Mayotte souffre d’un «problème majeur d’accès aux services publics et aux droits», qui ne doit pas être occulté par l’accent mis par l’État sur la lutte contre l’immigration irrégulière, pointe le Défenseur des droits. Jacques Toubon dénonce aussi une certaine «légitimation de dénis de droits pourtant flagrants», dans un rapport rendu public mardi et réalisé après une mission menée début octobre 2019.
«A Mayotte, plus qu’ailleurs, il existe un écart immense entre les droits consacrés et ceux effectivement exercés. Les droits fondamentaux -droits à l’éducation, à la sûreté, à la santé, à vivre dans des conditions décentes – n’y sont pas effectifs», souligne Jacques Toubon en introduction. Il constate que «si le sous dimensionnement des services publics mahorais est tel qu’il ne permet pas d’en assurer la jouissance à l’ensemble des personnes (…), la responsabilité doit être cherchée du côté de ceux qui en ont la charge et non de ceux qui en ont l’usage».
Accès aux soins, enfants et étrangers
Le Défenseur des droits a surtout axé sa mission sur les entraves à l’accès aux soins et les atteintes aux droits de l’enfant et aux droits des étrangers. Il pointe le manque d’attractivité du territoire et les difficulté de recrutements, qui affectent notamment le secteur médical et entraînent une offre de soin sous-dimensionnée, les difficultés d’accès à l’assurance maladie ou aux évacuations sanitaires.
Il critique aussi la situation toujours «alarmante» en matière d’éducation à Mayotte, où «le droit à la scolarisation est ineffectif», notamment pour les mineurs isolés, en raison des refus d’inscription de certains maires, et où la protection de l’enfance fait face à «une inertie persistante».
De même, les étrangers sur le territoire font face «à des règles dérogatoires et toujours plus restrictives» et «à une politique d’accueil et d’intégration des étrangers pratiquement inexistante», déplore-t-il. Enfin, il dénonce des atteintes au droits «fréquentes et répétées» dans la lutte contre l’immigration irrégulière: «exécution expéditive des éloignements», rétention des mineurs, mineurs rattachés arbitrairement à un tiers pour être éloignés, etc.
«Du coté des pouvoirs publics, la thèse selon laquelle le bon fonctionnement des services publics et l’équilibre social de l’île seraient mis en péril par une immigration massive semble largement relayée», déplore-t-il. «La réponse de l’Etat au dénuement des infrastructures se focalise ainsi sur la lutte contre l’immigration irrégulière, au risque de creuser les clivages et d’attiser les tensions sociales.»
Dans cet archipel de 374 km2, devenu département français en 2011, 48% des 256.000 habitants sont des étrangers, selon l’Insee. Lors de sa visite en octobre, le président Emmanuel Macron s’était réjoui que «les reconduites à la frontière aient fortement augmenté» atteignant «quasiment 24.000» de janvier à octobre, «contre 9.800» sur la même période de 2018.
Source : Par Le Figaro avec AFP