Par Yves Morhain et Bernard Chouvier Université Lumière France & Stephane Proia Université de Nimes
Resumé: Le présent travail s’attache à montrer en quoi les nouvelles formes de psychopathologie adolescente, ne se déclinent plus dans le registre de la rivalité jalouse entre semblables, de luttes pour la possession de biens, mais se manifestent par l’agression contre l’autre, le semblable, souvent de manière soudaine et brutale, Sous l’emprise de l’envie primaire et dans l’impossibilité d’élaborer leurs angoisses archaïques, les adolescents destructeurs sont en permanence à la limite de la menace d’effondrement identitaire et d’une projection évacuative. Deux cas cliniques viennent étayer la thèse d’un effondrement narcissique conjoint à la pression d’une jouissance archaïque comme déclencheurs de la pulsion de destruction. Nous considérons les agirs destructeurs de ces adolescents, qui ont pour finalité la désubjectivation d’autrui et son anéantissement en tant qu’être différent, porteur d’un désir propre, comme une parade contre la disparition subjective et partant une lutte désespérée pour la survie psychique.
Mots-Clés: Adolescence, haine, envie, destructivité.
Resumo: O presente trabalho relaciona-se com a demonstração de que as novas formas de psicopatologia do adolescente não mais se propõem ao registro da rivalidade ciumenta entre semelhantes e a luta pela posse de bens, mas se manifestam pela agressão ao outro, frequentemente de maneira súbita e brutal. Sob a influência da inveja primária e na impossibilidade de elaborar suas angústias arcaicas, os adolescentes destruidores permanecem no limite da ameaça da perda de identidade e de uma projeção de esvaziamento. Dois casos clínicos reforçam a tese da existência de uma queda brusca e narcísica aliada à pressão de um prazer arcaico como desencadeadores da pulsão de destruição. Os autores consideram que as atuações destrutivas dos adolescentes estudados têm por objetivo a falta de subjetivação ou forma de ser diferente, portador de um desejo próprio e, portanto, como uma defesa entre o desaparecimento subjetivo e assim uma luta desesperada para a sobrevivência psíquica.
Palavras-chaves: adolescência, ódio, inveja, destrutividade.
1. Introduction
De tout temps, l’adolescence a témoigné des difficultés et des impasses d’une époque et d’une culture. Elle est le lieu où peut se dire le malaise dans la culture freudien (1929). C’est ainsi qu’en France, depuis une vingtaine d’années, des manifestations de violence et de destructivité d’une extrême brutalité sont apparues et tendent de plus en plus à se banaliser parmi la population des jeunes issus de quartiers considérés comme difficiles (et/ou évoluant dans des familles vulnérables et fragiles), jusqu’à interroger l’existence d’une psychopathologie spécifique aux « banlieues. »
Provocatrices et multiformes, imprévisibles et dévastatrices, les manifestations de violence d’adolescents, en rupture de lien social et de ses lois, que l’écho renvoyé par un univers médiatique exercé à substituer l’image à l’événement rend encore plus présentes, constituent un paradigme du risque dans notre culture. Elles nous confrontent aux limites de l’analysable, en mettant à l’épreuve notre appareil à penser ainsi que nos ressources empathiques. Lorsque la violence se mue en destructivité, elle semble être l’expression du nouage victorieux de Thanatos sur Éros, ouvrant ainsi la porte aux figures de l’impensable.
2. Une nouvelle forme de psychopathologie adolescente
L’actualité de la clinique nous confronte à des troubles primaires du narcissisme, des pathologies de l’agir (qui incluent les conduites addictives et suicidaires) et du retrait (État-limite, psychopathie) : ces figures de la destructivité portent la marque de perturbations de la continuité et des frontières du Soi, et sont d’authentiques pathologies du lien intersubjectif. Associées à la précarité des dispositifs et des fonctions symbolisantes, ces pathologies mettent en cause les instances d’énonciation des limites et les processus de reconnaissance de l’altérité (Kaës, 1997, p. 45). Aussi, lorsque des événements traumatiques, – en tant qu’expériences de tension et de déplaisir sans représentation, sans dégagement possible -, se télescopent avec l’événement pubertaire, ils propulsent l’adolescent dans des agirs qui conduisent à des comportements violents, souvent imprévisibles et redoutables, pouvant aller jusqu’à l’acharnement destructif des personnes.
Ces manifestations violentes mettent en scène une disparition subjective ou une lutte désespérée pour l’existence. Elles sont à entendre dans le champ du narcissisme primaire de la construction d’une identité et d’une tentative de séparation d’avec l’infantile le plus archaïque, et non dans le registre de la transgression des interdits référés au complexe d’oedipe comme c’était le cas par le passé.
