Sur France Inter, dans Boomerang, Barack Obama en interview pour parler de son livre.
Barack Obama a publié le premier tome de ses mémoires, Une terre promise, aux éditions Fayard, en novembre 2020. À l’occasion de la sortie de ce livre, celui qui fut le Président des États-Unis pendant huit ans, et prix Nobel de la Paix, s’est confié dans une interview-radio exclusive à Augustin Trapenard. Il a évoqué son parcours, le pouvoir des mots, et ses espoirs pour le monde de demain.
France Inter, lundi 8 février 2022
Son histoire, digne d’une épopée, est celle d’un homme que rien ne prédestinait à accéder à la fonction suprême. Jeune, métisse, sans expérience, il a su convaincre par la force du récit qu’il proposait et incarner l’espoir d’une Amérique nouvelle. Dans Une terre promise, il revient sur la naissance de son engagement citoyen, et sur les étapes qui ont jalonné sa première élection en 2008, alors que son pays était à l’aube d’une crise financière majeure. Observateur sans complaisance de sa propre action politique, il livre une analyse lucide des errances et des défis auxquels se confronte la démocratie américaine. Un récit fleuve, sincère et épique, qui témoigne à la fois de la force des mots et de leur impuissance.
Extraits de l’interview
« Ce qui menace la démocratie, c’est ce que nous devons à la mondialisation et à la technologie : l’accélération des inégalités, et des gens qui se sentent laissés pour compte. Cela a rendu une grande partie de la population vulnérable aux appels du populisme.
– Le pouvoir des mots a été compromis par les changements du paysage médiatique. Aujourd’hui, il y a Internet et un millier de plates-formes, et il n’y a plus de règles convenues sur ce qui est vrai ou faux. C’est le plus grand danger actuel pour la démocratie.
– Nous ne pourrons pas revenir à une époque où il n’y avait que quelques arbitres de la vérité. Mais nous devons trouver des moyens de tenir les réseaux sociaux responsables de la manière dont nous faisons la différence entre réalité et fiction.
– Michelle et moi avions l’habitude de plaisanter sur le fait que, si les gens voyaient que je ne suspendais pas mes vêtements, ou s’ils voyaient comment mes filles me taquinaient à table, je perdrais beaucoup de mon prestige en tant que président.
– À la fin de mon mandat, j’avais fait assez d’erreurs pour me sentir à l’aise : il n’y avait plus rien que je ne pouvais pas gérer. Si des extraterrestres avaient atterri devant la Maison Blanche, j’aurais dit : « Allons leur parler et voyons ce qu’ils veulent. »
– Après la tuerie de Charleston, j’ai été invité à prononcer l’oraison funèbre. Ça a été très dur. A la fin du discours, j’ai chanté Amazing Grace. C’est un moment où j’ai utilisé des mots, de la poésie, pour faire jaillir un espoir commun hors du désespoir.
– Certains écrivains sont tellement doués qu’ils canalisent les dieux. Je n’en suis pas. Moi, je suis plutôt comme un maçon quand j’écris, j’essaie de monter un mur solide.
– L’important est de connaître suffisamment l’histoire pour que lorsque le nationalisme de droite refait surface, nous nous rappelions à quoi il mène. Pour que lorsque nous voyons le sectarisme, les préjugés refaire surface, nous nous en rappelions les conséquences.
– Ceux d’entre nous qui croient en une démocratie tolérante, pluraliste et inclusive, qui offre à tous des possibilités, doivent être vigilants. Ils doivent faire mieux, travailler plus dur, et ne pas considérer la démocratie comme acquise. »
Présentation du livre aux Éditions Fayard, extrait
Une terre promise est aussi un récit introspectif – l’histoire du pari qu’un homme a lancé à l’Histoire, d’un militant associatif dont la foi a été mise à l’épreuve sur la scène internationale. Barack Obama parle sans détour du défi colossal qu’il lui a fallu relever : être le premier candidat afro-américain à la présidence, incarner « l’espoir et le changement » aux yeux de toute une génération galvanisée par la promesse du renouveau, et devoir à chaque instant prendre des décisions d’une gravité exceptionnelle. Il évoque la façon dont sa vie à la Maison-Blanche a pu affecter sa femme et ses filles, et parle sans fard des moments où il s’est retrouvé en proie au doute et à la déception – sans pour autant renoncer à croire qu’en Amérique le progrès est toujours possible. Ce livre puissant et magnifiquement écrit est l’expression de la conviction profonde de Barack Obama : la démocratie n’est pas un don du ciel, mais un édifice fondé sur l’empathie et la compréhension mutuelle que nous bâtissons ensemble, jour après jour.
Télérama : Aux États-Unis, des réserves sur l’action du Président exprimées à la sortie de l’ouvrage
Ce nouvel ouvrage, les troisièmes Mémoires de Barack Obama après L’Audace d’espérer et Les Rêves de mon père, porte sur son premier mandat. Il y évoque ses politiques, des anecdotes sur sa vie privée et publique, ou encore ses relations avec les Républicains, comme le leader du Sénat Mitch McConnell (…)
Même si les critiques de la presse américaine sont très positives, l’ancien président n’échappe pas à l’examen de son bilan à l’aune de l’irruption de Donald Trump sur la scène politique. A-t-il une part de responsabilité dans son ascension ? Aurait-il pu faire davantage pour le contrer ? Tout en louant ses qualités d’auteur, plusieurs critiques ont aussi noté le silence relatif de Barack Obama sur les questions raciales, alors que les États-Unis ont été profondément secoués ces derniers mois par les morts de plusieurs Noirs aux mains de policiers blancs. « Il écrit sur la race comme s’il était très conscient qu’il sera lu par quelqu’un qui sera offensé », a noté l’autrice nigériane Chimamanda Ngozi Adichie dans le New York Times. Cette critique rejoint les frustrations de nombreux militants de la cause afro-américaine à l’égard de l’ancien président, accusé de ne pas avoir fait assez pour la communauté noire.
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Demarty, Charles Recoursé et Nicolas Richard
Barack Obama répond à la question des Éditions Fayard : « Que souhaitiez-vous accomplir avec ce livre ? »