— Par Yves Léopold Monthieux —
Les élections de la CMT sonnent peut-être le glas d’une controverse commencée depuis une trentaine d’années et relative aux rapports entre les élus de droite et de gauche. Ce débat a pris toutes les formes et s’est déroulé par des formulations diverses dont la plus vieille fut « la nouvelle droite » Elle s’adressait au PPM, en mode d’accusation, par le maître de la formule, Alfred Marie-Jeanne. C’était au cours de la campagne électorale de l’élection régionale de 1989. En réalité, la saillie était en gestation depuis le moratoire d’Aimé Césaire que le patron du MIM avait vivement critiqué. Même si l’accusation tenait avant tout de la posture, elle a poussé le PPM à s’arcbouter contre les avances à peine voilées que leur exprimait Pierre Petit. Lequel s’était opposé à ses amis qui, au départ du PKLS du pacte global d’unité, souhaitaient la dissolution de l’assemblée de la région.
En réalité, c’est AMJ qui fit l’ouverture vers la droite lors de son accession à la présidence de la région, en 1998. La 1. ère vice-présidence fut accordée à Pierre Petit et deux présidences de commission furent confiées à Miguel Laventure et Jean-Marcel Maran. Mais ce ne fut pas le moindre talent d’AMJ que d’avoir réussi à faire prospérer l’accusation de nouvelle droite alors qu’il a été le premier à s’ouvrir à la Droite. Le parti de Trénelle ne sut pas apporter la riposte adéquate aux accusations contradictoires de nouveau parti de droite par le MIM et de parti sectaire par la Droite.
Reste qu’une brèche significative était ouverte dans laquelle finira par pénétrer le parti de Trénelle. Ce fut le rapprochement avec Osons oser de Pierre Petit puis la création du mouvement d’Ensemble pour une Martinique nouvelle (EPMN) ouvert à tous, sauf aux indépendantistes. Soit dit en passant, le PPM ne s’est jamais allié aux indépendantistes comme s’il était plus aisée face aux électeurs, d’assumer l’orientation droitière que le soupçon de rupture qui lui a parfois été faite. Bref, la controverse connut son paroxysme en 2015 avec le rapprochement inattendu du Gran Sanblé et de Ba péyi-a an chans qui allait inverser la tendance du premier tour de l’élection de la CTM. Au contraire du précédent, ce rapprochement provoqua un choc d’une grande violence au PPM que seule justifiait l’ampleur de sa déception à la suite de son échec. Cette péripétie sera dénoncée tout le long de la première mandature de la CTM par l’expression « alliance contre nature ». reprise par les échos.
. Mais la critique s’est arrêtée net à l’approche du renouvellement de la CTM et ce modèle est devenue référence. Tout le monde veut son alliance avec la Droite qu’il n’est plus question d’accuser « d’indigne » ou de « contre nature ». On le sait, ce n’est souvent qu’arrivés à leur paroxysme que les controverses se dénouent et que du jour au lendemain les travers de la veille se transforment en vertus. On avait beau répéter que la ligne de partage politique entre la Gauche et la Droite était désuète, l’argument inverse était commode pour compenser le vide idéologique. Aujourd’hui que tout le monde a goûté de ces alliances, c’est la fin du traumatisme qui débouche donc sur la véritable explosion des lignes et des codes.
. Quasiment toutes les équipes parties à la conquête de la CTM possèdent dans leurs rangs et s’en félicitent, des « autonomistes », des « indépendantistes » et des « départementalistes ». Il est touchant d’entendre Catherine Conconne faire avec effusion l’éloge de son co-listier Fred-Michel Tirault et d’observer dans une salle acquise à Alfred Marie-Jeanne la salve d’applaudissements qui ponctue l’intervention de Miguel Laventure. Dans les deux cas c’est la compétence qui est mise en avant. Mais aux clivages désormais caducs, il ne faudrait pas substituer le principe populiste du « Nou tout’ kapab » ou celui du melting-pot réputé apolitique qui reconnaîtraient la même capacité de faire de la part d’un sportif ou d’un ingénieur, d’un Césaire ou du saltimbanque lambda.
. Fort-de-France, le 25 mai 2021
. Yves-Léopold Monthieux