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«Joël Des Rosiers. L’échappée lyrique des damnés de la mer»: éclairer Des Rosiers

— Par Hugues Corriveau, Collaborateur du journal Le Devoir —

Dans son essai Joël Des Rosiers. L’échappée lyrique des damnés de la mer, Jean-Jacques Thomas veut tout aborder, prendre à bras-le-corps les divers aspects de l’oeuvre poétique d’un auteur qu’il admire, et ce faisant, il se répète. C’est bien là le plus grand défaut de cet essai qui, par ailleurs, est pénétrant et éclaire de façon méticuleuse les voies à emprunter pour en décoder le désir.

Ce que l’essayiste souligne chez Des Rosiers, c’est « d’abord un refus radical et absolu d’une poésie tout entière dominée par le devoir de mémoire déploratrice. » Ce point de départ capital met en lumière le projet intrinsèque du poète, à savoir : « faire une oeuvre québécoise originelle et personnelle sans le poids du pathos déploratif incrusté dans le regret du “pays natal”. » Ainsi libérée du poids du fétichisme ancestral, la poésie de Des Rosiers va s’incarner dans les territoires nouveaux qu’elle découvre, va se mettre au présent de l’émotion.

Jean-Jacques Thomas va aussi du côté d’une forme étonnante de psychocritique, alors qu’il rappelle que le poète, premier bébé haïtien né d’une césarienne, a eu les mains blessées alors qu’il tenait la lame du bistouri qui le délivrait.

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Le prix littéraire Fetkann! à Joël Des Rosiers pour « Chaux »

 joel_des_rosiers-2Joël Des Rosiers lauréat du prix littéraire Fetkann!/ Maryse Sondé de poésie 2016 pour « CHAUX », éditions Triptyque, 2015, Montréal

« Le mur du fond est un mur de chaux »

Marcelin Pleynet

La chaux est l’encre des écrits divins (Daniel 5,5). C’est donc à un Dieu à la main coupée, à ce point humain, que tout poète s’adresse comme limite extrinsèque de tout savoir. Plutôt que de prendre la parole l’auteur a voulu être enveloppé, porté par elle, bien au-delà de tout commencement. La tentation est grande de se tourner vers ses poèmes antérieurs, ses champs de parfums et de sonorités. Cela reviendra à ignorer les traces d’une fulgurance plus ancienne : une terre vivante, une chaleur organique, la chaux, entre délire et prophétie, était entrée en lui dès les premiers jours de sa vie, dans cet espace du dedans, démesuré, insoupçonné, intemporel, qui est la vraie mesure de l’homme.

Sans doute avec Chaux est-ce le même poème différent qui se continue en déjouant toute attente. L’écriture en est plus avide, plus déchiquetée, plus rapace. Plus dévêtue aussi.

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Métaspora, essai sur les patries intimes, de Joël Des Rosiers

"là où l’espérance fait défaut, l’âme se dessèche et s’exténue"

— Par Tanella Boni(*) —

joel_des_rosiersPoète, essayiste, psychiatre et psychanalyste, Joël Des Rosiers publie en novembre dernier Métaspora, Essai sur les patries intimes(1). Une publication parue chez Tryptique à Montréal, comme l’ensemble des titres de l’auteur depuis 1987. Joël Des Rosiers est récipiendaire de nombreux prix parmi lesquels, en 2011, le prix du Québec Athanase-David pour la qualité exceptionnelle de son œuvre. Focus sur son dernier essai.

Il y a d’abord la couverture, avec un titre énigmatique, comme souvent chez Joël Des Rosiers – Métaspora, Essai sur les patries intimes – énigmatique parce qu’il attire le regard et convoque, déjà, l’entendement comme dirait quelque philosophe.

