Avignon 2019. « À ceux qui nous ont offensés », d’après Jérémie Lefebvre, m.e.s. de Carine Bouqillon

— Par Roland Sabra —

Chyen paka fè chat ? Pas sûr ! Adapté du livre « Le collège de Buchy » de Jérôme Lefebvre «  À ceux qui nous ont offensés » dans une mise en scène de Carine Bouqillon est un seul en scène avec Bruno Tuchszer. C’est le portrait d’un homme enfermée dans une enfance harcelée, qui tout au long d’une interminable nuit blanche se remémore les humiliations, les injures, et les coups dont il a été victime tout au long de sa scolarité du fait d’un défaut de virilité affichée. Ce retour du passé est la conséquence d’une découverte scandaleuse : le comportement de son propre fils. Humiliation suprême, le gamin reproduit aujourd’hui les gestes et les dires des bourreaux d’antan.
Peut-on aimer un tel fils ?
Les désirs de vengeance et de meurtre alternent avec les situations non dépourvues d’ambiguïté entre larmes, rires étouffés et cris de désespoir. A la cruauté du monde des enfants répondent l’aveuglement et le silence complices des adultes, pédagogues,personnels soignants et tutti quanti. Si les bourreaux s’acharnent c’est peut-être que la victime n’est pas innocente. Ce qu’elle finit par croire.

Un très beau jeu de lumières opère dans la phase d’exposition une découpe du corps du récitant dont on ne voit que le buste en médaillon dans le noir du plateau. Vision morcelée à l’image de l’enfance rapportée. Sur le proscenium un ensemble de fils tissés en toile d’araignée sépare le public du comédien.

Le travail proposé touche à la question de l’apport d’une mise en scène à un texte suffisamment riche et dense pour se contenter d’une simple lecture dans le noir comme on l’a expérimentée avec « Moi, fardeau inhérent ». Tout le talent, bien réel du comédien apparaît comme un surplus à côté de la violence et la beauté d’un texte qui semble se suffire à lui-même.
Avignon, le 16/07/19
R.S.