une meilleure inclusion linguistique en Haïti, en soutenant l’usage du créole. Le plaidoyer pour notre langue maternelle est l’un des piliers de ma mission », a déclaré Dominique Dupuy, tout en précisant que la Délégation permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO montre l’exemple en faisant usage des deux langues tant au niveau de ses communications internes qu’externes » (voir l’article « L’UNESCO s’exprime en créole » paru sur le site Web antilla-martinique.com le 11 février 2021).
La compulsive et récurrente interpellation du Bureau de l’UNESCO en Haïti par Michel Degraff procède, à l’analyse la plus objective, d’une démagogique mystification au creux d’un populisme linguistique qui n’arrive pas à convaincre en Haïti, en particulier dans le système éducatif national. Tel que précisé précédemment, le Bureau de l’UNESCO en Haïti n’a manifestement pas vocation à remplir un quelconque mandat d’aménagement linguistique en Haïti –et dans ce domaine comme dans tout autre domaine–, ce Bureau ne saurait remplacer l’État haïtien à qui il revient constitutionnellement l’obligation d’instituer l’aménagement simultané de nos deux langues officielles. Faire croire ou laisser entendre implicitement qu’une institution internationale, l’UNESCO notamment, est de facto soumise aux obligations consignées à l’article 40 de la Constitution haïtienne de 1987 est une démagogique mystification. Cela reviendrait à placer une institution internationale sur le même plan que l’État haïtien au chapitre de ses prérogatives régaliennes… Sur le registre de la compulsive et récurrente « fatwa » portée par quelques créolistes fondamentalistes et autres Ayatollahs du créole, le populisme linguistique –qui tourne le dos aux sciences du langage et à la Constitution de 1987–, est également une posture (une imposture ?) qui génère un lourd défaut de vision sur la nature politique et jurilinguistique de l’aménagement linguistique en Haïti. À ce titre le populisme linguistique, démagogique et mystificateur, doit être assidûment soumis à l’analyse critique, avec rigueur, de manière documentée et rassembleuse.
À contre-courant du populisme linguistique promu par les créolistes fondamentalistes et autres Ayatollahs du créole, nous proposons l’établissement en Haïti du consensuel « bilinguisme de l’équité des droits linguistiques ».
Le « bilinguisme de l’équité des droits linguistiques » renvoie à la fois à sa dimension politique et juridique, et il est fort éclairant que l’Assemblée constituante ait consigné un si explicite « Préambule » dans la Constitution de 1987 dans les termes suivants : « Pour fortifier l’unité nationale, en éliminant toutes discriminations entre les populations des villes et des campagnes, par l’acceptation de la communauté de langues et de culture (…) ». Ainsi, « Fortifier l’unité nationale » est de l’ordre de la gouvernance politique de l’État –le « Préambule » est conclu dans cette perspective par l’obligation d’« instaurer un régime gouvernemental basé sur les libertés fondamentales et le respect des droits humains »–, et ce choix politique de société repose sur les garanties constitutionnelles inscrites dans les articles relatifs aux droits citoyens désignés dans notre charte fondamentale. Un tel choix politique de société trouve toute sa légitimité dans la Constitution de 1987 au Titre III – Chapitre II qui consigne explicitement « Des droits fondamentaux ». Dans l’expression « bilinguisme de l’équité des droits linguistiques », chacun des termes (« bilinguisme », « équité », « droits linguistiques ») est porteur de traits définitoires distincts et pourtant liés.
Alors même que le terme « équité » comprend les sèmes définitoires de « Caractère de ce qui est fait avec justice et impartialité » (Le Larousse), les termes « bilingue » et « bilinguisme » sont le lieu d’âpres débats notionnels contradictoires et l’objet de cet article n’est pas d’en exposer les grandes avenues ni les principales tendances. La réflexion que nous proposons en partage s’attache plutôt au bilinguisme en tant que politique d’État tout en gardant à l’esprit que « Des 195 États souverains, 54 sont officiellement bilingues, c’est-à-dire 27,6 % des pays du monde pour une population regroupant environ deux milliards de personnes (Jacques Leclerc : « L’aménagement linguistique dans le monde », Québec, CEFAN, Université Laval).