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AnthologieS de la poésie haïtienne : arpentage documentaire, datation, voix plurielles

— Par Robert Berrouët-Oriol —

En hommage fraternel et amical à Anthony Phelps, « Homme de vigie »,

qui vient de fêter ses 96 ans…

L’idée de rédiger le présent article provient d’un échange de correspondance entre Jean-Claude Nazon et moi relatif à la parution de L’« Anthologie trilingue de la poésie haïtienne contemporaine / This Land, My Beloved : A Trilingual Anthology of Contemporary Haitian Poetry / Tè mwen renmen an : Yon antoloji trileng pwezi ayisyen kontanporen ». Éditée par Elizabeth Brunazzi, Denizé Lauture et Tontongi, cette « Anthologie trilingue de la poésie haïtienne contemporaine » a été publiée le 28 octobre 2023 aux Éditions Trilingual Press, Cambridge, MA, USA. J’en ai fait par courriel une courte présentation indicative qui est pour l’essentiel reproduite dans le présent article. Détenteur d’un diplôme d’études supérieures en gestion administrative et financière de l’Université libre de Bruxelles et au Canada, passionné de musique classique et de littérature, friand d’opéra, Jean-Claude Nazon est, sur l’archipel fécond d’une vieille amitié, le lecteur critique de tous mes articles : qu’ils soient du domaine linguistique ou littéraire, je les lui soumets avant publication.

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Revisiter les « écritures migrantes »…

… dans la littérature québécoise contemporaine : contexte, genèse, corpus, réception et publications académiques

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

En hommage au poète et romancier haïtien Anthony Phelps, passeur de mémoires
en Terre-Québec, auteur de « Et moi je suis une île » (1973)
et de « Mon pays que voici » (1968).
En hommage au poète et romancier québécois Pierre Nepveu,
spécialiste de l’œuvre de Gaston Miron
et auteur de « L’hiver de Mira Christophe » (1986).

Le remarquable livre de l’Haïtien Jean Jonassaint, poète, essayiste et professeur de littérature –« Le Pouvoir des mots, les maux du pouvoir : des romanciers haïtiens de l’exil » (Éditions Arcantère / Presses de l’Université de Montréal 1986)–, m’a remis en mémoire, il y a quelques semaines, l’article que j’ai autrefois publié sous le titre « L’effet d’exil du champ littéraire québécois » (magazine Vice Versa no 17, décembre 1986-janvier 1987). Le texte « L’effet d’exil du champ littéraire québécois », que certains critiques littéraires confondent avec l’article « L’émergence des écritures migrantes et métisses au Québec » publié plus tard dans la revue LittéRéalité (vol.

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Fortenel Thélusma, de la linguistique à la fiction romanesque : un pari et de grands défis ?

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Entrevue exclusive

La littérature haïtienne a en partage avec les autres littératures à travers le monde une caractéristique de premier plan : les forgerons de la fiction appartiennent la plupart du temps à des champs d’activités qui n’ont pas à priori grand-chose à voir avec la littérature. Il en est ainsi de Jacques Stephen Alexis et Joël Des Rosiers, médecins ; de Marie-Célie Agnant, traductrice ; de Lilas Desquiron, ethnologue ; de Ketly Mars, gestionnaire ; de Jan J. Dominique, communicatrice ; de Georges Anglade, géographe ; de Michel Soukar, historien ; de Gérald Bloncourt, photographe et peintre ; de Faubert Bolivar, philosophe, etc. Il est toutefois attesté que nombre d’écrivains puisent dans leur expérience professionnelle la matière première de leurs œuvres de fiction. C’est notamment le cas du neurologue et linguiste Jean Métellus. À la suite de « Une eau forte » (Gallimard, 1983), qui marquait une première prise de distance à l’égard des clichés du roman haïtien, l’auteur s’attache dans « La parole prisonnière » (Gallimard, 1986) à l’étude de certains troubles du langage.

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« Créole Blues », de Jean-Marc Beausoleil

Un roman polyvocal sur les terres enneigées du Québec

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Entrevue exclusive

Sur les terres vêtues de neige au Québec, de Pointe-Calumet à Chibougamau, de l’Abitibi au Saguenay-Lac‑Saint‑Jean, il n’est pas rare d’entendre parler créole au détour d’une rue… Dans les couloirs d’une école secondaire de Montréal comme dans une épicerie desservant des locuteurs du créole à Montréal-Nord, le créole poursuit sa lente mais sûre entreprise de métissage sur plusieurs registres, de l’univers symbolique à celui des mutations langagières. Le vénérable quotidien montréalais Le Devoir s’en est fait récemment l’écho dans un article de la série « Le français sous influence » daté du 20 août 2022 et dont le titre est « Un français appelé à évoluer à Montréal ». L’auteure de l’article, Sarah Rahmouni, note de manière tout à fait pertinente combien le créole haïtien arpente différents lieux de vie : « On les entend dans la rue, dans le métro ou sur les bancs d’école depuis plusieurs années : des mots provenant du créole haïtien et de l’arabe maghrébin se sont peu à peu ajoutés à l’argot de Montréal, venant bouleverser la traditionnelle dichotomie entre le français et l’anglais.