De plus en plus souvent, des actes d’une violence exacerbée sont commis par des adolescents très jeunes, qui déconcertent les adultes et les laissent parfois dans l’effroi et la stupeur. Ces explosions destructrices, immédiates, par ruptures des digues contendantes de leur agressivité, se sont déplacées des enjeux oedipiens et phalliques dans la rivalité avec le père à une problématique maternelle qui recouvre des difficultés d’existence, de séparation, de fusion archaïque, d’un lien perturbé au manque et aux limites, de l’impossibilité d’attendre et de différer, du désir d’être dans une jouissance immédiate. Cette nouvelle forme de délinquance se signale par l’agression brutale contre l’autre, mais aussi contre un certain nombre de symboles de représentants de la société. Elle relève de l’archaïque qui renvoie au sentiment même d’exister du sujet.
La répétition des actes antisociaux de ces jeunes déprivés (Winnicott), porte la marque d’une menace identitaire et d’un échec dans la mise en oeuvre du travail du lien. Leurs actes transgressifs apparaissent liés à la vulnérabilité d’une économie narcissique constamment menacée par la difficulté de pouvoir s’appuyer sur des objets internes suffisamment stables. D’autant que les carences environnementales qui ont fragilisé la stabilité interne et la sémiotisation primaire ne permettent pas d’augurer d’une capacité de relance, mais tendent plutôt à renforcer une exacerbation de leur fonctionnement comportemental. Alors que l’adolescent attend précisément de ses figures tutélaires, de son thérapeute, comme de tout adulte qui fait référence, que ceux-ci ne s’effondrent pas face à sa propre violence, expression autant d’une force nouvelle que d’une menace.
Passager d’une crise qui le traverse malgré lui, l’adolescent cherche un adulte suffisamment solide dans l’actuel, en lui et dans son environnement, mais aussi dans son histoire infantile. Nous sommes de plus en plus souvent confrontés à des adolescents, porteurs d’une souffrance identitaire-narcissique (Roussillon, 2002) liée à une problématique de contenants, d’enveloppes psychiques, de symbolisation, qui évoluent dans des quartiers considérés comme difficiles. Dans ces espaces désavoués, lieux de rupture dont la vie est en rupture de repères symboliques, des adolescents, souvent d’origine immigrée, mettent en acte leur processus d’adolescence dans des comportements de violence narcissique, où se joue l’existence même du sujet (Lesourd, 1998, p. 41).
Notre clinique auprès de ces adolescents violents nous amène à considérer leurs actes antisociaux comme une conséquence d’une attaque précoce du narcissisme et une défense identitaire. C’est à dire l’éruption d’une irrépressible destructivité qui a pour finalité la désubjectivation d’autrui et son anéantissement en tant qu’être différent, porteur d’un désir propre. Ce qu’il convient de nommer une nouvelle forme de psychopathologie adolescente relève avant tout d’une difficulté d’ancrage de leur être dans le lien social, d’un sujet pris, dans la double insertion de tout sujet dans la verticalité de la transmission intergénérationnelle et dans l’horizontalité de groupes transindividuels (Kaës, 1993).
Ces nouvelles formes de psychopathologie adolescente, qui attestent d’un changement de l’inscription du sujet dans le lien social, ne se déclinent plus dans le registre de la rivalité jalouse entre semblables, de luttes pour la possession de biens, qui fait partie du processus normal de l’adolescence lorsque le sujet doit notamment se mesurer avec ses pairs pour se différencier, s’affilier, consolider son identité et s’affranchir de la soumission aux imagos parentales. Il ne s’agit plus de problématique à consonance oedipienne, mais d’une lutte de destruction radicale de celui qui est considéré comme un ennemi possédant la jouissance. C’est ainsi que les rivalités de bandes se manifestent à travers des comportements de violence qui prennent des aspects archaïques d’une extrême brutalité, sous l’effet du narcissisme des petites différences qui
fondent les sentiments d’étrangeté et d’hostilité entre les individus (Freud, 1929, p. 56), mais surtout de la contagion affective et du règne de ce qu’il convient d’appeler la loi du plus fort.
De plus, à la vulnérabilité psychique de ces adolescents – de familles souvent déplacées –, viennent se greffer des difficultés majeures d’intégration sociale ou professionnelle qui sont vécues comme autant d’atteintes portées à des assises narcissiques (Jeammet, 2002) déjà largement grevées par la carence de référents identificatoires fiables et valorisants, obérant ainsi la capacité de sentir et de décider, de s’affranchir d’un destin hypothéqué et d’un désir instrumentalisé.
L’exclusion ne consiste pas seulement à rester en marge de la société de consommation et du bien-être, mais convoque nombre de ces jeunes, passifs ou agités, à demeure ou les contraint à l’errance, sans aucun objet de perspective.
La perte d’ancrage porte à dériver ou à s’amarrer sans discernement. La perte d’ancrage porte à dériver ou à s’arrimer sans discernement. Cette panne de la temporalité en passe de se chroniciser, conjuguée à une quasi-inaccessibilité au changement psychique, débordent du champ référé à ce que certains dénomment la crise des repères traditionnels et témoignent de ce que Castoriadis (1996) appelle le processus de dé-socialisation. Les situations sociales, d’exclusion, de rejet et d’isolement, nourrissent chez ces jeunes en panne de désir et en souffrance identitaire, – sans lieux institutionnels à investir pour exprimer leurs contradictions -, des passages à l’acte répétés ou des symptômes (réactions dépressives anaclitiques, psychosomatiques, addictions…) qui signent à leur place.
