Sécession du Katanga le 11 juillet 1960
État du Katanga est le nom pris par la province du Katanga, lorsqu’elle déclara unilatéralement son indépendance de la République démocratique du Congo le 11 juillet 1960, soit moins de deux semaines après l’accession de la République du Congo (actuelle République démocratique du Congo) à l’indépendance, dans le cadre de la Crise congolaise.
La sécession katangaise se fit sous l’impulsion de Moïse Tshombé, qui fut son unique président, et des milieux d’affaires pro-occidentaux, au premier rang desquels la toute-puissante Union minière du Haut Katanga (UMHK). L’État du Katanga finit par être réuni de force au Congo-Kinshasa, trois ans plus tard, avec la participation des troupes de l’ONU.
Le contexte de l’indépendance
En mai 1960, dans le cadre du processus de préparation de l’indépendance, les premières élections législatives du futur Congo-Léopoldville donnent la victoire au MNC de Patrice Lumumba, qui, après la proclamation de l’indépendance à Léopoldville le 30 juin 1960 confie la présidence à Joseph Kasa-Vubu.
Dès cette date, les violences de ce qui deviendra la crise congolaise se multiplient, car les partis exclus du gouvernement suscitent des troubles et les forces armées congolaises se mutinent. Le contexte de la guerre froide favorise ces troubles car chaque « bloc » de l’hémisphère nord, l’occidental et l’oriental, soutient tel ou tel parti congolais : le second soutient le MNC tandis que le premier craint des nationalisations qui priveraient les entreprises occidentales implantées au Congo des richesses de ce pays. Afin de ramener le calme et de protéger les Européens toujours présents dans le pays, les forces belges demeurées sur le territoire selon les accords sur l’indépendance, sont renforcées par des troupes venues de Belgique, ce que la population favorable au MNC interprète comme une tentative de retour de la puissance coloniale. S’ensuivent des actes de violence contre les Européens, à Léopoldville en particulier, qui poussent la population d’origine européenne à émigrer massivement. Simultanément, le retrait soudain d’une grande partie des capitaux étrangers prive le gouvernement de Léopoldville de la plus grande partie de ses réserves financières. Le conflit, jusque-là politique, se territorialise : les ressources minières et les entreprises occidentales qui les exploitaient, notamment l’Union minière du Haut Katanga (UMHK), se trouvant dans le sud-est du pays, les forces pro-européennes et les entreprises en question se rangent massivement aux côtés de la Confédération des Natifs du Katanga (CONAKAT) pour demander la sécession de cette province1.
La sécession katangaise
Le 11 juillet 1960, soit moins de deux semaines après l’indépendance du Congo-Kinshasa (à l’époque Congo-Léopoldville), Moïse Tshombe proclame l’indépendance du Katanga avec l’appui de la puissante Union minière du Haut Katanga (UMHK) et demande l’aide militaire et logistique belge. En prenant le prétexte de la protection de ses nombreux ressortissants présents dans la province, la Belgique reconcentre des troupes au Katanga. Les sécessionnistes bénéficient également du soutien des réseaux de Jacques Foccart, le « monsieur Afrique » de l’Élysée2. Le nouvel État émet alors sa monnaie et crée sa police.
Cependant, l’État du Katanga ne sera jamais reconnu par l’ONU, d’une part parce que les deux superpuissances de l’époque, États-Unis et URSS, affichent toutes deux des positions fermement anticoloniales, et d’autre part parce que même si les États-Unis et les autres états occidentaux avaient proposé de reconnaître le Katanga, le bloc de l’Est ne l’aurait jamais accepté. Allant plus loin encore, le Conseil de sécurité des Nations unies répond à l’appel du premier ministre congolais Patrice Lumumba et demande le retrait des Belges.
La marge de manœuvre de l’ancienne puissance coloniale se réduit alors progressivement et, bien que le nouvel État du Katanga garde de nombreux cadres techniques et conseillers belges, il doit très tôt renforcer sa Gendarmerie katangaise en faisant appel à des mercenaires, les célèbres Affreux, parmi lesquels on compte notamment Jean Schramme ou Bob Denard.
Les forces de l’ONU remplacent alors progressivement les troupes belges, mais n’interviennent pas directement. Dès lors, Patrice Lumumba se tourne ouvertement vers les Soviétiques, suivant en cela l’exemple de Fidel Castro à Cuba.
