Une disparition brutale
Le monde de l’art caribéen est en deuil. L’artiste dominiquais Marvin Fabien, martiniquais d’adoption, est décédé à l’âge de 42 ans. Le montage de l’exposition qui lui est consacrée venait tout juste de s’achever, que le public pourra prochainement admirer à la galerie La Véranda de Tropiques Atrium Scène Nationale.
Le site culturel de Tropiques Atrium rend hommage à l’artiste, et salue ainsi sa mémoire :
« À l’heure où s’achève le montage de son exposition, nous apprenons le départ « au pays sans chapeau » de Marvin Fabien, fauché brutalement par la maladie, à l’âge de 42 ans.
Diplômé de l’Institut Régional d’Arts Visuels (IRAV), ce jeune Dominiquais, résidant en Martinique, y a laissé l’image d’un étudiant généreux, curieux et agréable. Il incarnait l’artiste complet, sans barrières esthétiques ni techniques.
Doctorant en art et musicien-compositeur, il développe une création artistique multimédia qui questionne la Caraïbe, son identité, ses pratiques culturelles et populaires, à travers des performances, le mixed media ou des installations digitales développant parfois l’interaction avec le spectateur.
Ce jeune talent s’est produit dans plusieurs manifestations internationales en Martinique, aux États-Unis et dans la Caraïbe, suscitant un vif intérêt et nouant des collaborations avec d’autres artistes.
L’exposition Caribbean bodies: of shining fragments, qui sera prochainement présentée à La Véranda devient alors un ultime hymne à la riche et complexe Caraïbe. Cette exposition dont Marvin Fabien a suivi chaque étape à distance, résume bien son propos artistique : résolument caribéen, ouvert et plein de fraîcheur. A l’image de cette vitalité caribéenne qui ne cesse de surprendre le Monde.
Tropiques Atrium Scène nationale salue la mémoire de ce talent et exprime sa pleine solidarité et son profond soutien à sa famille et à ses proches. »
Décembre 2020 – Galerie la Véranda : L’exposition « Caribbean bodies : of shining fragments »
Marvin Fabien est un artiste multimédia, doctorant en art, également musicien compositeur. Sa démarche artistique questionne les attitudes performatives dans un contexte populaire et régional qu’il met en oeuvre dans des dispositifs artistiques incluant les nouveaux médias et les nouvelles technologies : images, vidéo et son. Il emploie ainsi différents moyens d’expression, le dessin, la peinture, le collage, aussi le sound art, le vidéo mapping, les mixed media et l’installation digitale.
Téléchargez le catalogue de l’exposition… Lire ici un extrait :
« L’exposition Caribbean bodies : of shining fragments propose un travail artistique multidisciplinaire s’inscrivant dans une problématique caribéenne. Elle réunit des œuvres mixed media dont trois séries : Bouyon, Bodies Inside Out et Black Antilles.
La première série Bouyon, réalisée entre 2014 et 2019, est constituée de compositions bi-dimensionnelles, techniques mixtes sur toile ou sur papier. Elles donnent à voir les convulsions de corps fragmentés dont les formes complexes vacillent entre figuration et abstraction. Une sensibilité plastique propre à l’artiste entremêle le trait, l’aplat, le jus coloré et les paillettes. Les silhouettes apparaissent et s’évanouissent, sur un fond uniforme, par un jeu de lignes et de surfaces de couleurs essentiellement primaires et secondaires. Les pleins et les vides, qui articulent la relation fond-forme, contrastent et participent au surgissement et au dynamisme des figures. Ces corps féminins et masculins arborent des postures et des attitudes, souvent provocantes, que nous retrouvons dans la culture musicale caribéenne.
Pour l’artiste, ces caribbean bodies ne sont pas que des corps « aveugles » dans des espaces technologiques et ancrés dans un monde défini par les codes de «l’autre». Ce sont des corps énergétiques, des corps conscients des vibrations qu’ils déploient dans l’espace comme pour redéfinir le corps caribéen, comme pour générer un nouveau code vibratoire qui unit chacun.
Il questionne par là la complexité de l’univers caraïbe, un monde insulaire, dont les cultures se sont façonnées au fil du temps, au fil des rencontres, parfois conflictuelles et tumultueuses, au fil des strates de cultures, d’histoires, de peuples, de mentalités, etc. Il s’interroge alors sur l’idée d’une image projetée, préfabriquée que les Caribéens auraient d’eux-mêmes, sur l’adoption de valeurs esthétiques musicales venues d’ailleurs, et sur le fait de se demander si elles ne seraient pas un moyen de se constituer une identité nouvelle. »
Des hommages sur le Net
Hugo Paterne, dans People Bò Kay, : « Il ne verra pas le montage final de ses œuvres à Fort de France et il n’aura pas l’occasion de savourer l’enthousiasme du public venu visiter l’exposition qui leur est consacrée, ni d’échanger avec ceux qui auraient souhaité mieux comprendre le plasticien. »
Annabel Gueredrat, sur sa page Facebook : « Je suis encore choquée …( je respire profondément. je vois ton sourire, ton âme ! Tu es parti et tu es éternellement avec nous. Ta composition musicale pour I’M A BRUJA, je l’écoute en boucle depuis hier. Elle est si belle, si vibrante, si touchante. Tu étais un brujo ! Tu es toujours avec nous et nous te laissons partir : Marvin Fabien ! » ( avec Marielle Bompuis, Henri Tauliaut, Pierrot Marie-rose, Suzanne Péchenart, Franck Martin.)
… et pour sa participation au FIAP :
« Marvin Fabien, tu nous as quitté, beaucoup trop tôt. Toi qui as oeuvré à la réalisation de ce Festival dès sa première édition. Toi qui as donné toute ton énergie, toute ta puissance à cet événement, encore plus lors de la deuxième édition, avec ces magnifiques photos de @Jb Barret qui en témoignent. Toi qui avais une vision de l’art contemporain caribéen si claire et qui nous la transmettais à travers tes actions performances multimédia. Si passionné, si dédié à ta création ! Nous t’aimons.
Marvin Fabien, artiste contemporain multimédia, enseignant chercheur et doctorant en Esthétique et Sciences de l’Art à l’Université des Antilles, Martinique. En tant qu’artiste multimédia, ses travaux interrogent les esthétiques et les archétypes présents dans la culture des musiques populaires de la Caraïbe.
À travers ses performances digitales, il crée des espaces musicaux qu’il dirige en créant en direct une interaction entre corps, sons, lumières et vidéomapping. En utilisant l’idée de «Bouyon», type de musique originaire de son île, la Dominique, il crée des figures archétypales suggérées par des corps en mouvement, attirés par des paillettes et des lumières. »
Pour participer, voici le lien vers La Cagnotte Solidaire : Cérémonie Marvin Fabien et soutien aux divers frais engagés par son épouse.
Crédits photos : Fiap19 Martinique via Artincidence – photographe : Jb Barret