— Par Jean-Claude Duville-Marrant —
Au cours de mon récent séjour en Martinique pour la FAO, j’ai pu observer les terribles défis auxquels vous faites face dans votre agriculture. Il est plus qu’important d’aborder les manquements de la Collectivité Territoriale de Martinique (CTM) concernant l’accompagnement et le soutien aux agriculteurs.
Mon travail portait essentiellement sur les producteurs agricoles de l’ensemble des filières martiniquaises.
En tant qu’afro-martiniquais et producteur agricole délégué dans la Caraïbe, je suis fortement troublé par la stagnation et le déclin de l’agriculture martiniquaise, particulièrement en raison de l’inaction de vos dirigeants actuels.
En vous interrogeant, les trois noms qui sont revenus sont Serge Letchimy, Nicaise Monrose et José Maurice. Leur passivité a gravement affecté le secteur, et malgré les efforts de José Maurice, le « directeur factice », la dynamique ne s’améliore pas.
Les défis liés à l’insularité et aux dérèglements climatiques sont bien réels, mais la CTM, via la chambre d’agriculture, doit prendre ses responsabilités. Le fossé de 15 ans dans votre démarche collective et l’absence de projets structurants sont alarmants.
Les promesses non tenues et la désinformation autour des deux millions d’euros évoqués, dont nous avons trouvé trace nulle part, exacerbent la méfiance entre agriculteurs et filières.
Depuis que le Gallion a cessé de fonctionner normalement, plusieurs enquêtes ont été ouvertes pour comprendre comment une pénurie de sucre en Martinique est possible.
De plus, l’accès aux conclusions des états généraux de l’agriculture montre que beaucoup d’argent a été dépensé pour des constats déjà connus.
La situation devient intolérable, et il est temps de cesser les promesses vides. L’exemple de la Guadeloupe, où l’agriculture est solidement soutenue, pourrait servir de modèle.
Il est faux de blâmer la chlordécone pour le manque de production ici, alors que d’autres îles, tout aussi infectées que vous, continuent à cultiver. Les tubercules, comme les ignames et les patates douces, ne peuvent être cultivés sur ces terres contaminées, déjà occupées pour la plupart, mais 67 % des terres martiniquaises ne sont pas contaminées. Quel est donc votre plan pour optimiser l’utilisation de ces terres épargnées ? Les excuses doivent cesser.
L’observation des pratiques guadeloupéennes pour encourager des cultures génératrices d’emploi devrait inspirer votre démarche. Vous devez revendiquer une agriculture durable et respectée, car votre avenir et celui de votre région en dépendent.
Le débat racial qui divise est stérile, car les agriculteurs, quelle que soit leur origine, ont un rôle vital dans la société. L’unité et la solidarité entre paysans doivent primer.
Parlons du POSEI, qui, loin d’être une simple subvention, est un soutien essentiel pour compenser les coûts de production, en perpétuelle augmentation pour tous les agriculteurs. Il est déplorable que certains dirigeants semblent ignorer cette nécessité et ne travaillent pas sur d’autres leviers d’aide.
Cesser de chercher des coupables est essentiel pour avancer.
Je vous remercie de votre attention et vous assure que ce message parviendra à des instances supérieures lors de la remise de mes travaux pour l’ONU/FAO. En tant que Martiniquais, je reste solidaire de votre lutte. Force à vous.
Jean-Claude Duville-Marrant
Depuis Saint-Barthélemy,
le 28 novembre 2024