Nelson-Rafaell Madel, que l’on attend à la Martinique, est reçu dans l’émission « L’Oreille est hardie »
À Tropiques Atrium Scène Nationale, à 20 heures, les 2 et 3 octobre
« L’Oreille est hardie »
C’est une émission conçue et animée par Patrice Elie-Dit-Cosaque, sur « La1ere.francetvinfo ».
« Écouter parler les Outre-mer… Les chercher là où ils se trouvent mais aussi (et surtout ?) là où on ne s’attend pas toujours à les trouver, qu’ils soient « ici », « là-bas », « ailleurs »… Les chercher dans les livres, dans les films, sur les réseaux sociaux, dans les voyages, dans les voix, dans les regards, dans les maisons, dans les rues… et parler d’eux.
Surprendre avec des thématiques peu souvent mises en avant concernant les Outre-mer ; surprendre également en revisitant des sujets parfois maintes fois abordés, leur donner un reflet actuel. Bref, parler des Outre-mer résolument modernes, actuels, débarrassés des sempiternels clichés… Parler, écouter des Outre-mer ancrés dans leurs réalités, pas des Outre-mer fantasmés ou rêvés… »
Nelson-Rafaell Madel
Comédien et metteur en scène martiniquais, il se forme notamment auprès de Yoshvani Médina, metteur en scène cubain, puis de Claude Buchvald à Paris. Il met en scène Minoé, d’Isabelle Richard Taillant, P’tite Souillure de Koffi Kwahulé, Nous étions assis sur le rivage du monde, de José Pliya, Erzuli Dahomey, déesse de l’amour, de Jean-René Lemoine, spectacle avec lequel il est lauréat du Prix Théâtre 13 / Jeunes metteurs en scène, Poussière(s), de Caroline Stella, Au plus noir de la nuit, d’après le roman d’André Brink. Il a été notamment assistant à la mise en scène de Claude Buchvald, Pierre Guillois, Marie Ballet. En tant que comédien, il a joué sous la direction de Claude Buchvald, Pierre Guillois, Frédéric Fisbach, Anne-Laure Liégeois, Marie Ballet, Arnaud Churin, Yoshvani Médina, Naidra Ayadi, Marie Ballet, Evelyne Torroglosa, Sandrine Brunner, Paul Nguyen, Néry Catineau, Stella Serfaty, Margaux Eskenazi, Damien Dutrait, Ricardo Miranda, Pierre Notte. Nelson-Rafaell Madel est directeur artistique de la compagnie Théâtre des Deux Saisons. Il est également membre fondateur du collectif La Palmera (présentation lue sur le site Théâtre-Contemporain).
Aussi doué qu’audacieux, Nelson aime revisiter les textes, et ne craint pas de donner autre visage à quelque grande figure de l’Antiquité. Hier ce fut Andromaque, aujourd’hui ce sera Antigone, « drame lyrique chanté, avec des musiciens sur scène », un spectacle intitulé Antigone ma sœur, Oratorio, et que nous devons pour notre plus grand bonheur accueillir sous peu à la Martinique, à la salle Frantz Fanon de Tropiques-Atrium-Scène Nationale. Une bien belle proposition pour marquer cette rentrée théâtrale, après l’interruption des activités liée à la crise sanitaire puis à la fermeture traditionnelle des grandes vacances !
Présentation de l’intrigue :
« Suite à la mort de ses deux frères qui se sont entretués, Antigone n’accepte pas que l’un d’eux considéré comme traître ne soit pas enterré dignement. Antigone choisit de dire non, envers et contre tout. Pour elle, donner une sépulture à son frère demeure fondamental. Elle ne peut accepter que des lois puissent l’empêcher de faire ce qui lui semble juste. Elle le dit.
Ce soir, avec Œdipe son père, Jocaste sa mère, Étéocle et Polynice ses frères, et Ismène sa sœur, ils forment un groupe de musique mythique. Le temps d’un concert exceptionnel, nous traverserons avec eux les épisodes de la vie d’Antigone : de son insouciance jusqu’à son choix final ».
L’écriture est collective, à partir de plusieurs pièces de Sophocle.
L’interview par Patrice Elie-Dit-Cosaque :
Premier invité de l’émission en cette rentrée 2020, Nelson-Rafaell Madel se confie à Patrice Elie-Dit-Cosaque. En quelques années, le comédien confirmé, d’origine martiniquaise, est aussi devenu metteur en scène, avec une petite prédilection pour la tragédie : outre cette inclination particulière, pourquoi le choix de la figure d’Antigone et quel lien fait-il entre ce personnage et la Martinique ?