Lorsque nous rencontrons ces adolescents dans le cadre de nos missions d’Expert auprès des Tribunaux, ce n’est pas sans éprouver un sentiment d’impuissance. Malgré le rappel incessant de la réalité de l’acte, les faits qui les ont conduits à être incarcérés sont banalisés, niés. Les carences objectales qui jalonnent leur parcours, portent, nombre de ces adolescents, à mettre en scène, au sein de la famille ou dans la rue, une compulsion à détruire, comme pour constituer l’objet dans la haine, reliant celle-ci aux privations et aux injustices dont ils se considèrent, dans un mouvement de dévalorisation dépressive, comme des cibles sacrifiées.
3. De la haine à la destructivité
Je sens de la haine, j’explose et je peux frapper quelqu’un sans le connaître, nous dit Hamid (18 ans), détenu pour assassinat. Né en Algérie, le cinquième d’une fratrie de huit enfants, Hamid est arrivé avec sa famille très jeune en France. Les difficultés d’adaptation sociale et professionnelle, entraînent ses soeurs à demeure et contraignent ses frères à l’errance ou à la délinquance, d’autant que leurs parents se sont retirés de la scène sociale et éducative.
Pour Hamid, comme pour nombre d’adolescents de ces quartiers, victimes de la défection des liens familiaux, englués dans une absence de réparation sociale autre que d’assistance, la socialisation s’effectue dans la rue ou au pied des immeubles de son quartier. Espace considéré paradoxalement, à la fois comme diabolisé mais aussi comme un lieu d’appropriation d’un territoire à défendre, par le biais d’affrontements réels ou symboliques. Lieux d’errance, sans limites contenantes, investis de manière éphémère, la rue ou le quartier, qui nous situent au coeur de la problématique du dehors et du dedans, de l’appropriation d’un territoire, sont perçus par ces adolescents, comme un dehors sécurisant, comme un espace de dégagement par rapport au monde clos de la famille qui se révèle un dedans dangereux. Cependant, ces espaces déclenchent des réactions sociales de transgressions ou de violences subies ou infligées, sans possibilité de les traiter comme l’illustre le cas d’Hamid : Dans la rue, un groupe de jeunes que j’ai jamais vu, s’est mis au milieu de la route et y-en a un qui me donne un coup de poing. Le plus grand m’insulte sur ma mère. Ils voulaient se battre. J’ai insulté sa mère au grand qui me pousse et veut me frapper avec les autres. Il m’a donné un coup de pied et me fait tomber. Je me suis vite retourné pour prendre un couteau et je l’ai frappé au visage. Il est tombé et y avait du sang. Avec mes copains, on a continué à lui donner des coups et puis on est parti… Il paraît que le type est mort à l’hôpital.
Dans l’après-coup, Hamid exprime un sentiment de haine particulièrement prégnant, qui lui paraît légitime au regard d’une vie considérée comme entravée et en réplique à des attaques et des humiliations dont lui et sa communauté se sentent victimes. Ce vaste ensemble de sentiments négatifs, à la fois confus, complexes et sans objet précis, peut se comprendre comme la crainte d’un dehors perçu comme menaçant, hostile. Elle serait une puissance défensive qui peut être mobilisatrice contre la menace, la trahison, l’emprise des objets. En quête de limites, à défaut d’opposants réels ou d’oppositions fantasmatiques, pour tenter de se construire, de s’affirmer (en opposition mais aussi en appui) contre les adultes, Hamid et d’autres jeunes de son quartier provoquent inlassablement : soit directement, soit par le biais de destructions de biens et d’attaques contre les représentants de l’ordre. La projection de la haine permet, d’une part de délester le sujet des mouvements pulsionnels pénibles à supporter (d’autant que l’agressivité est une réaction de déplaisir liée à la frustration qui l’engendre) et d’autre part de consolider les limites entre dedans et dehors, entre sujet et objet. Contrairement à l’amour qui a une histoire réelle ou fantasmée, la haine, plus ancienne du point de vue de la relation d’objet1 (Freud, 1915), n’a pas d’histoire autre qu’imaginaire : elle est un processus psychique qui annule ou tente d’annuler une source d’excitation ressentie comme traumatique, considérée comme irrecevable par le Moi ou l’instance psychique de jugement selon sa topique interne. En se sens, l’effraction traumatisme ne peut se confondre avec l’événement extérieur, qui peut être de gravité différente (remarque, injure, interpellation). La haine, par un sursaut régressif originaire, serait une sorte de refus massif, une ultime renonciation appelée à pallier le déficit de contenance interne et à déclencher le processus d’auto-conservation.
