— par Cécile Crouzel —
La Guadeloupe coûte déjà 2,5 milliards d’euros à l’État et la Martinique 1,8 milliard.
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Le pouvoir et le président de la République en particulier sont la cible des protestations sur l’île. Crédits photo : AFP |
Avec un taux de chômage qui dépasse les 20 % et une proportion de RMistes presque quatre fois plus élevée qu’en métropole, les Antilles souffrent de nombreux handicaps économiques. Pourtant, l’État ne lésine pas sur les moyens qu’il accorde à l’outre-mer. L’effort global programmé jusqu’à présent pour 2009 est de 16,7 milliards d’euros. Pour la Guadeloupe, la facture s’élève à 2,5 milliards, et pour la Martinique à 1,8 milliard. «Toutefois, ces chiffrages agrègent tous les coûts, y compris ceux liés aux missions régaliennes de l’État, comme l’Éducation, la Justice, la police, qui existent dans l’ensemble des départements français», nuance Éric Doligé, sénateur UMP rapporteur du budget de l’outre-mer. Or ces charges «habituelles» ne sont pas négligeables : en Guadeloupe, l’État dépense près de 700 millions d’euros pour l’enseignement scolaire. «Il est donc plus juste de se concentrer sur le coût, pour l’État, des mesures spécifiques à ces territoires», explique Jérôme Cahuzac, député socialiste, rapporteur de ce budget à l’Assemblée.
3,3 milliards de niches fiscales
Mais pour cela, il ne suffit pas de prendre en compte le budget du secrétariat d’État à l’Outre-Mer, dont les crédits ont été fixés, jusqu’à nouvel ordre, à 1,88 milliard d’euros pour 2009. En réalité, il faut ajouter aux 1,88 milliard le coût des mesures de défiscalisation (3,3 milliards en 2009) et celui des avantages particuliers accordés aux fonctionnaires travaillant ou résidant dans les Dom-Com (1,5 milliard, selon la dernière évaluation de 2007). Pour la seule Guadeloupe, les compléments de rémunérations des fonctionnaires civils ont coûté 159 millions. La facture des mesures spécifiques à l’outre-mer tourne donc plutôt autour des 7 milliards, soit l’équivalent du budget de la Justice Un autre constat s’impose : l’État a tendance à utiliser énormément les allégements de charges sociales et d’impôt dans sa politique ultra-marine. Ainsi, sur les 3,3 milliards du coût des mesures de défiscalisation, le régime de TVA réduite applicable à la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion coûtera à lui seul 1,2 milliard de 2009. La facture des réductions d’impôt sur le revenu accordées aux contribuables qui investissent outre-mer dépassera, elle, le milliard. Il est vrai que le plafonnement de ces niches, voté dans le budget 2009, n’aura un effet sur les finances de l’État qu’en 2010. Enfin, l’essentiel des crédits du secrétariat d’État sont consacrés aux allégements de cotisations sociales pour les entreprises ultramarines (coût : 1 milliard). À cette aune, les aides accordées aux Îliens pour leurs déplacements semblent anecdotiques (53 millions, dont 6 pour la Guadeloupe et 5 pour la Martinique). Le gouvernement a tenté ces derniers mois de réformer sa politique ultramarine. Le régime des surpensions de retraite a été durci. « Mais le tour de vis étant progressif, l’effet sur les finances publiques ne sera pas immédiat», précise Éric Doligé. L’exécutif a surtout préparé une grande loi sur l’outre-mer, qui doit arriver au parlement en mars. Parmi les principales mesures, on trouve le recentrage des cotisations sociales, la création de zones franches et la réforme des aides au déplacement. Au total, le projet n’est pas censé générer des économies. Le budget du secrétariat d’État est d’ailleurs prévu en hausse de 2,6 % en 2010. Mais que deviendra-t-il avec la mobilisation actuelle ? Une chose est certaine : la facture ne risque pas de s’alléger. Selon l’entourage d’Yves Jégo, les mesures promises par l’État pour répondre aux manifestants dépasse déjà 100 millions d’euros…
Le figaro 11/02/2009