— Par Géraldine Kornblum —
La 18e édition du Festival mondial des théâtres de marionnettes, qui vient d’ouvrir ses portes, se tient jusqu’au 27 septembre. L’occasion de découvrir quelques merveilles.
Charleville-Mézières (Ardennes), correspondance Voilà donc que s’est ouvert le Festival mondial des théâtres de marionnettes, vendredi dernier à Charleville-Mézières. Pendant dix jours, l’événement – biennal depuis 2011 – rassemble en salles comme dans la rue 115 compagnies venues des cinq continents, parmi lesquelles 41 premières en France et deux artistes invités, soit 569 représentations pour spectateurs de tous âges. Voilà surtout une édition qui s’annonce des plus prometteuses tant elle a livré aux premiers jours quelques succulences.
Une extrême beauté faite de douceur et de légèreté
Esquisses, de Barbara Mélois, une des nombreuses créations que présente le festival, est de celles-ci, de ces spectacles qui font de l’instant vécu un moment de grâce inouïe qui enserre le cœur d’un magma d’émotions dont il est difficile de se sortir, qui enveloppe le cerveau longtemps, très longtemps, d’une réminiscence persistante et incontrôlable, comme douée d’une force se refusant à refermer la parenthèse enchanteresse. Barbara Mélois, il faudra retenir ce nom-là. C’est à elle que le public doit d’avoir chaviré ; c’est à elle que reviennent l’écriture du spectacle, le jeu scénique et la manipulation des marionnettes, qu’elle a d’ailleurs conçues. Tout commence en avant-scène par un amas de rubans de papier résidus de broyeuses. Et puis il y a cette secrétaire, aux côtés de son collègue, en ombres chinoises derrière des paravents blancs. Elle est éprise de son patron, espérant que celui-ci la sorte de sa condition d’aliénée au travail. Alors elle rêve des plages de Bora Bora, d’un voyage en hélicoptère, de plaines arides, de paysages enneigés… Des reliquats de papier naissent les reflets de ses fantasmes, un jardin, un bonhomme de neige, des songes projetés en ombres portées, comme dessinées effectivement en esquisses, le tout dans une extrême beauté faite de douceur, de légèreté ; la musique de l’accordéoniste Floran Théault et la lumière d’Estelle Baggs viennent souligner parfaitement l’ensemble, accentuant la candeur d’un Don Quichotte suivi de Sancho Pança luttant contre un ventilateur ou la fantaisie d’une chevauchée à deux sur une Harley Davidson. Par quelques subterfuges et du fait de la dextérité de l’artiste, on se laisse surprendre à chaque naissance de marionnette ; il y a quelque chose de l’ordre de la magie, de cette magie qui transporte le spectateur aux frontières intimes de l’enfance et du désir de sortir de sa propre condition humaine journalière…