Dans le mouvement même de leurs agirs délinquants et de leur rejet primaire d’un lien intersubjectif, ces adolescents cherchent paradoxalement un interlocuteur dans la négativité, à travers des conduites violentes à caractère ordalique où le divin est à la fois sollicité et défié. Confrontation active et volontaire à l’inconnu, à l’aléatoire, à l’incertitude, la prise de risque est par essence une mise en jeu imaginaire d’un possible vivre ou mourir. Elle est épreuve de vérité en ce qu’elle prend forme dans un agir répété. Ces conduites à risque à visée ordalique – dont la seule limite pour l’adolescent est son moi-corps confronté à l’auto destructivité ou à un passage porteur de vie – seraient une réponse à une attaque du narcissisme et une défense contre ce qui est perçu comme une menace de l’identité. La destruction du narcissisme prend alors la forme d’une centration narcissique exacerbée. Par ces conduites à risque pseudo-initiatiques, nombre d’adolescents qui réinterrogent sans cesse un tiers, cherchent à rencontrer l’Autre dans une démarche solitaire de l’intensité de l’instant.
C’est ainsi qu’ils se déportent dans des expériences limites, de démesure, où l’extradition est jouissive. Liée à l’intensité des sensations au risque parfois de la mort réelle, elle réveillera un sentiment de vivre qui triomphe de la menace de la mort psychique. Cependant, le sentiment de haine éprouvé n’est pas obligatoirement destructif ou meurtrier, malgré la connotation hostile qui le signifie.
Dans la mesure où elle est encore une défense, un dernier rempart avant l’effondrement psychique, la haine peut être réparatrice et constitue pour certains jeunes une expression positive de la violence et de la négativité, lorsque la pulsion de mort est tempérée en haine pour l’objet, assurant la consistance de celui-ci et sa continuité. Mais elle peut aussi basculer dans la destructivité, lorsqu’elle « montre le chemin » à la pulsion de destruction (Freud, 1923, p. 285).
Pour peu qu’interviennent certains facteurs traumatiques qui viennent annihiler le dépassement de la haine, au-delà d’un certain seuil, le Moi s’embrase et la charge tensionnelle qui ne peut être régulée, se résout en collapsus. Point de rupture qui shunte la dimension temporelle et le travail psychique, la transgression qui revêt le sens d’un franchissement, donne à l’auteur l’impression d’être entraîné dans une dynamique qui le dépasse : J’explose. Je vois rouge. nous dit Hamid, qui, sur un mode paranoïaque, a le sentiment de voir des ennemis partout, d’être méprisé, humilié, appelant à une réaction immédiate. Imprévisible pour le sujet lui-même, réactivé par des circonstances particulières, son acte criminel qui relève de l’irreprésentable, ne trouve pas d’explication: Je ne comprends pas comment j’en suis arrivé là. Nous repérerons, bien que déniée par Hamid, une angoisse extrême sous-jacente, d’effondrement ou d’anéantissement en écho à des expériences traumatiques précoces. Le clivage du moi en jeu ici, conduit à prendre en compte un déficit grave dans l’élaboration des désirs, mais aussi et surtout un trouble identitaire majeur lié à la libération d’angoisse catastrophique, qui ne pourra être contenue que par la manifestation de toute-puissance d’un recours à l’acte inattendu, aberrant, pour faire échec à une menace d’anéantissement, d’effondrement déjà-là. Pour ces adolescents en particulier, le clivage se présente comme une protection contre un risque de désintégration psychique face à la force pulsionnelle des affects qui ne trouverait pas un dégagement représentatif suffisamment symbolisant.
4. Pathologie du regard
Koran est un adolescent de 17 ans, incarcéré pour Homicide volontaire aggravé en bande. Les mains enfoncées dans les poches de son pantalon, le regard dissimulé par une grande capuche sombre, il s’avance de manière déhanchée, nonchalante et provocatrice. Son corps est recouvert de tatouages et de blessures faites de coupures, de brûlures, comme autant de stigmates qui racontent les péripéties d’une vie chaotique, faite d’errances et d’ennui, empreinte de la maltraitance et de la défaillance d’une présence parentale au sens d’une attitude anticipatrice. Ces recherches de traces et d’épreuves infligées sur son corps, peuvent s’entendre comme une tentative pour donner forme à sa souffrance, une manière de s’éprouver et de se libérer pour se sentir mieux ou de s’apaiser.
