— Par Yves-Léopold Monthieux —
L’adoption d’un discours permanent de défiance et de rupture, méticuleusement entretenu pendant des décennies par une classe politique unanime, prenant dans la société martiniquaise les formes les plus diverses, suscitant les manifestations les plus inattendues, et qui est véhiculé par la totalité des moyens médiatiques à disposition, ne pouvait pas rester sans conséquences pour la société martiniquaise. Laquelle est, par ailleurs, paradoxalement, avec ses élus, viscéralement attachée à l’assimilation matérielle. Bref, les pieds et le ventre dans l’assimilation, la tête en dehors, le malade est atteint de schizophrénie !
Comment comprendre, dès lors, avec une divergence aussi fondamentale – assimilation assumée et volonté de rupture affirmée – au sein d’une population qu’on exhorte à faire peuple – peuple identifié : petits-fils d’esclaves, peuple empoisonné – mais dont on s’acharne à développer chez elle que des sentiments d’individualisme, qu’une telle combinaison chimique ne finisse un jour par exploser ? Telles sont les eaux grises dans lesquelles baigne la politique martiniquaise.
On sait que les populations sont parfois folles, les peuples devenir fous (celui qui écrit ces lignes est un peu fou). On sait même qu’ils peuvent disparaître. On peut être inquiets des expressions de folie générées par la pandémie, y compris par des cerveaux structurés, et de la stupéfiante indifférence observée pour ceux qui nous quittent, même lorsque ceux-ci sont des amis ou des proches. Tout se passe dans la catastrophe du COVID comme si le politique avait pris le pas sur la santé, l’opposition à l’autorité sur le combat pour la vie. Les références aux spécificités des DOM, aussi judicieuses fussent-elles, ne sont que des adjuvants au combat politique, à l’image du déplorable épisode du chloredecone.
J’ai toujours cru que le futur martiniquais n’allait pas se déterminer, à l’occasion de référendums-croupion, par les demi-réponses téléphonées (interprétées avec une grande liberté par les pouvoirs) aux demi-questions posées aux électeurs martiniquais. Lesquelles – questions et réponses – n’ont rien à voir avec celles, claires et non ambigües, qui sont appelées à déterminer le devenir de la Nouvelle-Calédonie. L’avenir martiniquais pourrait s’inscrire dans des perspectives bien plus obscures.
Fort-de-France, le 14 août 2021
Yves-Léopold MONTHIEUX