« Il s’approche, souriant, pour le rendez-vous que nous lui avons fixé au théâtre de Belleville à Paris. Et pourtant, Nelson-Rafaell Madel pourrait avoir quelques motifs d’inquiétude à quelques heures de la reprise du spectacle qu’il met en scène, J’aurais aimé savoir ce que ça fait d’être libre. Un spectacle écrit par son amie Chloë Lacan, accompagnée sur scène du multi-instrumentiste Nicolas Cloche, et qui revient dans les salles de spectacle après l’interruption due à la Covid 19. Mais non, le jeune homme de trente-deux ans a l’air plutôt serein à l’idée de cette nouvelle première parisienne qui annonce d’autres dates de tournée dans toute la France jusqu’en mai 2021. Nelson–Rafaell Madel pourrait encore s’inquiéter en attendant les résultats de son test Covid-19, sésame indispensable pour filer en Martinique et s’atteler aux dernières répétitions de son prochain spectacle Antigone ma sœur.
C’est avec le collectif qu’il a co-fondé, la Palmera, qu’il a peaufiné ce spectacle, d’abord en différents lieux en France hexagonale avant de parachever sa conception en résidence à l’Atrium, la Scène nationale de Martinique. Un spectacle qu’il montrera d’abord en matinées scolaires, puis en représentations pour le public les 2 et 3 octobre sur la scène de Fort de France, avant d’être les 6 et 7 octobre en Guadeloupe, en collaboration avec l’Artchipel.
La suite des événements aussi a l’air de sourire à Nelson-Rafaell Madel. Car après Antigone ma sœur qui, après les Antilles, partira en tournée dans l’Hexagone, le prochain projet est déjà en écriture, quasiment terminé… Dans les circonstances actuelles, il est bon d’avoir autant de clarté sur l’avenir quand on est comédien, metteur en scène et directeur de troupe. C’est peut-être cela qui rend Nelson–Rafaell Madell si souriant à moins que ce ne soit son état naturel… Il savoure ainsi la chance de pouvoir continuer à exercer ses talents aussi bien en France hexagonale que dans sa chère Martinique. Sa « chair » Martinique, pourrait-on dire, tellement l’île des Antilles est chevillée à son corps et à son cœur… Un attachement qui ne date pas d’hier, une résolution prise quasiment dès l’instant où il a posé le pied à Paris, il y a une quinzaine d’années, pour « faire du théâtre ». Une farouche volonté de marcher sur ses deux pieds, l’un à Paris, l’autre en Martinique. Et à l’entendre, il y réussit bien : et pour faire encore plus ample connaissance avec cet homme de théâtre résolument vissé sur les planches, tendez l’oreille vers « L’Oreille est hardie », à écouter sur le réseau des « Radios La1ère ».
La parole de Nelson, extraits :
Monter Antigone, pourquoi ? :
« Antigone, c’est celle qui se rebelle, celle qui veut dire non… J’ai voulu dire : Qu’est-ce que ça veut dire dans notre société d’aujourd’hui la révolte, qu’est-ce que ça veut dire aujourd’hui d’oser dire non envers et contre tout… J’ai choisi de monter Antigone parce que pour moi elle est une figure qui résonne de façon profonde avec la Martinique, je dirais même avec ce qui s’y passe en ce moment… On a des jeunes activistes, il y a beaucoup de femmes qui disent non, qui disent qu’elles ne peuvent plus supporter les choses telles qu’elles ont toujours été ; qui veulent en tout cas que ça change… en déboulonnant des statues, en faisant des manifestations… Voilà ce qui se passe en Martinique… Ça fait un an et demi que je veux monter Antigone, mais la résonance elle est encore plus forte, donc c’est un spectacle martiniquais ! »
Partir, oui, mais être fidèle à la Martinique, trouver un équilibre :
« … je veux de toute façon avoir tout le temps un pied en Martinique … j’ai besoin de bouger et j’ai besoin tout le temps de retourner à cette espèce de base et de socle qu’est la Martinique pour moi, aussi bien d’un point de vue artistique théâtral que du point de vue des énergies, que d’un point de vue de l’histoire, des histoires à raconter et puis de ce qui m’anime. »
Fort-de-France, le 7 septembre 2020