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Marjorie Théodore ou la passion de l’innovation au service des aveugles et malvoyants du Québec

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Le Québec, le plus vaste territoire francophone d’Amérique du Nord, jouit à l’échelle internationale d’une solide réputation pour l’excellence de ses services dans différents domaines : des universités performantes, une médecine de pointe couplée à un solide réseau de santé, un vaste ensemble de Maisons de la culture, des systèmes de transports publics de qualité, des pôles de recherche dans nombre de domaines tels que la robotique, l’intelligence artificielle, la bioéthique, etc. À ces lieux d’excellence s’ajoutent une littérature post-moderne plurielle dans laquelle, depuis cinquante ans, des auteurs de premier plan et d’origine haïtienne ont inscrit des œuvres majeures (Anthony Phelps, Marie-Célie Agnant, Stéphane Martelly, Serge Legagneur, Gérard Étienne, Émile Ollivier, Stanley Péan, Joël Des Rosiers, etc.). Au cours des cinquante dernières années, la modernisation du Québec a bénéficié de l’apport professionnel multiforme des Haïtiens comme en fait foi le livre édité et coécrit par Samuel Pierre, « Ces Québécois venus d’Haïti / Contribution de la communauté haïtienne à l’édification du Québec moderne » (Presses internationales Polytechnique, 2007). Alors même que la contribution des enseignants et des infirmières originaires d’Haïti est assez bien connue à travers leurs parcours professionnels à l’échelle du Québec, la contribution de certains professionnels dans des secteurs ultraspécialisés est moins bien connue.

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Psychiatrie de la race : visioconférence le 25 mars 2022

— Par Joël Des Rosiers, psychiatre et psychanalyste —

Présentation : La race n’est pas, comme le prétendent les nationalistes raciaux, une particularité immédiate, une donnée naturelle. Il s’agit plutôt d’une régression vers la nature comme pure violence, vers le particularisme caché qui, dans l’ordre existant, constitue précisément l’universel. « La race est aujourd’hui l’affirmation de soi de l’individu, intégré dans le collectif barbare.» (Horkeimer et Adorno : 1944). Au cours des deux premières décades du XXIe siècle, une floraison d’études historiques sur la race a été publiée. Pourtant, le silence collectif des psychiatres et des psychanalystes sur cette réalité sociétale limite notre capacité à explorer, enseigner et traiter les effets, tant interpersonnels qu’intrapsychiques des traumatismes racialisés, des préjugés implicites et des privilèges.

Dès le XVIIIe siècle, parallèlement au développement d’un savoir médical sur les corps noirs devenus objets d’études pour des raisons économiques, politiques et sanitaires, se développe sur un mode plus ambigu un savoir psychiatrique sur les mêmes objets dépréciés dont la souffrance psychique n’est reconnue que sur le mode du désaveu et de la dénégation. Proposée par Michel Foucault (1979), la biopolitique décrit « la manière dont on a essayé, depuis le XVIIIe siècle, de rationaliser les problèmes posés à la pratique gouvernementale par les phénomènes propres à un ensemble de vivants constitués en population : santé, hygiène, natalité, longévité, races…» Nous chercherons à démêler comment le discours de la race s’autorise du discours médical.

