— de Yoshvani Medina —
Chers Greg et Marie-Pierre :
Vous écrire équivaut à être encore en Avignon, à revivre ces moments tellement spéciaux que vous nous avez offert : je me vois encore en train de préparer la scène pour jouer ; de la défaire, une fois que le sortilège a eu lieu ; de tracter dans cet Avignon vôtre, qui maintenant, d’une certaine façon est à nous ; d’apprendre avec ces gens merveilleux que vous avez fait converger dans votre théâtre ; de prendre position dans cette lutte que vous menez, pas pour les idées qui vous donnent le pouvoir d’un festival, mais pour un festival d’idées qui donnent la priorité à l’artistique et à l’humain.
Et justement c’est de l’artistique et de l’humain que s’éloigne de plus en plus le Festival d’Avignon Off, qui n’est qu’un reflet de ce qui se passe en France, de là l’importance de votre combat, qui est l’essence même de votre existence.
Nous étions là déjà en 2003, l’année de tous les dangers, nous avons partagé avec vous les heures terribles d’une guerre qui n’était pas la nôtre par ignorance, et qui l’est devenue par vocation. Nous sommes retournés cette année et avons constaté que le combat demeure, mais que vous avez grandit davantage, je n’ai pas attendu que Gélas dise publiquement que la Chapelle du Verbe Incarné était un lieu majeur du Festival pour m’en rendre compte.
La Chapelle est un lieu majeur du Festival parce que les artistes qui s’y rendent sont mis dans les meilleures conditions pour réaliser ce pourquoi ils sont là, parce que l’équipe, depuis les directeurs jusqu’aux poseurs d’affiches, est disponible, efficace et attentive au moindre problème, parce que vous faites l’impossible pour nous valoriser devant la presse, les décideurs, les collègues, qui ne sont finalement qu’une partie de cette masse cruciale et indicible qu’on appelle le public. Et le public sait toujours reconnaître les professionnels.
L’année prochaine sera le dixième anniversaire du TOMA (le jeu de mots en espagnol est somptueux, il faut savoir que donner c’est la meilleure façon de recevoir), et je voulais vous dire de la façon la plus simple : félicitations et merci.
Merci pour tout ce que vous avez fait pour notre compagnie (seulement Dieu, Ulises Cala et Nathalie Laulé savent combien), pour nous faire le cadeau de votre confiance, de votre amitié ; pour nous mettre en résonance avec le meilleur du théâtre contemporain, que ce soit des éditeurs, des metteurs en scène, des acteurs, des critiques, des dramaturges, des décideurs ; pour considérer notre travail sans paternalisme (et comme si cela ne suffisait pas, pour le faire immortaliser par les caméras de Taxi Brousses, et son génial réalisateur Laurent Mini), merci pour démontrer que, au de-là des controverses, un théâtre d’outremer profondément universel est possible.
Bien à vous,
Yoshvani Medina.
Directeur Artistique
Cie Théâtre Si.