A propos du peintre qui peint des toiles de la couleur des murs où elles sont accrochées

La chronique n° 25 de Nicole Esterolle

 

 

 

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On connaissait déjà ce fameux peintre du dimanche qui ne peignait que le mardi et qui devint pour cela le précurseur de l’art dit de résistance, conceptuel, d’attitude ,de posture, bref : typiquement schtroumfesque. On connaît cet autre plasticien qui, par souci de résistance aussi au modèle bourgeois, pendant quarante ans, n’a peint que des bandes verticales régulièrement espacées et qui se voit aujourd’hui offrir par l’Etat et le contribuable français, une exposition au Grand Palais aussi triomphale que monumentale… Et puis voici ce Claude Rutault, né à Trois-Moutiers, dans le Poitou en 1941, qui peint ses toiles de la couleur des murs où elles sont accrochées, qui expose actuellement au Château d’Oiron proche de son village natal, et qui vient d’avoir une exposition chez Emmanuel Perrotin le galeriste parisien international, découvreur de Murakami et de bien d’autres produit du « Financial art »….

Ce préambule pour vous vous dire que cette chronique se situe  toujours bien dans le domaine de  cette crétinerie artistique en bande organisée sévissant au  sein de l’appareil d’Etat

Quoi de plus crétin en effet que cette photo jointe où l’on voit l’artiste Rutault qui tient la toile qu’il a toute peinte en rouge avec son gros pinceau encore baveux, avant de la placer sur un mur peint du même rouge imbécile ?

Quoi de plus crétin que cette autre photo jointe où l’on voit, comme le dit la notice :  « une  toile tendue sur châssis, matériau de prédilection du peintre Rutault, devient un guide visuel : posée à plat sur des tréteaux devant une fenêtre, portant le regard sur le paysage et préférant ce paysage à sa représentation peinte »

Quoi de plus crétin que cette exposition « dans cinq espaces successifs, de la même toile tendue sur châssis de l’artiste Rutault. A chaque présentation l’organisateur de l’exposition a le choix entre trois solutions : 1) repeindre la toile de la couleur du mur, 2) repeindre le mur de la couleur de la toile, 3) repeindre les deux d’une même couleur »

Quoi de plus crétin enfin que cette apparition miraculeuse du concept « toile et mur de la même couleur », à Claude Rutault , enfant du petit village de Trois Moutiers dans la Vienne  , , lorsqu’en 1973, repeignant les murs de sa petite cuisine ainsi qu’un petit tableau qu’il avait laissé là par inadvertance, il lui apparait (comme Bernadette Soubirou à Lourdes) cette grandiose, fulgurante, lumineuse  et divine évidence « qu’une toile et son mur cohabitent dans un rapport qui est loin d’être neutre et qu’il serait intéressant d’en rendre compte. »

Alors, me direz-vous, comment une telle crétinerie peut-elle être  devenue crédible et opératoire ? Comment ce neuneu du Haut Poitou a-t-il pu accéder à une telle notoriété ?

La première explication qui vient est celle  que plus c’est énorme et stupide, mieux ça passe. Mais c’est un peu  court.

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Rutault action painting

Moi je pense que la crétinerie ne peut être avalable que par «l’ intelligence » de son enrobage, et je crois même que plus c’est crétin, plus cela permet au dispositif institutionnel, qui en est le producteur et le vecteur, de développer un emballage d’ une plus extrême sophistication intellectuelle  ou théorique, qui devient alors une terrifiante arme de pouvoir sur les masses laborieuses que l’on veut enculturer.

Je pense enfin ( comme je le disais dans ma chronique n° 19 ) que cet intense travail de  crétinisation organisé institutionnellement est un contributeur amont indispensable au processus d’éradication du sens, du sensible et du métier, c’est-à-dire de  dématérialisation de l’art, dont la scène  artistico-financière  internationale a besoin pour cette titrisation du rien, et pour la confection  de produits spéculatifs sans contenu ,  appropriés à son économie également vidée de substance et   de type  virtuel… Collusion donc entre la spéculation intello du secteur public et la spéculation financière du grand marché privé…et ce n’est donc pas  par hasard si l’on retrouve aussi ce Claude Rutault, pur produit de l’intellectualité artistique d’Etat,  chez notre Financial Art Gallery Perrotin.

 

Publié le par nicole

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