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Le spectacle « Haïbécoise » de Rebecca Jean confirme son talent sur la scène musicale montréalaise

Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Peu de temps après s’être produite au Centro Leonardo Da Vinci, à Montréal, dans le cadre des célébrations du mois du créole, la chanteuse Rebecca Jean a offert au public montréalais, le 30 octobre 2021, son nouveau spectacle musical intitulé « Haïbécoise » au lieudit Le Ministère. La tonalité sinon l’ADN de ce spectacle est inscrite dans le titre même de cette ample prestation musicale, « Haïbécoise », comme pour rappeler les deux matrices de l’identité de cette chanteuse haïtiano-québécoise, née à Montréal de parents haïtiens, et qui chante aussi bien en français qu’en créole. « Haïbécoise » est un mot-valise créé par Rebecca Jean pour signifier que c’est à la confluence et à la pollinisation de ses deux cultures, la québécoise et l’haïtienne, qu’elle tisse son art chansonnier et qu’elle inscrit en notes aériennes chacune des mélodies qu’elle a écrites ou qu’elle interprète, avec un rare et novateur talent déjà salué dans les médias québécois par la critique. En entrevue au National le mois dernier, elle rappelle que « [Ses] racines ont pris naissance au soleil, quelque part entre Petit-Goâve et Jacmel.

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De Ricardo Seitenfus à Helen La Lime, l’aveuglante et impériale manufacture du « consentement » politique en Haïti

—Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue

Ces derniers mois, la détérioration accélérée de la situation sécuritaire et politique en Haïti a mis en lumière le jeu macabre des contradictions et des intérêts communs de ses différents protagonistes, les acteurs nationaux et étrangers, ces derniers étant regroupés au sein d’une bienveillante et hyperactive coterie internationale dénommée « Core Group » (qui comprend les ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, du Canada, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de France, de l’Union européenne, du Représentant spécial de l’Organisation des États Américains et de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies). À l’opposé des justes revendications de la population portées par la société civile, le cartel politico-mafieux connu sous le nom de PHTK (Parti haïtien tèt kale ouvertement néo-duvaliériste) cristallise et organise depuis dix ans, avec l’aval décomplexé du « Core Group », une gouvernance du pays caractérisée par la dilapidation des fonds publics et des fonds du programme PetroCaribe (3,8 milliards de dollars), le blanchiment d’argent à grande échelle, l’extinction programmée des droits citoyens, la décapitation des institutions de l’État, la violente répression des protestations citoyennes publiques par l’instrumentalisation des corps répressifs de la Police nationale, la tolération et/ou la complicité de l’Éxécutif dans les assassinats ciblés et les massacres dans les quartiers populaires, la banalisation de la corruption et du népotisme installés à tous les étages de l’édifice social.

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L’État sauvage. Violence politique, fantômes ombilicaux et pestilence en Haïti

— Par Joël Des Rosiers —

– « Qui va là ? », Hamlet, Shakespeare

Au début du XIXe siècle, les ambitions colonialistes de la France subirent coup sur coup deux défaites qui sonnèrent le glas de son expansion impérialiste au Moyen-Orient et en Amérique. Deux épidémies eurent des conséquences majeures sur le moral, la santé et l’aptitude au combat des troupes françaises et de leurs supplétifs locaux confrontés à un environnement hostile, la chaleur extrême du désert et la pestilence tropicale de l’île, locus terribilis inhabitable, infesté d’aèdes vecteurs d’infection.

Telles furent la peste bubonique lors de l’Expédition d’Égypte (1789-1801), campagne dirigée par le général afro-caribéen né à Jérémie (Haïti) Thomas Alexandre Dumas, « le fils de la négresse » qui versa sa part de gloire à la France, et la fièvre jaune (1801-1803) survenue en deux vagues lors de l’expédition esclavagiste de Saint-Domingue. Les soldats français succombaient au vomito negro, sang noirâtre sorti des entrailles. Port-au-Prince était transformé en mouroir, ce qu’il restait de troupes en débandade se réfugiaient dans les réduits côtiers.

L’Égypte et Saint-Domingue étaient des fronts militaires certes éloignés mais unis par une stratégie commune.

