Rupture des relations diplomatiques entre les États-Unis et Cuba le 3 janvier 1961
Les relations entre Cuba et les États-Unis sont marquées par l’embargo américain mis en place depuis le 7 février 1962. Les relations étaient neutres au moment de la révolution cubaine, en 1959, mais se sont dégradées dès l’année suivante, avec l’expropriation des compagnies des États-Unis et le refus américain d’acheter le sucre cubain, malgré les tentatives de médiation opérées par le président argentin Arturo Frondizi. En avril 1961, Washington lance le débarquement de la baie des Cochons, avec des membres de la Brigade 2506, qui fut un fiasco. En 1973, les deux États signent ainsi un pacte sur les détournements d’avion, qui leur a permis d’échanger un certain nombre de pirates de l’air.
Les relations américano-cubaines alternent depuis entre période de réchauffement et d’adoucissement, l’administration Obama ayant récemment organisé un dégel de celles-ci, en ordonnant notamment la levée des restrictions sur les voyages et les remesas envoyées à Cuba par les immigrants cubains aux États-Unis. Les États-Unis ont aussi retiré leur veto mis depuis 1962 à l’intégration de Cuba dans l’Organisation des États américains (OEA).
Historique
Entre 1959 et 2015, le déficit migratoire cumulé dépasse le million, soit 12 % de la population moyenne durant cette période. Les quatre cinquièmes des Cubains se réfugient aux États-Unis.
Avant 1961
Malgré la victoire des États-Unis dans la guerre hispano-américaine qui rend Cuba indépendant, les Américains occupèrent l’île de Cuba durant cinq années consécutives. L’amendement Platt mis en place leur permet d’intervenir dans les affaires du pays, si le besoin se manifeste ; ils conservent donc des bases navales, investissant aussi dans la production de sucre et de tabac. Cette alliance dura jusqu’en 1958, et pour Cuba la période de 1902 à 1958 est comme une occupation néocoloniale de la part des États-Unis.
En février 1959, Fidel Castro devient premier ministre et se détourne des Américains pour se rapprocher de l’Union soviétique. C’est une suite d’évènements qui monte les États-Unis et Cuba l’un contre l’autre, provoquant une montée du soutien cubain pour l’Union soviétique.
Yves Lacoste indique que Fidel Castro a été soutenu par les États-Unis et les grands propriétaires cubains jusqu’en 1961. Ainsi lors de son arrivée au pouvoir, Fidel Castro effectue son premier voyage officiel à Washington5. En effet en avril 1959, Castro rencontre le vice-président Richard Nixon à la Maison-Blanche. Ce dernier fait un compte rendu de son entretien, au président des États-Unis Dwight D. Eisenhower, en ces termes : « Quoi que nous pensions de lui, il jouera un rôle important dans le développement de Cuba et très probablement de l’Amérique latine en général. Il a l’air sincère. Il est soit incroyablement naïf à propos du communisme, soit d’obédience communiste — je pencherais plutôt pour la première option. /…/ Nous n’avons pas d’autre choix que d’essayer au moins de l’orienter dans la bonne direction ».
Dans l’année 1960, les Américains tentent de stopper leurs liens avec Cuba, suspendant les exportations venant de l’Union soviétique et supprimant leur vente de sucre cubain sur le marché américain. Les États-Unis veulent cesser cette alliance entre eux et Cuba. en 1961, les États-Unis rompent leurs relations diplomatiques. Les relations commerciales sont à la suite elles aussi supprimées par Kennedy le 31 mars 1961.
Rupture des relations diplomatiques
Ambassade de Cuba à Washington
Le 3 janvier 1961, les États-Unis décident de rompre leurs relations diplomatiques avec Cuba. Leurs intérêts sont alors défendus par l’ambassade de Suisse à La Havane, tandis que l’ambassade de Tchécoslovaquie défend les intérêts cubains à Washington.
Le 23 février 1962, les États-Unis décrètent un embargo commercial contre l’île par mesure de rétorsion contre le régime castriste qui nationalisa et expropria des compagnies des États-Unis.
