— Par Selim Lander —
Gerty Dambury, d’origine guadeloupéenne et auteure de théâtre déjà confirmée a mis en scène sa dernière pièce, Trames, présentée ces jours-ci au théâtre Aimé Césaire à Fort-de-France.
Dans un décor réduit à peu de choses mais qui colle bien avec l’esprit de la pièce, Firmine Richard, la mère, reçoit de temps en temps la visite de Jalil Leclaire, son fils, tandis que Martine Maximin endosse tour à tour plusieurs « petits » rôles : servante de scène, archétype de la femme antillaise, fille perdue au grand cœur. La progression dramatique est plutôt bien menée, nous comprenons peu à peu quelles raisons ont pu conduire le fils vers sa déchéance présente. Bien qu’astucieux et beau parleur, ayant même poursuivi des études d’économie à l’université, il n’arrive pas à sortir du cercle vicieux de la drogue, de la misère et de l’oisiveté. Les rapports entre les deux personnages principaux sont bien décrits dans toute leur ambiguïté. Tous les deux ont bien du mal à faire vivre l’amour qui est pourtant censé exister d’une manière toute naturelle entre une mère et son fils.
Tout l’intérêt de la pièce réside dans cette démonstration que les sentiments que nous considérons comme allant de soi – y compris le sentiment maternel – ne sont pas si naturels que cela. Il y a une scène superbe où la mère annonce à son fils qu’elle le quitte, qu’elle renonce à s’occuper de lui, parce que sa vie ne peut pas se borner à un horizon aussi décevant que lui. L’auteure aurait pu faire de cette scène heurtant les préjugés courants un dénouement très fort. On peut regretter qu’elle ait préféré terminer sa pièce sur l’assassinat de la mère par le fils, le fils outragé par la déclaration d’émancipation qu’il vient d’entendre. L’alcoolisme du père, révélé sur le tard, est un autre élément dont l’auteure aurait sans doute pu faire l’économie car, soudain, on se demande si elle ne veut pas nous faire entendre que la toxicomanie du fils pourrait n’être en quelque sorte qu’héréditaire.
Jalil Leclaire interprète de manière convaincante son rôle de jeune paumé et Martine Maximin sait faire vivre ses différents personnages en variant les effets. On sera plus réticent à l’égard du choix de Firmine Richard qui, le soir où nous l’avons vue en tout cas, n’a paru que bien rarement habitée par son rôle, un rôle qu’elle débitait, au demeurant, sur un rythme exagérément rapide.
Selim Lander, 24 avril 2009