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Appel d’un collectif d’écrivains : il faut barrer la route au retour de l’emprise mortifère du duvaliérisme en Haïti

— Par un collectif d’écrivains, enseignants-chercheurs, universitaires, essayistes, acteurs socio-professionnels et citoyens engagés —

Notre pays que voici vit les heures les plus sombres de son histoire depuis la défaite de la dictature duvaliériste en 1986. Les nouvelles rapportées quotidiennement par la presse nationale l’attestent au défilé mutique des corbillards : massacres impunis commis par les gangs armés dans les quartiers populaires, violente répression des manifestations pacifiques du fait de la Police nationale d’Haïti instrumentalisée par l’actuel Exécutif, décapitation de l’appareil judiciaire, mise en coma du Parlement, assassinats sélectifs en pleine rue, intensification des enlèvements contre rançon, etc. Comme au temps funeste de Papa Doc Duvalier, il semble venu le temps de se parler par signes. Et la peur et l’angoisse se réinstallent dans les foyers, les parents hésitent à envoyer leurs enfants à l’école, et tôt en fin de journée les paisibles habitants des principales villes du pays se barricadent chez eux, craignant d’être la cible des gangs de rue et des zenglendos recyclés dans les basses œuvres du pouvoir politique.

Notre pays que voici a mal à l’idéal du vivre ensemble légué par les fondateurs de la Patrie en 1804.

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Le malheur du monde

Pour la distance de précaution. Contre la distanciation sociale

Par Joël Des Rosiers, MD, FRCP, IPA, Psychiatre, psychanalyste, écrivain —

« Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde. » écrit Albert Camus dans Poésie 44 un essai paru en 1944, durant la Deuxième Guerre mondiale. L’objet en question est à définir comme un objet philosophique, c’est-à-dire le résultat d’une activité de la pensée, que le sujet se préoccupe du monde ou de lui-même. S’agissant de l’expression « distanciation sociale », calque de « social distancing », on ne peut que regretter le coupable empressement avec lequel elle s’est illustrée dans les médias et les réseaux sociaux.

Négation de la loi d’échanges entre les hommes, décrété au nom de l’impératif d’endiguement de la contagion, le syntagme est désormais passé dans la langue et pas seulement. Ne le retrouve-t-on pas flanqué d’une congruente cohorte de termes techniques issus du novlangue dont l’infâme jargon collapsologie, science de l’effondrement de la civilisation ? La distanciation sociale ne représente pas moins un contresens moral et historique. Parce que distanciation signifie refus des liens entre les classes sociales et fut dans un autre contexte introduit par le dramaturge Bertol Brecht pour définir un processus critique de création théâtrale, il y résonne de ce fait un jeu d’équivoques.

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Le prodigieux parcours de Jean-Robert Léonidas

— Par Mérès Weche —

Léonidas, un homme multidimensionnel

Jean-Robert Léonidas est connu pour son excellence en matière de pratique médicale et de production littéraire. Il a mené à bien sa double vie d’écrivain et de médecin. Il exerce tour à tour l’endocrinologie aux États-Unis, enseigne, publie dans des journaux médicaux tels le JAMA américain, le Lancet de Londres. En même temps, il est journaliste culturel à Haïti-Progrès, signe un beau livre sur la peinture haïtienne, s’adonne à la poésie, écrit des essais, des romans, etc. À un moment donné, un difficile choix esthétique s’impose. Il abandonne la médecine pour la littérature.

Sa jeunesse à Jérémie, ses études universitaires à Port-au-Prince, son séjour aux Cayes et à Thomazeau, sa spécialisation et aux États-Unis, ses voyages, son retour dans la Grand-Anse haïtienne, depuis plus de dix-ans, sa plongée dans le pays profond; tout cela constitue la matière première de son œuvre.

Très attentif aux actualités de culture et de littérature, il présente dans Haïti-Progrès plusieurs recensions d’œuvres d’auteurs haïtiens. Invité de Bibliobs, il signe quelques articles sur le site littéraire du Nouvel Observateur (France).

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Naomi Osaka : tennis et psychanalyse, une victoire haïtienne de pères en filles

— Par Joël Des Rosiers —

« Tout ce que je sais de plus sûr à propos
de la moralité et des obligations des hommes,
c’est au football que je le dois. »
– Albert Camus

La brillante victoire au US Open (6-2, 6-4) le 8 septembre dernier de la jeune Haïtienne-Japonaise Naomi Osaka (20 ans) aux dépens de l’Américaine Serena Williams (37 ans) appelle quelques remarques sur les concepts de répétition et de rivalité entre soeurs. Le tennis doit être considéré dans la perspective d’une sublimation de l’agression tout en préservant l’intégrité du soi et celle de l’adversaire. Freud introduit au long de ses écrits tardifs la notion de pulsion de mort à l’œuvre dans le fanatisme qui sévit dans le sport de compétition. On a ainsi entendu la foule huer le juge du match alors que Serena en colère l’injuriait pour les sanctions prises à son encontre en raison de violations répétées du code de conduite : coaching de son entraîneur qui faisait des signes de ses mains durant le match, coup de raquette sur le sol et outrages au juge.