Le dictionnaire Le Robert définit comme suit le « bilinguisme » : « Caractère bilingue (d’un pays, d’une région, de ses habitants). Le bilinguisme en Belgique, au Québec (personnes). Qualité de bilingue. Le bilinguisme parfait est rare ». Pour sa part, Le Larousse consigne la définition suivante : « Situation d’un individu parlant couramment deux langues différentes (bilinguisme individuel) ; situation d’une communauté où se pratiquent concurremment deux langues ». Ranka Bijeljac-Babic, de l’Université de Poitiers, introduit des éléments de définition en ces termes : « Les termes « bilingue », « bilinguisme » désignent différents phénomènes selon qu’ils décrivent un individu, une communauté ou un mode de communication. Une personne est bilingue si elle utilise deux langues de façon régulière ; une société est bilingue si elle utilise une langue dans un contexte et l’autre dans un contexte différent. » (« Enfant bilingue / De la petite enfance à l’école », Éditions Odile Jacob, 2017). Le bilinguisme de société évoqué dans le dernier segment de cette définition est contestable et il rappelle l’opposition de nombre de linguistes au concept de diglossie appliqué à la situation linguistique haïtienne. Sans entrer dans les détails, il est utile de mentionner l’éclairage que propose le linguiste-aménagiste Jean-Claude Corbeil lorsqu’il établit une « Distinction entre bilinguisme en tant que projet individuel et bilinguisme en tant que projet collectif / Distinction entre bilinguisme institutionnel et bilinguisme fonctionnel ». Ainsi, « L’objectif du bilinguisme de langue commune est de donner à l’individu une aisance linguistique en langue seconde qui lui permette, par exemple, d’entretenir une conversation courante, de lire, d’aller au cinéma, de faire ses courses, de manger au restaurant, en somme les gestes les plus familiers de la vie quotidienne. (…) c’est le vocabulaire surtout qui caractérise le bilinguisme de langue spécialisée : il s’agit, ici, d’acquérir le vocabulaire d’une science, d’un métier, d’une technique, ou encore un ensemble de vocabulaires qui constituent la langue d’une entreprise. Le bilinguisme est institutionnel lorsque la société tend à vouloir faire de chaque individu un individu bilingue tant de langue commune que de langue spécialisée » (Jean-Claude Corbeil : « L’embarras des langues / Origine, conception et évolution de la politique linguistique québécoise », Éditions Québec-Amérique, 2007).
Dans le droit fil de ces différents éclairages notionnels, nous entendons par « bilinguisme de l’équité des droits linguistiques » la politique d’État d’aménagement des deux langues officielles d’Haïti conformément à la Constitution de 1987 et qui s’articule sur deux versants indissociables :
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À l’échelle de l’État, le bilinguisme institutionnel instaure la parité effective et mesurable entre nos deux langues officielles et il garantit, dans la sphère publique, l’obligation de l’État d’effectuer toutes ses prestations, orales et écrites, en créole et en français, et d’élaborer/diffuser tous ses documents administratifs dans les deux langues officielles du pays. Le bilinguisme institutionnel se réfère ainsi en amont aux droits linguistiques collectifs ainsi qu’à l’« aptitude d’un service public à fournir à la population et à son propre personnel des services dans les deux langues officielles » (Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton, et Bureau de la traduction du gouvernement fédéral canadien).
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Le bilinguisme individuel recouvre le « droit à la langue » (le droit à l’acquisition et à la maîtrise des deux langues du patrimoine linguistique historique d’Haïti ; le « droit à la langue maternelle » (le droit à la maîtrise et à l’utilisation de la langue maternelle créole dans toutes les situations de communication) et qui est étroitement lié aux obligations de l’État sur le registre du bilinguisme institutionnel.
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En tant que politique d’État, le « bilinguisme de l’équité des droits linguistiques » que nous préconisons au coeur de l’aménagement linguistique en Haïti constitue sur plusieurs plans une avancée majeure. Il est conforme au « Préambule » et aux articles 5 et 40 de la Constitution de 1987, il est en lien direct avec la Déclaration universelle des droits linguistiques de 1996, et il s’articule à la perspective centrale en jurilinguistique selon laquelle les droits linguistiques, dans leur universalité, sont à la fois individuels et collectifs. Dans cette optique, le « bilinguisme de l’équité des droits linguistiques » renvoie à toute la problématique du rôle de l’État en matière de mise en œuvre des droits linguistiques et quant aux garanties constitutionnelles qu’il faut obligatoirement leur accorder (voir notre livre « Plaidoyer pour les droits linguistiques en Haïti / Pledwaye pou dwa lenguistik ann Ayiti », Éditions Zémès, Port-au-Prince, et Éditions du Cidihca, Montréal, 2018).
Montréal, le 16 octobre 2023