Jours et nuits, Koran errait en bande dans son quartier et parfois jusqu’au quartier voisin pour aller les dérouiller. De manière démonstrative, il clame : depuis tout petit, je frappe. Dès qu’on me regarde, qu’on me traite, je frappe n’importe qui. Il indique qu’un jour, il a menacé un jeune, sans raison, avec une hache : J’étais pas bien (…) Je l’ai insulté. Un soir, je suis tombé nez à nez devant lui. Je ne le connaissais pas. Il m’a fixé. Il y a eu des échanges. Et puis ça a commencé à frapper. Il était pas seul. Les autres sont venus m’aider. De manière détachée et sans manifestation émotionnelle, Koran évoque une bagarre au sol J’ai vu noir. Je l’ai frappé avec mon couteau à la tête et il est tombé par terre. Ça pissait du sang partout. Il disait arrêtez, vous allez me tuer (…) Il y avait tous les autres
qui frappaient à la tête, dans les côtes, il y avait des barres, des couteaux. Une batte de base-ball s’est cassée sur son crâne (…) On s’est arrêté parce qu’il bougeait plus et on est parti et de préciser qu’il apprendra la mort de l’autre jeune le lendemain : Je crois qu’il est mort à l’Hôpital.
Dans ce qui précède ou provoque l’affrontement, la question de la rencontre avec le regard de l’autre semble fondamentale. La référence au regard qui à la fois réfléchit ce qui s’offre au sujet et le constitue, semble renvoyer à la quête narcissique d’une image de soi et à son manque, mais aussi plus profondément, à une carence en énoncés identificatoires portés par le regard de la mère et que le sujet aurait pu s’approprier pour développer son existence propre. Les enjeux narcissiques attachés au regard de l’autre se révèlent à travers une tension entre le désir d’être remarqué, différencié et l’envahissement d’un sentiment de mépris et de honte. Dans ces affrontements entre jeunes de quartiers difficiles, dans un jeu de miroir destructeur, le regard de l’autre, intrusion insupportable, est perçu comme offensant, menaçant, destructeur et vient persécuter le sujet, le mettant en état de réaction paranoïaque, de lutte pour sa propre survie (Lesourd, 1998).
C’est ainsi que le regard de haine envieuse peut s’avérer être un détonateur. Affect fondamental des forces destructrices qui accompagnent la souffrance narcissique-identitaire de l’individuation et de l’appropriation subjective (Roussillon, 2004, p. 74), l’envie introduit immédiatement cette dimension du regard. Processus imaginaire, qui est à distinguer du processus moins archaïque qu’est la jalousie1, l’invidia (video, videre : malveillance, mauvais oeil) introduit l’oeil d’envie et renvoie à la possession d’un objet supposé apporter la complétude (ou de soulager la douleur du manque) mais qui est surtout perçu dans l’inconscient comme étant détenu par un autre que soi. Elle vient signer le fantasme d’expulsion du sujet de la scène de la relation. L’envie fait ressentir douloureusement ce qui manque au balafré du narcissisme. Ce sentiment insidieux renvoie à la trace d’une faille fondamentale non repérée mais dont l’écho, par le biais de l’autre, fait retour sur le sujet dans un mouvement destructeur. Le rapport imaginaire à soi devient alors suspendu au regard de l’autre.
L’affect d’envie qui exclut le tiers, combine la frustration de ne pas être ce que l’on désire et le sentiment de dévalorisation que l’on éprouve face à celui ou celle que l’on voudrait être, dans un sentiment de colère ou de rage face à une autre personne supposée posséder et jouir de quelque chose de désirable (Lachaud, 1998). On se retrouve dans une problématique de l’altérité impossible : c’est lui ou moi.
Activation de la haine destructrice, par débordement des capacités intégratives du moi, l’envie devient anéantissement par destitution du sujet au profit de sa réduction au rang d’objet déshumanisé. Ce qui peut expliquer ces acharnements entre bandes rivales dont on fait le constat de plus en plus fréquemment dans les banlieues des grandes villes françaises. Derrière leurs
actes destructeurs est sous-tendue la question du narcissisme des jeunes migrants, que le passage adolescent accentue, d’autant que la chaîne sociale et intergénérationnelle qui investit le sujet comme porteur d’une continuité d’ensemble ne tient pas – ce que Aulagnier (1975) nomme le contrat narcissique –. Car pour nombre de ces adolescents de familles immigrées, la transmission, qui résulte des liens que la famille entretient avec sa propre histoire, peut difficilement se faire voire même opérer en négatif et être traumatique, compte tenu d’un héritage parfois douloureux et/ou empreint de secrets.
5. Défaut d’enveloppe, déliaison et désidéalisation précoce
Lors de ces empiétements ou intrusions externes, les enveloppes psychiques du sujet, en référence aux travaux de D. Anzieu (1987), sont effractées et viennent menacer le moi. Comme le montrent les recours à l’acte d’Hamid et de Koran, tout bascule très vite, par débordement d’une charge agressive dont le flot ne peut plus être contenu. Cette hostilité meurtrière, qui s’inscrit dans un contexte de rivalités et de défense de territoires, recèle un caractère archaïque proche de la psychologie des masses (Freud, 1921).