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La déshumanisation d’Haïti

La vocation populiste de Trump s’alimente à la grande frayeur nataliste des Blancs

— Par Joël Des Rosiers —

« Le voici maintenant cet habitant des frontières,
sans identité,sans désir ni lieu propres,
errant, égaré,douleur et rire mélangés,
rôdeur écoeuré dans un monde immonde.
C’est le sujet de l’abjection. »
— Julia Kristeva

Le président des États-Unis est un raciste comme il en existe, hobos tapis au fond des tavernes miteuses du Nebraska ou à la Maison-Blanche ou encore au Congrès même.

« They all have AIDS, why do we need them ? They come from a shithole country. Take them out ! » Hyper symptomatiques, ces saillies de Donald Trump résonnent avec leur cortège d’images de latrines, de fèces, de fluides biologiques, de maladies sexuelles et de contamination. Le langage utilisé par Trump est pré-symbolique, avant toute acculturation, avant toute représentation. Connu pour souffrir d’une phobie de la contamination et de l’empoisonnement, traqué par l’enquête du procureur spécial qui se referme inexorablement sur lui, Trump laisse échapper son angoisse de la destitution, sa toute-puissance et ses pulsions de destruction qui ne se laissent pas soumettre à l’ordre symbolique : lieu, fonction présidentielle, décorum, rencontre avec des sénateurs.

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In Memoriam : Rachel Beauvoir, la reine-soleil couchée

— Par Joël Des Rosiers —

« Et les chiens se taisaient » – Aimé Césaire

La mort de Rachel Beauvoir est une blessure. Nous dînions en famille, il y a quelques jours, dans le jardin édénique à l’ombre des grands arbres sacrés qui relient la terre au ciel. Les neuf chiens, un peu agités, aboyaient sans cesse jusqu’à ce qu’ils eurent fini par se résigner à notre présence. Dehors, les stridences des klaxons d’un « blocus » routier interminable qui nous avait retenus plusieurs heures dans la poussière, à hauteur de Mariani, se heurtaient aux hautes murailles barbelées de la propriété. Et Nirva, l’illustre servante, qui apparaissait et disparaissait comme dans le poème de Perse, jetait un voile de pudeur et d’irréalité sur cette rencontre qui allait devenir à notre insu un dîner d’adieu.

Lorsque je lui ai annoncé la mort de Rachel Beauvoir qui nous avait accueillis en compagnie de son mari avec une délicieuse hospitalité, ma fille Inès qui du haut de ses cinq ans possède le don des langues m’a demandé si les neuf chiens avaient pleuré.

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Héros postcoloniaux

— Par Joël Des Rosiers —

Pour moitié sont morts mes amis.
Je t’en ferai de nouveaux, dit la terre.
Non, rends-les moi, comme ils étaient, plutôt,
Avec leurs fautes et tout le reste, je pleurais.
Sea Canes(1), Dereck Walcott

J’écris cet hommage pour saluer la mémoire de deux penseurs qui viennent de disparaître. Et aussi pour vaincre l’immense peine qui m’étreint chaque fois qu’il y a à l’œuvre le rappel de l’enfance. Je ne raconterai pas ce que je sais de Bernard Labrousse ou de Maximilien Laroche. Mais ce que leur disparition laisse en moi d’humanités contuses. Si le premier est de ma génération, cela signifie-t-il que je sois moi-même en sursis et que désormais la mort puisse frapper sans préavis comme un huissier, un de ces jours insaisissables où s’éteint la lumière du jour ? Mon métier m’a appris au cours d’une longue fréquentation à côtoyer la mort, la fin irréfutable tant qu’elle n’est pas encore là, la grande amie, l’ennemie intime. Laroche m’avait dit un jour que les médecins regardent les hommes avec les deux yeux : l’un regarde la vie, l’autre la mort.