En 1977, les deux pays conviennent mutuellement de normaliser leurs relations en ouvrant des sections d’intérêts américains et cubains dans leurs capitales respectives et gérées par leurs chargés d’affaires suisses et tchécoslovaques : la United States Interests Section in Havana dans la capitale cubaine et la Sección de Intereses de la República de Cuba (es) dans la capitale des États-Unis.
En 1992, après la dissolution de la Tchécoslovaquie, La Havane désigna également l’ambassade de Suisse à Washington pour défendre ses intérêts9.
Printemps noir
En mars 2003, 75 opposants au régime sont arrêtés lors du printemps noir cubain. Ils sont accusés d’être au service des États Unis et avoir reçu de l’argent de celui-ci. Après la mort du prisonnier Orlando Zapata en 2010, à la suite d’une grève de la faim de 85 jours, les négociations entre l’Église cubaine et le régime communiste conduisent à la libération des derniers membres du groupe des 75 en 2012.
Reprise du processus de normalisation
Le Vatican a été impliqué dans la détente des relations entre Cuba et les États-Unis dès mars 2012. Un groupe de parlementaires américains a visité la nonciature apostolique à Washington et a demandé l’aide du Vatican dans le dossier cubain. Le pape Benoît XVI s’est engagé dans cette affaire. Puis le pape François a repris le dossier, et il s’est trouvé au cœur du rapprochement entre les deux pays. Le Vatican a accueilli, avec le Canada, les pourparlers secrets engagés entre les États-Unis et Cuba. Ces négociations ont été un sujet majeur de l’entretien entre le pape et Barack Obama lors de la visite du président américain au Vatican à la fin de mars 2014.
Le 17 décembre 2014, les deux pays annoncent conjointement le rapprochement entre Washington et La Havane, impliquant un assouplissement de l’embargo américain sur Cuba13. Ils annoncent en juillet 2015 la reprise de leurs relations diplomatiques.
Le fait que l’embargo ne peut être annulé que par le Congrès implique que certaines mesures d’application extraterritoriale, tel que le Helms Burton Act de 1996 ou encore la section 211 de l’Omnibus Appropriations Act de 1998, resteront en vigueur pour le moment. En effet, le Congrès manifeste une forte opposition au processus de normalisation.
Le 20 juillet 2015, les bâtiments qui abritaient jusqu’à présent les sections d’intérêts dans chaque capitale ont retrouvé automatiquement leur statut d’ambassade. Les employés ont été accrédités auprès de leurs ambassades et les chefs de mission deviennent chargés d’affaires, en attendant la nomination d’ambassadeurs.
En janvier 2017 le rapprochement américano-cubain conduit à mettre fin à la politique mise en place par Bill Clinton en 1995, qui permettait aux exilés cubains d’obtenir l’asile puis une carte verte dès lors qu’ils posaient le pied sur le sol des États-Unis (s’ils étaient interceptés par les garde-côtes, ils étaient renvoyés à Cuba).
Rupture sous la gouvernance de Donald Trump
Le 16 juin 2017, Donald Trump annonce vouloir annuler l’accord conclu fin 2014 avec Cuba en motivant sa décision par le caractère « brutal » du régime en place. Cette décision ne remet toutefois pas en cause les relations diplomatiques rétablies suite à l’accord de 2014. La décision de Trump se borne à interdire les opérations conclues avec des organisations sous contrôle de l’armée cubaine, ce qui pourrait toutefois avoir une influence sur le tourisme. La décision de Trump est critiquée notamment par la chambre de commerce américaine qui fait valoir que cette décision « limite les possibilités de changements positifs sur l’île » et « risque de laisser la place à d’autres pays ».
Article détaillé : Syndrome de La Havane.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_de_La_Havane
En 2016 et 2017, des diplomates américains en poste à Cuba sont rapatriés après des malaises, dont l’origine serait une arme sonique. En réponse, des diplomates cubains sont expulsés des États-Unis, alors que le régime castriste nie toute implication dans cette situation.
En juin 2019, les bateaux de croisière touristique ne sont plus autorisés à quitter les États-Unis pour rejoindre Cuba. Alors que près de 50 000 médecins cubains travaillent à l’étranger, une ONG basée à Madrid, dépose plainte contre l’état cubain pour esclavagisme à leur égard. Les États-Unis classe Cuba sur leur liste de pays qui ne s’opposent pas aux trafics d’êtres humains.