Paradoxalement, aussi destructives qu’elles soient au regard de la réalité externe, aussi saisissantes dans leur cruauté froide par absence de culpabilité et sidérantes par leur déroulement acharné, ces conduites transgressives sont une recherche d’apaisement interne et ont une fonction de réassurance narcissique qui permet d’échapper sans doute à des pathologies plus graves (retrait autistique notamment). Elles constituent une tentative de solution pour inscrire sur la scène du monde ce qui est éprouvé intérieurement comme une impasse, un essai de (re)construction de l’espace du dedans, une tentative de symbolisation (Roussillon, 2000) qui, pour s’effectuer, doit paradoxalement en passer par sa réalisation plutôt que par le refoulement, afin de retrouver l’expérience d’une relation d’objet. L’autre, qui m’est presque pareil mais que je méprise, objet de projection devient ainsi dans le même mouvement objet inconscient d’étayage d’une subjectivité qui ne s’intériorise pas. La question de la compulsion à la répétition se trouve ici convoquée, au travers de ce qui peut s’interpréter à la suite de Winnicott (1967), comme des retours, non pas du refoulé, mais de ce qui n’a pas été symbolisé. Le drame sous-tendu de la déprivation – à l’origine de la tendance antisociale pour Winnicott (1956) – voit ces adolescents rejouer inconsciemment une expérience déjà vécue de destructivité de l’environnement affectif primordial, mais cette fois-ci sur le mode actif et non plus passif.
Les agirs violents de ces adolescents peuvent ainsi être appréhendés à partir de l’hypothèse d’un motif inconscient (Freud, 1916). Plus précisément, ils peuvent être considérés comme des réactions défensives contre ce noyau de culpabilité primaire1 – qui précède l’organisation de la différenciation sujet-objet et repose sur une confusion primaire moi/non-moi – et des tentatives de
traitement du noyau traumatique qui le sous-tend (Roussillon, 1995, p. 75). Il y a pour ces cas limites, échec du refoulement au profit des mécanismes de déni et de clivage, non-intrication des pulsions, avec une prédominance de la destructivité, soit directe (état de rage destructrice que H. Kohut (1991) conçoit comme une réaction à une blessure narcissique, au sentiment d’être humilié, mal compris ou méprisé), soit sur le mode projeté avec l’angoisse de persécution. Le caractère inintégrable de l’ambivalence pulsionnelle associé à la confusion primaire moi/ non-moi, aboutissent à l’impossible l’élaboration du deuil originaire de l’objet primaire maternel, de la détresse originelle (Hilflosigkeit) et à l’échec de la constitution de la sexualité génitale et partant de la structuration oedipienne de la différence des sexes et des générations. En conséquence, de manière diverse, les rapports aux objets et à soi-même ne peuvent qu’engendrer une menace narcissique devenue insupportable.
De plus, un environnement qui se dérobe, défaillant sur le plan identificatoire, ainsi qu’un contexte socioculturel qui ne favorise pas les capacités de symbolisation avec une banalisation de la violence, viennent renforcer chez ces adolescents, la propension mégalomaniaque et le fonctionnement imaginaire du moi idéal au détriment du surmoi qui se traduit par une exacerbation du fonctionnement comportemental (Richard, 2001, p. 227).
La fonction contenante de la peau, du moi et de la pensée (Anzieu, 1993) s’avère défaillante pour ces jeunes délinquants, insuffisante à transformer les contenus impensables voire persécuteurs en éléments représentatifs et figurables, instaurant un repli défensif sur un narcissisme anesthésié. Leur travail du penser paraît perforé par l’agir tandis que leur psyché se serait constituée en retrait schizoïde, comme en fuite dans le registre exclusif d’une réalité externe perceptivo-motrice. Avec en guise d’héritage l’expérience négative d’un attachement pathogène, prélude à l’enracinement psychique de ce que Anzieu (1996) a nommé l’attachement au négatif. L’accès à l’altérité de l’autre est obéré.
Le plus souvent, ces jeunes ont été précocement affectés par des expériences qui ont laissé des traces profondes, des traumatismes primaires qui font écho au concept de traumatisme cumulatif décrit par Khan (1974). Le traumatisme cumulatif dont Kahn a montré qu’il résulte de défaillances de la mère dans son rôle de pare-excitations, tout au long du développement de l’enfant jusqu’à l’adolescence, qui vont conduire imperceptiblement, de manière silencieuse, au développement d’un noyau de réactions pathogènes (p. 74) dont les effets sont de plusieurs ordres :
– un développement prématuré du moi sera utilisé sur un mode défensif pour faire face aux empiétements maternels (l’enfant est maintenu dans un rôle de prolongement narcissique) auxquels il ne peut répondre ;
– des distorsions du moi donnant lieu à une crise d’adolescence particulièrement difficile et douloureuse ;
– un surinvestissement de la réalité interne et externe, avec une avidité et un intérêt exacerbé pour le monde extérieur et le monde fantasmatique.