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Salon du livre de Montréal 2015

La région Martinique au Salon du livre de Montréal

salon_livre_montreal-2015Après le salon du livre de Paris, la Martinique sera présente à la 38e édition du salon du livre de Montréal qui se déroule du 18 au 23 novembre 2015 à la Place Bonaventure. Elle accueillera ses visiteurs sous le pavillon MARTINIQUE (stand n°270).

La délégation martiniquaise est composée de plus d’une quinzaine d’auteurs, d’illustrateurs, d’éditeurs et de libraires qui présenteront au public canadien la diversité de la culture, l’universalité de la littérature martiniquaise ainsi que la richesse de la production littéraire du pays. Cette délégation compte des auteurs tels que : Suzanne Dracius, Alfred Alexandre, Miguel Duplan, Jean-Marc Rosier, Nadia Chonville, François Gabourg, Charles-Henri Fargues, William Rolle, Jala. Renée-Laure Zou… L’illustratrice Stéphanie Destin et l’artiste Géraldine Entiope font partie de ces invités.
Des maisons d’édition, des dessinateurs, des producteurs et des auteurs invités de la Caraïbe et d’autres pays cohabiteront sur le pavillon de 75 m2 aux couleurs de la Martinique placé sous le signe fort du centenaire des naissances de Joseph Zobel et de Suzanne Roussi Césaire.

Plusieurs temps forts et animations rythmeront le pavillon durant ces six jours de salon : séances de dédicaces, table ronde, animations littéraires, lectures, contes, performances, spectacles de marionnettes bwabwas pour enfants.

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L’homme rapaillé des Caraïbes

Recension de Métaspora. Essai sur les patries intimes de Joël Des Rosiers

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— Par Pascal Chevrette —

À première vue, Métaspora est un titre qui fait sourciller. Néologisme forgé par le poète québécois d’origine haïtienne Joël Des Rosiers, il recèle de nombreuses significations et s’apparente à « diaspora » ; disons qu’il approfondit l’idée de la dispersion en l’amenant du côté de l’art et de l’imaginaire.

Les essais, notes de lecture, conférences et entretiens qui composent cet essai original explorent les aspects d’une esthétique se voulant « transnationale » et « postcoloniale ». Après un texte d’introduction où il présente sa notion (« Fabriques de la métaspora »), Des Rosiers l’applique aux œuvres de plusieurs écrivains, poètes et artistes, principalement originaires des Caraïbes, qui ont tâché, par l’art – par la sublimation – de se guérir des blessures et drames issus d’un passé colonial.

Des Rosiers est un poète prolifique, médecin, psychiatre et aussi psychanalyste. Sa prose, précieuse et élégante, florissante, se nourrit à ces trois racines et allégeances. Ayant étudié en Europe, il réside actuellement au Québec où il exerce la médecine.

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Dany Laferrière sous la Coupole de l’Académie française

— Par Joël Des Rosiers —

lafrerriere_academicienEn ce jeudi 28 mai sous le Haut patronage de M. François Hollande, Président de la République, du Premier Ministre du Québec M. Philippe Couillard, des Ministres de la Culture Fleur Pellerin de France, Hélène David du Québec et Dithny Joan Raton d’Haïti, du chef de l’Opposition M. Pierre Karl Péladeau, du chef du parti Québec Solidaire Mme. Françoise David, de quatre ex-premiers ministres, MM. Bernard Landry, François Charest, Pauline Marois du Québec et Mme. Michèle Duvivier Pierre-Louis de Haïti ainsi que de Mme. Michaëlle Jean, ex-gouverneure générale, Secrétaire générale de la Francophonie.

Par un temps magnifique, dans une langue aussi élégante que précise, le nouvel immortel, Dany Laferrière, a prononcé comme l’exige la tradition, l’éloge en tout point remarquable d’Hector Bianciotti, le romancier italo-argentin, son prédécesseur au fauteuil numéro 2. Ce siège inchangé et immobile, s’il avait été occupé naguère par Montesquieu, l’auteur des Lettres persanes, le fut surtout par un Dumas, le petit-fils du Général Alexandre Dumas dont la grand-mère Marie-Cessette Dumas était une esclave de Saint-Domingue. Car le fils du Général, le célèbre Alexandre Dumas, le plus traduit des romanciers français qui nous donna tant à lire et à rêver dans des allusions si nombreuses à ses origines créoles, eut à son tour un fils naturel, le romancier et dramaturge Alexandre Dumas fils.

