— Par Marie-Hélène Léotin —
Une question a été posée, par un media, le 1er juin 2023, aux maires de Martinique à propos du drapeau Rouge-Vert-Noir: Pourquoi ce drapeau n’est-il pas hissé au fronton de votre mairie? 7 maires pour le moment l’ont fait.Certains maires ont répondu: le drapeau rouge-vert-noir n’est pas une priorité pour mes administrés. Il y a des choses bien plus importantes à faire pour améliorer la vie quotidienne de la population.
Je trouve étrange ce genre de réponse. C’est comme si un directeur d’école disait aux enseignants de son établissement: Vous savez, il faut donner la priorité aux matières « dites » fondamentales: lire, écrire, parler, le français, les mathématiques, les sciences. Les autres matières comme les arts, la musique, le dessin, la peinture, le sport, ne sont pas prioritaires. Vous faites si vous avez le temps. C’est une attitude criminelle. L’enfant a besoin, pour son équilibre physique et psychique, de toutes les matières, y compris de l’éducation artistique et sportive.
Le drapeau rouge-vert-noir est un symbole d’identité pour les Martiniquais. Il n’appartient plus aux seuls patriotes et indépendantistes. C’est une bannière de ralliement, d’union et d’unité. Il participe de notre mémoire collective, de notre histoire au fil du temps, qu’on le veuille ou pas. Il participe de notre équilibre et de notre vision en tant que peuple. Sauf si on ne reconnaît pas qu’il existe un peuple martiniquais. C’est une priorité pour notre peuple, autant que boire, manger, se loger, se déplacer, se soigner, lutter contre la vie chère ou contre la violence. L’administré n’est pas un simple alimentaire. Il a besoin d’une spiritualité, autre que celle de l’Eglise ou de la religion, une spiritualité laïque, qui lui donne la force de regarder demain et d’entamer les combats qui sont les nôtres aujourd’hui, pour une société meilleure.
Si le drapeau n’est pas une priorité, pourquoi mettre le drapeau bleu-blanc-rouge? On pourrait aussi l’enlever.
N’oublions pas que lors de l’Insurrection du Sud en septembre 1870, la commune du Saint-Esprit, haut lieu de lutte, a été la seule où les insurgés ont entamé une occupation des habitations des grands propriétaires terriens, et un partage des terres. Même Rivière-Pilote ne l’a pas fait! Honneur à ceux de l’habitation Daubermesnil, à ceux de Peter Maillet, à ceux de Régale-Saint-Esprit! Allez-vous les appeler, vous aussi, comme le gouverneur de la colonie, « une bande de pillards et d’incendiaires? »
Non! Cette vision de l’histoire est bien finie aujourd’hui! Les peuples ont besoin qu’on les respecte. Les peuples ont besoin de connaître leur passé pour porter leur humanité.La conscience martiniquaise avance!
Marie-Hélène LEOTIN