Ces traumatismes primaires n’ayant pu être symbolisés faute de figures tutélaires suffisamment bonnes (au sens de Winnicott), ils restent sans représentation possible ; donc toujours actifs. C’est ainsi que les failles de leur histoire, les maltraitances subies vont se rejouer avec la métamorphose adolescente, bien souvent sur la scène sociale, en cherchant une réponse pour parer à une détresse interne. D’autant qu’il n’y a pas entre ces jeunes, qui se livrent à une activité pulsionnelle irrépressible, d’adultes suffisamment présents qui tiennent leur place et résistent à leur destructivité, afin de médiatiser la haine et favoriser sa transformation psychique (Morhain & Martinneau, 2001 e 2002). La déconstruction des figures de l’idéalité (affiliées au registre du Moi-idéal) qui permet d’échafauder son autonomie psychique et de se projeter dans un futur à moyen-terme (référable au registre de l’Idéal du Moi), ne peut se risquer que si le sujet conserve l’espoir de retrouver ailleurs, hors de l’infantile, une autre figure de la réalité sociale qui lui permette d’ordonner à nouveau ses désirs et sa vie. Or cette opération spécifique de l’adolescence est justement inopérante chez ces jeunes. Leur violence narcissique, leur destructivité agie, n’est ainsi pas référable à une difficulté à désidéaliser les figures tutélaires en provenance de l’infantile, mais d’une absence d’idéalisation précoce par défaut de figures parentales suffisamment présentes et solides. Tiraillés entre la réalité et leurs illusions (idéalisation, modèles imaginaires), les parents sont, depuis une trentaine d’années, ébranlés dans leurs certitudes et sont contraints de réinventer leurs rôles (sexuel, conjugal, parental…), dans un monde qui évolue dans l’imprévisible et la complexité.
En d’autres termes, outre la déliaison pulsionnelle à l’oeuvre, le paradigme de l’impasse dans laquelle semblent se trouver ces adolescents à risque, résiderait dans un processus de désidéalisation qui aurait opéré très précocement, c’est à dire dès la petite enfance. Fortement sollicités, souvent attaqués, les objets externes, et plus particulièrement les parents, sont des objets de support nécessaires, mais ils peuvent être aussi objets de projection de la haine nécessaire à la constitution d’un espace de pensée autonome. C’est d’autant plus compliqué pour les adolescents dont le vécu fantasmatique rencontre dans la réalité un effondrement parental dépressif, un état de désarroi ou une violence en contre-point de leur propre violence.
Plutôt que de faire le constat des effets morbides d’un monde moderne qui serait marqué par la destitution symbolique de la fonction du père, d’une société désertée par les pères, il convient de souligner la permanence du complexe paternel au coeur du social, de repérer l’importance d’un père qui tienne dans sa fonction de protection face à la jouissance archaïque de l’avant séparation/individuation. Blos (1967), qui conceptualise l’adolescence comme un second processus de séparation-individuation, considère qu’à cette période de la vie, le sujet doit se séparer de la représentation psychique interne de la mère afin de lui substituer de nouveaux investissements. Il a souligné que lorsque la première phase est entravée, la seconde phase répétera une régression conduisant à un fonctionnement hallucinatoire et à une perte du sens de la réalité, qui selon Richard (2001), éclaire l’appétence adolescente pour les vécus d’intensité sensorielle des conduites à risque, permettant dans ce combat, de maintenir un contact avec la réalité.
6. Conclusion
La clinique des adolescents criminels nous conduit à considérer leurs actes destructeurs, comme mettant en scène une disparition subjective et/ou une lutte désespérée pour l’existence. Il est possible d’évoquer un effondrement narcissique comme déclencheur de l’agir violent, qui représente alors une preuve d’existence et non le résultat d’une construction psychique, d’où son aspect pulsionnel brutal. De tels actes se situent non pas dans le registre de la transgression de la Loi ou d’un défi aux limites surmoïques, mais viennent déloger l’autre pour le détruire.
Attestant d’une faillite de l’imaginaire, l’acte criminel éphébique relève du champ du narcissisme primaire et de la jouissance archaïque. D’essence habituellement transgressive, si l’acte possède un potentiel désorganisateur, régressif, il peut aussi être re-créateur pour le sujet, refondateur d’une subjectivité, témoignant alors de l’évolution des capacités du Moi avec l’altérité interne et externe. Dans le mouvement même de leurs agirs transgressifs et de leur rejet d’un lien intersubjectif, les adolescents délictueux cherchent paradoxalement un interlocuteur dans la négativité. Mais dans le cas de la destructivité agie et alimentée par la haine envieuse, la problématique est autre et convoque le registre le plus archaïque en l’homme lorsqu’il s’agit d’assurer sa survie : c’est-à-dire ce que Bergeret (1994) a nommé la violence fondamentale, qui serait liée à la conservation du sujet, à ses besoins instinctuels, à ses pulsions d’auto-conservation. Sous l’effet redoublé de l’après-coup issu de l’émergence d’un processus pubertaire (Laplanche, 2007) non marqué du sceau de l’oedipe, cette violence fondamentale, désarrimée du courant pulsionnel chez les adolescents criminels, vient alors éveiller une destructivité aveugle lorsque l’autre résiste à être utilisé tel un objet désubjectivé.