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Métaspora : au-delà de l’identité ou l’ouvroir anthropologique de l’écrivain des Tropiques

— Par Paultre Pierre Desrosiers —

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« Celui qui n’a pas de patrie acquiert une autre liberté. »
– Stefan Zweig, Le Monde d’hier

Métaspora. Essai sur les patries intimes de Joël Des Rosiers est le fruit d’un long et pertinent travail de réflexion qui se donne pour ambition de s’ouvrir aux expériences sensibles, aux modifications des pratiques et des représentations que les « égarés » produisent, car issues des richesses inépuisables de la confusion du monde et de l’enchevêtrement des cultures. C’est que la mondialisation des idées, des biens et de la littérature est un phénomène déjà ancien. Goethe jadis rappelait son espoir de la transfiguration du réel par une Weltliteratur (littérature mondiale). De l’univers contemporain souvent hybride et animé de complexités diverses dont une histoire postcoloniale toujours pesante, Des Rosiers rapporte des utopies culturelles et des fulgurances esthétiques qui congédient la suprématie du local sur l’universel, de l’origine instinctive sur la pensée mûrie⋅ Au fil de lectures et de compagnonnages qui vont bien au-delà des références communes : de la philosophie à la littérature, de la peinture contemporaine à la photographie puis du cinéma à la musique urbaine et à la politique, l’auteur s’empare de toutes les formes de la culture dominante dans une érudition héritée de Borges, fragmentaire et profondément poétique⋅

Lire aussi : Tanella Boni : Métaspora.

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Requiem pour Jean Métellus (1937-2014)

Portrait d’un médecin en poète
— Par Joël Des Rosiers —
jean_metellus-2L’impression, tenace, envoûtante, que la disparition d’un grand homme de lettres et d’un grand médecin, neurologue spécialiste du langage, puise à des eaux profondes, non pas seulement celles de la tristesse ou de l’accablement – non sans que l’inquiétude ne vienne à celui qui se risque à saluer la mémoire du disparu – mais de la certitude que son œuvre contenait en elle-même les racines d’un art médecine et qu’on y retrouvait une langue d’écrivain, sa musique, sa distinction, son entêtement et finalement ce qui est irréductible à tout autre, une écriture.

Peu de médecins écrivains ont incarné à ce point la problématique du double déploiement : écrire un poème est chaque fois réapprendre à parler. Comme si l’intention poétique, hostile à toute entrave et toujours jalouse de l’indépendance du langage, annulait par avance la faculté de parler. Pourtant, face à ces deux instances, Jean Métellus arrivait à préserver avec force l’autonomie de l’une, la poésie, tout en établissant l’incidence de l’autre sur les actes de parole, la science du langage.

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Haïti, pays invité d’honneur du Salon du livre de Montréal

20 au 25 novembre 2013

Suite aux Rencontres québécoises tenues en Haïti du 1er au 8 mai 2013 à l’occasion des dix ans de Mémoire d’encrier, le Salon du livre de Montréal accueille Haïti comme pays invité d’honneur. Pour la présente édition, qui se déroule sous le thème «Une passerelle entre les cultures», Haïti déploie son imaginaire à la Place Bonaventure.En savoir plus

Pour l’occasion, des écrivains haïtiens sont parmi nous :Yanick Lahens, Kettly Mars, Emmelie Prophète, Laënnec Hurbon, James Noël, Jean-Robert Léonidas, Jean-Euphèle Milcé, Michel Soukar et Gary Victor.

Sont également présents des professionnels du livre: Monique Lafontant, librairie La Pléiade, Anaïse Chavenet, Communication Plus Distribution, Charles Tardieu, éditions Zémès. L’ancienne première ministre Michèle Duvivier Pierre-Louis, figure emblématique du changement en Haïti et présidente de la Fondation Connaissance & Liberté (FOKAL), fait aussi partie de la délégation.

 

 

 

 

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