La chute de l’État du Katanga
Le 21 février 1961, le Conseil de Sécurité de l’ONU décide d’envoyer des casques bleus afin de « rétablir l’ordre au Congo ». À la fin de l’année, l’armée gouvernementale congolaise et les troupes de l’ONU lancent une attaque militaire contre celles de Tshombe. Alors qu’il négocie un cessez-le-feu entre les troupes de l’ONU et les forces katangaises, le secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld, trouve la mort dans un accident d’avion3. En décembre 1962, les forces de l’ONU prennent le contrôle d’Élisabethville et Moïse Tshombe est obligé de prendre la fuite pour se réfugier à Kolwezi. Le 15 janvier 1963, il finit par se rendre et obtient l’amnistie pour lui-même et ses partisans. En janvier 1964 ce même Tshombe deviendra premier ministre d’un Congo unifié
Moïse Tshombé, également retranscrit Tshombe ou Tchombe (10 novembre 1919 – 29 juin 1969), est un homme d’État congolais, président de l’État du Katanga de 1960 à 1963 et Premier ministre de la République démocratique du Congo de 1964 à 1965.
Rôle dans la mort de Lumumba
Le Premier ministre du Congo, Patrice Lumumba, est arrêté en septembre 1960 à la suite de ses tensions grandissantes avec le Président Joseph Kasa-Vubu et le chef de l’armée Joseph Mobutu. Il s’évade peu après et tente de gagner Stanleyville pour y organiser un contre-gouvernement. Arrêté à Port-Francqui le 1er décembre 1960, il est placé en détention à Thysville.
Les 12 et 13 janvier 1961, une mutinerie militaire éclate dans la ville, pour des raisons financières. C’est « la panique à Léopoldville. « On » craint que la libération de Lumumba et son retour soient imminents […]. Le collège des commissaires demande à Kasa-Vubu de transférer Lumumba « dans un endroit plus sûr ». […] Au nom du collège des commissaires [congolais], Kandolo insiste auprès du président Tshombe pour que Lumumba soit transféré au Katanga ». L’ambassadeur belge au Congo, Dupret, en informe son gouvernement et conseille « il vous apparaîtra sans doute indiqué appuyer opération envisagée et insister auprès autorités katangaises ».
À cette date, le gouvernement congolais et le gouvernement katangais sont encore en négociation et se sentent tous les deux menacés par Lumumba et ses partisans. Le gouvernement katangais est ainsi à cette date en proie à des attaques de troupes lumumbistes dans le Nord-Katanga. Une action commune contre Lumumba est donc dans leur intérêt commun.
Le gouvernement congolais livre finalement son prisonnier au gouvernement katangais de Moïse Tshombe le 17 janvier 1961. Il meurt le même soir, entre 21 h 40 et 21 h 43 d’après le rapport d’enquête belge.
Tshombe refuse d’assumer le décès de Lumumba affirmant, d’une part qu’il ne savait rien du transfert de Lumumba vers le Katanga, et d’autre part que son prisonnier est mort lors d’une tentative d’évasion.
Concernant la première affirmation, la commission d’enquête belge de 2001 est formelle « il y a trois déclarations du 18 janvier qui contredisent la version de Tshombe5 ». Pour la commission, Tshombe a bien donné son accord au transfert de Lumumba sur son territoire. Elle cite en particulier une déclaration officielle katangaise confirmant l’accord du gouvernement sécessionniste.
Concernant la seconde affirmation de Moïse Tshombe sur son absence d’implication dans la mort de Lumumba, la commission d’enquête indique d’abord : « il apparaît que la reconstitution détaillée et illustrée des faits de ce 17 janvier est aléatoire6 ». Mais elle considère que plusieurs faits sont assez précis. À 16 h 50 l’avion de Lumumba atterrit. De 17 h 20 à 20 h 30 Lumumba et ses deux compagnons sont enfermés à la « maison Brouwez », « où il est certain que les prisonniers ont subi des mauvais traitements de la part de leurs gardiens, mais aussi de la part de ministres katangais6 ». Il est possible « que le président katangais [ait] participé aux sévices, même si aucune source ne le prouve. […] Il semble hors de question qu’il n’ait pas vu les prisonniers dans la maison Brouwez, au moins lors du départ des prisonniers vers le lieu d’exécution ». La décision de Tshombe de l’exécution de Lumumba est donc certaine pour la commission, mais quatre représentants belges qui soutiennent la sécession katangaise y participent aussi : « le commissaire de police Frans Verscheure, le capitaine Julien Gat, le lieutenant Michels et le brigadier Son6 ». « Vers 21 h 15-21 h 30, Lumumba [et] ses compagnons arrivent sur le lieu de leur exécution. Ils vont être tués par balle, en présence du président Tshombe et de plusieurs de ses ministres. […] Lumumba […] meurt en dernier. »
La fin de l’indépendance
Peu après la mort de Lumumba, les relations sont rompues entre les gouvernements congolais et katangais et la guerre reprend.
Les Nations unies mirent deux ans à reprendre le contrôle du Katanga pour le compte du gouvernement congolais.
En 1963, la prise du Katanga par les forces des Nations unies contraint Moïse Tshombe à l’exil vers la Rhodésie du Nord (actuelle Zambie), et plus tard vers l’Espagne.
Source : Wikipedia