Dans l’espace à vocation psychothérapeutique, il convient pour le thérapeute de sortir de la fascination, de se prévenir d’une confusion avec le sujet violent qui le précipiterait dans une spécularité inductrice de rapports de rivalité agressive. Ainsi, un travail de remise en oeuvre d’un refoulement rendant inaccessible ce lieu énigmatique du savoir inconscient qui s’exprime par le corps lorsqu’il s’altère dans le transfert, devient possible. Il s’agit d’un travail de coupure ou de tressage de la jouissance avec son propre interdit, qu’interrompt le flux d’un pur devenir pour déclencher le temps des métamorphoses (Le Poulichet, 1991). Par sa présence, par sa capacité propre à créer, à jouer dans l’appréciation de sa propre distance au patient et de sa mobilité personnelle intérieure (Fédida, 1983, p. 120), de son style propre, l’analyste, loin du faire-semblant d’une pratique psychothérapique qui techniciserait le jeu (le game de Winnicott), vient bien au contraire l’y accueillir avec le plaisir de jouer (le play winnicottien) en vue de créer et de recréer une parole. Parler c’est alors prendre et jeter hors de soi, dans un élan vers la co-création d’un entre-deux psychique. Par l’ouverture vers le fantasme que permet le jeu, s’initie chez le sujet, un espace intermédiaire entre parole et corps, entre conscient et inconscient. Pour tout un chacun, le fantasme est un élément de son transfert à l’inconscient, sorte de conducteur vital entre le Soi et l’inconscient à l’oeuvre.
Cependant, ce processus psychothérapeutique doit avoir la possibilité de s’appuyer sur un dispositif institutionnel, en tant que métaphore topologique de l’instance du Moi qui permettrait au sujet de passer d’un état d’élation et de souffrance dû à la perméabilité de son appareil psychique, à la possibilité d’accéder à une réalité subjective capable de soutenir et contenir ses représentations psychiques.
1 C’est dans la haine (1915) aux primes origines que Freud repère l’origine de la tendance native de l’homme à la destruction, à la cruauté, à la méchanceté. Cette haine primordiale de l’être qui est d’abord haine de la vie, présente le premier visage de la pulsion de mort.
1 Nous nous référons aux travaux de M. Klein (1957) qui différencie l’envie de l’affect jaloux et de l’avidité. M. Klein précise que l’envie prend naissance dans l’étape fusionnelle primaire de la relation, tandis que la jalousie implique déjà une relation triangulée. L’aspect détériorant et destructeur de l’envie est pris en compte en tant que facteur très important de l’identification projective qui tend à s’approprier, à s’incorporer son objet mais aussi à le détruire.
1 Lorsque les défenses habituelles sont débordées et laissent place à une situation traumatique, le sujet tend à s’attribuer la cause du mal-être ; à la place de l’illusion narcissique primaire je suis le sein (Freud, 1938) s’instaure une illusion négative à l’origine du noyau de culpabilité primaire je suis le mal. (Roussillon, 1995, p. 75).
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Resumé: Le présent travail s’attache à montrer en quoi les nouvelles formes de psychopathologie adolescente, ne se déclinent plus dans le registre de la rivalité jalouse entre semblables, de luttes pour la possession de biens, mais se manifestent par l’agression contre l’autre, le semblable, souvent de manière soudaine et brutale, Sous l’emprise de l’envie primaire et dans l’impossibilité d’élaborer leurs angoisses archaïques, les adolescents destructeurs sont en permanence à la limite de la menace d’effondrement identitaire et d’une projection évacuative. Deux cas cliniques viennent étayer la thèse d’un effondrement narcissique conjoint à la pression d’une jouissance archaïque comme déclencheurs de la pulsion de destruction. Nous considérons les agirs destructeurs de ces adolescents, qui ont pour finalité la désubjectivation d’autrui et son anéantissement en tant qu’être différent, porteur d’un désir propre, comme une parade contre la disparition subjective et partant une lutte désespérée pour la survie psychique.
1 Psychologue-Psychanalyste, Professeur de Psychologie Clinique et de Psychopathologie. Institut de Psychologie. CRPPC EA-653. Univ. Lumière, Lyon II. 5 avenue Pierre Mendès-France C.P 11 F-69 676 BRON. E-mail: Yves.Morhain@univ-Lyon2.fr
2 Psychologue Clinicien, Professeur de Psychologie Clinique et de Psychopathologie. Institut de Psychologie. CRPPC EA-653. Université Lumière, Lyon II. 5 avenue Pierre Mendès-France C.P 11 F-69 676 BRON.
3 Psychologue Clinicien, Service de Rééducation et Réaadaptation Neurologique, CHU Carémeau. Place du Pr. Robert Debré. F-30 029 NIMES Cedex 9. Chargé d‘enseignement à l‘Université de Nimes, France.
Emplacement original
http://redalyc.uaemex.mx/pdf/946/94611474006.pdf
Mots-Clés: Adolescence, haine, envie, destructivité.