Espionnage et différends diplomatiques
Cinq citoyens américains ont été inculpés pour espionnage au profit des services de renseignement cubain entre 1947 et 200024.
Cinq de Cuba
Article détaillé : Affaire des cinq espions cubains.
Le 12 septembre 1998, huit hommes et deux femmes sont arrêtés à Miami, soupçonnés d’être des espions cubains ayant transmis illégalement à Cuba des informations portant notamment sur l’armée américaine. Quatre autres personnes réussissent à se soustraire à leur capture et elles seraient retournées à Cuba.
Cinq des personnes arrêtées ont accepté de coopérer avec les autorités en échange de peines réduites mais cinq autres, connus comme les Cinq de Cuba : René Gonzalez Sehweret, Gerardo Hernandez Nordelo, Ramón Labañino Salazar, Fernando González Llort et Antonio Guerrero Rodríguez sont condamnés en décembre 2001 à Miami, pour, notamment, conspiration en vue de commettre des actes d’espionnages et des délits à des peines d’emprisonnement dont les termes varient entre dix ans et la perpétuité.
La défense dénonce de nombreuses irrégularités et violations de la loi, tant dans le déroulement du procès que dans le traitement des inculpés. Selon le gouvernement cubain, ces agents n’avaient pas pour mission d’espionner les États-Unis (et plusieurs officiers américains ont témoigné dans ce sens), mais d’infiltrer des organisations terroristes basées à Miami et liées à la Fondation nationale cubano-américaine (en). Celles-ci auraient organisé, entre autres, les attentats à la bombe ayant frappé La Havane en 1997, d’après les aveux de Luis Posada Carriles, terroriste d’origine cubaine qui revendique les attentats.
En octobre et décembre 2009, les deux peines à perpétuité ont été commuées en peine de 30 et 22 de prison et une troisième peine de prison a été réduite de 19 à 18 ans.
Le gouvernement cubain fait de la libération des « cinq de Miami » l’une de ses priorités au niveau international, et trois Argentins ont déployé le 10 janvier 2010 une banderole sur le pic de l’Aconcagua, à près de 7 000 mètres, réclamant la liberté des Cinq.
Couple Myers
En juin 2009, Walter Kendall Myers, un retraité du département d’État a été arrêté pour espionnage au profit de Cuba. Arrière-petit-fils de l’inventeur du téléphone Alexander Graham Bell et petit-fils de Gilbert Hovey Grosvenor, qui publiait le National Geographic et était lui-même cousin du président William Taft, Myers et sa femme espionnaient probablement pour des raisons de déception politique envers les États-Unis et son attitude envers les pauvres. Myers aurait toutefois eu un accès beaucoup moins important aux informations classifiées qu’Aldrich Ames, qui travaillait pour l’URSS puis pour la Russie, jusqu’à son arrestation en 1994.
Commerce
Le 30 mai 2007, selon le directeur général d’Alimport (Cuban Food Imports Company), Pedro Alvarez, le volume total du commerce américano-cubain a atteint 2,4 milliards de dollars et l’importation de produits agricoles a atteint 7,8 millions de tonnes, incluant le riz, les haricots, le maïs, les céréales, les œufs et le poulet.
Les États-Unis sont le troisième fournisseur de Cuba avec 11 % des importations en 2006. En 1998, le président américain Bill Clinton déclara que Cuba n’était plus une menace pour les États-Unis et assouplit l’embargo. Depuis 2001, suite à l’allègement de l’embargo, les sociétés américaines peuvent vendre certains produits agroalimentaires et des médicaments à Cuba. La plupart des importations agroalimentaires à Cuba viennent des États-Unis. Le gouvernement américain a autorisé la mise en vente aux États-Unis de deux vaccins élaborés à Cuba, devenu un grand exportateur de médicaments génériques. Washington possède une Section d’intérêts des États-Unis à La Havane. Enfin, les Cubains exilés en Floride envoient sur l’île des Remesas, c’est-à-dire de l’argent sous forme de mandats. Après avoir été légalisé comme les autres monnaies étrangères en août 1993, le dollar américain a été interdit de nouveau en 2004.
Le département de la Défense a, durant l’année fiscale 2011, effectué pour 1,9 million de dollars d’achat à Cuba.